La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/09/2018 | CEDH | N°001-186322

CEDH | CEDH, AFFAIRE STOMATII c. RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA ET RUSSIE, 2018, 001-186322


DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE STOMATII c. RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA ET RUSSIE

(Requête no 69528/10)

ARRÊT

STRASBOURG

18 septembre 2018

DÉFINITIF

04/02/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Stomatii c. République de Moldova et Russie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Robert Spano, président,
Julia Laffranque,
Ledi Bianku, r>Işıl Karakaş,
Paul Lemmens,
Valeriu Griţco,
Dmitry Dedov, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en cha...

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE STOMATII c. RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA ET RUSSIE

(Requête no 69528/10)

ARRÊT

STRASBOURG

18 septembre 2018

DÉFINITIF

04/02/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Stomatii c. République de Moldova et Russie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Robert Spano, président,
Julia Laffranque,
Ledi Bianku,
Işıl Karakaş,
Paul Lemmens,
Valeriu Griţco,
Dmitry Dedov, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 28 août 2018,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 69528/10) dirigée contre la République de Moldova et la Fédération de Russie, dont une ressortissante ukrainienne, Mme Svetlana Stomatii (« la requérante »), a saisi la Cour le 13 novembre 2010 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. La requérante a été représentée par Me A. Postica, avocat à Chișinău et juriste auprès de Promo-LEX, une association moldave de défense des droits de l’homme sise à Chișinău. Le gouvernement moldave a été représenté par son agent, M. L. Apostol. Le gouvernement russe a été représenté par son agent, M. G. Matiouchkine.

3. La requérante se plaint en particulier d’une violation de l’article 2 de la Convention.

4. Le 30 janvier 2013, la requête a été communiquée au gouvernement moldave et au gouvernement russe. Informé de son droit de prendre part à la procédure (articles 36 § 1 de la Convention et 44 § 1 du règlement de la Cour), le gouvernement ukrainien n’a pas répondu.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. La requérante est née en 1963 et réside à Vărăncău, en région transnistrienne de la République de Moldova. Elle est la mère de Alexandre Stomatii, né en 1990.

6. Le gouvernement moldave a indiqué qu’il lui était impossible de vérifier les faits de l’affaire au motif que ceux-ci s’étaient déroulés dans une zone sous contrôle exclusif des autorités de la « République moldave de Transnistrie » (« RMT »), autoproclamée comme telle.

7. Le gouvernement russe n’a pas formulé d’observations sur les circonstances de la présente affaire.

8. Le contexte de l’affaire, notamment le conflit armé qui s’est déroulé en Transnistrie en 1991-1992 ainsi que les événements ultérieurs, est décrit dans les arrêts Ilaşcu et autres c. Moldova et Russie ([GC], no48787/99, §§ 28-185, CEDH 2004-VII) et Catan et autres c. République de Moldova et Russie ([GC], nos 43370/04, 8252/05 et 18454/06, §§ 8-42, CEDH 2012 (extraits)).

9. Les faits de la cause, tels qu’exposés par la requérante et tels qu’ils peuvent être établis à partir des documents versés au dossier, peuvent se résumer comme suit.

A. Le décès de Alexandre Stomatii

10. Le 29 juin 2009, Alexandre Stomatii fut incorporé au sein de l’armée de la « RMT » dans le cadre de son service militaire obligatoire.

11. Selon la requérante, son fils subissait les brimades d’autres soldats et avait des relations conflictuelles avec ses supérieurs.

12. Le 22 mai 2010, vers 22 heures, Alexandre Stomatii décéda alors qu’il montait la garde.

B. L’enquête diligentée par les autorités de la « RMT » et la condamnation de F.

13. Selon le procès-verbal de l’inspection des lieux dressé dans la nuit du 22 au 23 mai 2010, Alexandre Stomatii était allongé au sol, sur le dos, à une distance d’environ 5 mètres du bâtiment de la caserne. Le procès-verbal indiquait en outre que le corps présentait des traces de blessures par balle, et qu’un fusil d’assaut Kalachnikov et deux douilles avaient été trouvés à côté du corps.

14. Dans son rapport du 24 mai 2010, le médecin légiste conclut que la mort était survenue à la suite d’une blessure perforante au niveau de la tête et précisa que la balle provenait probablement d’une arme automatique Kalachnikov. Il mentionna également la présence d’une autre blessure pénétrante par balle dans la région dorsale, au niveau de l’omoplate droite.

