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31/07/2012 | CEDH | N°001-112577

CEDH | CEDH, AFFAIRE MIKRYUKOV ET AUTRES c. RUSSIE, 2012, 001-112577


PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE MIKRYUKOV ET AUTRES c. RUSSIE

(Requêtes nos 34841/06, 59954/09, 746/10, 1096/10, 1162/10 et 1898/10)

ARRÊT

STRASBOURG

31 juillet 2012

DÉFINITIF

18/03/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 c) de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Mikryukov et autres c. Russie,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Nina Vajić, présidente,
Anatoly Kovler, r>Peer Lorenzen,
Khanlar Hajiyev,
Mirjana Lazarova Trajkovska,
Julia Laffranque,
Linos-Alexandre Sicilianos, juges,
et de Søren Nielsen, ...

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE MIKRYUKOV ET AUTRES c. RUSSIE

(Requêtes nos 34841/06, 59954/09, 746/10, 1096/10, 1162/10 et 1898/10)

ARRÊT

STRASBOURG

31 juillet 2012

DÉFINITIF

18/03/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 c) de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Mikryukov et autres c. Russie,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Nina Vajić, présidente,
Anatoly Kovler,
Peer Lorenzen,
Khanlar Hajiyev,
Mirjana Lazarova Trajkovska,
Julia Laffranque,
Linos-Alexandre Sicilianos, juges,
et de Søren Nielsen, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 juillet 2012,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l’origine de l’affaire se trouvent six requêtes (nos 34841/06, 59954/09, 746/10, 1096/10, 1162/10 et 1898/10) dirigées contre la Fédération de Russie et dont six ressortissants de cet État, M. Andrey Aleksandrovich Mikryukov, M. Yuriy Timofeyevich Tkachev, M. Denis Petrovich Oleynik, Mme Aida Grachikovna Shelepova, M. Vyacheslav Alekseyevich Slavnyy et M. Yevgeniy Borisovich Dmitriyev (« les requérants »), ont respectivement saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. M. Oleynik est représenté par Mme L.L. Safargaliyeva, juriste dans la région de Tioumen. Mme Shelepova est représentée par M. S.V. Ryabikin, juriste à Kislovodsk, région de Stavropol.

3. Le gouvernement russe (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. G. Matyushkin, représentant de la Fédération de Russie auprès de la Cour européenne des droits de l’homme.

4. Les requérants allèguent en particulier qu’ils n’ont pas été dûment informés des audiences d’appel dans des litiges auxquels ils étaient parties, ce qui a eu pour conséquence que les affaires ont été examinées par les juridictions d’appel en leur absence. Certains requérants allèguent également le non-respect du principe de l’égalité des armes du fait d’une participation du parquet en faveur des défendeurs dans les procédures civiles en question.

5. Le 26 août 2010, les requêtes ont été communiquées simultanément au Gouvernement en vertu de l’Article 42 du Règlement de la Cour. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

6. Les six requérants sont des ressortissants russes résidant dans différentes régions de Russie. Leurs dates de naissance ainsi que leurs lieux de résidence sont indiqués à l’Annexe no 1.

7. Les requérants avaient intenté des actions civiles concernant des conflits de travail et des litiges pécuniaires. Ils furent déboutés de leurs demandes en première instance et interjetèrent appel, à l’exception de M. Oleynik, qui se trouva dans le cas de figure inverse. Les requérants allèguent que, devant les juridictions d’appel, ils ne furent pas dûment informés des audiences de sorte à pouvoir y comparaître. Les appels furent ainsi examinés en l’absence des requérants et de leurs représentants. Les décisions des juridictions d’appel ne contiennent pas de données sur la convocation des requérants et de leurs représentants ni sur la possibilité d’ajourner les audiences d’appel au cas où les requérants et leurs représentants n’auraient pas été dûment convoqués. Les faits spécifiques pour chaque affaire, les dates auxquelles les jugements et les décisions d’appel ont été rendus ainsi que les noms des juridictions respectives sont précisés à l’Annexe no 1.

8. Dans les requêtes no 59954/09 et no 1162/10 les requérants allèguent également que les procureurs ont participé aux audiences et ont donné des explications de la part des défendeurs.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

A. Sur la convocation et la comparution des parties au procès

9. La convocation et la comparution des parties sont réglées par les articles suivants du code de procédure civile de la Fédération de Russie (no 138-FZ du 14 novembre 2002).

