ARRÊT DU
04 Avril 2007
B.B / S.B
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RG N : 06 / 00452
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ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG venant aux droits de l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE LIMOUSIN
C /
Laure X...
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE
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Aide juridictionnelle
ARRÊT no
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé à l'audience publique le quatre Avril deux mille sept, par René SALOMON, Premier Président,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG venant aux droits de l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE LIMOUSIN, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est 20 Avenue du Stade de France
93218 LA PLAINE SAINT DENIS CEDEX
représenté par Me Jean-Michel BURG, avoué
assisté de Me Michel BOUFFARD, avocat
DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION ordonné par l'arrêt rendu le 15 Novembre 2005, cassant un arrêt de la Cour d'Appel de BORDEAUX en date du 13 Juin 2002, pour statuer plus avant du jugement rendu le 05 Septembre 2000 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX
D'une part,
ET :
Mademoiselle Laure X...
née le 05 Mai 1975 à PERIGUEUX (24000)
...
...
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 006062 du 22 / 12 / 2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN)
représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués
assistée de Me Jérôme ATHANAZE, avocat
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège
Dont le siège social est 50 rue Claude Bernard
24040 PERIGUEUX CEDEX
ASSIGNEE, n'ayant pas constitué avoué
DEFENDERESSES
D'autre part,
a rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 07 Mars 2007, devant René SALOMON, Premier Président, Bernard BOUTIE, Président de Chambre (lequel, désigné par le Premier Président, a fait un rapport oral préalable) et Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
* *
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Laure X..., née le 05 mai 1975, était victime de graves brûlures au mois de mars 1984 nécessitant son hospitalisation dans le service des brûlés de l'hôpital PELLEGRIN à BORDEAUX du 19 mars au 11 mai 1984 où elle subissait diverses interventions et recevait les produits sanguins. Sa contamination par le virus de l'hépatite C était découverte en décembre 1994 et confirmée à diverses reprises.
Au vu du rapport déposé par le docteur A..., commis par ordonnance de référés et l'assignation lancée par Laure X...contre le CRTS de BORDEAUX (devenu l'Etablissement Français du Sang), le tribunal de grande instance de BORDEAUX, dans un jugement rendu le 05 septembre 2000 : * constatait que la contamination par le virus HVC de Laure X...était consécutif aux produits sanguins dont elle avait été bénéficiaire et fournis par le CRTS, * condamnait la CRTS à indemniser Laure X...à raison de 200. 000 F pour le préjudice moral spécifique de contamination et 160. 000 F au titre de la perte de chance,
* déboutait Laure X...de ses autres demandes dirigées contre le CHU et son assureur ainsi que contre l'assureur du CRTS.
Sur appel de l'Etablissement Français du Sang, venant aux droits du CRTS, la cour d'appel de BORDEAUX, dans un arrêt rendu le 13 juin 2002, décidait qu'il n'était pas établi par Laure X...que sa contamination par le virus de l'hépatite C soit imputable aux transfusions sanguines reçues en 1964 et la déboutait en conséquence de ses demandes.
Statuant sur le pourvoi formé par Laure X...contre cet arrêt, la première chambre civile de la cour de cassation, dans un arrêt rendu le 15 novembre 2005, cassait et annulait en toutes ses dispositions la décision déférée. Au visa de l'article 102 de la loi du 04 mars 2002, la haute juridiction fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que, selon ce texte applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à décision irrévocable, en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi, le demandeur apporte les éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination et qu'il appartient au juge de former sa conviction après avoir, le cas échéant, ordonné toute mesure d'instruction et pris en compte le doute qui profite au demandeur.
La cause et les parties étaient renvoyées devant la présente cour qui était régulièrement saisie par l'Etablissement Français du Sang le 24 mars 2006.
Dans ses dernières conclusions déposées le 17 janvier 2007, l'Etablissement Français du Sang estime qu'il démontre que la contamination de Laure X...n'est pas la conséquence des transfusions qu'elle a subies. Il conclut donc, par réformation du jugement, au débouté de la demande.
