La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2013 | CEDH | N°001-116945

CEDH | CEDH, AFFAIRE SALİH SALMAN KILIÇ c. TURQUIE, 2013, 001-116945


DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE SALİH SALMAN KILIÇ c. TURQUIE

(Requête no 22077/10)

ARRÊT

STRASBOURG

5 mars 2013

DÉFINITIF

05/06/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Salih Salman Kılıç c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Guido Raimondi, président,
Danutė Jočienė,
Peer Lorenzen,
Dragoljub Popović, >Işıl Karakaş,
Nebojša Vučinić,
Paulo Pinto de Albuquerque, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du cons...

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE SALİH SALMAN KILIÇ c. TURQUIE

(Requête no 22077/10)

ARRÊT

STRASBOURG

5 mars 2013

DÉFINITIF

05/06/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Salih Salman Kılıç c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Guido Raimondi, président,
Danutė Jočienė,
Peer Lorenzen,
Dragoljub Popović,
Işıl Karakaş,
Nebojša Vučinić,
Paulo Pinto de Albuquerque, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 5 février 2013,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 22077/10) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet Etat, M. Salih Salman Kılıç (« le requérant »), a saisi la Cour le 20 février 2010 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant a été représenté par Me A. Y. Yılmaz, avocat à Ardahan. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.

3. Le 10 janvier 2012, la requête a été communiquée au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

4. Le requérant est né en 1984.

5. Le 16 décembre 2009, le juge du tribunal d’instance pénal d’Ardahan, statuant sur une demande du procureur de la République de cette ville, délivra un mandat d’amener à l’encontre du requérant, qui était soupçonné d’appartenir à une organisation armée illégale.

6. Le 5 janvier 2010, le requérant fut arrêté à Denizli, une ville située à environ 1 600 km d’Ardahan, et traduit devant le juge du tribunal d’instance pénal de cette ville. Le juge vérifia à cette occasion que le requérant était bien la personne visée par le mandat d’amener et lui notifia ce dernier par oral et par écrit. En application de l’article 94 du code de procédure pénale (« CPP »), il ordonna ensuite le placement de l’intéressé en détention provisoire en vue d’assurer sa comparution devant le juge du tribunal d’instance pénal d’Ardahan dans les plus brefs délais.

7. Le 4 février 2010, l’avocat du requérant forma opposition contre le mandat d’amener. Le même jour, le tribunal correctionnel d’Ardahan rejeta l’opposition au motif qu’aucune preuve n’avait encore été recueillie et qu’il y avait un risque de fuite et d’altération des preuves.

8. Le 16 février 2010, l’avocat du requérant adressa une requête au ministère de la Justice. Soulignant que son client était détenu depuis le 5 janvier à Denizli, il sollicitait son transfert à Ardahan dans les plus brefs délais.

9. Le 19 février 2010, le requérant fut traduit devant le juge du tribunal d’instance pénal d’Ardahan et entendu sur les accusations portées contre lui. Au terme de son audition, le juge ordonna son placement en détention provisoire eu égard aux forts soupçons d’appartenance au PKK qui pesaient sur lui, à la nature et à la qualification de l’infraction qui lui était reprochée, à l’état des preuves et à la peine encourue.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

A. Le code de procédure pénale

10. Les dispositions pertinentes du code de procédure pénale (CPP) sont ainsi libellées :

Article 94

« Lorsqu’une personne arrêtée dans le cadre d’une instruction ou d’un procès en vertu d’un mandat d’arrêt décerné par un juge ou un tribunal ne peut être déférée dans les vingt-quatre heures devant le juge ou le tribunal compétent, elle doit être traduite dans le même délai devant un juge du tribunal d’instance pénal le plus proche. Dans le cas où elle n’est pas remise en liberté, elle doit être placée en détention provisoire pour être déférée dans les plus brefs délais devant le juge ou le tribunal compétent. »

Article 98

« Au stade de l’instruction, le juge du tribunal d’instance pénal peut délivrer, sur demande du procureur de la République, un mandat d’amener à l’encontre d’un suspect qui ne se présente pas à une convocation ou qui ne peut être convoqué. (...) »

Article 141 § 1 d)

« 1) Dans le cadre d’une enquête ou d’un procès relatifs à une infraction, les personnes qui :

(...)

d) même régulièrement placées en détention provisoire au cours de l’enquête ou du procès, ne sont pas traduites dans un délai raisonnable devant l’autorité de jugement et concernant lesquelles une décision sur le fond n’est pas rendue dans ce même délai,