10. En vertu de l’article 113, les parties au procès sont informées ou convoquées au tribunal par lettre recommandée avec avis de réception, par remise en main propre contre émargement, par message téléphonique ou par télégramme, par fax ou par l’utilisation de tous autres moyens de communication qui garantissent la remise au destinataire. Les convocations doivent être délivrées aux parties au procès de manière à leur laisser suffisamment de temps pour se préparer à l’audience et pour comparaître.

11. L’article 115 dispose que les convocations sont délivrées par la poste ou par une personne désignée par le juge. L’heure de leur remise au destinataire est certifiée par la poste ou dans un document à renvoyer au tribunal.

12. Conformément à l’article 116, la convocation doit être remise à la personne contre sa signature sur une copie de la convocation, laquelle doit être renvoyée au tribunal.

13. L’article 167 prévoit que les parties au procès doivent, le cas échéant, informer le tribunal des raisons de leur non-comparution. En l’absence de comparution d’une partie non avisée de l’audience, l’audience doit être ajournée. Le tribunal peut examiner l’affaire en l’absence d’une partie au procès informée de la date et du lieu de l’audience si celle-ci n’explique pas les raisons de sa non-comparution ou si le tribunal estime ces raisons non valables.

14. En vertu de l’article 343, après avoir reçu l’acte d’appel, le juge doit en envoyer copie aux autres parties avec les documents joints au plus tard le lendemain de leur réception ainsi qu’informer les parties au procès de la date et du lieu de l’audience d’appel.

15. L’article 354 énonce que l’audience d’appel doit être ajournée si des parties non convoquées sont absentes.

B. Sur la participation du parquet à l’examen de l’affaire

16. Conformément à l’article 45 du code de procédure civile de la Fédération de Russie, le procureur peut saisir un tribunal dans l’intérêt d’un particulier si ce dernier ne peut pas le faire lui-même à cause de son état de santé, de son âge, de son incapacité ou pour d’autres raisons valables. Le procureur a dans ce cas tous les droits et obligations du demandeur. Dans certains domaines, le procureur intervient aussi pour donner son avis, notamment dans les affaires d’expulsion, de reclassement ou de réparation du préjudice corporel.

17. L’article 336 du code de procédure civile prévoit que le procureur peut interjeter appel s’il a participé à l’examen de l’affaire au fond.

18. En vertu de l’article 1 § 3 de la loi sur le parquet de la Fédération de Russie (no 2202-1 du 17 janvier 1992), les procureurs, conformément à la législation procédurale de la Fédération de Russie, participent à l’examen des affaires par les tribunaux et les cours de commerce et interjettent appel contre les jugements et les décisions qui leur paraissent contraires à la loi. En vertu de l’article 35 §§ 1 et 3 de la loi, le procureur participe à l’examen des affaires dans les cas prévus par la législation procédurale et par d’autres lois ; il peut intervenir à tout stade du procès si la protection des droits des particuliers ou des intérêts de la société ou de l’État l’exige. Conformément à l’article 36 § 1 de la même loi, le procureur peut interjeter appel ou demander l’ouverture d’une procédure de supervision contre tout jugement qui lui paraît illégal ou mal fondé.

EN DROIT

I. JONCTION DES REQUETES

19. Compte tenu de la similitude des requêtes quant aux faits et aux questions de fond qu’elles posent, la Cour décide de les joindre et de les examiner conjointement dans un seul et même arrêt.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION DU FAIT DE LA NON-CONVOCATION DES REQUÉRANTS AUX AUDIENCES D’APPEL

20. Les requérants allèguent ne pas avoir été dûment informés des audiences d’appel, ce qui aurait violé leur droit à un procès équitable tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

A. Sur la recevabilité

1. Sur l’exception de non-épuisement des voies de recours internes

21. Le Gouvernement soutient que tous les requérants, sauf le premier, ont omis d’épuiser les voies de recours internes, à savoir de soulever ces griefs dans le cadre de la procédure de supervision. Le Gouvernement affirme que la procédure de supervision représente une voie de recours interne effective et souligne que le cas où une partie au procès n’a pas été convoquée à l’audience constitue, pour la juridiction de supervision, un motif d’annulation des jugements soumis à son examen.