15. Le 24 mai 2010, le parquet militaire de la « RMT » ouvrit une enquête pénale pour incitation au suicide.

16. Selon le rapport d’un expert du ministère des Affaires intérieures de la « RMT » du 26 mai 2010, aucune empreinte digitale n’avait été relevée sur le fusil d’assaut Kalachnikov retrouvé à côté du corps de Alexandre Stomatii.

17. Dans ses conclusions du 28 mai 2010, le médecin légiste précisait, s’agissant de la blessure au niveau de la tête, que la balle avait été tirée de bas en haut, suivant une trajectoire presque verticale, et que le tir avait été effectué à courte distance, probablement à bout portant. S’agissant de la blessure dans le dos, il indiquait que, autour de l’orifice d’entrée principal, il y avait douze autres petites blessures pénétrantes par éclat et qu’il n’était possible de déterminer ni le type d’arme qui avait servi à effectuer le tir ni, entre autres, la distance de tir. De plus, il relevait que les deux blessures par balle avaient été causées ante mortem et à un court intervalle.

18. D’après un rapport balistique du 6 juin 2010, les deux douilles découvertes sur les lieux provenaient de l’arme automatique trouvée à côté de Alexandre Stomatii.

19. D’après un autre rapport balistique établi le même jour, il était impossible de déterminer si les trois fragments de balle retrouvés dans le dos de Alexandre Stomatii provenaient de l’arme susmentionnée. Ce rapport précisait également qu’au moins deux des fragments provenaient de la même balle et que celle-ci avait pu se désintégrer au contact d’un obstacle suffisamment dur pour causer son éclatement.

20. Par une lettre du 24 juin 2010, le parquet militaire de la « RMT » informa la requérante que l’enquête avait permis d’établir que le décès de Alexandre Stomatii était survenu en raison d’actions imprudentes de l’appelé F. Il indiqua en outre que, le 15 juin 2010, ce dernier avait été mis en examen pour homicide involontaire.

21. Le 25 juin 2010, un expert en recherche criminalistique du ministère des Affaires intérieures de la « RMT » constata l’absence de traces de sang sur l’uniforme de F.

22. Par une lettre du 1er juillet 2010, le parquet militaire de la « RMT » informa la requérante, entre autres, que F. avait reconnu les faits.

23. D’après un rapport d’expertise médicolégale supplémentaire du 30 juin 2010, un taux d’alcool de 2,26 pour mille (soit 2,26 grammes d’alcool par litre de sang) avait été constaté dans le sang du corps de Alexandre Stomatii. Ce rapport indiquait que ce taux correspondait à un « état d’ivresse moyen ». Il précisait également que, compte tenu de la faible hémorragie au niveau de la blessure dans le dos, il pouvait être supposé que cette blessure avait été provoquée au moment où Alexandre Stomatii était déjà agonisant, c’est-à-dire après avoir été blessé à la tête.

24. Il ressort des éléments du dossier que, selon le parquet militaire de la « RMT », Alexandre Stomatii avait monté la garde en état d’ébriété. Il aurait, en présence d’autres soldats, dirigé son arme vers son menton ; se trouvant aux côtés de l’intéressé, F. aurait tenté d’écarter l’arme mais aurait accidentellement appuyé sur la détente, provoquant ainsi le décès de Alexandre Stomatii ; deux à trois minutes plus tard, F. aurait décidé de déplacer l’arme tombée au sol, mais, en la manipulant maladroitement, il aurait déclenché un autre tir et la balle, après avoir rebondi sur un obstacle non identifié, aurait touché Alexandre Stomatii dans le dos.

25. À une date non précisée, l’affaire fut déférée au tribunal de Camenca.

26. Lors de l’audience, F. reconnut les faits. Il déclara, entre autres, ce qui suit : le soir du 22 mai 2010, il avait consommé de l’alcool avec d’autres soldats à l’occasion d’un anniversaire ; il s’était ensuite retrouvé dehors avec un autre appelé aux côtés de Alexandre Stomatii qui, pour s’amuser, aurait enlevé le cran de sûreté de son fusil et l’aurait chargé ; peu de temps après, R. et un autre soldat s’étaient approchés d’eux ; à ce moment-là, Alexandre Stomatii avait pointé son arme vers R. ; ce dernier avait écarté l’arme de la main ; Alexandre Stomatii avait alors dirigé, sans rien dire, l’arme vers son menton. F. indiqua encore que, étant le plus proche de Alexandre Stomatii, il avait voulu écarter l’arme, mais qu’il avait accidentellement appuyé sur la détente, que le coup était parti, que Alexandre Stomatii était tombé sur le dos et que les trois autres soldats s’étaient enfuis vers la caserne. F. ajouta que, lors du second tir qu’il qualifiait d’accidentel, le canon du fusil était dirigé vers Alexandre Stomatii.