Dans ses dernières écritures déposées le 01 décembre 2006, Laure X...soutient qu'elle démontre qu'elle a subi des transfusions et des injections de produits sanguins et qu'ainsi, la responsabilité de l'Etablissement Français du Sang a été justement retenue par le tribunal. Par appel incident, elle demande que son préjudice soit liquidé en augmentation et qu'il lui soit alloué 10. 000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La CPAM de la DORDOGNE, régulièrement citée le 21 septembre 2006, n'a pas constitué avoué pour faire connaître ses moyens de défense. Le présent arrêt sera donc réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 474 du nouveau Code de procédure civile.
SUR QUOI,
Attendu que l'article 102 de la loi du 04 mars 2002, applicable en l'espèce, précise que le demandeur à une action en responsabilité pour contamination sanguine d'apporter des éléments permettant de présumer que sa contamination avérée a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang ; qu'au vu de ces éléments, il appartient à l'Etablissement Français du Sang de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de cette contamination ; que le doute profite au demandeur ;
Attendu en l'espèce qu'il résulte du rapport du docteur A..., commis par ordonnance de référés du 05 novembre 1997 :
Que les modes de contamination par le virus de l'hépatite C sont multiples : post transfusionnels, percutané (toxicomanie intra veineuse, piqûres accidentelles, acupuncture, mésothérapie, utilisation d'aiguilles non jetables et insuffisamment stérilisées, transmission sexuelle ; que le risque nosocomial est faible par rapport au risque transfusionnel,
Qu'à la suite de son accident, Laure X...a été hospitalisée en urgence au CHU de LIMOGES où elle recevait un produit sanguin puis était transférée au centre hospitalier PELLEGRIN à BORDEAUX où elle séjournait à plusieurs reprises durant le premier semestre 1984 ; qu'elle était l'objet de quatre transfusions sanguines et d'une greffe de peau,
Que sa contamination par le virus de l'hépatite C était découvert en décembre 1994 à l'occasion d'un don du sang et confirmée en 1995,
Que son état de santé actuel est consolidé et qu'il ne nécessite aucun traitement en l'état actuel des connaissances,
Attendu en ce qui concerne le risque transfusionnel que ce document précise que le dossier d'hospitalisation de Laure X...a été perdu et qu'il n'a été retrouvé qu'une fiche de comptabilité pour un concentré globulaire no 76089 dont le donneur retrouvé est sain ; que deux autres donneurs ont été retrouvés également sains ; que postérieurement au rapport, les deux derniers donneurs de produits administrés se sont également révélés sains (lettre du 21 juillet 1999) ;
Que si Laure X...affirme qu'il lui a été administré du plasma sanguin, cette affirmation ne résulte que de ses propres déclarations faites au docteur B...alors qu'aucune délivrance d'un tel produit n'a été répertoriée au nom de la victime par le CRTS ; que l'expert A...indique d'ailleurs que dans l'hypothèse où cette administration serait avérée, on ignore le nombre et la qualité des produits reçus ;
Attendu en conséquence que si Laure X...établit qu'il lui a été administré durant son hospitalisation des produits sanguins, ceux-ci se sont avérés sains aux termes des investigations ; que l'administration de plasma sanguin n'est pas établie ;
Qu'ainsi, en application du texte ci-dessus rappelé, l'Etablissement Français du Sang démontre que les produits administrés à Laure X...ne sont pas à l'origine de sa contamination ; que par réformation du jugement, Laure X...sera déboutée de ses demandes ;
Attendu que Laure X..., qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu l'arrêt rendu le 16 novembre 2005 par la première chambre civile de la Cour de Cassation,
Infirme le jugement rendu le 06 juin 2000 par le tribunal de grande instance de BORDEAUX,
Statuant à nouveau,
Dit et juge que l'Etablissement Français du Sang démontre que les produits administrés à Laure X...ne sont pas à l'origine de sa contamination,
Déboute en conséquence Laure X...de ses demandes,
Condamne Laure X...aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront ceux exposés devant la cour d'appel de BORDEAUX et autorise Maître BURG, avoué, à les recouvrer conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par René SALOMON, Premier Président et par Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.
Le GreffierLe Premier Président