La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/09/2022 | CEDH | N°001-219051

CEDH | CEDH, AFFAIRE ETE c. TÜRKIYE, 2022, 001-219051


DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE ETE c. TÜRKİYE

(Requête no 28154/20)

ARRÊT

Art 10 • Liberté d’expression • Condamnation pénale de la requérante pour propagande en faveur d’une organisation terroriste pour avoir coupé et distribué un gâteau célébrant l’anniversaire du leader du PKK • Actes ne pouvant être perçus comme contenant un appel à l’usage de la violence, à la résistance armée ou au soulèvement, ni comme constituant un discours de haine • Absence de besoin social impérieux et de proportionnalité

STRASBOURG

6 septemb

re 2022

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir de...

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE ETE c. TÜRKİYE

(Requête no 28154/20)

ARRÊT

Art 10 • Liberté d’expression • Condamnation pénale de la requérante pour propagande en faveur d’une organisation terroriste pour avoir coupé et distribué un gâteau célébrant l’anniversaire du leader du PKK • Actes ne pouvant être perçus comme contenant un appel à l’usage de la violence, à la résistance armée ou au soulèvement, ni comme constituant un discours de haine • Absence de besoin social impérieux et de proportionnalité

STRASBOURG

6 septembre 2022

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Ete c. Türkiye,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une Chambre composée de :

Jon Fridrik Kjølbro, président,
Carlo Ranzoni,
Egidijus Kūris,
Pauliine Koskelo,
Jovan Ilievski,
Saadet Yüksel,
Diana Sârcu, juges,
et de Hasan Bakırcı, greffier de section,

Vu :

la requête (no 28154/20) dirigée contre la République de Türkiye et dont une ressortissante de cet État, Mme Fehime Ete (« la requérante ») a saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention ») le 4 juin 2012,

la décision de porter à la connaissance du gouvernement turc (« le Gouvernement ») le grief concernant l’atteinte alléguée portée au droit du requérant à la liberté d’expression ou à la liberté de réunion pacifique et de déclarer irrecevable la requête pour le surplus,

les observations des parties,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 28 juin 2022,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

INTRODUCTION

1. La requête concerne la condamnation pénale de la requérante à une peine d’emprisonnement de dix mois, dont il a été sursis à l’exécution, du chef de propagande en faveur d’une organisation terroriste pour ses actes lors d’une manifestation qui aurait été organisée à Siirt afin de célébrer l’anniversaire du leader du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, organisation illégale armée).

EN FAIT

2. La requérante est née en 1960 et réside à Siirt. Elle a été représentée par Me S. Çelebi, avocat.

3. Le Gouvernement a été représenté par son agent, M. Hacı Ali Açıkgül, chef du service des droits de l’homme au ministère de la Justice de Türkiye.

4. Le 2 mai 2006, le procureur de la République de Siirt engagea une action pénale contre la requérante du chef de propagande en faveur d’une organisation terroriste en raison des actes qu’elle aurait commis lors d’une manifestation organisée le 4 avril 2006 pour célébrer l’anniversaire du leader du PKK.

5. Le 15 février 2008, la cour d’assises de Diyarbakır (« la cour d’assises ») reconnut la requérante coupable de l’infraction reprochée et la condamna à une peine d’emprisonnement de dix mois. Elle releva à cet égard que l’intéressée avait participé à cette manifestation et qu’elle y avait coupé un gâteau préparé afin de célébrer l’anniversaire du leader du PKK et l’avait distribué en assiettes. Elle considéra que ces actes accomplis lors d’une manifestation qui, selon elle, s’était transformée en une manifestation de propagande en faveur du PKK, constituaient l’infraction de propagande en faveur d’une organisation terroriste et qu’ils ne pouvaient être vus comme un exercice de la liberté d’expression.

6. Le 15 novembre 2011, la Cour de cassation rejeta le pourvoi en cassation formé par la requérante contre l’arrêt de la cour d’assises, en indiquant qu’elle n’avait décelé aucune impertinence dans cet arrêt.

7. Le 31 juillet 2012, la cour d’assises, prenant acte de l’entrée en vigueur de la loi no 6352 (paragraphe 12 ci-dessous), décida de surseoir à l’exécution de la peine infligée à la requérante, en application de l’article 1 provisoire de cette loi.

