SUR LA RECEVABILITÉ de la requête N° 28346/95 présentée par Wladyslaw PIETRZYK contre la Pologne __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 26 février 1997 en présence de Mme G.H. THUNE, Présidente MM. J.-C. GEUS G. JÖRUNDSSON J.-C. SOYER H. DANELIUS F. MARTINEZ M.A. NOWICKI I. CABRAL BARRETO D. SVÁBY P. LORENZEN E. BIELIUNAS E.A. ALKEMA Mme M.-T. SCHOEPFER, Secrétaire de la Chambre ; Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 19 juin 1995 par Wladyslaw PIETRZYK contre la Pologne et enregistrée le 29 août 1995 sous le N° de dossier 28346/95 ; Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Le requérant, ressortissant polonais, né en 1948, est un prêtre catholique et réside à Cracovie. Devant la Commission il est représenté par Maître Adam Wloch, avocat au barreau de Cracovie. Les faits, tels qu'ils ont été présentés par le requérant, peuvent se résumer comme suit. Le procureur du district de Cracovie-Centre (Prokuratura Rejonowa Kraków-Sródmiescie), par décision du 14 décembre 1993, plaça le requérant en détention provisoire pour abus de biens privés. En tant que directeur de la filiale de la société d'assurances "Compensa" sise à Cracovie, le requérant s'était porté garant, à plusieurs reprises, des engagements contractés par un tiers (M. M.). Il n'aurait pas rempli ses obligations de caution en se soustrayant aux injonctions de payer. A la suite de l'appel du requérant interjeté en décembre 1993, le tribunal du district de Cracovie-Centre (S*d Rejonowy Kraków-Sródmiescie), le 23 décembre 1993, confirma la décision du procureur. Le 10 mars 1994, le procureur régional (Prokuratura Wojewódzka) décida de prolonger la détention du requérant jusqu'au 13 juin 1996 en raison de la complexité de l'affaire, décision confirmée le 24 mars 1994 par le tribunal régional de Cracovie. Le 4 février 1994, le tribunal du district (S*d Rejonowy) de Cracovie-Centre rejeta le recours du requérant, décision confirmée le 24 mars 1994 par le tribunal régional (S*d Wojewódzki) de Cracovie- Centre. Par lettre du 7 juin 1994, l'évêché proposa de se porter garant du requérant en échange de sa mise en liberté. Le 8 août 1994, le requérant fit une demande de mise en liberté, rejetée par le tribunal régional par décision du 29 septembre 1994, confirmée le 26 octobre 1994 par la cour d'appel (S*d Apelacyjny). Une seconde demande de mise en liberté du 31 août 1994 fut rejetée par le tribunal régional le 27 juin 1995, décision confirmée par la cour d'appel le 27 juillet 1995. Les décisions de la cour d'appel et du tribunal régional, des 26 octobre 1994 et 27 juin 1995, relevèrent expressément le fait qu'aucune date d'audience n'avait encore été fixée, ce qui paraissait "alarmant". Toutefois, les juridictions retinrent essentiellement que le requérant présentait une menace pour l'ordre public, car ce type de délit connaissait une croissance exceptionnelle dans le pays. Le procès du requérant en première instance eut lieu le 5 décembre 1995. Il fut condamné à une peine de trois ans de prison et à une amende. En l'absence d'appel, cette décision est devenue définitive. Le requérant a été remis en liberté le 12 janvier 1996.
GRIEFS
1. Le requérant soutient en premier lieu que la décision de mise en détention provisoire aurait enfreint l'interdiction de priver quiconque de sa liberté pour inexécution d'une obligation contractuelle, droit garanti par l'article 1 du Protocole N° 4 à la Convention. Il fait valoir qu'il se serait seulement porté caution sans dessein frauduleux.
2. Le requérant se plaint en second lieu de la "procédure d'une lenteur insupportable", invoquant en substance l'article 6 par. 1 de la Convention.
EN DROIT
1. Le requérant soutient en premier lieu que sa mise en détention provisoire en raison de sa seule qualité de caution serait contraire à l'article 1 du Protocole N° 4 (P4-1), qui se lit comme suit : "Nul ne peut être privé de sa liberté pour la seule raison qu'il n'est pas en mesure d'exécuter une obligation contractuelle." La Commission constate toutefois que la détention du requérant a résulté non de l'inexécution d'une obligation contractuelle, mais de la décision du procureur, confirmée par le tribunal compétent, dans le cadre d'une procédure pénale. Il s'ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée, au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
2. Le requérant se plaint en second lieu de la durée de la procédure et invoque en substance l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...)". La Commission considère qu'en l'état actuel du dossier, elle n'est pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de porter cette partie de la requête à la connaissance du Gouvernement polonais, en application de l'article 48 par. 2 b) de son Règlement intérieur. Par ces motifs, la Commission, à la majorité, AJOURNE l'examen du grief du requérant concernant la durée de la procédure, DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE pour le surplus. M.-T. SCHOEPFER G.H. THUNE Secrétaire Présidente de la Deuxième Chambre de la Deuxième Chambre