22. Les requérants dans les requêtes nos 59954/09, 746/10, 1162/10 et 1898/10 contestent cet argument du Gouvernement. Les autres requérants ne font aucune remarque à ce sujet.

23. La Cour rappelle qu’au sens de l’article 35 § 1 de la Convention il incombe à l’État de prouver l’existence d’un recours disponible, adéquat, efficace en théorie comme en pratique, et propre à remédier à la violation alléguée. Selon la jurisprudence de la Cour les procédures de supervision ne sont pas prises en considération en tant que voie de recours interne effective au sens de l’article 35 § 1 de la Convention (voir Tumilovich c. Russie (déc.), no 47033/99, 22 juin 1999 ; Berdzenishvili c. Russie (déc.), no 31697/03, 29 janvier 2004 ; Denisov c. Russie (déc.), no 33408/03, 6 mai 2004 ; Martynets c. Russie (déc.), no 29612/09, 5 novembre 2009). Il convient donc de rejeter l’exception du Gouvernement.

2. Sur l’exception de tardiveté dans la requête no 746/10

24. Le Gouvernement considère que le grief soulevé par le requérant dans l’affaire no 746/10 sous le présent titre est tardif.

25. La Cour note que le requérant n’a obtenu la copie de la décision de la juridiction d’appel du 4 mai 2009 que le 24 juin 2009. Rien n’indique que le requérant ait pris connaissance de la décision du 4 mai 2009 avant cette dernière date. La première lettre du requérant est parvenue à la Cour le 23 décembre 2009. Il s’ensuit que la présente requête ne saurait donc être rejetée pour tardiveté.

3. Sur le bien-fondé des griefs

26. La Cour constate par ailleurs que ces griefs ne sont pas manifestement mal fondés au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention et qu’ils ne se heurtent à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de les déclarer recevables.

B. Sur le fond

27. Le Gouvernement soutient que les requérants ont été informés des audiences d’appel à temps. En effet, les tribunaux en charge de l’examen des affaires au fond ont envoyé aux parties des avis les informant de la date et du lieu des audiences d’appel. Les copies de ces avis ne sont pas jointes aux observations du Gouvernement. Le Gouvernement souligne que ces avis ont été adressés aux requérants suffisamment à l’avance pour leur permettre d’assister aux audiences d’appel et d’y présenter leur cause. Le Gouvernement soutient qu’en vertu de l’article 167 du code de procédure civile de la Fédération de Russie, les juridictions d’appel pouvaient examiner l’appel en l’absence des requérants.

28. Le Gouvernement soutient, d’autre part, que la présence des requérants aux audiences d’appel ne revêtait aucune nécessité pratique, étant donné qu’après avoir déposé leurs actes d’appel les parties n’ont avancé aucun nouvel argument concernant leurs affaires.

29. Le Gouvernement précise que les parties au procès ont été informées des audiences d’appel par des lettres simples, d’où l’absence, dans les dossiers, d’avis de réception certifiant la remise de ces lettres aux requérants. Le Gouvernement invoque également le fonctionnement des services postaux.

30. Les requérants maintiennent leurs griefs. Ils affirment, en particulier, que leur droit à un procès équitable a été vidé de son sens car ils n’ont pas été informés des audiences d’appel de sorte à pouvoir comparaître devant les juridictions d’appel. Les requérants soulignent également que ces juridictions ont omis de considérer la question de leur convocation pour l’audience d’appel et ont examiné les affaires en leur absence.

31. La Cour rappelle que les principes de la procédure contradictoire et de l’égalité des armes - éléments de la notion plus large de procès équitable - requièrent que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (voir Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas, 27 octobre 1993, § 33, série A no 274 ; Nideröst-Huber c. Suisse, 18 février 1997, § 23, Recueil des arrêts et décisions 1997‑I ; Krčmář et autres c. République tchèque, no 35376/97, § 39, 3 mars 2000).

