ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre élargie)
2 juillet 2015 ( *1 )
«Marque communautaire — Procédure d’opposition — Demande de marque communautaire verbale ALEX — Marques nationales verbales et figurative ALEX — Motif relatif de refus — Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 — Recevabilité du recours devant la chambre de recours — Obligation de motivation — Article 75 du règlement no 207/2009 — Absence de similitude entre les produits et les services désignés par les marques en conflit — Absence de risque de confusion»
Dans l’affaire T‑657/13,
BH Stores BV, établie à Curaçao (Territoire autonome des Pays-Bas), représentée par Me T. Dolde, avocat, et M. M. Hawkins, solicitor,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant
Alex Toys LLC, établie à Wilmington, Delaware (États-Unis), représentée par Mes G. Macías Bonilla, P. López Ronda, G. Marín Raigal et E. Armero, avocats,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 16 septembre 2013 (affaire R 1950/2012‑2), relative à une procédure d’opposition entre BH Stores BV et Alex Toys LLC,
LE TRIBUNAL (septième chambre élargie),
composé de MM. M. Jaeger, président, M. van der Woude (rapporteur), Mme M. Kancheva, MM. C. Wetter et I. Ulloa Rubio, juges,
greffier : M. J. Plingers, administrateur,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 11 décembre 2013,
vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 2 avril 2014,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 21 mars 2014,
vu le renvoi de la présente affaire devant la septième chambre élargie du Tribunal,
vu l’empêchement d’un des membres de la chambre de siéger et la décision du président du Tribunal de se désigner, en application de l’article 32, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, pour compléter la chambre,
à la suite de l’audience du 10 mars 2015,
rend le présent
Arrêt
1 Le 27 décembre 2007, Panline U.S.A. Inc. (à laquelle a été substituée l’intervenante, Alex Toys LLC, à la suite de la cession de la demande de marque communautaire, le 21 mai 2013) a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement
(CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est la marque verbale ALEX.
3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 16, 20 et 28, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
— classe 16 : « Tampons en caoutchouc et tampons encreurs ; boîtes à stencil ; règles ; cartes d’anniversaire à surprise ; feutres marqueurs ; nécessaires de peinture pour enfants contenant de la peinture au doigt, de la gouache, des aquarelles, des pinceaux, des godets, et des tabliers pour enfants ; effaceurs pour tableau ; craie ; pastels en cire et en matières plastiques ; colles pour la papeterie ou le ménage ; ciseaux pour enfants ; crayons de couleur ; papier origami ; blocs à dessin ;
livres de coloriage et de découpage ; livres de coloriage ; et livres d’activités pour enfants » ;
— classe 20 : « Meubles pour enfants » ;
— classe 28 : « Trousses d’artisanat d’art pour enfants pour fabriquer des bijoux, des colliers de perles, des cartes, des dioramas sur la jungle, des chaînes porte-clés, des accessoires d’habillement, de pratiquer l’art de l’origami et du kirigami, de fabriquer des autocollants, des objets en paillettes, de pratiquer l’art avec du sable, de fabriquer des sculptures d’animaux, des maquettes, des collages, des potions, des parfums personnels, des gels de bain, des agendas personnels et des
albums-souvenirs de vacances, des albums de photographies, des motifs sur soie, des accessoires de mode (y compris des cordons, perles et perles fluorescentes) ; trousses d’artisanat d’art pour enfants destinées à la peinture, au dessin, à la peinture au pochoir, au coloriage, au modelage, à la confection de dinosaures et au dessin et à l’enseignement de l’alphabet et des nombres (en utilisant des cartes-éclair, des nombres et lettres magnétiques en matières plastiques) ; trousses de bricolage
en papier ; kits pour fêtes costumées ; trousses pour fabriquer des montres et des bracelets de montres ; tabliers pour enfants vendus en tant que pièces de trousses d’artisanat d’art ; jouets pour le bain pour enfants ; et jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants ».
4 La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 21/2008, du 26 mai 2008.
5 Le 26 août 2008, Arcandor Akt (à laquelle a été substituée la requérante, BH Stores BV, à la suite d’un transfert ultérieur), a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement no 40/94 tel que modifié (devenu article 41 du règlement no 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.
