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07/03/2025 | FRANCE | N°2024-6368

France | France, Conseil constitutionnel, 07 mars 2025, 2024-6368


LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 17 juillet 2024 d’une requête présentée pour M. Rémy REBEYROTTE, candidat à l’élection qui s’est déroulée dans la 3e circonscription du département de Saône-et-Loire, par Me Philippe Azouaou, avocat au barreau de Paris, tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 30 juin et 7 juillet 2024 en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6368 AN.




Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnanc...

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 17 juillet 2024 d’une requête présentée pour M. Rémy REBEYROTTE, candidat à l’élection qui s’est déroulée dans la 3e circonscription du département de Saône-et-Loire, par Me Philippe Azouaou, avocat au barreau de Paris, tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 30 juin et 7 juillet 2024 en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6368 AN.

Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les mémoires en défense présentés pour M. Aurélien DUTREMBLE, député, par Me Thomas Laval, avocat au barreau de Paris, enregistrés les 18 septembre et 24 octobre 2024 ;
- le mémoire en réplique présenté pour M. REBEYROTTE par Me Azouaou, enregistré le 11 octobre 2024 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Après avoir entendu les parties et leurs conseils ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

- Sur le grief relatif au déroulement de la campagne électorale :
1. M. REBEYROTTE dénonce la diffusion, dans la soirée du vendredi 5 juillet 2024, sur le site internet du Journal du dimanche, d’une information inexacte selon laquelle le Gouvernement s’apprêtait à « suspendre les éléments les plus répressifs de la loi immigration » qui a été relayée par certains médias audiovisuels ainsi que par des personnalités politiques sur les pages de leurs réseaux sociaux, y compris par des membres et le président du parti soutenant la candidature de M. DUTREMBLE.
2. Il résulte toutefois de l’instruction que cette information a été immédiatement démentie par le Gouvernement, ce qui a amené le Journal du dimanche à corriger, dans la nuit du 5 au 6 juillet, la publication litigieuse sur son site internet. Par ailleurs, il n’est pas établi ni même allégué que l’un des candidats à l’élection dans la 3e circonscription de Saône-et-Loire aurait relayé cette information, ni que celle-ci aurait rencontré un écho particulier dans cette circonscription.
3. Dans ces conditions, pour regrettable qu’elle soit, une telle publication, qui n’a pas méconnu les articles L. 47 A, L. 48-2 et L. 49 du code électoral, ne peut être regardée, en l’espèce, comme ayant altéré la sincérité du scrutin.
- Sur les griefs relatifs aux opérations de vote :
4. En premier lieu, aux termes du dernier alinéa de l’article L. 62-1 du code électoral : « Le vote de chaque électeur est constaté par sa signature apposée à l’encre en face de son nom sur la liste d’émargement ». Aux termes du second alinéa de l’article L. 64 du même code : « Lorsqu’un électeur se trouve dans l’impossibilité de signer, l’émargement prévu par le troisième alinéa de l’article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : "l’électeur ne peut signer lui-même" ». Il ressort de ces dispositions, destinées à assurer la sincérité des opérations électorales, que seule la signature personnelle, à l’encre, d’un électeur est de nature à apporter la preuve de sa participation au scrutin, sauf cas d’impossibilité dûment mentionnée sur la liste d’émargement.
5. Le requérant soutient que quatre-vingt-huit signatures sur les listes d’émargement des bureaux de vote de certaines communes de la circonscription présenteraient des différences significatives entre les deux tours de scrutin.
6. Il résulte toutefois de l’instruction, notamment de l’examen des listes d’émargement des bureaux de vote concernés, que seules trente-six signatures comportent des différences significatives entre les deux tours de scrutin qui ne sont pas justifiées. Les votes correspondants doivent, par suite, être regardés comme irrégulièrement exprimés. En revanche, les autres signatures contestées par le requérant soit ne comportent pas les irrégularités alléguées, soit ont été justifiées par les électeurs concernés, qui ont attesté avoir pris personnellement part au scrutin et avoir signé la liste d’émargement.
7. Il y a ainsi lieu de déduire trente-six voix tant du nombre de suffrages obtenus au second tour par M. DUTREMBLE que du nombre total de suffrages exprimés.