32. La Cour prend en compte la circonstance que le code de procédure civile de la Fédération de Russie prévoit une audience publique devant la juridiction d’appel et que la compétence de la juridiction d’appel ne se limite pas aux points de droit: elle englobe aussi les questions de fait. Toutefois, la comparution des parties au procès n’est pas obligatoire. Le tribunal peut examiner l’affaire en l’absence d’une partie, pourvu qu’elle ait été dûment informée de la date et du lieu de l’audience, si cette partie n’explique pas les raisons de sa non-comparution ou si le tribunal trouve ces raisons non valables. L’analyse des dispositions du droit russe concernant la convocation des parties aux audiences permet de conclure que, quel que soit le moyen de la convocation, les tribunaux internes doivent avoir une preuve de la remise de la convocation aux parties. Si ce n’est pas le cas, l’audience doit être ajournée. Il s’ensuit que le Gouvernement doit avoir en sa possession une telle preuve. Or, le Gouvernement n’a pas présenté de justificatifs, tels que des accusés de réception postaux ou des enveloppes retournées avec un cachet, prouvant la remise des avis d’audience aux requérants ou à leurs représentants, ou au moins la tentative d’une telle remise. De surcroît, le Gouvernement reconnaît que de tels justificatifs ne sont pas en sa possession, expliquant que les parties au procès ont été informées des audiences d’appel par des lettres simples. De leur côté, les requérants maintiennent que ni eux ni leurs représentants n’ont été informés de l’audience d’appel.

33. La Cour rappelle que l’article 6 § 1 ne prévoit pas une forme spécifique d’envoi des documents afférents aux procédures judiciaires, tel que par exemple l’usage de lettres recommandées (voir Bogonos c. Russie (déc.), no 68798/01, 5 février 2004). La Cour considère néanmoins que, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, chaque partie au procès doit être informée de l’audience non seulement pour en connaître la date et le lieu mais aussi de façon à disposer d’assez de temps pour s’y préparer et pour y comparaître. Le simple envoi formel d’une convocation sans aucune certitude de sa remise au destinataire ne saurait être considéré par la Cour comme un procédé valable pour garantir la comparution des parties. Qui plus est, rien dans les textes des décisions d’appel ne laisse à penser que les juridictions d’appel ont examiné si les requérants ou leurs représentants avaient été dûment convoqués aux audiences d’appel et, dans la négative, si les audiences devaient être ajournées conformément à l’article 354 du code de procédure civile. La Cour ne dispose pas non plus d’éléments prouvant que les requérants aient eu connaissance de la date et du lieu des audiences par d’autres moyens. Il s’ensuit que le Gouvernement n’a pas démontré que les requérants avaient été dûment convoqués pour les audiences d’appel.

34. La Cour a conclu à maintes reprises à la violation de l’article 6 § 1 de la Convention dans des affaires similaires à la présente (voir Yakovlev c. Russie, no 72701/01, §§ 19-23, 15 mars 2005; Groshev c. Russie, no 69889/01, §§ 27-31, 20 octobre 2005; Mokrushina c. Russie, no 23377/02, §§ 20-24, 5 octobre 2006; Prokopenko c. Russie, no 8630/03, §§ 17-21, 3 May 2007 ; Roman Karasev c. Russie, no 30251/03, §§ 58-70, 25 novembre 2010; et Shandrov c. Russie, no 15093/05, §§ 28-32, 15 mars 2011). Or, le Gouvernement n’a présenté aucun fait ou argument permettant à la Cour de parvenir dans la présente affaire à une conclusion différente. Le fait de ne pas avoir offert aux requérants l’occasion de présenter efficacement leur cause devant les juridictions d’appel lors d’une audience a donc porté atteinte à leur droit à un procès équitable au sens des dispositions de l’article 6.

35. Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention.

III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION DU FAIT D’UNE PARTICIPATION DU PARQUET EN FAVEUR DES DÉFENDEURS DANS LES PROCÉDURES CIVILES

36. Dans les requêtes no 59954/09 et no 1162/10, les requérants se plaignent du non-respect du principe de l’égalité des armes du fait de la participation du parquet du côté des défendeurs dans les procédures civiles. Ils invoquent l’article 6 § 1 de la Convention.

A. Sur la recevabilité

37. La Cour constate que ces griefs ne sont pas manifestement mal fondés au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention et qu’ils ne se heurtent à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de les déclarer recevables.