27. Devant le tribunal, R. exposa, pour ce qui était du premier tir – réputé accidentel – et des événements qui l’avaient précédé, la même version des faits que F. Pendant les audiences, le tribunal fit également la lecture des dépositions des deux autres soldats témoins du premier tir. Celles-ci avaient été recueillies pendant l’enquête et étaient analogues à celle de R.

28. Le tribunal entendit également un autre soldat, S. Celui-ci déclara qu’il avait aperçu à l’extérieur de la caserne Alexandre Stomatii et quatre autres soldats, dont F. et R., qu’il s’était approché d’eux et que, à ce moment-là, Alexandre Stomatii, en voulant charger l’arme, l’avait heurté deux fois à l’épaule avec la crosse de son fusil. S. indiqua qu’il était ensuite rentré dans la caserne. Il ajouta enfin que, ce soir-là, de l’alcool avait été consommé à l’occasion d’un anniversaire et que Alexandre Stomatii et les quatre autres soldats étaient tous ivres.

29. Le 30 mars 2011, le tribunal de Camenca jugea F. coupable d’homicide involontaire et le condamna à deux ans d’emprisonnement. Il fonda sa décision principalement sur les dépositions de F. et de trois autres soldats témoins du premier tir, ainsi que sur les conclusions du rapport d’expertise médicolégale supplémentaire du 30 juin 2010 (paragraphe 23 ci‑dessus).

30. Sur recours de F., la Cour suprême de la « RMT » confirma sa condamnation le 17 mai 2011. Cependant, elle fit application des dispositions d’une loi d’amnistie de la « RMT » et exonéra F. de l’exécution de sa peine d’emprisonnement. La Cour n’a pas été informée du contenu de cette loi.

C. La saisine des autorités moldaves et russes

31. Entre-temps, par une lettre du 15 juin 2010, la requérante s’était plainte de la mort de son fils, entre autres, aux autorités moldaves et à l’ambassade de la Fédération de Russie en République de Moldova.

32. Par une lettre du 30 juin 2010, l’ombudsman moldave informa la requérante que sa plainte avait été renvoyée au délégué aux droits de l’homme de la région transnistrienne.

33. Le 28 octobre 2010, le parquet moldave décida d’ouvrir une enquête pénale concernant le décès de Alexandre Stomatii.

34. Par une ordonnance du 28 décembre 2010, le parquet en question suspendit l’enquête au motif qu’aucune personne susceptible d’être mise en examen n’avait été identifiée. Il précisa qu’il avait entendu la requérante et que les autorités de la « RMT » n’avaient pas répondu à ses multiples demandes d’information concernant l’affaire.

35. Sur plainte de la requérante, les autorités moldaves rouvrirent à deux reprises l’enquête pénale. Par la suite, elles suspendirent à chaque fois la procédure, invoquant peu ou prou les mêmes motifs que précédemment.

36. Quant aux autorités russes, elles ne répondirent pas à la plainte de la requérante.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS DE LA RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA ET D’AUTRES ÉLÉMENTS PERTINENTS

37. Des rapports d’organisations intergouvernementales et non gouvernementales, le droit et la pratique internes pertinents de la République de Moldova ainsi que d’autres documents pertinents en l’espèce sont résumés dans l’arrêt Mozer c. République de Moldova et Russie ([GC], no 11138/10, §§ 61-77, CEDH 2016).

EN DROIT

I. SUR LA JURIDICTION

38. La Cour doit d’abord déterminer si les faits dénoncés par la requérante relèvent de la juridiction des États défendeurs au sens de l’article 1 de la Convention.

A. Thèses des parties

39. Le gouvernement moldave estime que les faits en cause relèvent de la juridiction de la République de Moldova et de celle de la Fédération de Russie.

40. Pour sa part, le gouvernement russe soutient que les faits à l’origine des griefs soulevés par la requérante ne relèvent pas de sa juridiction et que, par conséquent, la requête doit être déclarée irrecevable ratione personae et ratione loci à l’égard de la Fédération de Russie. Comme il l’a fait dans l’affaire Mozer (précitée, §§ 92-94), le gouvernement russe exprime le point de vue que l’approche adoptée par la Cour à l’égard de la question de la juridiction dans les affaires Ilaşcu et autres (précitée), Ivanţoc et autres c. Moldova et Russie (no 23687/05, 15 novembre 2011) et Catan et autres (précitée) était erronée et incompatible avec le droit public international.

