Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2017 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n°1800719 du 9 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 août 2018, M. D...représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800719 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 9 mai 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2017 pris dans son ensemble ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans l'immédiat, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est recevable en application des dispositions de l'article 39 du décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- la décision méconnaît l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne s'est pas prononcé sur la disponibilité du traitement dans son pays d'origine ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision contestée est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2018, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il s'en remet à ses écritures de première instance dont il joint une copie.
Par ordonnance du 14 septembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 novembre 2018 à 12h00.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. Nicolas Normand pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M A...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...D..., ressortissant albanais né le 4 décembre 1981, déclare être entré en France en 2014. Sa demande d'asile ayant été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 19 août 2014, confirmée par une décision du 2 avril 2015 de la Cour nationale du droit d'asile, il a fait l'objet, le 7 mai 2015, d'une mesure d'éloignement dont la légalité a été confirmée par jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 1er octobre 2015. Il n'a pas exécuté cet arrêté et a déposé une demande de titre de séjour en raison de son état de santé, sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Un titre de séjour lui a été délivré sur ce fondement, valable du 19 mai 2016 au 18 mai 2017. Le 23 mars 2017, il en a sollicité le renouvellement. Après avoir recueilli, le 23 septembre 2017, l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le préfet de la Gironde a, par un arrêté du 15 novembre 2017, refusé de délivrer à M. D...un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. M. D...relève appel du jugement du 9 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (... ) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre: " ( ...) un collège de médecins (...) émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement./ Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays./ Cet avis mentionne les éléments de procédure./ (...)./ L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. En premier lieu, si comme le soutient M.D..., l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne se prononce pas sur l'existence du traitement requis par son état de santé dans son pays d'origine alors que cela est prévu par l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'est pas tenu de le faire lorsque, comme en l'espèce, le collège estime que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
4. En deuxième lieu, M. D...n'établit ni même n'allègue avoir adressé au préfet de la Gironde, préalablement à l'arrêté litigieux, des documents lui permettant d'apprécier son état de santé. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde ne pouvait que se fonder sur l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, la reprise des termes de l'avis dans l'arrêté en litige, ne permet pas à elle seule d'établir que le préfet se serait estimé lié par celui-ci et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence.
5. En troisième lieu, le requérant se prévaut de ce que, à la date de l'arrêté, il est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'employé polyvalent et de ce qu'une partie de sa famille réside en France. Il ressort cependant des pièces du dossier que M. D... est célibataire et sans charge de famille, qu'il n'est pas isolé dans son pays d'origine où résident sa mère et une partie de sa fratrie et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans. En outre, si son frère Aleksander réside régulièrement sur le territoire français, ce n'est pas le cas de sa soeur Delsona qui a fait l'objet d'un refus de renouvellement de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le même jour que l'arrêté contesté. Enfin, il n'établit ni même n'allègue avoir des liens d'une particulière intensité avec eux. Dès lors, la seule circonstance que M. D...ait travaillé en qualité de plongeur du 1er juillet 2016 au 30 septembre 2016 puis en qualité d'employé polyvalent du 12 octobre 2016 au 30 novembre 2017 ne permet pas d'établir l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de l'obligation de quitter le territoire français en raison de l'illégalité du refus de d'un titre de séjour doit être écarté.
7. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les motifs énoncés au point 5.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 novembre 2017. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. D...à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'Intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 22 mars 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
Mme Caroline Gaillard, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mai 2019.
Le rapporteur,
Paul-André A...Le président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 18BX03205