B. Sur le fond

38. Le Gouvernement expose que l’intervention du parquet dans les affaires en matière d’expulsion, de reclassement et de réparation du préjudice corporel est prévue par la loi. Le Gouvernement fait aussi valoir que les parties au procès ont, dans ce cas, la possibilité de répondre aux observations du parquet. De plus, après avoir donné son avis lors de l’examen de l’affaire au fond, le procureur ne participe pas aux plaidoiries. Le Gouvernement ajoute également que dans l’affaire no 59954/09 le procureur n’a pas interjeté appel, mais s’est limité à faire des observations sur les arguments du requérant lors de l’examen de l’affaire au fond.

39. Le Gouvernement insiste sur le fait que le principe de l’égalité des armes a été assuré, d’une part, par la possibilité donnée aux parties au procès de répondre aux conclusions du parquet et de faire les derniers commentaires avant le délibéré du tribunal, et d’autre part, par la non-participation du procureur aux plaidoiries.

40. Le Gouvernement soutient ensuite que le procureur donne uniquement son avis personnel et ne peut pas être considéré comme une partie au procès. D’après le Gouvernement, la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie considère le procureur comme garant de la légalité et des intérêts des parties ; l’avis du procureur n’exerce aucune influence indue sur le tribunal.

41. Les requérants maintiennent leurs griefs. Le requérant dans la requête no 59954/09 affirme, en particulier, que le procureur est intervenu dans le procès sans son accord et a pris le parti des deux défendeurs, dont une institution d’État ; de plus, le procureur a participé à l’audience d’appel.

42. La Cour rappelle que le principe de l’égalité des armes – qui est l’un des éléments de la notion plus large de procès équitable – exige un « juste équilibre entre les parties » : chacune doit se voir offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son ou ses adversaires (voir Yvon c. France, no 44962/98, § 31, CEDH 2003‑V ; Kress c. France [GC], no 39594/98, § 72, CEDH 2001‑VI ; Nideröst-Huber, précité, § 23 ; Krčmář et autres, précité, § 39 ; Dombo Beheer B.V., précité, § 33).

43. La Cour conçoit qu’en s’exprimant publiquement en faveur du rejet ou de l’acceptation des moyens présentés par l’une des parties, le ministère public puisse être perçu par les parties comme prenant fait et cause pour l’une d’entre elles (voir Kress, précité, § 81).

44. La Cour constate en outre qu’un dédoublement de la représentation des intérêts d’une partie ou le renforcement de sa position par l’intervention du procureur peut affaiblir la position d’une partie adverse (voir, mutatis mutandis, Yvon, précité, § 32). Toutefois, le fait qu’un point de vue semblable soit défendu par plusieurs parties à une instance juridictionnelle ne met pas nécessairement la partie adverse dans une situation de « net désavantage » pour la présentation de sa cause (ibidem).

45. La Cour doit vérifier si, au vu des modalités de la participation du procureur à l’instance, le « juste équilibre » qui doit régner entre les parties a été respecté.

46. La Cour considère que le soutien apporté par le procureur à une des parties peut être justifié dans certaines circonstances, et notamment pour protéger les droits des personnes vulnérables qui ne peuvent pas se défendre elles-mêmes, ou lorsqu’un grand nombre de personnes est affecté par une infraction, ou encore lorsque les intérêts de l’État l’exigent (voir Mentchinskaïa c. Russie, no 42454/02, § 35, 15 janvier 2009 et Batsanina c. Russie, no 3932/02, § 27, 26 mai 2009).

47. Se tournant vers les circonstances de l’espèce, la Cour note que dans l’affaire no 59954/09 le requérant a intenté une action contre une institution d’État et une entreprise privée afin d’obtenir des allocations sociales. Le procureur est intervenu et a demandé de débouter le requérant. D’après le texte du jugement du 29 mai 2008, le tribunal s’est rangé à l’avis du procureur. Le requérant a fait appel. La juridiction d’appel a entendu un autre procureur à l’audience d’appel et a confirmé le jugement rendu.

48. Dans l’affaire no 1162/10 le requérant a saisi le tribunal afin d’être reclassé après son licenciement. En position de défenderesses se trouvaient deux institutions d’État. Le procureur est intervenu et a demandé au tribunal de débouter le requérant. Après avoir été débouté, le requérant a interjeté appel. La juridiction d’appel a entendu un autre procureur à l’audience d’appel et a confirmé le jugement rendu.

