Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...G...et Mme B...F...ont saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande d'expertise tendant à examiner l'assiette de la voie communale de la commune de Miglos au droit des parcelles 1100 et 1101 appartenant à Mme D...E...afin de déterminer si le mur faisant angle droit avec la ruelle desservant leur habitation porte empiètement sur l'emprise de la voie publique.
Par une ordonnance n° 1703067 du 20 novembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2018, et un mémoire, enregistré le 31 mai 2018, M. G...et MmeF..., représentés par la SCP Luc Goguyer Lalande- Régis Degioanni, avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1703067 du 20 novembre 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'ordonner une expertise au contradictoire de la commune de Miglos et de MmeE....
Ils soutiennent que :
- la juridiction administrative est bien compétente pour ordonner l'expertise demandée ;
- deux géomètres ont émis des conclusions contradictoires, et la maire, qui avait reconnu l'empiètement, est revenue sur sa position ;
- le premier juge ne pouvait estimer qu'il leur appartenait de provoquer un arrêté d'alignement alors que cette procédure ne pourrait être initiée que par le propriétaire riverain, et que Mme E...n'y a aucun intérêt ;
- ils ont donc un réel intérêt à obtenir une expertise contradictoire pour déterminer si un accès automobile pourrait être envisagé pour desservir le gîte qu'ils entendent exploiter ;
- seule la juridiction administrative est compétente s'agissant de la limite entre le domaine public routier et une propriété privée.
Par un mémoire, enregistré le 2 février 2018, MmeE..., représentée par MeH..., demande à la cour de confirmer l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse et de condamner M. G...et Mme F...à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'assiette de la voie publique n'a pas changé depuis plus de quarante ans, les requérants ne sont pas propriétaires des parcelles 1100 et 1101 et sont donc sans intérêt pour solliciter une expertise sur la voie publique qui longe ces parcelles ; ils ne sont nullement enclavés et peuvent se rendre à leur domicile par la voie principale de la commune, laquelle est inaccessible aux véhicules du fait de sa largeur ; aucun rebord de fenêtre de sa propriété ne fait saillie sur la voie publique, celui visé par les consorts G.../F... étant sur la parcelle D 1084 ; les murs anciens constituent bien la limite de propriété et ils ne peuvent être déplacés, notamment au titre de la prescription trentenaire ; le classement de la voie reste à déterminer ; c'est à bon droit que le premier juge a estimé que la procédure d'alignement était envisageable.
Par un mémoire, enregistré le 13 février 2018, la commune de Miglos conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de tout succombant d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que des querelles de personnes opposent les propriétaires des environs depuis quarante ans, que la rue objet du litige ne peut être empruntée par des véhicules indépendamment du mur incriminé, mais qu'elle a souhaité démontrer son impartialité en procédant par délibération du 7 février 2018 à un alignement individuel. M. G...et Mme F...n'ont pas intérêt à agir. Subsidiairement elle n'a jamais affirmé un quelconque empiètement et émet toutes réserves en cas d'expertise. S'agissant des appuis de fenêtre, un débordement de quelques centimètres existe sur la parcelle 1084 appartenant au frère de MmeE..., ce qui ne justifie pas une expertise.
Le président de la cour a désigné Mme C...en application des dispositions du livre V du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. G...et Mme F...ont acquis en 2002 une maison d'habitation avec jardin sur les parcelles 1086 et 3319 dans le hameau de Norgeat sur la commune de Miglos (Ariège). Désireux d'y aménager un gîte pour accueillir des touristes, ils ont demandé au maire d'user des pouvoirs que lui confère le code de la voirie routière afin de faire rectifier le tracé de la rue d'accès, trop étroite pour être empruntée par des véhicules, en se plaignant que le mur de clôture édifié en 1974 le long de la propriété de Mme E...sur les parcelles 1100 et 1101 empièterait sur la voie publique. Le maire ayant refusé de faire droit à leur demande au motif que deux géomètres-experts avaient rendu en 1974 des conclusions contradictoires sur ledit empiètement, M. G...et Mme F...ont saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande d'expertise, et relèvent appel de l'ordonnance du juge des référés qui a rejeté leur demande.
2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'octroi d'une telle mesure est subordonné à son utilité pour le règlement d'un litige principal. Celle-ci doit être appréciée en tenant compte, notamment, de l'existence d'une perspective contentieuse recevable, des possibilités ouvertes au demandeur pour arriver au même résultat par d'autres moyens ou de l'intérêt de la mesure pour le contentieux né ou à venir.
3. Le juge administratif ne peut être saisi d'une requête tendant à la mise en oeuvre de l'une des procédures régies par le livre V du code de justice administrative que pour autant que le litige principal auquel se rattache ou est susceptible de se rattacher la mesure d'urgence qu'il lui est demandé de prescrire n'échappe pas de façon manifeste à la compétence de la juridiction administrative.
4. Aux termes de l'article L.116-1 du code de la voirie routière : " La répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire sous réserve des questions préjudicielles relevant de la compétence de la juridiction administrative. " L'article R.116-2 du même code édicte : " Seront punis d'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe ceux qui : 1° Sans autorisation, auront empiété sur le domaine public routier ou accompli un acte portant ou de nature à porter atteinte à l'intégrité de ce domaine ou de ses dépendances, ainsi qu'à celle des ouvrages, installations, plantations établis sur ledit domaine (...)3° Sans autorisation préalable et d'une façon non conforme à la destination du domaine public routier, auront occupé tout ou partie de ce domaine ou de ses dépendances ou y auront effectué des dépôts (..)6° Sans autorisation préalable, auront exécuté un travail sur le domaine public routier (...) "
5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartiendrait à la commune, dans le cas où le géomètre expert qu'elle a entre-temps missionné par délibération du 7 février 2018 conclurait à un empiètement du mur litigieux sur la voie publique, de poursuivre la contrevenante devant la juridiction judiciaire. Dès lors, la mesure sollicitée, qui n'avait d'autre objet que de déterminer précisément les limites de la propriété privée de Mme E...aux fins d'apprécier si le mur de clôture érigé empiétait ou non sur la voie dont personne ne conteste le caractère public, portait sur un litige dont la connaissance au fond n'appartient manifestement pas à la juridiction administrative. Par suite, c'est en tout état de cause à tort que le premier juge a rejeté au fond la demande des requérants au motif qu'il leur appartiendrait de solliciter un arrêté d'alignement individuel au droit de la propriété de leur voisine, lequel ne peut au demeurant, en vertu de l'article L.112-1 du code de la voirie routière, que constater la limite actuelle de la voie et ne saurait par suite utilement régler le litige. Il y a lieu d'annuler son ordonnance et de rejeter la demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions.
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée.
Article 2 : La demande de M. G...et Mme F...est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A...G...et Mme B...F..., à Mme D...E...et à la commune de Miglos.
Fait à Bordeaux, le 8 juin 2018
Le juge d'appel des référés
Catherine C...
La République mande et ordonne au préfet de l'Ariège en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX00214