Le Conseil constitutionnel,
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu : 1° la requête présentée par M. Henri Gourmelen, enregistrée le 9 octobre 1980 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et demandant : que toute la lumière soit faite sur la régularité de la date de la réunion de la commission de propagande, recevoir des explications à ce sujet ;
Vu : 2 ° la requête présentée par M. Pierre Fourel, délégué sénatorial de Brest, demeurant à Brest (Finistère), 24, rue Erwan Marrec, enregistrée le 8 octobre 1980 à la préfecture de Quimper et tendant à ce qu'il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 1980 dans le département du Finistère pour la désignation de quatre sénateurs ;
Vu les observations en défense présentées par MM. Lombard, Le Jeune, Bécam et Arzel, sénateurs, lesdites observations enregistrées respectivement les 3, 6, 7 et 10 novembre 1980 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées le 17 octobre 1980 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;
1. Considérant que les requêtes susvisées sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur la requête de M. Gourmelen :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 33 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 "L'élection d'un député ou d'un sénateur peut être contestée devant le Conseil constitutionnel durant les dix jours qui suivent la proclamation des résultats du scrutin" ;
3. Considérant que la proclamation des résultats des élections sénatoriales du Finistère a eu lieu le 28 septembre 1980 ; qu'ainsi, le délai de dix jours fixé par l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 expirait le 8 octobre à minuit ;
4. Considérant que la requête de M. Gourmelen adressée directement au Conseil constitutionnel n'y a été enregistrée que le 9 octobre 1980 ; que, dès lors, elle n'est pas recevable ;
Sur la requête de M. Fourel :
5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 157 du code électoral : "Il est institué au chef-lieu du département, trois semaines au moins avant la date des élections, une commission chargée .., d) de mettre en place au lieu de l'élection et avant l'ouverture du scrutin les bulletins de vote de chaque candidat ou liste de candidats en nombre au moins égal au nombre des membres du collège électoral ; la surveillance des bulletins est assurée par un employé désigné par la commission ; e) dans les départements où fonctionne le scrutin majoritaire, de mettre en place pour le deuxième tour de scrutin un nombre de bulletins en blanc correspondant au nombre d'électeurs inscrits et au nombre de candidats en présence" ;
6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, pour le deuxième tour de scrutin, la commission n'a d'autre obligation que de mettre en place des bulletins en blanc ; que, dès lors, le grief tiré par le requérant de ce que la commission n'a pas mis en place les bulletins de vote des candidates de l'union démocratique bretonne ne saurait être retenu ;
7. Considérant toutefois qu'aucune disposition de loi ou de règlement ne fait obstacle à ce que les candidats mettent eux-mêmes à la disposition des électeurs les bulletins imprimés à leur nom ; que si la commission a rappelé l'existence de cette possibilité pour le second tour, au cours de la réunion qu'elle a tenue le 16 septembre 1980, date à laquelle les candidates de l'union démocratique bretonne n'avaient pas encore déclaré leur candidature, la circonstance que ces candidates n'aient pas été informées de cette faculté par la commission ne peut être regardée comme ayant porté illégalement atteinte à l'égalité entre les candidats, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'elle puisse être attribuée à une manoeuvre ;
8. Considérant que s'il résulte des constatations faites par un huissier au cours des opérations du second tour que les bulletins de la liste de l'union démocratique bretonne n'ont pas été mis à la disposition des électeurs dans deux des six sections de vote, ou ne l'ont été qu'en petit nombre, cette circonstance ne saurait être regardée comme constituant une irrégularité dès lors qu'il n'est pas contesté que, conformément aux dispositions de l'article R. 157 du code électoral, des bulletins en blanc mis à la disposition des électeurs ont permis à ceux-ci d'exprimer leurs suffrages en faveur de tout candidat de leur choix parmi ceux qui étaient en présence ; que les présidents de ces sections de vote ont pu régulièrement refuser de suspendre les opérations de vote pendant le temps nécessaire à l'approvisionnement des bureaux en bulletins de la liste de l'union démocratique bretonne, après avoir fait vérifier et constater que les bulletins en blanc étaient en nombre suffisant ;
9. Considérant que, si l'article R. 157, d, du code électoral impose à la commission l'obligation de faire assurer par un employé désigné par elle la surveillance des bulletins, aucune obligation identique ne lui est imposée par le e du même article pour le second tour de scrutin ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. Fourel ne peut être accueillie,
Décide :
Article premier :
Les requêtes de MM. Gourmelen et Fourel sont rejetées.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au Sénat et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 2 décembre 1980, où siégeaient MM. Roger FREY, président, MONNERVILLE, JOXE, GROS, LECOURT, BROUILLET, VEDEL, SEGALAT, PÉRETTI.