49. La Cour prend également en compte que dans les deux affaires les défendeurs ont eu leurs propres représentants aux audiences.

50. La Cour observe que même si l’intervention du procureur dans ces affaires était prévue par la législation russe, il apparaît qu’aucune circonstance particulière ne justifie une telle intervention dans les présentes affaires. Le Gouvernement n’a pas expliqué quel intérêt d’ordre général demandait la présence du procureur dans ces litiges de caractère essentiellement privé, même si le défendeur était une institution d’État ou si l’affaire concernait le paiement d’allocations sociales.

51. Par ailleurs, il convient de noter que les requérants n’ont pas comparu aux audiences d’appel alors que les représentants des parties défenderesses et les procureurs étaient présents et ont donné des explications qui n’ont pas été communiquées aux requérants ni à leurs représentants, étant donné leur absence.

52. Selon la Cour, tout cela a créé, au détriment des requérants, un déséquilibre incompatible avec le principe de l’égalité des armes. Elle conclut en conséquence à une méconnaissance en l’espèce de ce principe et à une violation de l’article 6 § 1 de la Convention.

IV. SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES

53. Sous l’angle de l’article 6 § 1 de la Convention tous les requérants remettent en cause l’appréciation des éléments des dossiers opérée par les tribunaux et l’interprétation des lois opérée par les juges et contestent l’issue défavorable des procédures civiles auxquelles ils étaient parties. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, les requérants dans les requêtes nos 34841/06 et 1898/10 se plaignent aussi de la violation du droit au respect de leurs biens. Invoquant l’article 2 § 1 de la Convention, le requérant dans la requête no 59954/09 se plaint de son côté de l’insuffisance des allocations sociales. Le requérant dans la requête no 1162/10 se plaint quant à lui de la violation de ses droits prévus par les articles 10 et 14 de la Convention.

54. Compte tenu de l’ensemble des éléments en sa possession et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, la Cour ne relève aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles. Il s’ensuit que cette partie des requêtes est manifestement mal fondée et qu’elle doit être rejetée, en application de l’article 35 §§ 3 (a) et 4 de la Convention.

V. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

55. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

56. La requérante dans l’affaire no 1096/10 n’a présenté aucune demande de satisfaction équitable. Partant, la Cour estime qu’il n’y a pas lieu de lui octroyer de somme à ce titre.

A. Dommage matériel

57. Certains des requérants réclament différentes sommes au titre du préjudice matériel qu’ils auraient subi (voir Annexe no 2).

58. Ne voyant aucun lien de causalité entre les demandes des intéressés et le non-respect allégué de la Convention, le Gouvernement conteste ces demandes.

59. La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre les violations constatées et le dommage matériel allégué par les requérants et rejette donc leurs demandes à ce titre.

B. Dommage moral

60. Certains des requérants réclament différentes sommes au titre du préjudice moral qu’ils estiment avoir subi (voir Annexe no 2).

61. Le Gouvernement estime excessives les sommes demandées par les requérants et propose pour chacun d’eux une somme inférieure à celle réclamée (voir Annexe no 2).

62. La Cour admet que les requérants ont dû éprouver frustration et détresse en raison de leur non-convocation aux audiences d’appel et que ce dommage moral ne serait pas suffisamment réparé par le seul constat d’une violation. De plus, les requérants dans les affaires nos 59954/09 et 1162/10 ont dû éprouver les mêmes sentiments en raison de la participation des procureurs dans les procédures civiles les concernant.

63. La Cour rappelle par ailleurs qu’en application du principe ne ultra petitum, elle n’accorde pas, en règle générale, un montant supérieur à celui demandé par le requérant.

64. Statuant en équité et compte tenu de tous les facteurs pertinents exposés ci-dessus, la Cour décide d’accorder les sommes indiquées dans la colonne « Satisfaction équitable accordée » de l’Annexe no 2.

C. Frais et dépens

65. Certains des requérants demandent également différentes sommes pour les frais et dépens engagés par eux devant les juridictions internes et devant la Cour (voir Annexe no 2).

