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10/09/2018 | FRANCE | N°18BX02185

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 10 septembre 2018, 18BX02185


Vu la procédure suivante :

Par un mémoire distinct enregistré le 6 juin 2018, déposé par la SCP Lyon-Caen et Thiriez au titre des articles 23-1 de l'ordonnance n° 58-1068 modifiée du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel et R. 771-3 du code de justice administrative, la communauté de communes du Cordais et du Causse (4C), qui a présenté la requête d'appel enregistrée sous n°18BX02185 dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 16033373 du 3 avril 2018 qui a rejeté sa demande à l'annulation de l'arrêté du préfet du

Tarn du 8 juillet 2106 prononçant la fusion des communautés de communes ...

Vu la procédure suivante :

Par un mémoire distinct enregistré le 6 juin 2018, déposé par la SCP Lyon-Caen et Thiriez au titre des articles 23-1 de l'ordonnance n° 58-1068 modifiée du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel et R. 771-3 du code de justice administrative, la communauté de communes du Cordais et du Causse (4C), qui a présenté la requête d'appel enregistrée sous n°18BX02185 dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 16033373 du 3 avril 2018 qui a rejeté sa demande à l'annulation de l'arrêté du préfet du Tarn du 8 juillet 2106 prononçant la fusion des communautés de communes 4C et 3CS, demande à la cour de renvoyer la présente question de constitutionnalité au Conseil d'Etat afin que ce dernier la renvoie au Conseil constitutionnel pour qu'il se prononce sur la constitutionnalité de l'article 35-III de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;

Elle soutient que :

- les conditions de renvoi sont réunies :

- la disposition contestée est applicable au litige ;

- la disposition n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution ;

- la question n'est pas dépourvue de caractère sérieux ; l'article 35-III de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 qui prive les élus locaux appelés à délibérer sur un projet de fusion de tout droit à information en n'imposant pas au représentant de l'Etat de joindre à l'arrêté de projet de fusion le rapport explicatif et l'étude d'impact budgétaire et fiscale prévue par l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2018, le ministre de l'intérieur conclut à la non-transmission de la question prioritaire de constitutionalité au Conseil d'Etat.

Il fait valoir que :

- la question posée est dépourvue de caractère sérieux ; si le Conseil constitutionnel admet que les règles relatives à la fusion d'ECPI affectent le principe de la libre administration des communes, il considère que le législateur peut assujettir les communes et leurs EPCI à des obligations, sans méconnaître ce principe, à la condition que ces obligations répondent à des fins d'intérêt général ;

- La procédure pérenne de fusion mentionnée à l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales et la procédure temporaire prévue au III de l'article 35 de la loi NOTRe, sont applicables dans des conditions différentes, justifiant que les procédures de fusion suivies ne soient pas identiques.

- le droit à l'information des conseillers municipaux n'est pas méconnu.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son préambule et son article 61-1 ;

- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-3 ;

- le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

- vu le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative, notamment son article R. 771-7.

Par une décision du 2 janvier 2018, le président de la cour a notamment désigné M. Pierre Larroumec, président de chambre, en qualité de juge statuant sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ". L'article L. 771-1 du code de justice administrative dispose que : " La transmission par une juridiction administrative d'une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat obéit aux règles définies par les articles 23-1 à 23-3 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. ". Selon l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure ou constitue le fondement des poursuites ; / 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; / 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. ". En vertu de l'article R. 771-5 du code de justice administrative : " Sauf s'il apparaît de façon certaine, au vu du mémoire distinct, qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité, notification de ce mémoire est faite aux autres parties. Il leur est imparti un bref délai pour présenter leurs observations. ". L'article R. 771-7 du code de justice administrative dispose que : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours ou les magistrats désignés à cet effet par le chef de juridiction peuvent, par ordonnance, statuer sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité. ".

2. Par un mémoire distinct enregistré le 6 juin 2018, la communauté de communes du Cordais et du Causse (4C) sollicite que la cour administrative d'appel de Bordeaux renvoie au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité de l'article 35-III de la loi n°2015-991 du 7 août 2015 en tant qu'il prive les élus locaux appelés à délibérer sur un projet de fusion de tout droit à information en n'imposant pas au représentant de l'Etat de joindre à l'arrêté de projet de fusion le rapport explicatif et l'étude d'impact budgétaire et fiscale prévue par l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, et est en conséquence contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, afin que le Conseil d'Etat la renvoie au Conseil constitutionnel.

3. Aux termes du III de l'article 35 de la loi n°2015-991 du 7 août 2015 : " III.-Dès la publication du schéma départemental de coopération intercommunale prévu au II de l'article 33 de la présente loi et jusqu'au 15 juin 2016, le représentant de l'Etat dans le département définit par arrêté, pour la mise en oeuvre du schéma, la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale dont l'un au moins est à fiscalité propre.