8. En deuxième lieu, si la liste d’émargement des bureaux de vote des communes d’Allerey-sur-Saône, Antully et La Chapelle-sous-Uchon ne comporte pas les signatures des membres du bureau de vote, en méconnaissance des prescriptions de l’article R. 62 du code électoral, il résulte de l’instruction que le nombre de votants porté sur chacun des procès-verbaux, qui ont eux-mêmes été signés par les membres de chaque bureau de vote, correspond au nombre d’électeurs ayant signé chaque liste d’émargement. Dès lors, les suffrages exprimés dans chacune des trois communes ne peuvent être regardés comme ayant été irrégulièrement décomptés.
9. En troisième lieu, il résulte de l’instruction que, comme le soutient le requérant, il existe, dans le bureau de vote de la commune d’Anost et dans le bureau de vote n° 8 de la commune du Creusot, une différence d’une unité entre le nombre de signatures portées sur la liste d’émargement et le nombre d’enveloppes trouvées dans l’urne. Il y a lieu, par suite, de réduire de deux voix supplémentaires le nombre de suffrages recueillis au second tour par le candidat arrivé en tête.
10. En quatrième lieu, si M. REBEYROTTE soutient qu’il n’y a pas lieu de tenir compte des suffrages exprimés dans la commune de Pontoux, faute que les feuilles de pointage aient été annexées au procès-verbal, une telle circonstance est toutefois sans incidence sur la régularité du scrutin, dès lors qu’aucune observation ne figure sur ce point sur les procès-verbaux qui ont été signés par les membres du bureau de vote et les scrutateurs présents.
11. En cinquième lieu, il résulte de l’instruction que c’est à tort qu’ont été regardés comme nuls un suffrage exprimé dans le bureau de vote d’Étang-sur-Arroux et deux suffrages exprimés dans les bureaux n° 2 et 8 de la commune d’Autun. En revanche, si le requérant allègue également que 22 bulletins déclarés nuls dans les bureaux de vote des communes de Monthelon, Saint-Léger-du-Bois et Sully devraient être ajoutés au nombre total de voix qu’il a reçues, faute pour ces bulletins d’avoir été contresignés par les membres du bureau de vote en application de l’article L. 66 du code électoral, un tel grief ne peut qu’être écarté dès lors qu’il résulte de l’instruction que les procès-verbaux ne portent la mention d’aucune réclamation concernant la validité des votes déclarés nuls et que le nombre de bulletins qui y sont décomptés comme tels correspond au nombre et au contenu des bulletins annexés à ces procès-verbaux. Par suite, il y a lieu d’ajouter trois voix au total des suffrages exprimés au second tour en faveur de M. REBEYROTTE.
12. En sixième lieu, si l’erreur de calcul alléguée par le requérant dans le bureau de vote de la commune de Chaudenay n’est pas établie, en revanche, dans le bureau de vote de la commune de Dracy-le-Fort, une erreur de calcul portant sur ce nombre de voix entache la feuille de pointage et, par suite, le décompte figurant au procès-verbal. Dès lors, il y a lieu de retrancher deux voix tant du nombre de suffrages obtenus au second tour par M. DUTREMBLE que du nombre total de suffrages exprimés.
13. En dernier lieu, si, dans la commune de Chagny, il est soutenu que les résultats du bureau de vote n°1 devraient être annulés dès lors que deux des feuilles de pointage ne comportent que le nombre total des voix recueillies par M. DUTREMBLE au titre des deux tables de vote concernées, sans porter de trace du décompte individuel des suffrages qu’il a obtenus, il ne résulte toutefois pas de l’instruction que cette omission procèderait d’une manœuvre. À cet égard, aucune mention n’est portée en ce sens au procès-verbal et le nombre total de suffrages exprimés en faveur de M. DUTREMBLE correspond bien à la somme des suffrages recensés en sa faveur sur chacune des feuilles de pointage.
14. Il résulte de tout ce qui précède que l’écart de voix entre les deux candidats au second tour de scrutin s’établit à vingt-deux voix. Ces rectifications ne modifient pas l’ordre des candidats au second tour.
15. Par conséquent, la requête de M. REBEYROTTE doit être rejetée.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - La requête de M. Rémy REBEYROTTE est rejetée.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 6 mars 2025, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 7 mars 2025.
 


Synthèse
Numéro de décision : 2024-6368
Date de la décision : 07/03/2025
A.N., Saône-et-Loire (3e circ.), M. Rémy REBEYROTTE
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Élections à l'Assemblée nationale

Références :

AN du 07 mars 2025 sur le site internet du Conseil constitutionnel
AN du 07 mars 2025 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Élection à l'Assemblée nationale (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°2024-6368 AN du 07 mars 2025
Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:2025:2024.6368.AN
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