66. Le Gouvernement conteste en partie ces demandes.

67. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. La Cour note que les honoraires des avocats sont considérés comme « réellement engagés » par le requérant même s’il ne les a pas encore payés, à condition que ces honoraires sont recouvrables selon le droit interne (voir Fadeïeva c. Russie, no 55723/00, §§ 146-147, CEDH 2005‑IV). En l’espèce et compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable d’accorder les sommes indiquées dans la colonne « Satisfaction équitable accordée » de l’Annexe no 2.

D. Intérêts moratoires

68. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR , À L’UNANIMITÉ,

1. Décide de joindre les requêtes;

2. Déclare les requêtes recevables quant aux griefs, tirés de l’article 6 § 1 de la Convention, relatifs à l’absence de convocation des requérants aux audiences d’appel et de la participation du parquet dans les procédures civiles et irrecevables pour le surplus ;

3. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention à raison de l’absence de convocation des requérants aux audiences d’appel ;

4. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention à raison de la participation du parquet en faveur des défendeurs dans les procédures civiles (requêtes nos 59954/09 et 1162/10) ;

5. Dit

a) que l’État défendeur doit verser aux requérants, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes :

i) à M. Mikryukov (requête no 34841/06), 1 500 EUR (mille cinq cents euros) pour dommage moral ;

ii) à M. Tkachev (requête no 59954/09), 1 950 EUR (mille neuf cent cinquante euros) pour dommage moral ;

iii) à M. Oleynik (requête no 746/10), 1 500 EUR (mille cinq cents euros) pour dommage moral ;

iv) à M. Slavnyy (requête no 1162/10), 1 950 EUR (mille neuf cent cinquante euros) pour dommage moral et 455 EUR (quatre cent cinquante-cinq euros) pour frais et dépens ;

v) à M. Dmitriyev (requête no 1898/10), 1 253 EUR (mille deux cent cinquante-trois euros) pour dommage moral,

plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par les requérants, ces sommes étant à convertir en roubles russes au taux applicable à la date du règlement ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

6. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 31 juillet 2012, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Søren NielsenNina Vajić
GreffierPrésidente

ANNEXE No 1

No

|

Requête No

|

Introduite le

|

Requérant, date de naissance, lieu de résidence

|

Nature du litige

|

Décisions des juridictions nationales

---|---|---|---|---|---

1.
|

34841/06

|

10/07/2006

|

Andrey Aleksandrovich MIKRYUKOV

04/10/1980

Tcheliabinsk

|

Litige de propriété

|

Le 31 mars 2005, un huissier de justice effectua une saisie de certains biens immobiliers dans le cadre de la procédure d’exécution d’un jugement rendu au bénéfice d’une société privée. Le requérant contesta devant les tribunaux internes la légalité de cette décision en prétendant que ces biens immobiliers constituaient sa propriété.

Le 17 novembre 2005, ayant examiné l’affaire au fond, le tribunal du district Iglinskiy de la République de Bachkortostan débouta le requérant et constata que l’intéressé aurait dû intenter une action civile contre la société privée pour établir son droit de propriété à l’égard de ces biens.

Le 17 janvier 2006, la Cour suprême de la République du Bachkortostan confirma en appel le jugement rendu. Le requérant fut absent à l’audience d’appel.

Le requérant intenta une action civile contre la société privée. Le 5 mai 2006, le tribunal du district Iglinskiy de la République du Bachkortostan donna gain de cause au requérant et ordonna de lever la saisie.

2.
|

59954/09

|

02/03/2009

|

Yuriy Timofeyevich TKACHEV

10/01/1942

Volzhskiy, région de Volgograd

|

Litige concernant des allocations sociales

|

Le requérant intenta une action contre le fonds d’assurance sociale et une entreprise privée afin d’obtenir le paiement d’allocations sociales.

Le procureur intervint et demanda de débouter le requérant.

Le 29 mai 2008, le tribunal municipal de Volzhskiy (région de Volgograd) débouta le requérant de sa demande.

Le 4 septembre 2008, la cour régionale de Volgograd entendit un autre procureur et confirma en appel le jugement en l’absence du requérant.

3.
|

746/10

|

23/12/2009

|

Denis Petrovich OLEYNIK

15/04/1980

Tioumen

|

Litige du travail, reclassement après un licenciement

|

Le 13 mars 2009, le tribunal du district Leninskiy de Tioumen donna partiellement gain de cause au requérant et ordonna son reclassement.

