Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet de la Martinique a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique d'ordonner la suspension du certificat d'urbanisme délivré à la société Etablissements Lajus le 28 juillet 2020 par le maire du Carbet indiquant que le terrain situé habitation Lajus, quartier Lajus pouvait être utilisé pour la construction d'un chai de 1 000 m².
Par une ordonnance n° 2100029 du 18 février 2021, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a suspendu l'exécution de ce certificat d'urbanisme.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 3 mars 2021, la SARL Etablissements Lajus, représentée par Me C..., demande au juge d'appel des référés de la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 18 février 2021 du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique ;
2°) de rejeter la demande du préfet tendant à la suspension du certificat d'urbanisme délivré le 28 juillet 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- un moyen n'a pas été analysé et l'ordonnance est insuffisamment motivée ;
- le caractère contradictoire de la procédure a été méconnu dès lors que le juge s'est fondé, sans avoir informé préalablement les parties, sur la méconnaissance d'une disposition du plan de prévention des risques naturels qui n'était pas invoquée par le préfet et qui ne figurait pas dans l'extrait du règlement produit ;
- l'ordonnance est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne répond pas aux moyens de défense qu'elle avait invoqués ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1.4.4 du plan de prévention des risques naturels n'est pas propre à créer un doute sérieux sur la légalité du certificat d'urbanisme ;
- les autres moyens ne sont pas fondés.
Par un courrier du 12 mars 2021, les parties ont été informées de ce que, en application des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre administratif, il serait statué sans audience sur ce dossier et de ce que la clôture de l'instruction était fixée au 26 mars 2021 à 12 heures.
II. Par une requête enregistrée le 3 mars 2021, la commune du Carbet, représentée par Me A..., demande au juge d'appel des référés de la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 18 février 2021 du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique ;
2°) de rejeter la demande du préfet tendant à la suspension du certificat d'urbanisme délivré le 28 juillet 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la légalité du certificat d'urbanisme ne peut être appréciée à l'aune du régime des ICPE ;
- le projet de réalisation d'un chai est possible au regard du PPRN.
Par un courrier du 12 mars 2021, les parties ont été informées de ce que, en application des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre administratif, il serait statué sans audience sur ce dossier et de ce que la clôture de l'instruction était fixée au 26 mars 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020, et notamment son article 3 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la cour a désigné Mme D... B... en application du livre V du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Le 28 juillet 2020, le maire du Carbet a délivré à la société Etablissements Lajus un certificat d'urbanisme indiquant que le terrain cadastré D1100, situé habitation Lajus, quartier Lajus, pouvait être utilisé pour la construction d'un chai d'une superficie de 1 000 m². La SARL Etablissements Lajus relève appel de l'ordonnance du 18 février 2021 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, saisi par le préfet de la Martinique, a suspendu ce certificat d'urbanisme.
2. En application de l'article L. 554-1 du code de justice administrative et de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, il est fait droit à la demande de suspension présentée par le préfet contre les actes visés par ces dispositions si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué.
3. Pour prononcer la suspension de l'exécution du certificat d'urbanisme délivré le 28 juillet 2020 par le maire du Carbet le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a considéré, sans d'ailleurs motiver sa position, que le moyen, invoqué par le représentant du préfet au cours de l'audience publique, tiré de ce que cette décision méconnaissait les dispositions du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles du Carbet était de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur sa légalité.
4. En vertu des dispositions relatives à la zone rouge " inondation " du règlement du plan de prévention des risques naturels de la commune du Carbet, produit par le préfet de la Martinique devant le tribunal administratif, sont autorisés dans cette zone certains aménagements et constructions " sous réserve de ne pas aggraver significativement les risques (y compris de nuisances et de pollution, y compris pour des situations accidentelles raisonnablement vraisemblables) et de ne pas en créer de nouveaux ". En particulier, si ce règlement interdit dans cette zone l'implantation de nouvelles installations classées pour la protection de l'environnement, il autorise toutefois celles dont " l'implantation est justifiée pour des raisons de sécurité et d'éloignement des constructions existantes ou pour des raisons d'intérêt général et sous réserve de ne pas aggraver significativement le risque d'inondation ni d'en provoquer de nouveau et que le risque de pollution soit limité ". Ledit règlement autorise également dans cette même zone l'installation de bâtiments d'exploitation agricole sans création de logement sous réserve " de réaliser une étude hydraulique prouvant la non aggravation du risque et l'absence de création de nouveau risque ".
5. En l'espèce, le projet objet du certificat d'urbanisme litigieux consiste en la réalisation d'un chai d'une superficie de 1 000 m² sur une parcelle située en zone rouge du plan de prévention des risques naturels de la commune du Carbet. Une telle construction, qui ne prévoit pas la création de logement, est un bâtiment d'exploitation agricole destiné au stockage de produits inflammables qui doit être éloigné des constructions existantes pour des raisons de sécurité. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de l'étude hydraulique réalisée au mois de décembre 2018 qui montre que seule une petite portion au sud-ouest de la parcelle est susceptible d'être inondée, que l'implantation de ce bâtiment serait de nature à aggraver significativement le risque d'inondation ou à en provoquer un nouveau. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas allégué, que cette implantation serait de nature à créer un risque particulier de pollution. Par suite, c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a estimé que le moyen tiré de ce que le certificat d'urbanisme délivré par le maire du Carbet méconnaissait les dispositions du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles du Carbet était de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur sa légalité.
6. A l'appui de ses conclusions à fin de suspension le préfet de la Martinique a également invoqué, devant le tribunal administratif, le moyen tiré de ce que le certificat d'urbanisme litigieux méconnaissait les dispositions du plan local d'urbanisme de la commune du Carbet dès lors que le chai ne pouvait être regardé comme directement lié à une activité agricole à la date de la demande. Toutefois un tel moyen ne paraît pas, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité de l'ordonnance attaquée ni les fins de non-recevoir opposées, que la société Etablissements Lajus et la commune du Carbet sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a prononcé la suspension de l'exécution du certificat d'urbanisme délivré le 28 juillet 2020.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 000 euros chacune au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la commune du Carbet et par la société Etablissements Lajus.
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2100029 du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique est annulée.
Article 2 : La demande de suspension présentée par le préfet de la Martinique devant le tribunal administratif de la Martinique est rejetée.
Article 3 : L'état versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à la commune du Carbet et la somme de 1 000 euros à la société Etablissements Lajus.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la ministre de la transition écologique, à la commune du Carbet et à la SARL Etablissement Lajus.
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Martinique.
Fait à Bordeaux, le 7 avril 2021.
La juge des référés,
Marianne B...
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
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No 21BX00935, 21BX00936