(...)

peuvent demander à l’Etat l’indemnisation de tous leurs préjudices matériels et moraux. »

Article 142 § 1

« La demande d’indemnisation peut être présentée dans les trois mois suivant la notification à l’intéressé que la décision ou le jugement est devenu définitif et dans tous les cas de figure dans l’année suivant la date à laquelle la décision ou le jugement est devenu définitif. »

B. Développements jurisprudentiels

11. La 12e chambre criminelle de la Cour de cassation turque a rendu récemment deux arrêts concernant le placement en détention provisoire d’un suspect, en application de l’article 94 du CPP, en vue de sa comparution devant le juge ayant délivré le mandat d’amener à son encontre (arrêts du 4 avril 2012 (E. 2011/15700 – K. 2012/9187) et du 15 mai 2012 (E. 2011/20114 – K. 2012/12183). Dans les affaires en question, les intéressés avaient été placés en détention provisoire en vue d’être traduits devant l’autorité judiciaire compétente dans les plus brefs délais, comme l’exige l’article 94 du CPP. Toutefois, ils avaient été déférés devant le tribunal compétent respectivement dix et douze jours après leur placement en détention. La demande d’indemnisation des intéressés fondée sur la première partie de l’article 141 § 1 d) – défaut de comparution devant la juridiction compétente dans un délai raisonnable – avait été rejetée en première instance au motif que l’action avait été introduite avant l’intervention de la décision interne définitive.

La Cour de cassation infirma ces jugements. Elle posa le principe selon lequel il n’est pas nécessaire d’attendre la décision interne définitive pour se prononcer sur certaines demandes d’indemnisation fondées sur l’article 141 du CPP et considéra que ce principe s’appliquait dans les cas d’espèce. Elle dit en outre que la question de savoir si les intéressés avaient été traduits devant la juridiction compétente dans un délai raisonnable était distincte de celles soulevées lors de l’examen sur le fond de l’affaire. Elle conclut donc que la juridiction de première instance avait jugé à tort que la demande d’indemnisation était prématurée. Quant au fond des affaires, elle estima que les intéressés n’avaient pas été traduits devant le tribunal compétent dans les plus brefs délais comme l’exige l’article 94 du CPP.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 DE LA CONVENTION

12. Invoquant les articles 5 et 6 de la Convention, le requérant se plaint d’avoir été arrêté et incarcéré à la prison de Denizli en vertu d’un mandat d’amener sans avoir été en mesure de présenter sa défense. Il fait observer qu’il a été conduit à Ardahan et entendu sur les accusations portées contre lui quarante-cinq jours seulement après son arrestation à Denizli.

13. La Cour estime opportun d’examiner ces griefs sous l’angle de l’article 5 §§ 1 et 3 de la Convention, ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

(...)

3. Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1 c) du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l’intéressé à l’audience. »

A. Sur la recevabilité

14. La Cour conclut que ces griefs ne sont pas manifestement mal fondés au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention. Constatant par ailleurs qu’ils ne se heurtent à aucun autre motif d’irrecevabilité, elle les déclare recevables.

B. Sur le fond

1. Article 5 § 1 de la Convention

15. Le Gouvernement soutient que la privation de liberté subie par le requérant entre son arrestation à Denizli et son transfert à Ardahan est conforme au droit interne. Il affirme que l’intéressé a été transféré à Ardahan dans les plus brefs délais comme l’exige l’article 94 du CPP.

16. La Cour rappelle qu’en matière de « régularité » d’une détention, y compris l’observation des « voies légales », la Convention renvoie pour l’essentiel à la législation nationale. Dans tous les cas, elle consacre l’obligation d’en observer les normes de fond comme de procédure, mais elle exige de surcroît la conformité de toute privation de liberté au but de l’article 5 : protéger l’individu contre l’arbitraire (voir, parmi beaucoup d’autres, McKay c. Royaume-Uni [GC], no 543/03, § 30, CEDH 2006‑X, Mooren c. Allemagne [GC], no 11364/03, § 76, 9 juillet 2009, et Medvedyev et autres c. France [GC], no 3394/03, § 79, CEDH 2010). S’il incombe au premier chef aux autorités nationales, notamment aux tribunaux, d’interpréter et d’appliquer le droit interne, il en est autrement s’agissant d’affaires dans lesquelles, au regard de l’article 5 § 1, l’inobservation du droit interne emporte violation de la Convention. En pareil cas, la Cour peut et doit exercer un certain contrôle pour rechercher si le droit interne a bien été respecté (Baranowski c. Pologne, no 28358/95, § 50, CEDH 2000‑III, et Douiyeb c. Pays-Bas [GC], no 31464/96, § 44-45, 4 août 1999).

