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30/06/2017 | FRANCE | N°17BX00822

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 30 juin 2017, 17BX00822


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société All Security Assistance (ASA) a demandé au tribunal administratif de Mayotte de condamner le centre hospitalier de Mayotte à lui verser une provision de 271 013,95 euros assortie des intérêts moratoires et d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard au titre de l'exécution du marché de surveillance, gardiennage et sécurité dont elle était titulaire.

Par une ordonnance n° 1601041 du 16 février 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a condamné le centr

e hospitalier de Mayotte à verser à la société ASA la somme demandée de 271 013,95 eu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société All Security Assistance (ASA) a demandé au tribunal administratif de Mayotte de condamner le centre hospitalier de Mayotte à lui verser une provision de 271 013,95 euros assortie des intérêts moratoires et d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard au titre de l'exécution du marché de surveillance, gardiennage et sécurité dont elle était titulaire.

Par une ordonnance n° 1601041 du 16 février 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a condamné le centre hospitalier de Mayotte à verser à la société ASA la somme demandée de 271 013,95 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er mars 2017, le centre hospitalier de Mayotte, représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte du 16 février 2017 ;

2°) de rejeter la demande de provision présentée par la société ASA devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de la société ASA une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la créance dont se prévaut la société ASA est sérieusement contestable dès lors que le grand livre de compte sur lequel elle fonde sa demande mentionne certaines factures qui ne lui ont pas été transmises, qui ne correspondent pas à des prestations effectivement réalisées ou dont les délais de paiement n'étaient pas échus, et qu'il ne retrace pas l'ensemble des paiements effectués par l'établissement public à hauteur de 359 552,34 euros à la date de saisine du juge des référés du tribunal administratif ;

- s'il restait à devoir la somme de 218 201,06 euros, le règlement de cette somme n'était pas exigible au moment de la saisine du juge des référés et l'intégralité de la somme due au titre des échéances échues a depuis été mandatée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2017, la société All Security Assistance (ASA), représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête du centre hospitalier de Mayotte ; elle demande en outre à la cour d'assortir la condamnation prononcée par le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard jusqu'à complet paiement et de mettre à la charge du centre hospitalier de Mayotte une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le centre hospitalier n'a pas contesté les factures, même devant le tribunal administratif et est donc mal venu à les contester maintenant ; un nouveau tableau récapitulatif des sommes dues a d'ailleurs été établi après l'ordonnance du juge des référés et fait apparaître que le centre hospitalier est redevable de sommes supérieures à celles évoquées en première instance ; depuis le centre hospitalier a d'ailleurs réglé une partie des factures les 6 et 20 mars 2017 prouvant ainsi qu'il les acceptait sans contestation mais reste toujours devoir 20 941,89 euros ainsi que les factures complémentaires toujours impayées pour éviter tout nouveau contentieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2016, le président de la cour a désigné Mme A..., comme juge des référés et de tout recours présenté sur le fondement des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Par actes d'engagement du 20 juillet 2015, le centre hospitalier de Mayotte a chargé la société All Security Assistance (ASA) de l'exécution des lots 1, 2, 3 et 5 d'un marché de prestations de surveillance, de gardiennage et de sécurité pour une durée de douze mois renouvelable expressément. Pour le lot n°1, un avenant du 27 juillet 2016 a prolongé la durée d'exécution des prestations jusqu'au 3 novembre 2016 et porté le montant total du marché à la somme de 339 880,82 euros. Pendant la même période, la société ASA a en outre effectué des prestations ponctuelles sur demande du centre hospitalier de Mayotte. Le 30 août 2016, la société ASA a mis en demeure le centre hospitalier de lui régler la somme de 215 988,33 euros au titre des factures émises entre le 30 septembre 2015 et le 31 juillet 2016, puis le 21 novembre 2016 de lui régler la somme de 382 801,91 euros assortie des intérêts de retard. La société ASA, estimant que suite à un règlement partiel intervenu le 29 novembre 2016, le centre hospitalier restait à lui devoir la somme de 271 013,95 euros, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Mayotte à lui verser, assortie des intérêts de retard et d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Le centre hospitalier de Mayotte relève appel de l'ordonnance du 16 février 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte en tant qu'elle l'a condamné à verser à la société ASA, à titre de provision, la somme de 271 013,95 euros.

