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08/03/2017 | FRANCE | N°17BX00403

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 08 mars 2017, 17BX00403


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Lidl s'est vu opposer le 27 octobre 2015 par la commission départementale d'aménagement commercial de l'Ariège un avis défavorable à la création d'un supermarché de 1420 m² sur la commune de Saint Lizier. Sur son recours, la commission nationale d'aménagement commercial a, le 17 mars 2016, confirmé un avis défavorable au projet. La société Lidl a alors présenté une nouvelle demande de permis de construire un bâtiment identique au précédent projet, mais comportant une surface commerciale inférieur

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Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Lidl s'est vu opposer le 27 octobre 2015 par la commission départementale d'aménagement commercial de l'Ariège un avis défavorable à la création d'un supermarché de 1420 m² sur la commune de Saint Lizier. Sur son recours, la commission nationale d'aménagement commercial a, le 17 mars 2016, confirmé un avis défavorable au projet. La société Lidl a alors présenté une nouvelle demande de permis de construire un bâtiment identique au précédent projet, mais comportant une surface commerciale inférieure à 1000 m². Par un arrêté du 6 décembre 2016, le maire de Saint Lizier a accordé le permis de construire sollicité.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête enregistrée le 3 février 2017 et un mémoire complémentaire enregistré le 23 février2017, la société Cinqdis 09 demande à la cour d'annuler le permis de construire du 6 décembre 2016 et de mettre à la charge de la commune de Saint Lizier une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle exploite un magasin Carrefour Market dans la commune voisine de Saint Girons ;

- le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation en omettant d'inclure dans la surface de vente une surface de réserves majorée par rapport au précédent projet, qui serait susceptible d'être facilement ouverte à la vente comme l'indique la légende du plan de coupe, alors que le permis relevait en réalité des dispositions de l'article L.425-4 du code de l'urbanisme et devait être soumis à autorisation. La surface de vente annoncée par la société Lidl omet les 81,87 m² dédiés à la préparation du pain, alors que cette surface n'est même pas cloisonnée par rapport à la surface de vente déclarée .La société Lidl a manifestement détourné la procédure. Le permis est entaché d'un vice de procédure faute d'avoir été soumis à l'avis de la CDAC - la société Lidl pratique systématiquement le détournement de la législation alors qu'elle ne peut présenter, après un refus de la CNAC, de nouveau projet que s'il est substantiellement modifié, ce qui n'est pas le cas ;

- l'application des pénalités de l'article 40 du décret n°93-306 du 9 mars 1993 est totalement inefficace et ne permet pas a posteriori de garantir le respect de la loi Pinel quant aux objectifs fixés ;

-un débat contradictoire s'impose pour garantir le droit à un procès équitable, notamment sur les pièces qui seront produites par la SNC sur l'aménagement intérieur de son commerce ;

- le permis méconnait les critères de développement durable et de protection des consommateurs énoncés à l'article L.752-6 du code de commerce, ainsi que l'a justement relevé la CNAC ;

Par des mémoires, enregistrés les 22 février et 6 mars 2017, la commission nationale d'aménagement commercial intervient au soutien de la requête, en relevant que la pratique systématique de la société LIDL de demander une surface inférieure au seuil d'autorisation, tout en construisant un bâtiment aux réserves surdimensionnées, puis une autorisation d'extension de la surface commerciale, aboutit à un moindre contrôle sur l'implantation des bâtiments commerciaux, et méconnaît l'esprit de la loi.

Vu :

-le code de commerce ;

-le code de l'urbanisme ;

-le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (...) et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : ( ...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ".

2. Aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial(...) ". L'article L. 752-1 du code de commerce soumet notamment à une autorisation d'exploitation commerciale " les projets ayant pour objet : 1° La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions et de celles de l'article L. 752-17 du code de commerce, dans sa rédaction issue de cette même loi du 18 juin 2014, qu'un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale en application des dispositions de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme ne peut être délivré que sur avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial compétente ou, le cas échéant, sur avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial. A cette fin, les dispositions des articles R. 752-9 du code de commerce et R. 423-13-2 du code de l'urbanisme, issues des dispositions du décret du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial, prévoient que la demande de permis de construire, déposée conformément aux dispositions des articles R. 423-2 et suivants du code de l'urbanisme, est transmise par l'autorité compétente en matière de permis de construire à la commission départementale d'aménagement commercial, qui procède à l'instruction de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale.

4. Enfin, la même loi du 18 juin 2014 prévoit que la décision unique par laquelle l'autorité compétente octroie un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, d'une part par les personnes mentionnées au I de l'article L. 752-17 du code de commerce, au nombre desquelles figurent notamment les professionnels dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour le projet, est susceptible d'être affectée par celui-ci et, d'autre part, par les personnes mentionnées à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, au nombre desquelles figurent notamment celles pour lesquelles la construction est de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elles détiennent ou occupent régulièrement. Pour chacune de ces deux catégories de requérants, l'article L. 600-1-4, introduit au code de l'urbanisme par la loi du 18 juin 2014, fixe des dispositions qui leur sont propres dans les termes suivants : " Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions. / Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 600-1-2 d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il vaut autorisation de construire. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale sont irrecevables à l'appui de telles conclusions ".

5. Il est constant que le projet autorisé par le permis de construire attaqué porte sur une surface de vente inférieure à 1000 m² et n'a par suite pas été soumis à l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial, non visé par cette décision. Dans ces conditions, il ne peut en aucun cas valoir autorisation d'exploitation commerciale. Par suite, si la circonstance, à la supposer avérée, que la société Lidl aurait entendu détourner la procédure et exploiter en réalité plus de 1000 m² l'exposerait le cas échéant aux sanctions prévues notamment par l'article 40 du décret n°93-306 du 9 mars 1993, elle reste sans incidence sur la portée du permis attaqué, qui constitue exclusivement une autorisation d'urbanisme. Il en résulte que la demande de la société Cinqdis 09, qui exploite un magasin à l'enseigne Carrefour Market dans la commune voisine de celle d'implantation du projet et ne justifie pas d'autre intérêt que celui de concurrent commercial, qui ne lui permettrait au demeurant de demander l'annulation d'un permis de construire qu'en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, est sans objet sur ce point, et par suite manifestement irrecevable.

6. Si la commission nationale d'aménagement commercial fait valoir que la pratique de la société LIDL aboutit à un contrôle moindre sur l'implantation des bâtiments commerciaux, dès lors que ce point n'est pas examiné lors d'une demande ultérieure d'extension, cette circonstance, pour regrettable qu'elle soit, est sans incidence sur l'irrecevabilité d'un concurrent commercial à solliciter l'annulation d'un permis de construire qui ne vaut pas autorisation d'exploitation commerciale, alors au demeurant qu'il appartient à la commission, ultérieurement saisie d'une demande d'extension de la surface commerciale, de donner à une telle demande sa véritable portée et d'en tirer les conséquences qu'elle estimera nécessaires.

7. Il résulte de ce qui précède que la requête de la société Cinqdis 09, et par suite l'intervention de la commission nationale d'aménagement commercial, ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables, selon les modalités prévues par les dispositions précitées du code de justice administrative, ensemble et par voie de conséquence les conclusions au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : L'intervention de la commission nationale d'aménagement commercial n'est pas admise.

Article 2 : La requête de la société Cinqdis 09 est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la SAS Cinqdis 09 et à la commission nationale d'aménagement commercial. Copie en sera adressée à la SNC Lidl et à la commune de Saint Lizier.

Fait à Bordeaux, le 8 mars 2017.

Catherine GIRAULT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

4

No 17BX00403


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 17BX00403
Date de la décision : 08/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-07-01-03-02 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge. Questions générales. Conclusions. Conclusions irrecevables.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : LE CORNO CABINET JURIPUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-08;17bx00403 ?
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