41. La requérante rétorque que les faits en cause relèvent de la juridiction des deux États défendeurs susmentionnés.

B. Appréciation de la Cour

42. La Cour note que, au sujet de la juridiction, les parties dans la présente affaire ont des positions identiques à celles adoptées par les parties dans les affaires Catan et autres (précitée, §§ 83-101) et Mozer (précitée, §§ 81-95). En particulier, la requérante et le gouvernement moldave soutiennent que les faits relèvent de la juridiction des deux États défendeurs, alors que le gouvernement russe soutient que la Fédération de Russie n’exerçait aucune juridiction

43. La Cour rappelle que les principes généraux relatifs à la question de la juridiction au sens de l’article 1 de la Convention à l’égard des actes et faits ayant eu lieu dans la région transnistrienne de la République de Moldova ont été établis dans les arrêts Ilaşcu et autres (précité, §§ 311‑319), Catan et autres (précité, §§ 103-107), ainsi que, plus récemment, Mozer (précité, §§ 97‑98).

1. Juridiction de la République de Moldova

44. Dans les affaires Ilaşcu et autres, Catan et autres et Mozer (précitées), la Cour a estimé que, même si la République de Moldova n’exerçât aucune autorité sur la région transnistrienne, il découlait du fait que la Moldova était l’État territorial que les personnes se trouvant dans cette région relevaient de sa juridiction. L’obligation incombant à la République de Moldova, en vertu de l’article 1 de la Convention, de reconnaître à toute personne relevant de sa juridiction les droits et libertés garantis par la Convention se limitait toutefois à celle de prendre les mesures qui étaient en son pouvoir et en conformité avec le droit international, qu’elles fussent d’ordre diplomatique, économique, judiciaire ou autre (Ilaşcu et autres, précité, § 333, Catan et autres, précité, § 109, et Mozer, précité, § 100). Les obligations de la République de Moldova en vertu de l’article 1 de la Convention furent décrites comme des obligations positives (Ilaşcu et autres, précité, §§ 322 et 330-331, Catan et autres, précité, §§ 109-110, et Mozer, précité, § 99).

45. La Cour ne voit aucune raison de distinguer la présente espèce des affaires mentionnées ci-dessus. Elle observe, par ailleurs, que le gouvernement moldave n’émet pas d’objection quant à l’adoption en l’espèce d’une approche similaire. Elle conclut donc que le fils de la requérante relevait en l’espèce de la juridiction de la République de Moldova au sens de l’article 1 de la Convention, mais que la responsabilité de cet État dans les actes dénoncés doit s’établir à la lumière des obligations positives précitées (Ilaşcu et autres, précité, § 335).

2. Juridiction de la Fédération de Russie

46. La Cour rappelle avoir jugé dans l’affaire Ilaşcu et autres que la Fédération de Russie avait contribué, tant militairement que politiquement, à la création d’un régime séparatiste dans la région de Transnistrie en 1991-1992 (Ilaşcu et autres, précité, § 382). Dans des affaires subséquentes ayant eu trait à la Transnistrie, elle a en outre estimé que, jusqu’en juillet 2010, la « RMT » n’avait pu continuer à exister – en résistant aux efforts déployés par la République de Moldova et les acteurs internationaux pour régler le conflit et rétablir la démocratie et la primauté du droit dans la région – que grâce au soutien militaire, économique et politique de la Russie (Ivanţoc et autres, précité, §§ 116-120, Catan et autres, précité, §§ 121-122, et Mozer, précité, §§ 108 et 110). Dans l’affaire Mozer, la Cour a conclu que le degré élevé de dépendance de la « RMT » à l’égard du soutien russe constituait un élément solide permettant de considérer que la Fédération de Russie continuait d’exercer un contrôle effectif et une influence décisive sur les autorités transnistriennes, et que, dès lors, le requérant relevait de la juridiction de cet État aux fins de l’article 1 de la Convention (Mozer, précité, §§ 110-111).

47. Faute d’information pertinente nouvelle prouvant le contraire, la Cour estime que cette conclusion est toujours valable pour la période à considérer en l’espèce, à savoir de juin 2009 à mai 2011. Elle ne voit donc aucune raison de distinguer le cas présent des affaires Ilaşcu et autres, Ivanţoc et autres, Catan et autres et Mozer précitées.

48. Il s’ensuit que le fils de la requérante relevait en l’espèce de la juridiction de la Fédération de Russie, au sens de l’article 1 de la Convention. Par voie de conséquence, la Cour rejette les exceptions ratione personae et ratione loci formulées par le gouvernement russe.

