Le Conseil constitutionnel,
Vu la requête présentée par M. Yves Barrat, demeurant à Cayenne, Guyane, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 23 juin 1988, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 5 et 12 juin 1988 dans la 2è circonscription de la Guyane pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense présentées par M. Léon Bertrand, député, enregistrées comme ci-dessus le 11 juillet 1988 ;
Vu les observations présentées par le ministre des départements et territoires d'outre-mer et la réponse à ces observations, présentée par M. Yves Banat, enregistrées comme ci-dessus les 4 août et 24 octobre 1988 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Yves Barrat, enregistré comme ci-dessus le 24 octobre 1988 ;
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Sur le grief tiré d'abus de propagande :
1. Considérant qu'un tract anonyme mettant en cause de façon polémique l'attitude de M. Barrat à l'égard de l'appartenance de la Guyane à la France a été diffusé dans la nuit précédant le second tour de scrutin ; que, pour condamnable que soit le contenu de ce tract, sa diffusion, qui est restée limitée à une seule commune, n'a pu, en l'espèce, altérer les résultats du scrutin ;
2. Considérant par ailleurs que la diffusion par le maire de Matoury jusqu'au jour du scrutin d'un communiqué appelant les électeurs à ne pas voter pour M. Barrat, conseiller général du canton de Matoury et candidat sous l'étiquette de la majorité présidentielle, n'a pas apporté d'éléments nouveaux dans le débat électoral ; qu'il en va de même des émissions d'une radio locale de Matoury défavorables à M. Barrat ;
- Sur le grief tiré des irrégularités dans le fonctionnement de deux bureaux de vote :
3. Considérant que le requérant soutient que les assesseurs et délégués qu'il avait désignés dans les deux bureaux de vote de Saint-Laurent-du-Maroni auraient été empêchés d'exercer leur mission ;
4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que les assesseurs et délégués de M. Banat ont pu, à la suite de l'intervention du préfet, accomplir leur mission ; qu'il n'est pas établi que les entraves temporairement apportées au libre exercice de cette mission aient entraîné des fraudes de nature à altérer la sincérité de la consultation ;
- Sur les autres griefs :
5. Considérant, d'une part, que les allégations relatives à diverses irrégularités dans les votes par procuration et à la non annexion de certains bulletins nuls aux procès-verbaux ne sont assorties d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
6. Considérant, d'autre part, que l'écart entre les émargements et les enveloppes et bulletins trouvés dans l'urne constaté par la commission de recensement des votes prévue à l'article L. 175 du code électoral est, en l'espèce, sans incidence sur le résultat de l'élection ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête susvisée de M. Barrat doit être rejetée,
Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Yves Banat est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 novembre 1988, où siégaient : MM. Robert BADINTER, président, Louis JOXE, Robert LECOURT, Daniel MAYER, Léon JOZEAU-MARIGNÉ, Georges VEDEL, Robert FABRE, Francis MOLLET-VIÉVILLE, Jacques LATSCHA.