17. La Cour note que, le 16 décembre 2009, le juge du tribunal d’instance pénal d’Ardahan délivra un mandat d’amener à l’encontre du requérant, lequel était soupçonné d’être membre d’une organisation armée illégale. Le requérant fut arrêté le 5 janvier 2010 à Denizli, une ville située à environ 1 600 km d’Ardahan. L’intéressé n’ayant pu être traduit dans les vingt-quatre heures devant le juge ayant décerné le mandat d’amener, il fut traduit devant le juge du tribunal d’instance pénal de Denizli, qui ordonna son placement en détention provisoire en vue de son transfert à Ardahan. Toutefois, ce transfert n’eut lieu que quarante-cinq jours plus tard.

18. La Cour estime que la question qui se pose en l’espèce sous l’angle de l’article 5 § 1 de la Convention est celle de la légalité de la privation de liberté subie par le requérant. Celle-ci relève en effet de l’article 5 § 1 c) de la Convention car le requérant a été arrêté et détenu « en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente » au motif qu’il était soupçonné d’avoir commis une « infraction ». Reste donc à rechercher si l’intéressé a été privé de sa liberté « selon les voies légales » au sens de l’article 5 § 1 de la Convention.

19. La Cour observe que selon les termes de l’article 94 du CPP, lorsque la personne arrêtée en vertu d’un mandat d’arrêt ne peut être déférée dans les vingt-quatre heures devant le juge ou le tribunal compétent, elle doit être traduite dans le même délai devant le juge du tribunal d’instance pénal le plus proche. Dans le cas où la personne arrêtée n’est pas remise en liberté, elle doit être placée en détention provisoire pour être déférée dans les plus brefs délais devant le juge ou le tribunal compétent.

20. La Cour note que cette disposition exige un transfert devant le juge ou le tribunal compétent dans les plus brefs délais. Or force est de constater que dans le cas d’espèce le requérant a été transféré devant le juge du tribunal d’instance pénal d’Ardahan quarante-cinq jours après son placement en détention par le juge de Denizli. Aux yeux de la Cour, un tel délai ne saurait manifestement être considéré comme répondant à l’exigence de transfert dans les plus brefs délais, comme le prescrit l’article 94 du CPP. Par ailleurs, la Cour prend note des récents développements jurisprudentiels relatifs à cette question intervenus postérieurement aux faits de l’espèce. La 12e chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré que des délais de dix et douze jours pour une traduction devant le tribunal compétent ne répondaient pas à l’exigence de transfert « dans les plus brefs délais », comme exigé par l’article 94 du CPP.

21. Ainsi, la Cour considère que la privation de liberté subie par le requérant entre son arrestation à Denizli et son transfert à Ardahan n’était pas conforme au droit interne. Par conséquent, il n’a pas été privé de sa liberté « selon les voies légales » au sens de l’article 5 § 1 de la Convention.

22. Elle conclut dès lors à la violation de cette disposition.

2. Article 5 § 3 de la Convention

23. Le Gouvernement soutient que le requérant a été aussitôt traduit devant un juge comme l’exige l’article 5 § 3 de la Convention. Il précise que le juge du tribunal d’instance pénal de Denizli qui a décidé du placement en détention provisoire du requérant en vue de son transfert à Ardahan avait le pouvoir d’ordonner la mise en liberté de celui-ci. Ce pouvoir résulte selon lui de la deuxième phrase de l’article 94 du CPP.

24. A l’appui de ses dires, le Gouvernement fournit une décision relative à l’élargissement d’une personne arrêtée en vertu d’un mandat d’amener. Dans l’affaire en question, l’intéressé fut arrêté le 15 juillet 2010 à Ankara en vertu d’un mandat d’amener délivré le 19 janvier par le juge du tribunal d’instance pénal d’İskenderun. Ne pouvant être traduit dans les vingt-quatre heures devant le tribunal compétent, l’intéressé fut traduit devant un juge de la cour d’assises d’Ankara. Au terme de l’audition, le juge ordonna la libération de l’intéressé ; il releva que le mandat d’amener n’était accompagné par aucun élément de preuve et considéra que, s’il ordonnait le placement en détention de l’intéressé en application de l’article 94 du CPP, celui-ci risquait de demeurer en détention pendant une longue période, ce qui pouvait lui porter préjudice.