LE CADRE JURIDIQUE INTERNE PERTINENT

1. L’ARTICLE 7 § 2 DE LA LOI no 3713

8. L’article 7 § 2 de la loi no 3713 relative à la lutte contre le terrorisme, entrée en vigueur le 12 avril 1991, se lisait comme suit :

« Quiconque apporte une assistance aux organisations mentionnées [à l’alinéa ci‑dessus] et fait de la propagande en leur faveur sera condamné à une peine de un an à cinq ans d’emprisonnement ainsi qu’à une peine d’amende de 50 millions à 100 millions de livres (...) »

9. Après avoir été modifiée par la loi no 4963 du 30 juillet 2003, cette disposition était ainsi rédigée :

« Quiconque (...) fait de la propagande de manière à inciter à l’utilisation de la violence ou des méthodes relevant du terrorisme sera condamné à une peine allant de un à cinq ans d’emprisonnement ainsi qu’à une amende lourde allant de cinq cents millions à un milliard de livres turques (...) »

10. Après avoir été à nouveau modifié, par la loi no 5532, entrée en vigueur le 18 juillet 2006, l’article 7 § 2 de la loi no 3713 disposait ce qui suit :

« Quiconque fait de la propagande en faveur d’une organisation terroriste sera condamné à une peine de un an à cinq ans d’emprisonnement (...) »

11. Depuis la modification opérée par la loi no 6459, entrée en vigueur le 30 avril 2013, cette disposition est ainsi libellée :

« Quiconque fait de la propagande en faveur d’une organisation terroriste en légitimant les méthodes de contrainte, de violence ou de menace de ce type d’organisations, en faisant leur apologie ou en incitant à leur utilisation sera condamné à une peine de un an à cinq ans d’emprisonnement (...) »

2. B. La loi no 6352

12. La loi no 6352, intitulée « loi portant modification de diverses lois aux fins de l’optimisation de l’efficacité des services judiciaires et de la suspension des procès et des peines imposées dans les affaires concernant les infractions commises par le biais de la presse et des médias », est entrée en vigueur le 5 juillet 2012. Elle prévoit en son article 1 provisoire, alinéas 1 b) et 2, qu’il sera sursis pendant une période de trois ans à la poursuite des infractions commises avant le 31 décembre 2011 par le biais de la presse, des médias ou d’autres moyens de communication de la pensée et de l’opinion et passibles d’une amende ou d’un emprisonnement inférieur à cinq ans.

EN DROIT

1. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 10 DE LA CONVENTION

13. Invoquant les articles 10 et 11 de la Convention, la requérante allègue que sa condamnation pénale porte atteinte à ses droits à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique.

14. La Cour rappelle qu’elle n’est pas tenue par les moyens de droit avancés par un requérant en vertu de la Convention et de ses Protocoles et qu’elle peut décider de la qualification juridique à donner aux faits d’un grief en examinant celui-ci sur le terrain d’articles ou de dispositions de la Convention autres que ceux invoqués par le requérant (Radomilja et autres c. Croatie [GC], nos 37685/10 et 22768/12, § 126, 20 mars 2018).

15. En l’espèce, elle note que, en soumettant le grief exposé ci-dessus, la requérante se plaint de sa condamnation pénale à l’issue d’une procédure pénale du chef de propagande en faveur d’une organisation terroriste qui avait été diligentée contre elle à raison des actes qu’elle avait commis lors d’une manifestation. Les actes principaux retenus par la cour d’assises pour condamner la requérante est ceux de couper un gâteau préparé pour célébrer l’anniversaire du leader du PKK et de le distribuer en assiettes pendant cette manifestation (paragraphe 3 ci-dessus).

16. La Cour rappelle avoir déjà jugé que les opinions peuvent être exprimées, non seulement sous formes verbales ou écrites, mais également par le biais d’un comportement et que les actes constituant un mélange de comportement et d’expression verbale s’analysait en une forme d’expression artistique et politique couverte par l’article 10 de la Convention (voir, Ibrahimov et Mammadov c. Azerbaïdjan, nos 63571/16 et 5 autres, § 165-167, 13 février 2020 et les exemples y cités). Elle note cependant qu’en l’espèce la question de la liberté d’expression est difficilement séparable de celle de la liberté de réunion (Women On Waves et autres c. Portugal, no 31276/05, § 28, 3 février 2009). En effet, la protection des opinions personnelles, assurée par l’article 10, compte parmi les objectifs de la liberté de réunion pacifique telle que la consacre l’article 11 de la Convention (Ezelin c. France, 26 avril 1991, § 37, série A no 202).

17. Prenant en compte les circonstances particulières de l’affaire, et notamment le fait que le grief de la requérante porte sur sa condamnation pénale pour l’infraction de propagande en faveur d’une organisation terroriste, qui relève essentiellement de l’exercice du droit à la liberté d’expression, la Cour estime plus aisé d’examiner les faits dénoncés sous le seul angle de l’article 10 de la Convention, ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations.