49. La Cour déterminera ci-après si l’intéressé a eu à subir une violation de ses droits protégés par la Convention de nature à engager la responsabilité de l’un ou l’autre des États défendeurs (Mozer, précité, § 112).

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 2 DE LA CONVENTION

50. Invoquant les articles 2 et 13 de la Convention, la requérante se plaint du décès de son fils survenu pendant l’accomplissement du service militaire obligatoire et de l’absence d’enquête effective sur les circonstances de ce décès.

La Cour rappelle qu’elle peut décider de la qualification juridique à donner aux faits d’un grief en examinant celui-ci sur le terrain d’articles ou de dispositions de la Convention autres que ceux invoqués par le requérant (Radomilja et autres c. Croatie [GC], nos 37685/10 et 22768/12, § 126, CEDH 2018). En l’espèce, elle estime qu’il convient d’examiner ces griefs sous l’angle du seul article 2 de la Convention. Cette disposition énonce ce qui suit dans sa partie pertinente en l’espèce :

« 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) »

A. Sur la recevabilité

51. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’elle ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour la déclare recevable.

B. Sur le fond

52. La requérante allègue que les autorités ont failli à leur obligation de protéger la vie de Alexandre Stomatii. Elle affirme que son fils a été persécuté et maltraité par d’autres militaires. Elle argue également que l’enquête sur les circonstances du décès de son fils n’a pas été suffisamment approfondie et indépendante. Elle dénonce en outre l’impunité du responsable présumé de la mort de son fils.

53. Les gouvernements moldave et russe ne se sont pas exprimés sur le fond de ces griefs.

1. Sur le volet procédural de l’article 2 de la Convention

54. La Cour rappelle que l’obligation de protéger le droit à la vie qu’impose l’article 2 de la Convention requiert qu’une forme d’enquête effective soit menée lorsqu’un individu perd la vie dans des circonstances suspectes (Šilih c. Slovénie [GC], no 71463/01, § 157, 9 avril 2009, et Mustafa Tunç et Fecire Tunç c. Turquie [GC], no 24014/05, § 171, 14 avril 2015).

55. Elle rappelle également que l’effectivité de l’enquête s’apprécie sur la base de plusieurs paramètres essentiels : l’adéquation des mesures d’investigation, la promptitude de l’enquête, la participation des proches du défunt à celle-ci et l’indépendance de l’enquête. Ces paramètres sont liés entre eux et ne constituent pas, pris isolément, une finalité en soi. Pour de plus amples détails concernant ces critères, la Cour renvoie aux arrêts Mustafa Tunç et Fecire Tunç (précité, §§ 172-182, 14 avril 2015) et Armani Da Silva c. Royaume-Uni ([GC], no 5878/08, §§ 232-239, CEDH 2016).

56. En l’espèce, la Cour relève que Alexandre Stomatii est décédé dans l’enceinte de la caserne où il effectuait son service militaire obligatoire et qu’il présentait deux blessures par balle.

57. Elle observe que les autorités de la « RMT » ont commencé les investigations quelques heures après le drame et qu’elles ont ensuite ordonné un certain nombre d’expertises médicolégales et criminalistiques. Cependant, elle remarque que, nonobstant la présence de deux blessures par balle, l’autorité de poursuite transnistrienne n’a envisagé, au début de l’enquête, que la thèse du suicide, et qu’elle n’a donc pas recherché immédiatement après les faits la présence de résidus de tir et de traces de sang sur les mains et les vêtements des autres militaires présents dans la caserne au moment des faits. La Cour rappelle que le rejet d’une piste d’investigation qui s’impose de toute évidence compromet de façon décisive la capacité de l’enquête à établir les circonstances de l’affaire et, le cas échéant, l’identité des personnes responsables (Kolevi c. Bulgarie, no 1108/02, § 201, 5 novembre 2009). En l’espèce, elle note que la recherche, un mois après les faits, de traces de sang sur les vêtements de F., mis en examen entre-temps pour homicide involontaire, n’a donné aucun résultat (paragraphe 21 ci-dessus). En l’absence d’autres preuves, elle relève que l’enquête a accordé un poids déterminant aux aveux de F. ainsi qu’aux déclarations des trois autres soldats présents lors du premier tir (paragraphe 29 ci-dessus) et que, par conséquent, la thèse de deux tirs accidentels a été retenue. Sans remettre en cause la version des faits de ces soldats, la Cour observe cependant que, concernant les événements qui ont précédé le premier tir, il existe des contradictions entre les récits de F. et R. (paragraphes 26 et 27 ci-dessus) et celui de S. (paragraphe 28 ci‑dessus). Elle estime que des mesures promptes d’investigation auraient pu fournir des éléments à même de dissiper les doutes quant à la crédibilité de F. et des trois autres soldats témoins du premier tir.