25. La Cour rappelle que l’article 5 § 3 de la Convention fournit aux personnes arrêtées ou détenues au motif qu’on les soupçonne d’avoir commis une infraction pénale des garanties contre une privation arbitraire ou injustifiée de liberté. L’article 5 § 3, qui forme un tout avec l’article 5 § 1 c), a essentiellement pour objet d’imposer l’élargissement à partir du moment où la détention cesse d’être raisonnable. Les premiers mots de l’article 5 § 3 ne se contentent pas de l’accès du détenu à une autorité judiciaire ; ils visent à imposer au magistrat devant lequel la personne arrêtée comparaît l’obligation d’examiner les circonstances militant pour ou contre la détention, de se prononcer selon des critères juridiques sur l’existence de raisons la justifiant et, en leur absence, d’ordonner l’élargissement. En d’autres termes, l’article 5 § 3 exige que le magistrat se penche sur le bien-fondé de la détention (Aquilina c. Malte [GC], no 25642/94, § 47, CEDH 1999‑III).

26. S’agissant d’abord de l’étendue des pouvoirs du juge du tribunal d’instance pénal de Denizli qui a ordonné le placement en détention provisoire du requérant en vue de son transfert à Ardahan, l’examen du dossier ne permet pas de remettre en question l’affirmation du Gouvernement selon laquelle ce juge disposait du pouvoir d’ordonner la libération du requérant. La deuxième phrase de l’article 94 du CPP énonce explicitement la possibilité d’une remise en liberté et la décision fournie par le Gouvernement illustre l’exercice par le juge de son pouvoir de remettre en liberté la personne arrêtée.

27. Reste à examiner la question de savoir si le juge du tribunal d’instance pénal de Denizli s’est réellement penché sur le bien-fondé de la détention du requérant. La Cour observe que le juge en question s’est borné à vérifier l’identité de l’intéressé pour s’assurer qu’il s’agissait de la personne visée par le mandat d’amener et à lui notifier par oral et par écrit le mandat en question. Le juge n’a pas recueilli les déclarations du requérant et n’a pas examiné les circonstances militant pour ou contre la détention. Il n’a donc aucunement examiné le bien-fondé de la détention du requérant. C’est pourquoi la comparution du requérant devant ce juge n’était pas apte à assurer le respect de l’article 5 § 3 de la Convention.

28. Ce n’est que le 19 février 2010, soit quarante-cinq jours après son arrestation, que le bien-fondé du placement en détention a été examiné par le juge du tribunal d’instance pénal d’Ardahan. Force est donc de conclure que le requérant n’a pas été traduit « aussitôt » devant un juge au sens de l’article 5 § 3.

29. La Cour conclut donc à la violation de l’article 5 § 3 de la Convention.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION

30. Le requérant se plaint d’avoir été détenu dans une cellule d’isolement pendant les sept premiers jours de sa détention à la prison de Denizli et affirme avoir subi des mauvais traitements. Il invoque l’article 3 de la Convention.

31. La Cour note que l’intéressé n’a produit aucun document susceptible d’étayer ses affirmations. Il n’est pas établi, ni du reste allégué, que le requérant ait porté son grief devant les autorités internes.

32. Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 (a) et 4 de la Convention.

III. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

33. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage moral

34. Le requérant réclame 100 000 euros (EUR) pour préjudice moral.

35. Le Gouvernement conteste ce montant.

36. Statuant en équité, la Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 9 750 EUR au titre du préjudice moral subi par celui-ci.

B. Frais et dépens

37. Le requérant n’a présenté aucune demande au titre des frais et dépens. Partant, la Cour estime qu’il n’y a pas lieu de lui octroyer de somme de ce chef.

C. Intérêts moratoires

38. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés de l’article 5 §§ 1 et 3, et irrecevable pour le surplus ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 1 de la Convention ;

3. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 3 de la Convention ;

4. Dit

a) que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 9 750 EUR (neuf mille sept cent cinquante euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral, somme à convertir en livres turques au taux applicable à la date du règlement ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

5. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 5 mars 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Stanley NaismithGuido Raimondi
GreffierPrésident


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award