2. L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. »

1. Sur la recevabilité

18. Le Gouvernement soulève quatre exceptions d’irrecevabilité que la requérante conteste.

19. En ce qui concerne l’exception tirée du non-épuisement des voies de recours internes au motif que la requérante a omis de former une opposition contre la décision du 31 juillet 2012 de la cour d’assises relative au sursis à l’exécution de la peine et d’introduire une demande de révision de sa condamnation pénale eu égard aux modifications apportées à l’article 7 § 2 de la loi no 3713 par la loi no 6459 (voir, à cet égard, Üçdağ c. Turquie, no 23314/19, § 16, 31 août 2021), qui lui aurait permis ensuite de saisir la Cour constitutionnelle d’un recours individuel, la Cour rappelle avoir déjà rejeté une exception similaire dans l’affaire Süer c. Turquie ([comité] no 77711/11, § 21, 29 septembre 2020). En l’absence d’argument ou fait exigeant de se départir de cette conclusion, cette exception doit être rejetée.

20. S’agissant de l’exception relative à l’absence de qualité de victime de la requérante en raison de l’application d’une mesure de sursis à l’exécution de la peine, la Cour estime que cette mesure était inapte à prévenir ou réparer les conséquences de la procédure pénale dont l’intéressée a directement subi les dommages à raison de l’atteinte portée par celle-ci à sa liberté d’expression (voir, Dickinson c. Turquie, no 25200/11, § 25, 2 février 2021). Il convient donc de rejeter cette exception.

21. Pour ce qui est de l’exception tenant à l’abus du droit de requête en raison du manquement de la requérante d’informer la Cour de la décision de sursis à l’exécution de la peine rendue postérieurement à l’introduction de la requête, la Cour note que, la requérante ayant conservé son statut de victime malgré cette décision, ce fait ne peut être considéré comme un développement important dont l’absence d’information constituerait un abus du droit de requête. Dès lors, cette exception est aussi à rejeter.

22. Quant à l’exception relative à l’incompatibilité ratione materiae du grief au motif que les actes reprochés à la requérante ne peuvent bénéficier de la protection de l’article 10 au sens de l’article 17, la Cour estime que les arguments présentés concernant cette exception soulèvent des questions appelant un examen au fond du grief tiré de l’article 10 de la Convention et non un examen de la recevabilité de ce grief (Üçdağ, précité, § 57).

23. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée ni irrecevable pour un autre motif visé à l’article 35 de la Convention, la Cour la déclare recevable.

2. Sur le fond

24. La requérante soutient qu’elle a exercé son droit à la liberté d’expression en coupant un gâteau d’anniversaire à la manifestation du 4 avril 2006 et que sa condamnation pénale pour cet acte constitue une atteinte à ce droit.

25. Le Gouvernement considère qu’en l’espèce, il n’y a pas eu ingérence dans l’exercice par la requérante de son droit à la liberté d’expression. Pour le cas où l’existence de pareille ingérence serait admise par la Cour, le Gouvernement soutient que cette ingérence était prévue par l’article 7 § 2 de la loi no 3713 et qu’elle poursuivait les buts légitimes que constituent la protection de la sécurité nationale et de l’intégrité territoriale, la défense de l’ordre et la prévention du crime. Il estime aussi qu’eu égard à la nature de l’acte litigieux de la requérante, à savoir couper un gâteau pour célébrer l’anniversaire du leader du PKK, qui selon lui ne peut être considéré couvert par la liberté d’expression, l’ingérence litigieuse était nécessaire dans une société démocratique et proportionnée aux buts légitimes poursuivis.

26. La Cour considère que la procédure pénale engagée à l’encontre de la requérante ainsi que sa condamnation à l’issue de celle-ci s’analysent en une ingérence dans l’exercice par l’intéressée de son droit à la liberté d’expression (Üçdağ, précité, § 75 et Süer, précité, § 27, voir aussi İmrek c. Turquie, no 45975/12, § 29, 10 novembre 2020 et Nejdet Atalay c. Turquie, no 76224/12, § 16, 19 novembre 2019).

27. Cette ingérence résultait de l’application par les juridictions nationales de l’article 7 § 2 de la loi no 3713. La Cour rappelle à ce sujet avoir déjà estimé que, eu égard au libellé de cette disposition dans ses deux versions qui étaient successivement en vigueur de 2003 à 2013 et à la manière dont les juridictions nationales l’avaient interprétée pour condamner les requérants, de sérieux doutes se posaient quant à la prévisibilité de son application (Faruk Temel c. Turquie, no 16853/05, § 49, 1er février 2011 et Yavuz et Yaylalı c. Turquie, no 12606/11, § 38, 17 décembre 2013). Elle juge toutefois inutile de trancher la question de la qualité de loi de cette disposition, eu égard à la conclusion à laquelle elle est parvenue quant à la nécessité de l’ingérence (paragraphe 30 ci-dessous) et au fait que le libellé de l’article 7 § 2 de la loi no 3713 a subi une nouvelle modification en 2013 (Özer (no 3), no 69270/12, § 27, 11 février 2020). En outre, tout en ayant des doutes au sujet de la légitimité des buts poursuivis par l’ingérence, elle partira de l’hypothèse que cette ingérence poursuivait les buts légitimes que constituent la protection de la sécurité nationale et de l’intégrité territoriale, la défense de l’ordre et la prévention du crime.