58. La Cour décèle ensuite des incohérences dans le récit de F. en ce qui concerne le second tir, qui aurait atteint par ricochet le dos de Alexandre Stomatii. Elle relève que F. a notamment affirmé que, après le premier tir accidentel dans la tête, Alexandre Stomatii était tombé par terre sur le dos et qu’ensuite, en voulant déplacer l’arme, il avait déclenché un second tir accidentel, le canon de l’arme étant à ce moment-là dirigé vers Alexandre Stomatii. Dans ces conditions, la Cour estime que plusieurs questions auraient dû être clarifiées : tout d’abord, celle de savoir comment Alexandre Stomatii, qui était allongé sur le dos, avait pu être atteint dans le dos par une balle qui avait ricoché ; ensuite, celle de savoir comment la balle avait pu atteindre le corps par ricochet alors que le canon de l’arme était, selon les dires de F., dirigé vers Alexandre Stomatii. Elle constate que l’enquête ne s’est nullement efforcée de fournir des réponses plausibles à ces questions. Elle estime qu’une reconstitution des faits avec la participation de F. aurait pu apporter des réponses, mais elle constate que l’autorité de poursuite transnistrienne n’a jamais procédé à une telle reconstitution. Elle juge dès lors que les conclusions de l’enquête ne se sont pas appuyées sur une analyse méticuleuse, objective et impartiale de tous les éléments pertinents.

59. En conclusion, la Cour considère que l’enquête menée dans la présente affaire n’a pas été adéquate.

60. Partant, elle juge qu’il y a eu violation du volet procédural de l’article 2 de la Convention.

2. Sur le volet matériel de l’article 2 de la Convention

61. La Cour rappelle que, conformément à sa jurisprudence, lorsque les événements en cause, dans leur totalité ou pour une large part, sont connus exclusivement des autorités, comme dans le cas de personnes soumises à leur contrôle en garde à vue, tout dommage corporel ou décès survenu pendant cette période de détention donne lieu à de fortes présomptions de fait. La charge de la preuve pèse dans ce cas sur les autorités, qui doivent fournir une explication satisfaisante et convaincante (Salman c. Turquie [GC], no 21986/93, § 99, CEDH 2000‑VII, et El-Masri c. l’ex-République yougoslave de Macédoine [GC], no 39630/09, § 152, CEDH 2012). En l’absence d’une telle explication, la Cour est en droit de tirer des conclusions pouvant être défavorables à l’État défendeur (Blokhin c. Russie [GC], no 47152/06, § 140, CEDH 2016).

62. Dans certaines affaires, cette obligation a été étendue aux décès survenus dans les zones placées sous le contrôle des autorités de l’État, telles les casernes militaires (voir, par exemple, Beker c. Turquie, no 27866/03, § 42-43, 24 mars 2009).

63. La Cour réaffirme que l’article 2 de la Convention met à la charge des États l’obligation positive de prendre préventivement toutes les mesures nécessaires pour protéger l’individu dont la vie est menacée par les agissements criminels d’autrui (Osman c. Royaume-Uni, 28 octobre 1998, § 115, Recueil des arrêts et décisions 1998‑VIII) ou, le cas échéant, par ses propres agissements lorsque cette personne est à la charge des autorités (Keenan c. Royaume-Uni, no 27229/95, §§ 89-93, CEDH 2001‑III). Elle souligne que cette obligation vaut sans conteste dans le domaine du service militaire obligatoire (Álvarez Ramón c. Espagne (déc.), no 51192/99, 3 juillet 2001) et que, lorsqu’un État impose le service national obligatoire à ses citoyens, il doit faire preuve de la plus grande diligence, notamment en ce qui concerne l’usage des armes (Abdullah Yılmaz c. Turquie, no 21899/02, § 56, 17 juin 2008). Cependant, il ne faut pas perdre de vue l’imprévisibilité du comportement humain et il faut interpréter l’obligation positive de l’État de manière à ne pas lui imposer un fardeau insupportable ou excessif. La Cour rappelle que, dans son examen à cet égard, elle doit vérifier si l’éventuelle faute imputable aux professionnels de l’armée va bien au-delà d’une simple erreur de jugement ou d’une imprudence (ibid., § 57).