Le 4 mai 2009, la cour régionale de Tioumen annula le jugement en l’absence du requérant et le débouta de sa demande.

4.
|

1096/10

|

12/12/2009

|

Aida Grachikovna SHELEPOVA

08/05/1958

Kislovodsk, région de Stavropol

|

Litige du travail, reclassement après un licenciement

|

Le 28 avril 2009, le tribunal du district Promychlennyy de Stavropol débouta la requérante de sa demande de la reclasser après un licenciement.

Le 15 septembre 2009, la cour régionale de Stavropol confirma en appel le jugement en l’absence de la requérante.

5.
|

1162/10

|

07/12/2009

|

Vyacheslav Alekseyevich SLAVNYY

20/03/1963

Volgograd

|

Litige du travail, reclassement après un licenciement

|

Le requérant intenta une action contre le service fédéral d’exécution des peines – son ancien employeur – afin d’être reclassé après un licenciement.

Le procureur intervint et demanda de débouter le requérant.

Le 26 février 2009, le tribunal du district Tsentralnyy de Volgograd débouta le requérant de sa demande.

Le 11 juin 2009, la cour régionale de Volgograd entendit un autre procureur et confirma en appel le jugement en l’absence du requérant.

6.
|

1898/10

|

29/11/2009

|

Yevgeniy Borisovich DMITRIYEV

02/10/1956

Kostomoukcha, République de Carélie

|

Litige concernant le bornage du terrain du requérant et la propriété

|

Le 14 janvier 2009, le tribunal municipal de Kostomoukcha (République de Carélie) donna gain de cause au requérant et reconnut son droit de propriété sur le terrain.

Le 3 mars 2009, la Cour suprême de la République de Carélie annula le jugement et renvoya l’affaire pour un nouvel examen au fond.

Le 21 avril 2009, le tribunal municipal de Kostomoukcha (République de Carélie) débouta le requérant de sa demande.

Le 9 juin 2009, la Cour suprême de la République de Carélie confirma en appel le jugement en l’absence du requérant.

ANNEXE No 2

No

|

Requête No

|

Requérant

|

Satisfaction demandée

|

Satisfaction proposée par le Gouvernement

|

Satisfaction équitable accordée (EUR)

---|---|---|---|---|---

1.

|

34841/06

|

Andrey Aleksandrovich MIKRYUKOV

|

EUR 2 000 – dommage moral

|

EUR 1 000

|

dommage moral : 1 500

2.

|

59954/09

|

Yuriy Timofeyevich TKACHEV

|

RUB 111 978,98 – dommage matériel

EUR 5 000 – dommage moral

RUB 61 441 – frais et dépens

|

EUR 1 000

|

dommage moral : 1 950

3.

|

746/10

|

Denis Petrovich OLEYNIK

|

RUB 682 172,80 – dommage matériel

RUB 2 000 000 – dommage moral

RUB 50 000 – frais et dépens

|

EUR 1 000

|

dommage moral : 1 500

4.

|

1096/10

|

Aida Grachikovna SHELEPOVA

|

ne formule pas de demande de satisfaction équitable

|

néant

|

néant

5.

|

1162/10

|

Vyacheslav Alekseyevich SLAVNYY

|

EUR 4 000 – dommage moral

RUB 28 976,36 – frais et dépens

|

EUR 1 000

RUB 6 558,92 – frais et dépens

|

dommage moral : 1 950

frais et dépens : 455

6.

|

1898/10

|

Yevgeniy Borisovich DMITRIYEV

|

RUB 50 000 – dommage moral

RUB 392 000 – frais et dépens

|

EUR 1 000

|

dommage moral : 1 253


Synthèse
Formation : Cour (premiÈre section)
Numéro d'arrêt : 001-112577
Date de la décision : 31/07/2012
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure civile;Article 6-1 - Procès équitable);Violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure civile;Article 6-1 - Procès équitable;Egalité des armes)

Parties
Demandeurs : MIKRYUKOV ET AUTRES
Défendeurs : RUSSIE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SAFARGALIYEVA L.L. ; RYABIKIN S.V.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

Source

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