Le représentant de l'Etat dans le département peut également proposer un périmètre de fusion ne figurant pas dans le schéma, dans les mêmes conditions et sous réserve de respecter les objectifs mentionnés aux I et II de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et de prendre en compte les orientations définies au III du même article L. 5210-1-1, après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale. La commission départementale dispose d'un délai d'un mois à compter de sa saisine pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. Le projet de périmètre intègre les propositions de modification du périmètre adoptées par la commission départementale dans les conditions de majorité prévues au quatrième alinéa du IV dudit article L.5210-1-1. / L'arrêté portant projet de fusion dresse la liste des établissements publics de coopération intercommunale appelés à fusionner, ainsi que des communes, appartenant ou non à un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, incluses dans le périmètre du nouvel établissement public. / Cet arrêté est notifié par le représentant de l'Etat dans le département aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre intéressés afin de recueillir l'avis de l'organe délibérant et, concomitamment, au maire de chaque commune incluse dans le projet de périmètre afin de recueillir l'accord de chaque conseil municipal. A compter de la notification de l'arrêté de projet de périmètre, les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et les conseils municipaux disposent d'un délai de soixante-quinze jours pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. / La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés après accord des conseils municipaux des communes incluses dans le projet de périmètre. L'accord des communes doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse si cette dernière représente au moins le tiers de la population totale. /A défaut d'accord des communes et sous réserve de l'achèvement des procédures de consultation, le ou les représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés peuvent fusionner des établissements publics de coopération intercommunale, par décision motivée, après avis favorable de la commission départementale de la coopération intercommunale lorsqu'il s'agit d'un projet ne figurant pas au schéma, ou avis simple lorsqu'il s'agit d'un projet figurant au schéma. Avant de rendre son avis, la commission départementale entend, de sa propre initiative ou à leur demande, les maires des communes intéressées et les présidents des établissements publics de coopération intercommunale à même d'éclairer ses délibérations. La commission départementale dispose d'un délai d'un mois à compter de sa saisine pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. L'arrêté de fusion intègre les propositions de modification du périmètre adoptées par la commission départementale dans les conditions de majorité prévues au quatrième alinéa du IV de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales. / La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements intéressés, avant le 31 décembre 2016. / L'arrêté de fusion emporte, le cas échéant, retrait des communes des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elles sont membres et qui ne sont pas intégralement inclus dans le périmètre. "

4. Selon la communauté de communes du Cordais et du Causse, en n'imposant pas au représentant de l'Etat dans le département de joindre à la notification de l'arrêté fixant le projet de périmètre le rapport explicatif et l'étude d'impact budgétaire et fiscale prévus par l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, les dispositions précitées du III de l'article 35 de la loi du 7 août 2015 méconnaissent le droit à l'information des élus locaux et portent atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958. Si les règles relatives à la fusion des établissements publics de coopération intercommunale affectent la libre administration des collectivités territoriales concernées, le principe de libre administration des collectivités territoriales ne fait pas obstacle en lui même à ce que le législateur organise les conditions dans lesquelles les communes doivent exercer en commun certaines de leurs compétences dans le cadre de groupements dans un but d'intérêt général. En permettant au représentant de l'Etat d'imposer aux communes la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale auxquelles elles appartiennent, nonobstant leur opposition, le III de l'article 35 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 entend favoriser la rationalisation de la carte de l'intercommunalité et le renforcement de l'intercommunalité et poursuit ainsi un but d'intérêt général. La procédure, même si elle ne prévoit pas que le représentant de l'Etat dans le département ait l'obligation de joindre à la notification de l'arrêté fixant le projet de périmètre le rapport explicatif et l'étude d'impact budgétaire et fiscale prévus par l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales ne porte pas atteinte au principe de libre administration, le droit à l'information des élus concernés étant assuré indirectement par les informations données aux membres de la commission départementale de la coopération intercommunale chargés de donner un avis sur le projet de fusion. Dans ces conditions, la question soulevée ne présente pas un caractère sérieux

5. Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question soulevée par la communauté de communes du Cordais et du Causse (4C) dans son mémoire distinct enregistré le 6 juin 2018.

ORDONNE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question soulevée par la communauté de communes du Cordais et du Causse (4C).

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la communauté de communes du Cordais et du Causse (4C) et au ministre de l'intérieur

Fait à Bordeaux, le 10 septembre 2018.

Le président de chambre,

Pierre Larroumec,

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

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N° 18BX02185


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 18BX02185
Date de la décision : 10/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Avocat(s) : CABINET LYON-CAEN THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 18/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-09-10;18bx02185 ?
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