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31/01/2025 | FRANCE | N°2024-6339/6352

France | France, Conseil constitutionnel, 31 janvier 2025, 2024-6339/6352


LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 16 juillet 2024 d’une requête présentée par M. François ASSELINEAU, candidat à l’élection qui s’est déroulée dans la 11e circonscription des Français établis hors de France, tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 30 juin et 7 juillet 2024 en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6339 AN.
Il a également été saisi le 17 juillet

2024 d’une requête tendant aux mêmes fins, présentée par M. Marc GUYON, candidat à cette même él...

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 16 juillet 2024 d’une requête présentée par M. François ASSELINEAU, candidat à l’élection qui s’est déroulée dans la 11e circonscription des Français établis hors de France, tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 30 juin et 7 juillet 2024 en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6339 AN.
Il a également été saisi le 17 juillet 2024 d’une requête tendant aux mêmes fins, présentée par M. Marc GUYON, candidat à cette même élection, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6352 AN.

Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le décret n° 2024-527 du 9 juin 2024 portant convocation des électeurs pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale, modifié par le décret n° 2024-540 du 14 juin 2024 ;
- l’arrêté du 16 mars 2022 relatif au traitement automatisé de données à caractère personnel prévu à l’article R. 176-3 du code électoral ;
- l’arrêté du 14 juin 2024 fixant les dates limites de remise à la commission électorale et de livraison du matériel électoral des candidats à l'élection des députés élus par les Français établis hors de France ;
- l’arrêté du 17 juin 2024 fixant la liste des candidats au premier tour de l’élection des députés élus par les Français établis hors de France ;
- l’arrêté du 25 juin 2024 modifiant l’arrêté du 17 juin 2024 fixant la liste des candidats au premier tour de l’élection des députés élus par les Français établis hors de France ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les mémoires en défense présentés pour Mme Anne GENETET, députée, par Me Philippe Azouaou, avocat au barreau de Paris, enregistrés les 11 septembre et 14 novembre 2024 ;
- les observations présentées par le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, enregistrées les 16 et 17 septembre 2024 ;
- le mémoire en réplique présenté par M. ASSELINEAU, enregistré le 11 octobre 2024 ;
- la demande d’audition présentée par M. ASSELINEAU, enregistrée le 9 décembre 2024 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les requêtes mentionnées ci-dessus sont dirigées contre la même élection. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.
- Sur l’annulation des opérations électorales :
. En ce qui concerne les griefs relatifs à l’organisation du scrutin et la campagne électorale :
2. M. ASSELINEAU soutient, en premier lieu, qu’il lui a été impossible de faire campagne, compte tenu des délais anormalement courts laissés aux candidats et de l’étendue de la circonscription. Toutefois, il n’apporte aucune précision ou justification au soutien de ces allégations. Dans ces conditions, et alors que, d’une part, le scrutin a été organisé conformément aux modalités prévues par le code électoral pour la convocation des électeurs, les déclarations de candidatures et la campagne électorale sous réserve des adaptations particulières prévues par le décret du 9 juin 2024 mentionné ci-dessus, et que, d’autre part, tous les candidats ont été soumis aux mêmes contraintes, le grief doit être écarté.
3. En second lieu, si M. ASSELINEAU reproche au ministère de l’Europe et des affaires étrangères d’avoir refusé de mettre en ligne sur son site internet sa circulaire électorale, il résulte de l’instruction qu’il n’a pas respecté la date limite de remise à la commission électorale fixée pour le premier tour par l’article 1er de l’arrêté du 14 juin 2024 mentionné ci-dessus et qu’il a eu, au demeurant, la possibilité de diffuser sa circulaire aux électeurs selon d’autres modalités, notamment par courriel, en obtenant la communication des listes électorales de la circonscription qui comportent les adresses électroniques des personnes inscrites, en application de l’article L. 330-4 du code électoral.
4. Pour sa part, M. GUYON soutient que des erreurs auraient été commises à son détriment par l’administration, de nature à détourner des voix de sa candidature et à altérer la sincérité du scrutin. Il résulte toutefois de l’instruction que, d’une part, l’erreur commise sur le nom de son remplaçant dans l’arrêté du 17 juin 2024 fixant la liste des candidats au premier tour, publié le jour même au Journal officiel de la République française, a été rectifiée par un arrêté du 25 juin 2024, publié le 26 juin suivant, et n’a pas été reproduite sur d’autres supports d’information ou documents de propagande électorale mis à disposition des électeurs. D’autre part, si l’ambassade de France en Thaïlande a, dans une communication adressée aux électeurs le 25 juin 2024, indiqué par erreur que seuls trois candidats avaient déposé leur matériel électoral dans les délais requis, un message rectificatif a été diffusé le jour même demandant de ne pas prendre en compte cette information. Dans ces conditions, et eu égard à l’écart de voix séparant le requérant des candidats arrivés en tête au premier tour, ces erreurs matérielles, pour regrettables qu’elles soient, ne peuvent être regardées comme ayant pu exercer une influence sur le résultat de l’élection.
