Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) à lui verser une somme
de 102 909 euros en réparation des préjudices subis à la suite de sa prise en charge pour accouchement au CHU de Poitiers le 20 février 2007, avec intérêts au taux légal
capitalisés à compter du 11 juin 2007 et à chaque échéance annuelle ultérieure,
et de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1801248 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Poitiers
a rejeté la requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 juillet 2020, Mme B..., représentée
par la SCP Giroire Ravelier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2020 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) de condamner l'ONIAM à lui verser la somme de 102 909 euros, avec intérêts
au taux légal à compter du 11 juin 2017 et capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 8 000 euros au titre de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- si ses préjudices ne sont pas imputables à une faute du centre hospitalier universitaire de Poitiers, ils sont imputables à un acte de soins, à savoir la révision utérine réalisée à la suite de son accouchement, qui a été incomplète ; ses préjudices ont donc pour origine un accident médical et sont éligibles à une indemnisation par la solidarité nationale ;
- les conséquences de cet acte de soins, qui a conduit à une hystérectomie, sont
graves et anormales ;
- elle a subi un déficit fonctionnel temporaire total durant ses hospitalisations
du 20 au 24 février 2007 et du 27 février au 7 mars 2007 ; il convient de lui allouer une indemnisation de 29 euros par jour, soit une somme totale de 261 euros ; elle a également subi un déficit fonctionnel temporaire partiel du 8 mars au 11 juin 2007, en réparation duquel une somme de 609 euros doit lui être allouée ;
- elle a enduré des souffrances, évaluées à 4/7 ; une somme de 15 000 euros doit lui être allouée à ce titre ;
- son préjudice esthétique temporaire, lié à la cicatrice abdominale, doit être évalué à 1 500 euros ;
- une somme de 84 300 euros doit lui être allouée en réparation de son déficit fonctionnel permanent, évalué à 30 % par l'expert ;
- son préjudice esthétique temporaire, lié à la cicatrice abdominale qu'elle conserve, doit être évalué à 1 500 euros.
Par un mémoire enregistré le 8 octobre 2020, l'ONIAM conclut au rejet de la requête, subsidiairement à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise confiée à un gynécologue obstétricien ; il soutient que les préjudices de Mme B... ne sont pas en lien avec un acte de prévention, de diagnostic ou de soins ;
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n°2020/013372 du 15 octobre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux.
Par une ordonnance du 12 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été reportée
au 13 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours, ainsi que les autres magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel, les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 5° du présent article ainsi que, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement ".
2. Il résulte de l'instruction, en particulier de l'expertise ordonnée par le tribunal,
que Mme B... a accouché par voie basse le 20 février 2007 de son second enfant au sein
du centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers. Lors de cet accouchement, la délivrance placentaire ayant été incomplète, une révision utérine a été réalisée par une sage-femme.
Cet acte, qui consiste en un décollement manuel des fragments placentaires aux fins
de les extraire de l'utérus, a permis de ramener quelques membranes et caillots.
Mme B..., qui avait regagné son domicile le 24 février 2007, a été de nouveau hospitalisée le 27 février suivant pour des douleurs pelviennes intenses et des vomissements.
Une échographie réalisée le 1er mars 2007 a révélé que l'intéressée conservait une rétention placentaire intra-utérine d'environ 15 mm d'épaisseur. Une tentative d'évacuation par traitement médicamenteux ayant échoué, il a été décidé de réaliser un curetage évacuateur sous anesthésie générale le 2 mars 2007. D'importants saignements étant apparus quelques heures après ce premier curetage, un second curetage a été pratiqué le même jour. Durant l'intervention, les saignements ne se tarissant pas, il a été décidé de procéder, par laparotomie, à la ligature des ligaments ronds, du lombo ovarien, de l'utéro sacré et des artères utérines. Ce geste n'ayant pas permis d'obtenir un tarissement des saignements, et compte tenu de l'instabilité hémodynamique, une hystérectomie d'hémostase a finalement été pratiquée. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner l'ONIAM à l'indemniser de ses préjudices, qu'elle impute à un accident médical non fautif.
3. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ".
4. Il résulte de l'instruction que le dommage invoqué trouve son origine dans le phénomène de rétention placentaire survenu lors de l'accouchement de Mme B.... Si la requérante fait valoir que la révision utérine pratiquée lors de son accouchement constitue un acte de soins au sens des dispositions précitées, elle n'établit cependant pas davantage devant la cour qu'en première instance que le phénomène de rétention placentaire, inhérent à l'évènement naturel que constitue un accouchement par voie basse, aurait été causé par ce soin de la délivrance. La seule circonstance que ce soin, dont il n'est pas contesté qu'il a été réalisé dans les règles de l'art, n'ait pas permis d'empêcher la persistance d'une rétention placentaire, ne suffit pas à démontrer qu'il serait à l'origine de cette rétention et de l'hémorragie en ayant résulté. Dès lors, et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, ni la rétention placentaire ni l'hémorragie secondaire ayant finalement nécessité une hystérectomie d'hémostase, ne sont directement imputables à un acte de soins, d'investigations ou de prévention, de sorte que les préjudices invoqués ne sont pas éligibles à une réparation par la solidarité nationale sur le fondement des dispositions précitées du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique.
5. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de Mme B..., qui est manifestement dépourvue de fondement au sens des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée selon la procédure qu'elles prévoient, y compris les conclusions au titre des frais d'instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... B.... Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux.
La présidente de la 2ème chambre,
Catherine Girault
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
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N° 20BX02427