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20/07/2017 | FRANCE | N°17BX01536

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 20 juillet 2017, 17BX01536


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'ordonner une expertise aux fins de déterminer si l'aggravation de son état de santé depuis le mois de juin 2016 est liée à l'intervention chirurgicale du 13 décembre 2012 réalisée au centre hospitalier universitaire de Toulouse.

Par une ordonnance n° 1700575 du 4 mai 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

enregistrée le 16 mai 2017, M. B..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'or...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'ordonner une expertise aux fins de déterminer si l'aggravation de son état de santé depuis le mois de juin 2016 est liée à l'intervention chirurgicale du 13 décembre 2012 réalisée au centre hospitalier universitaire de Toulouse.

Par une ordonnance n° 1700575 du 4 mai 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 mai 2017, M. B..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1700575 du 4 mai 2017 ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est entachée d'erreur de droit et de dénaturation des arguments et faits invoqués ; en effet, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, l'expertise demandée ne préjudicierait pas au principal et une expertise peut être ordonnée en ce qui concerne l'aggravation de son préjudice alors même qu'une instance d'appel est en cours à l'encontre du jugement au fond ; la contestation de l'égalité des armes ne saurait constituer un obstacle à une mesure d'expertise pour aggravation dès lors que le premier expert amiable n'a pas eu accès à la totalité des pièces médicales utiles ; il n'a pas tenu compte du compte rendu écrit du radiologue du 21 décembre 2012 ; le rapport d'expertise ne lui a été communiqué que le 5 septembre 2014 ; l'avis de la commission de conciliation et d'indemnisation ne tient pas compte de ce rapport ni de la nouvelle pièce ni, enfin, de ses dires alors que le médecin conseil a tiré les conséquences de ce nouveau document ; par ailleurs, l'ordonnance ne pouvait se fonder sur l'existence d'expertises amiables dès lors que celles-ci ne portaient pas sur l'aggravation de son état de santé dont il justifie pourtant par de nombreuses pièces médicales ; aucun diagnostic médical ou expertal n'a jusque là été posé concernant cette aggravation ; l'expertise est donc utile et nécessaire ;

- contrairement à ce qu'a estimé le juge des référés de première instance, il n'existe pas de décision juridictionnelle statuant sur ce nouveau dommage qui a fait l'objet d'une nouvelle réclamation préalable ; il ne s'agit pas d'une simple augmentation des postes de préjudices en litige dans l'instance au fond mais d'un préjudice distinct du préjudice initial ; la juridiction saisie ne peut se prononcer sur ces nouveaux dommages ;

- l'ordonnance attaquée est entachée d'insuffisance de motivation et d'erreur manifeste d'appréciation des faits ;

- une expertise doit être ordonnée selon une mission adaptée à l'aggravation du dommage et des postes de préjudice.

Par un mémoire enregistré le 9 juin 2017, le centre hospitalier universitaire de Toulouse, représenté par la Selarl Montazeau et Cara, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- dans le cadre d'un litige de plein contentieux, le juge statue sur les préjudices au jour de sa décision ; or, M. B...a saisi la cour d'une requête d'appel contre le jugement qui statue sur le fond de sa demande indemnitaire et a demandé une expertise dans le cadre de cette instance au fond ; il serait superfétatoire et inutile d'ordonner en référé une expertise qui pourrait être ordonnée par le juge du fond ;

- le requérant invoque, de façon disproportionnée et dilatoire, une violation de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du fait de la non prise en compte du compte rendu écrit d'un radiologue de l'IRM réalisée le 21 décembre 2012 ; le tribunal administratif a, à juste titre, estimé que cette pièce n'avait aucune incidence sur le débat ; au surplus, les médecins et experts doivent analyser les images et ne pas se contenter des comptes rendus ; deux expertises ont déjà été diligentées dans cette affaire et M. B...a été présent et a pu présenter des observations ; le rapport lui a été communiqué dans les temps ;

- les éléments apportés par le requérant ne sont pas circonstanciés et ne suffisent pas à établir une aggravation de son état de santé ; le requérant perçoit commune une aggravation ce qui doit s'interpréter comme l'absence d'évolution favorable de son état de santé ;

- tant que l'instance au fond n'est pas définitivement jugée, il serait prématuré d'ordonner une nouvelle expertise en référé ;

- le juge des référés de première instance a bien pris en compte l'argumentation développée par le requérant et a suffisamment motivé son ordonnance.

Par mémoire enregistré le 12 juin 2017, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me C..., déclare s'en remettre à l'appréciation du juge des référés de la cour quant aux mérites des conclusions de M.B....