28. Les principes généraux concernant la nécessité de l’ingérence ont été résumés dans les arrêts Üçdağ (précité, §§ 80, 82 et 83 et Özer (no 3), précité, §§ 28-33).

29. La Cour relève que les actes retenus par la cour d’assises à l’appui de la condamnation pénale de la requérante pour propagande en faveur d’une organisation terroriste sont de couper un gâteau qui aurait été préparé afin de célébrer l’anniversaire du leader du PKK et de le distribuer en assiettes. Elle considère que ces actes, pris dans leur ensemble, ne peuvent être perçus comme contenant un appel à l’usage de la violence, à la résistance armée ou au soulèvement, ni comme constituant un discours de haine, ce qui est à ses yeux l’élément essentiel à prendre en compte (Sürek c. Turquie (no 4) [GC], no 24762/94, § 58, 8 juillet 1999, Belek et Velioğlu c Turquie, no 44227/04, § 25, 6 octobre 2015, Belge, précité, § 34 et Özer (no 3), précité, § 29).

30. Par conséquent, la Cour estime que dans les circonstances de l’espèce, le Gouvernement n’a pas démontré que la mesure incriminée répondait à un besoin social impérieux, qu’elle était proportionnée aux buts légitimes visés et qu’elle était nécessaire dans une société démocratique (Özer (no 3), précité, § 40).

31. Partant, il y a eu violation de l’article 10 de la Convention.

2. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

32. Aux termes de l’article 41 de la Convention :

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

33. La requérante demande 5 000 euros (EUR) au titre du dommage matériel et 15 000 EUR pour le dommage moral qu’elle estime avoir subi et 5 425 euros (EUR) au titre des frais d’avocat qu’elle dit avoir engagés dans le cadre de la procédure menée devant la Cour. À l’appui de cette dernière demande, elle soumet une feuille de calcul comportant le détail des heures et des frais afférents à chaque tâche que son avocat aurait accomplie dans le cadre du traitement de la requête et une convention d’honoraire d’avocat signée par son avocat et elle-même.

34. Le Gouvernement estime que la demande pour préjudice matériel est non étayée et excessive. Il soutient qu’il n’y a pas de lien de causalité entre le préjudice moral allégué et les violations constatées. Il considère en outre que la demande présentée à cet égard est également non étayée et excessive et que le montant réclamé ne correspond pas aux montants alloués dans la jurisprudence de la Cour. Il estime aussi que la demande présentée au titre des frais et dépens est non-étayée et excessivement élevée étant donné le manque de complexité de la procédure et le nombre limité des questions soulevées.

35. La Cour rejette la demande formulée au titre du dommage matériel, qui n’est nullement étayée. Toutefois, elle octroie à la requérante 2 000 EUR pour dommage moral, plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt (Özer (no 3), précité, § 45).

36. Compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour juge raisonnable d’allouer à la requérante la somme de 1 500 EUR pour les frais d’avocat, plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare, la requête recevable ;
2. Dit, qu’il y a eu violation de l’article 10 de la Convention ;
3. Dit,

a) que l’État défendeur doit verser à la requérante, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur au taux applicable à la date du règlement :

1. 2 000 EUR (deux mille euros), plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt, pour dommage moral ;
2. 1 500 EUR (mille cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû sur cette somme par la requérante à titre d’impôt, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4. Rejette, le surplus de la demande de satisfaction équitable.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 6 septembre 2022, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Hasan Bakırcı Jon Fridrik Kjølbro
Greffier Président


Synthèse
Formation : Cour (deuxiÈme section)
Numéro d'arrêt : 001-219051
Date de la décision : 06/09/2022
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 10 - Liberté d'expression-{général} (Article 10-1 - Liberté d'expression);Préjudice moral - demande rejetée (Article 41 - Dommage matériel;Satisfaction équitable);Préjudice moral - réparation (Article 41 - Préjudice moral;Satisfaction équitable)

Parties
Demandeurs : ETE
Défendeurs : TÜRKIYE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : ÇELEBI S.

Origine de la décision
Date de l'import : 07/09/2022
Fonds documentaire ?: HUDOC

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award