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21/03/2024 | FRANCE | N°2023-6283/6284

France | France, Conseil constitutionnel, 21 mars 2024, 2023-6283/6284


LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 4 octobre 2023 d’une requête présentée par MM. Olivier VAGNEUX, Claude STILLEN et Laurent STILLEN, électeurs dans le département de l’Essonne, tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans ce département le 24 septembre 2023 en vue de la désignation de cinq sénateurs. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6283 SEN.
Il a également été saisi le même jour d’une requête tendant aux mêmes fins, présentée pour Mme Fabienne CHARL

OT, M. Philippe DECOMBLE, Mme Annick ROBIN, M. Michel NOUAILLE et Mme Pascale DAVRIL, élect...

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 4 octobre 2023 d’une requête présentée par MM. Olivier VAGNEUX, Claude STILLEN et Laurent STILLEN, électeurs dans le département de l’Essonne, tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans ce département le 24 septembre 2023 en vue de la désignation de cinq sénateurs. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6283 SEN.
Il a également été saisi le même jour d’une requête tendant aux mêmes fins, présentée pour Mme Fabienne CHARLOT, M. Philippe DECOMBLE, Mme Annick ROBIN, M. Michel NOUAILLE et Mme Pascale DAVRIL, électeurs dans le département de l’Essonne, par Me Antoine Labonnelie, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6284 SEN.

Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les mémoires en défense présentés par Mme Laure DARCOS et M. Vincent DELAHAYE, sénateurs, enregistrés les 16 et 21 novembre 2023 ;
- les observations du ministre de l’intérieur et des outre-mer, enregistrées le 22 novembre 2023 ;
- les mémoires en défense présentés pour M. Jean-Raymond HUGONET, sénateur, par la SELARL Drai Associés, avocat au barreau de Paris, enregistrés le 30 novembre 2023 et le 13 janvier 2024 ;
- les mémoires en réplique présentés par M. VAGNEUX et autres, enregistrés le 29 décembre 2023 ;
- le jugement n° 2304875 du tribunal administratif de Versailles du 20 juin 2023 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les requêtes mentionnées ci-dessus sont dirigées contre la même élection. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.
- Sur la requête de M. VAGNEUX et autres :
. En ce qui concerne la contestation de la régularité de la désignation des délégués de la commune de Savigny-sur-Orge :
2. En premier lieu, si les requérants soutiennent que trois procurations seraient frauduleuses en raison de différences graphologiques manifestes et frauduleuses, il résulte toutefois de l’instruction que ces procurations, qui ne présentent pas de telles différences et dont les conseillers municipaux concernés ont confirmé être les auteurs, sont authentiques.
3. En deuxième lieu, le grief tiré de la méconnaissance des prescriptions relatives à l’acceptation ou au refus de leurs fonctions par les délégués et suppléants, invoqué pour la première fois par les requérants dans un mémoire en réplique, a été présenté après l’expiration du délai de dix jours fixé par l’article 33 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus. Ce grief est, dès lors, irrecevable.
4. En dernier lieu, si les requérants contestent les motifs pour lesquels l’unique bulletin exprimé en faveur de la liste conduite par M. VAGNEUX a été écarté comme nul, la prise en compte de ce bulletin serait, en tout état de cause, sans incidence sur la désignation des délégués de la commune.
5. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la désignation des délégués du conseil municipal de Savigny-sur-Orge aurait été irrégulière.
. En ce qui concerne les autres griefs :
6. En premier lieu, l’article L. 66 du code électoral n’impose l’annexion au procès-verbal que des bulletins nuls et non celle des enveloppes qui les contenaient. Dès lors, le grief des requérants, qui se bornent, pour contester le décompte des bulletins nuls dans la section n° 3, à invoquer l’absence d’annexion au procès-verbal de cette section des enveloppes ayant contenu les bulletins comptabilisés comme nuls, ne peut qu’être écarté.
7. En deuxième lieu, les requérants contestent la régularité de trois votes en raison de l’ajout d’électeurs sur les listes d’émargement postérieurement au découpage de la liste électorale en sections, sans justifier de procurations ou de la qualité de suppléant d’un délégué empêché.
8. Il résulte toutefois de l’instruction que ces électeurs ont été ajoutés sur ces listes soit pour rectifier des erreurs matérielles soit pour tirer les conséquences de démissions de conseillers municipaux postérieurement au découpage de la liste en sections, et qu’ils ont été admis à voter en tant que délégués de droit des communes de Ballainvilliers, d’Arpajon et d’Igny.
9. En troisième lieu, les requérants soutiennent que quatre délégués suppléants auraient pris part au vote sans justifier de l’empêchement des délégués qu’ils ont remplacés.
10. Il résulte cependant de l’instruction, d’une part, que l’un des électeurs visés par ce grief avait la qualité de délégué de droit, non celle de suppléant. D’autre part, deux autres délégués suppléants visés par ce grief ont dûment justifié de l’empêchement pour raison de santé, conformément à l’article R. 162 du code électoral, des délégués qu’ils ont remplacés.
11. En revanche, il résulte de l’instruction qu’un délégué suppléant a été admis à voter par le bureau en remplacement d’un délégué de droit de la commune de Villeneuve-sur-Auvers sans que soient annexés au procès-verbal les documents attestant de cet empêchement et sans que des justificatifs probants ne soient davantage présentés dans le cadre de l’instruction devant le Conseil constitutionnel. Toutefois, cette seule irrégularité est, eu égard à l’écart des voix, sans incidence sur la sincérité du scrutin.
12. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que l’ordre de remplacement fixé par l’article L. 289 du code électoral n’aurait pas été respecté dans le cas de quatre délégués des communes de Villeneuve-sur-Auvers, Ris-Orangis, Verrières-le-Buisson et Montgeron.
13. Toutefois, d’une part, ce grief a perdu son objet en tant qu’il se rapporte au vote émis par le suppléant qui n’avait pas justifié de l’empêchement du délégué de Villeneuve-sur-Auvers qu’il entendait suppléer, dont l’irrégularité a déjà été constatée au paragraphe 11.
14. D’autre part, ce grief est inopérant en tant qu’il est dirigé contre la participation d’une déléguée de Ris-Orangis et d’une déléguée de Verrières-le-Buisson, qui ont été admises à voter, à la suite de démissions de conseillers municipaux, respectivement en qualité de déléguée remplaçante en application de l’article L.O. 286-2 du code électoral et en qualité de déléguée de droit, et non en tant que suppléantes d’un délégué empêché. En outre, le grief contestant en réplique, postérieurement à l’expiration du délai de recours, la qualité de déléguée de droit de cette déléguée de Verrières-le-Buisson pour des motifs tenant à la date de son installation en conseil municipal est, en tout état de cause, irrecevable car tardif.
15. Enfin, compte tenu de la démission d’une conseillère municipale de son mandat puis de son remplacement par une autre conseillère ayant déjà la qualité de déléguée de droit en vertu d’une décision de désignation comme remplaçante au titre de l’article L. 287 du code électoral, le délégué de Montgeron visé par ce grief a été régulièrement admis au vote en sa qualité de suivant de liste.
16. En dernier lieu, la façon dont le bulletin de vote de la liste « Aimons l’Essonne » a été disposé sur la table de décharge dans la section n° 8 ne caractérise aucune rupture de l’égalité entre les candidats ni manœuvre susceptible d’avoir altéré la sincérité du scrutin.
17. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par Mme DARCOS et M. DELAHAYE, que la requête de M. VAGNEUX et autres doit être rejetée.
- Sur la requête de Mme CHARLOT et autres :
18. En vertu de l’article 3 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs mentionné ci-dessus, les requêtes doivent être signées par leurs auteurs. À la suite d’une invitation à régulariser leur requête initiale par l’apposition de leur signature, la requête n’a été signée que par Mme CHARLOT, Mme ROBIN, M. NOUAILLE et Mme DAVRIL. Elle n’est dès lors recevable qu’en tant qu’elle émane de ces derniers.
19. En premier lieu, les requérants soutiennent que la liste « Essonne Union Populaire Ecologique et Sociale » s’est prévalue indument, sur sa profession de foi ainsi que sur son bulletin de vote, de l’investiture de la NUPES alors qu’elle bénéficiait uniquement de celle de « La France insoumise », portant ainsi atteinte à la sincérité du scrutin.
20. Toutefois, les mentions et symboles figurant sur la profession de foi et le bulletin de vote de la liste « Essonne Union Populaire Ecologique et Sociale » ainsi que le nom de cette liste n’ont pas été de nature à induire en erreur le collège électoral, compte tenu de la composition particulière de ce dernier pour l’élection sénatoriale et eu égard tant aux autres mentions figurant sur ces documents désignant le parti « La France Insoumise » qu’à l’étiquette attribuée par le ministère de l’intérieur, sur l’identité de la formation politique soutenant cette liste.
21. En deuxième lieu, la seule circonstance que, dans la section n° 7, les feuilles de pointage n’ont pas été annexées au procès-verbal ne constitue pas, par elle-même, une irrégularité susceptible de vicier les résultats du scrutin, dès lors que le décompte des suffrages opéré dans cette section n’est pas contesté.
22. En dernier lieu, les requérants soutiennent que la participation de quatre personnes au vote serait irrégulière dès lors que leur nom ne figurait pas initialement sur les listes d’émargement mais a fait l’objet d’un ajout manuscrit.
23. Toutefois, d’une part, il résulte de l’instruction que l’omission du nom de M. Jean Arnaud MORMONT, qui a la qualité de délégué de droit de la commune de Ballainvilliers, résulte d’une erreur matérielle dans la confection initiale de la liste par les services préfectoraux, ainsi qu’il a été dit au paragraphe 8. Dès lors, l’ajout du nom de cet électeur par une mention manuscrite qui, contrairement à ce qui est soutenu, n’est pas illisible, n’est pas constitutif d’une irrégularité.
24.  D’autre part, il résulte de l’instruction que les trois autres électeurs dont l’ajout manuel sur la liste postérieurement au découpage en sections est contesté ont la qualité de délégués suppléants et ont été admis à voter en remplacement de délégués titulaires empêchés. Les requérants se bornant à contester la faculté d’ajouter de manière manuscrite ces noms sur la liste d’émargement sans critiquer la réalité et la justification de ces empêchements, le grief ne peut dès lors qu’être écarté.
25. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme CHARLOT et autres doit être rejetée.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - Les requêtes de MM. Olivier VAGNEUX, Claude STILLEN et Laurent STILLEN et de Mme Fabienne CHARLOT, M. Philippe DECOMBLE, Mme Annick ROBIN, M. Michel NOUAILLE et Mme Pascale DAVRIL sont rejetées.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 mars 2024, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 21 mars 2024.
 


Synthèse
Numéro de décision : 2023-6283/6284
Date de la décision : 21/03/2024
SEN, Essonne, M. Olivier VAGNEUX et autres
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Élections au Sénat

Références :

SEN du 21 mars 2024 sur le site internet du Conseil constitutionnel
SEN du 21 mars 2024 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Élection au Sénat (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°2023-6283/6284 SEN du 21 mars 2024
Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:2024:2023.6283.6284.SEN
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