. En ce qui concerne les griefs relatifs au vote électronique :
5. En application de l’article L. 330-13 du code électoral applicable à l’élection des députés par les Français établis hors de France, les électeurs votent dans les bureaux ouverts en application de l’article L. 330-12 du même code et « peuvent également, par dérogation à l’article L. 54, voter par correspondance … par voie électronique au moyen de matériels et de logiciels permettant de respecter le secret du vote et la sincérité du scrutin », selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. L’article R. 176-3-7 du même code dispose que l’identité de l’électeur votant par voie électronique est attestée par un identifiant associé à un mot de passe, créés de manière aléatoire et transmis séparément à l’électeur, au plus tard avant le début de la période de vote, par des modes d’acheminement différents. En vertu de l’article 4 de l’arrêté du 16 mars 2022 mentionné ci-dessus, cette transmission à l’électeur de l’identifiant s’opère par courrier électronique et celle du mot de passe par message texte sur son téléphone mobile, respectivement à l’adresse courriel et au numéro de téléphone communiqués à cette fin. Enfin, en vertu du premier alinéa de l’article R. 176-3-9 du code électoral, « pour voter par voie électronique, l’électeur, après s’être connecté au système de vote et identifié à l’aide de l’identifiant et du mot de passe prévus à l’article R. 176-3-7, exprime puis valide son vote au moyen d’un code de confirmation ». Ce code de confirmation lui est, conformément à l’article 4 de l’arrêté du 16 mars 2022, communiqué par voie électronique, à la même adresse électronique que celle utilisée pour la transmission de l’identifiant.
6. En premier lieu, M. ASSELINEAU, évoquant la possibilité d’une fraude informatique de grande ampleur, fait valoir que le dispositif technique élaboré pour la mise en œuvre du vote par correspondance électronique prévu à l’article L. 330-13 du code électoral ne permettrait pas de garantir un scrutin transparent, fiable et sincère.
7. Toutefois, le requérant se borne à formuler une critique générale du dispositif mis en œuvre sans établir, ni même alléguer, que des usurpations d’identité d’électeurs auraient été commises à l’occasion des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans la 11e circonscription des Français établis hors de France. Il n’est pas davantage fondé à soutenir que le calendrier des opérations de dépouillement et de publication des résultats, ainsi que les résultats comparés du vote à l’urne et du vote électronique seraient, par eux-mêmes, de nature à établir l’existence de manœuvres frauduleuses ayant eu pour objet ou pour effet de significativement avantager certains candidats. Ces griefs ne peuvent donc qu’être écartés, sans qu’il soit besoin, en tout état de cause, de procéder à l’enquête demandée par le requérant.
8. En second lieu, M. GUYON soutient que des dysfonctionnements dans l’organisation des opérations de vote par voie électronique auraient empêché certains électeurs de prendre part au vote, faute notamment pour ceux-ci d’avoir obtenu leur mot de passe ou leurs identifiants et de pouvoir joindre l’assistance dédiée. Il se borne cependant à produire à l’appui de sa critique un unique courriel d’un électeur, faisant état de difficultés rencontrées le 26 juin 2024 pour obtenir son mot de passe, qui n’est pas de nature à établir que ce dernier aurait été effectivement empêché de voter, ni, en tout état de cause, l’ampleur des dysfonctionnements allégués. Le grief doit donc être écarté.
- Sur les autres conclusions de M. ASSELINEAU :
9. Si M. ASSELINEAU demande à ce que le vote par voie électronique soit interdit pour toute élection législative, de telles conclusions, qui ne tendent pas à l’annulation de l’élection d’un député, ne peuvent qu’être rejetées.
10. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu’il soit besoin de procéder à l’audition demandée par M. ASSELINEAU, que les requêtes de MM. ASSELINEAU et GUYON doivent être rejetées.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. -  Les requêtes de MM. François ASSELINEAU et Marc GUYON sont rejetées.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 30 janvier 2025, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mme Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 31 janvier 2025
 


Synthèse
Numéro de décision : 2024-6339/6352
Date de la décision : 31/01/2025
A.N., Français établis hors de France (11e circ.), M. François ASSELINEAU et autre
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Élections à l'Assemblée nationale

Références :

AN du 31 janvier 2025 sur le site internet du Conseil constitutionnel
AN du 31 janvier 2025 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Élection à l'Assemblée nationale (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°2024-6339/6352 AN du 31 janvier 2025
Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:2025:2024.6339.6352.AN
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