64. Dans la présente affaire, la Cour rappelle que Alexandre Stomatii a été retrouvé mort dans l’enceinte de la caserne et qu’il présentait deux blessures par balle. Elle considère que la charge de la preuve pèse en l’espèce sur les autorités, qui devaient fournir une explication satisfaisante et convaincante (comparer avec Pankov c. Bulgarie, no 12773/03, § 59, 7 octobre 2010).

65. La Cour relève que les autorités de la « RMT » ont donné crédit à la thèse des deux tirs accidentels. Elle rappelle avoir conclu ci-dessus que l’enquête menée en l’espèce n’a pas été adéquate, car de sérieuses lacunes ont nui à sa rigueur (paragraphes 57-58 ci-dessus).

66. La Cour estime que les éléments énumérés aux paragraphes 57-58 ci-dessus sont susceptibles d’entamer la crédibilité de la thèse de deux tirs accidentels (Beker, précité, §§ 51-52 ; comparer avec Abdurashidova c. Russie, no 32968/05, § 69, 8 avril 2010, Pankov, précité, §§ 53-54, et Şişli c. Turquie (déc.), no 29071/09, §§ 78-80, 26 janvier 2016). Aussi estime-t-elle que les autorités de la « RMT » n’ont pas fourni une explication satisfaisante et convaincante quant aux circonstances ayant entouré le décès de Alexandre Stomatii.

67. À supposer même que la thèse de l’accident soit plausible et crédible, la Cour note que, selon les témoignages concordants recueillis dans l’affaire (paragraphes 26, 27 et 28 ci-dessus), Alexandre Stomatii et d’autres soldats, dont le principal suspect, avaient consommé de l’alcool peu avant l’événement tragique. Elle observe également que l’expertise médicolégale a révélé que Alexandre Stomatii était ivre au moment de son décès (paragraphe 23 ci-dessus) et elle estime que, compte tenu du taux important d’alcool constaté dans son sang, il présentait vraisemblablement des signes extérieurs visibles d’ébriété. Elle considère que la consommation apparemment sans entraves d’alcool par les appelés dans l’enceinte de la caserne, ainsi que le fait de permettre à un soldat ivre de monter la garde, muni d’une arme, révèlent un manque évident de vigilance et de diligence de la part de l’administration militaire, à qui il incombait d’adopter des mesures d’ordre pratique visant à la protection effective des appelés contre les dangers inhérents à la vie militaire. Elle estime que ce manquement va bien au-delà d’une simple erreur de jugement ou d’une imprudence. Elle remarque en outre que les États défendeurs n’ont nullement prouvé qu’il existait en « RMT » des procédures adéquates permettant de déterminer les défaillances et les fautes commises en l’espèce par les professionnels de l’armée.

68. À l’aune de ce qui précède, la Cour juge qu’il y a eu violation du volet matériel de l’article 2 de la Convention à l’égard du fils de la requérante.

3. Sur la responsabilité de la République de Moldova et de la Russie

69. La Cour doit déterminer si la République de Moldova s’est acquittée en l’espèce de son obligation positive de prendre des mesures appropriées et suffisantes pour garantir au fils de la requérante les droits découlant de l’article 2 de la Convention (paragraphe 45 ci-dessus). Dans l’arrêt Mozer, la Cour a dit que les obligations positives incombant à la République de Moldova concernaient tant les mesures nécessaires au rétablissement de son contrôle sur le territoire transnistrien, en tant qu’expression de sa juridiction, que les mesures destinées à assurer le respect des droits des requérants individuels (Mozer, précité, § 151).

70. Concernant le premier aspect des obligations positives de la République de Moldova, à savoir le rétablissement de son contrôle sur le territoire national, la Cour a jugé dans l’affaire Mozer que, du début des hostilités en 1991-1992 au mois de juillet 2010, l’État avait pris toutes les mesures qui étaient en son pouvoir (Mozer, précité, § 152). Étant donné que les faits dénoncés dans la présente affaire ont eu lieu avant cette dernière date, la Cour ne voit aucune raison de parvenir à une conclusion différente en l’espèce (ibid.).

71. Quant au second aspect des obligations positives, à savoir le devoir d’assurer le respect des droits du fils de la requérante, la Cour estime que les autorités étatiques ont déployé en l’espèce des efforts pour protéger les intérêts de celui-ci. En particulier, le parquet moldave a ouvert, à la suite des plaintes déposées par les intéressés, une enquête pénale concernant le décès de Alexandre Stomatii (paragraphe 33 ci-dessus). Par la suite, il a entrepris les démarches procédurales qui semblent avoir été en son pouvoir. Il a ainsi entendu la requérante et a demandé, à plusieurs reprises et en vain, aux autorités de la « RMT » de lui fournir des informations sur l’affaire (paragraphe 34 ci-dessus).