Par mémoire enregistré le 22 juin 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne, représentée par la société d'avocats Thevenot et associés, s'en remet à la décision de la cour quant à la demande d'expertise de M. B...et conclut à ce que ses droits soient réservés dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

Par décision du 8 juin 2017, M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné Mme D...A...en qualité de juge des référés et de tout recours présenté sur le fondement des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...a été pris en charge à compter du 10 décembre 2012 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Toulouse où ont été réalisées trois interventions chirurgicales pour des troubles neurologiques à type de syndrome partiel " de la queue de cheval ". Devant la persistance de troubles neurologiques, M. B...a introduit une demande d'indemnisation amiable auprès de la commission de conciliation et d'indemnisation de Midi-Pyrénées qui a estimé, par un avis du 18 novembre 2014, et après deux expertises médicales dont les rapports ont été établis les 19 février 2014 et 1er août 2014, qu'il convenait d'attribuer à l'évolution prévisible de l'état antérieur 50% du dommage et que la seconde moitié du dommage était imputable pour moitié à une faute commise lors de l'intervention chirurgicale de hernie discale et pour moitié à un accident médical non fautif. Elle a invité en conséquence l'assureur du CHU de Toulouse et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), à adresser à M. B...une offre d'indemnisation portant sur 50% de son préjudice répartis à parts égales entre eux. A la suite du refus implicite de sa demande d'indemnisation, M. B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de condamner le CHU de Toulouse à lui verser une indemnité provisionnelle globale de 205 890,16 euros en réparation du quart des préjudices résultant des interventions chirurgicales qu'il a subies. Par une ordonnance du 1er juillet 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a partiellement fait droit à sa demande en condamnant le CHU de Toulouse à lui verser une provision de 16 500 euros. Par une ordonnance du 10 décembre 2015, le juge d'appel des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a porté cette provision à la somme globale de 37 208,24 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2015, complétée par une rente annuelle de 2 184 euros revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. M. B...a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande de condamnation du CHU de Toulouse à lui verser une indemnité globale de 1 704 936,71 euros. Par jugement du 23 mars 2017, le tribunal a condamné le CHU, sous déduction de la provision éventuellement versée, à payer à M. B...une somme de 38 773,87 euros ainsi qu'une rente annuelle de 2 184 euros en réparation de ses préjudices imputables au centre hospitalier. Le 8 février 2017, il avait saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la désignation d'un expert en vue de déterminer si l'aggravation de son état de santé à compter du mois de juin 2016 était liée aux conditions dans lesquelles il a été pris en charge au CHU de Toulouse. Par ordonnance du 4 mai 2017, constatant que M. B...avait relevé appel, le 18 avril 2017, du jugement du 8 février 2017, et estimant qu'il appartenait au juge d'appel, saisi au fond, d'ordonner, si nécessaire, une nouvelle expertise, le juge des référés a rejeté la demande. M. B...relève appel de cette ordonnance.

2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ". L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher.

3. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les conséquences dommageables de la prise en charge de M. B...au CHU de Toulouse ont fait l'objet de deux expertises médicales ordonnées par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation. Si M. B...soutient que les conditions dans lesquelles ont été conduites ces expertises ne répondent pas aux exigences du principe de l'égalité des armes et ont méconnu le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartiendra au juge d'appel saisi du fond, devant lequel ce moyen a été développé, d'y statuer et de se prononcer sur la nécessité de recourir avant-dire droit, comme le demande le requérant dans sa requête d'appel au fond, à une nouvelle expertise.

4. Le requérant soutient par ailleurs que sa demande d'expertise porte sur une aggravation de son état de santé, laquelle constitue un préjudice distinct du préjudice initial qui fait l'objet de l'instance engagée sur le fond. Il résulte toutefois de l'instruction que l'aggravation dont il fait état serait apparue au mois de juin 2016, soit antérieurement au jugement du tribunal administratif du 23 mars 2017. De plus, les documents médicaux dont il se prévaut font état d'une aggravation qui résulterait d'un déficit des releveurs du pied et des orteils droits, alors que les deux expertises précédemment réalisées font déjà état d'un déficit des releveurs tant à droite qu'à gauche, bien que plus prononcé à gauche. En l'absence d'un préjudice distinct de ceux qui font l'objet de l'instance au fond, et à supposer que le requérant ait entendu contester le taux de déficit fonctionnel permanent et la date de consolidation de son état retenus par les deux experts et par le tribunal administratif dans son jugement au fond, il appartiendra à la cour saisie au fond d'apprécier, ainsi que l'a estimé le juge des référés du tribunal, la nécessité d'ordonner une nouvelle expertise au vu notamment des éléments apportés par le requérant, en particulier si elle estime que les expertises réalisées en 2014 n'ont pu tenir compte de faits postérieurs de nature à influer sur l'issue du litige.

5. Il résulte de ce qui précède que l'expertise sollicitée par M. B...ne présente pas un caractère d'utilité au sens des dispositions précitées de l'article L. 532-1 du code de justice administrative et que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par une ordonnance qui est suffisamment motivée, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande. Sa requête d'appel doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. F... B..., au centre hospitalier universitaire de Toulouse, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne.

Fait à Bordeaux, le 20 juillet 2017.

Le juge des référés,

Elisabeth A...

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Vanessa Beuzelin

2

No 17BX01536


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 17BX01536
Date de la décision : 20/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-03-011 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé tendant au prononcé d'une mesure d'expertise ou d'instruction.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : PECH CARIOU

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-07-20;17bx01536 ?
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