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal... ". Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie." Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui paraît revêtir un caractère de certitude suffisant.

3. La créance dont se prévaut la société ASA à l'encontre du centre hospitalier de Mayotte résulte de l'exécution des lots 1, 2, 3 et 5 d'un marché de prestations de surveillance, de gardiennage et de sécurité, pour la période du 30 juillet 2015 au 3 novembre 2016, dont le montant total a été porté par avenant du 27 juillet 2016 à la somme de 339 880,82 euros ainsi que de l'exécution, durant cette même période, de prestations commandées ponctuellement par le centre hospitalier.

4. Pour regarder cette créance comme non sérieusement contestable et fixer la provision due à la somme demandée de 271 013,95 euros, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, après avoir constaté que le centre hospitalier de Mayotte, qui n'avait pas produit devant lui, ne contestait ni l'effectivité des prestations réalisées, ni leur utilité pour lui ni leur montant, s'est fondé sur les documents comptables produits par la société ASA.

5. Il résulte de l'instruction que l'édition du grand livre global provisoire en date du 21 novembre 2016, relatif à la période du 1er janvier 2015 au 30 novembre 2016, produite par la société ASA pour justifier du caractère non sérieusement contestable de sa créance sur le centre hospitalier de Mayotte à hauteur de 271 013,95 euros, mentionne des factures émises à l'encontre du centre hospitalier pour un montant de 384 951,45 euros et deux règlements de cet établissement public pour un montant total de 2 149,54 euros, et présente ainsi un solde dû de 382 801,91 euros. L'édition du grand livre global provisoire en date du 30 novembre 2016, relatif à la même période, ne fait plus état que de factures émises à l'encontre du centre hospitalier pour un montant de 273 163,49 euros et présente ainsi un solde dû ramené à la somme de 271 013,95 euros. La société ASA n'a apporté aucune justification quant à la différence des factures mentionnées sur les deux éditions de ce document comptable, datées l'une du 21 novembre 2016, l'autre du 30 novembre 2016, lequel ne peut dès lors être regardé comme établissant l'existence d'une créance non sérieusement contestable à hauteur de 271 013,95 euros pour la période du 1er janvier 2015 au 30 novembre 2016. En appel, elle produit un nouvel extrait du grand livre global provisoire, daté du 30 mai 2017, portant sur la période du 1er janvier 2016 au 31 mai 2017, qui fait apparaître des factures émises à l'encontre du centre hospitalier entre le 1er janvier 2016 et le 17 novembre 2016 pour un montant total encore différent de 294 011,35 euros, sans apporter de justifications à cette nouvelle différence du montant des factures émises. Ce document fait en outre apparaître, en complément des versements effectués par le centre hospitalier à hauteur de 2 149,54 euros les 15 décembre 2015 et 27 juin 2016, l'acquittement des sommes de 3 098,58 et 625,21 le 30 juin 2016, de 249 291,12 euros le 6 mars 2017, et de 1 006,92 euros et 1 274,02 euros le 20 mars 2017, soit un montant total de 257 445,39 euros. Eu égard aux incohérences entre les différentes édictions des documents comptables produits quant aux factures émises à l'encontre du centre hospitalier de Mayotte, le centre hospitalier de Mayotte est fondé à soutenir que le montant de 271 013,95 euros ne revêt, en aucune fraction, en l'état de l'instruction, le caractère de certitude suffisant requis par les dispositions précitées de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

6. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Mayotte est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte l'a condamné à verser une provision à la société ASA.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions tendant à leur application présentées par la société ASA. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du centre hospitalier de Mayotte tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

ORDONNE

Article 1er : L'ordonnance n° 1601041 du 16 février 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte est annulée.

Article 2 : La demande présentée par la société ASA devant le tribunal administratif de Mayotte est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du centre hospitalier de Mayotte est rejeté.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au centre hospitalier de Mayotte et à la société All Security Assistance. Copie en sera transmise à la ministre des outre-mer.

Fait à Bordeaux, le 30 juin 2017.

Le juge d'appel des référés,

Christine A...

La République mande et ordonne au préfet de Mayotte en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N° 17BX00822


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 17BX00822
Date de la décision : 30/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015-04 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision. Conditions.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : ROMANET - DUTEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-06-30;17bx00822 ?
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