72. À la lumière de ce qui précède, la Cour juge que la République de Moldova n’a pas manqué à satisfaire à ses obligations positives à l’égard du fils de la requérante et qu’il n’y a pas eu violation de l’article 2 de la Convention par cet État.

73. Quant à la responsabilité de la Fédération de Russie, la Cour a établi que la Russie exerçait un contrôle effectif sur la « RMT » pendant la période en question (paragraphes 46-47 ci-dessus). Eu égard à cette conclusion, et conformément à sa jurisprudence, il n’y a pas lieu de déterminer si la Russie exerçait un contrôle précis sur les politiques et les actes de l’administration locale subordonnée (Mozer, précité, § 157). Du fait de son soutien militaire, économique et politique continu à la « RMT », sans lequel celle-ci n’aurait pu survivre, la responsabilité de la Russie se trouve engagée au regard de la Convention à raison de l’atteinte aux droits du fils de la requérante (ibid.).

74. En somme, au vu de ses conclusions opérées aux paragraphes 60 et 68 ci-dessus, la Cour estime qu’il y a eu violation par la Fédération de Russie des volets procédural et matériel de l’article 2 de la Convention.

III. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

75. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

76. La requérante réclame 60 000 euros (EUR) pour préjudice moral.

77. Le gouvernement moldave s’en remet à l’appréciation de la Cour quant au bien-fondé de cette demande.

78. Le gouvernement russe estime qu’il n’a pas à verser d’indemnité puisque, selon lui, aucune violation des droits du fils de la requérante ne peut lui être imputée. Il ajoute que, en tout état de cause, la somme demandée est excessive.

79. La Cour rappelle avoir jugé que, en l’espèce, la République de Moldova ne pouvait être tenue pour responsable d’aucune violation des droits garantis au fils de la requérante par la Convention. En conséquence, il n’y a pas lieu que cet État défendeur verse à l’intéressée une indemnité pour dommage moral.

80. La Cour a conclu ci-dessus à la violation par la Fédération de Russie des volets procédural et matériel de cet article dans le chef du fils de la requérante. Eu égard aux violations commises par cet État et à leur gravité, la Cour estime qu’il se justifie en l’espèce d’allouer une réparation pour dommage moral. Statuant en équité, elle accorde à la requérante la somme de 50 000 EUR, à verser par la Fédération de Russie.

B. Frais et dépens

81. La requérante demande 6 450 EUR pour les frais et dépens engagés devant la Cour. Cette somme correspond, selon elle, aux honoraires de son représentant pour quarante-trois heures de travail à raison de 150 EUR l’heure. Elle fournit copie du contrat signé avec l’association qui emploie son représentant, ainsi qu’un décompte horaire détaillé.

82. Le gouvernement moldave estime ces demandes excessives. Le gouvernement russe les considère quant à lui excessives et non étayées.

83. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, compte tenu des documents dont elle dispose et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable d’accorder, pour la procédure devant elle, 3 000 EUR à la requérante. Cette somme est à verser par la Fédération de Russie.

C. Intérêts moratoires

84. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

1. Déclare, à l’unanimité, la requête recevable à l’égard de la République de Moldova ;

2. Déclare, à la majorité, la requête recevable à l’égard de la Fédération de Russie ;

3. Dit, à l’unanimité, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 2 de la Convention par la République de Moldova ;

4. Dit, par six voix contre une, qu’il y a eu violation du volet procédural de l’article 2 de la Convention par la Fédération de Russie ;

5. Dit, par six voix contre une, qu’il y a eu violation du volet matériel de l’article 2 de la Convention par la Fédération de Russie ;

6. Dit, par six voix contre une,

a) que la Fédération de Russie doit verser à la requérante, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes :

i. 50 000 EUR (cinquante mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral,

ii. 3 000 EUR (trois mille euros), plus tout montant pouvant être dû par la requérante à titre d’impôt, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

7. Rejette, à l’unanimité, la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 18 septembre 2018, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Stanley NaismithRobert Spano
GreffierPrésident

Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 45 § 2 de la Convention et 74 § 2 du règlement, l’exposé de l’opinion séparée du juge Dedov.

R.S.
S.H.N.

OPINION DISSIDENTE DU JUGE DEDOV

Mon vote dans cette affaire repose sur le raisonnement que j’ai exposé dans mon opinion dissidente en l’affaire Mozer c. République de Moldova et Russie ([GC], no 11138/10, CEDH 2016) quant à la question du contrôle effectif de la Fédération de Russie sur la Transnistrie.


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award