6 L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :
— La marque allemande verbale ALEX, déposée le 2 septembre 1982, enregistrée le 3 juin 1983, renouvelée le 3 septembre 2002 et le 1er octobre 2012, sous le numéro 1049274, désignant les « articles de sport » compris dans la classe 28 ;
— La marque allemande verbale ALEX, déposée le 5 juillet 1990, enregistrée le 15 janvier 1992 et renouvelée 1er août 2010, sous le numéro DD 648968, désignant le « linge de toilette, tel que les serviettes pour les mains, les serviettes de bain, les gants de toilette et les serviettes pour invités » compris dans la classe 24 et les « articles de sport » compris dans la classe 28 ;
— La marque allemande figurative, déposée le 4 mai 1999, enregistrée le 2 août 1999 et renouvelée le 1er juin 2009, sous le numéro 39925705, désignant les « bicyclettes » comprises dans la classe 12, les « sacs, sacs à dos, sacs de voyage et valises » compris dans la classe 18 et les « articles de sport » compris dans la classe 28, reproduite ci-après :
Image
7 Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009] et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 40/94 (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009).
8 Le 7 juin 2011, la requérante a déposé la preuve de l’usage de ses marques antérieures.
9 Le 16 mai 2012, l’intervenante a limité la liste des produits compris dans la classe 28 en indiquant, à la suite de l’énumération de ces produits, une nouvelle mention, de la façon suivante :
— classe 28 : « […] jouets pour le bain pour enfants ; et jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants ; aucun des produits précités n’incluant les articles de sport ».
10 Le 3 octobre 2012, la division d’opposition a rejeté dans son intégralité l’opposition.
11 Le 22 octobre 2012, la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’opposition, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009.
12 Par décision du 16 septembre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a confirmé la décision de la division d’opposition. La chambre de recours a indiqué qu’elle limitait son examen au motif d’opposition tirée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, étant donné que la requérante ne présentait plus d’argumentation sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement. Elle a également indiqué que la requérante ne
contestait pas que les marques antérieures avaient uniquement été utilisées pour des « articles de sport », et que l’opposition était limitée aux « jouets pour le bain des enfants » et aux « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants », compris dans la classe 28. La chambre de recours a estimé que le public pertinent était composé des membres du grand public en Allemagne. Elle a indiqué qu’il n’était pas contesté que, en ce qui concernait les marques verbales antérieures,
les marques en conflit étaient identiques et que, en ce qui concernait la marque figurative antérieure, les marques en conflit étaient similaires. La chambre de recours a estimé, en se référant à l’arrêt du 4 juin 2013, i‑content/OHMI – Decathlon (BETWIN) [T‑514/11, Rec (Extraits), EU:T:2013:291, points 34 à 39], que les « articles de sport » et les « jouets pour le bain pour enfants ; et jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants » étaient des produits différents et que,
dès lors, il ne pouvait exister aucun risque de confusion, puisqu’une condition indispensable à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, à savoir l’identité ou la similitude des produits, n’était pas satisfaite.
Conclusions des parties
13 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler la décision attaquée ;
— condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux exposés dans le cadre de la procédure devant la division d’opposition et devant la deuxième chambre de recours de l’OHMI.
14 L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours dans son intégralité ;
— condamner la requérante aux dépens exposés par l’OHMI et par l’intervenante, y compris ceux exposés par l’intervenante dans le cadre de la procédure d’opposition et de recours devant l’OHMI.
15 Lors de l’audience, à la suite d’une question posée par le Tribunal, l’intervenante a indiqué demander au Tribunal, à titre principal, d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle a déclaré le recours de la requérante devant la chambre de recours recevable et, à titre subsidiaire, de rejeter le recours et de confirmer la décision attaquée dans l’hypothèse où le Tribunal confirmerait la recevabilité du recours devant la chambre de recours.
En droit
Sur la recevabilité du recours devant la chambre des recours
16 L’intervenante fait valoir que le recours formé devant la chambre de recours était irrecevable, en raison de la violation du délai de quatre mois à compter de la date de notification de la décision pour déposer l’exposé des motifs de recours, prévu par l’article 60 du règlement no 207/2009. Elle fait valoir que la notification de la décision de la division d’opposition a été faite à la requérante le 3 octobre 2012 et que cette dernière a déposé les motifs de son recours le 7 février 2013, soit
après l’expiration du délai imparti, délai qui aurait expiré selon l’intervenante le 4 février 2013 (le 3 février 2013 étant un dimanche). Elle fait encore valoir que cette irrégularité a été passée sous silence dans la décision attaquée.
17 Premièrement, il convient de constater que la question de la recevabilité du recours n’a pas été omise par la chambre de recours, puisqu’elle a indiqué, au point 17 de la décision attaquée, que le recours était conforme aux dispositions des articles 58, 59 et 60 du règlement no 207/2009 et de la règle 48, paragraphe 1, du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement no 40/94 (JO L 303, p. 1) et qu’il était, dès lors, recevable.
18 Deuxièmement, s’agissant de la question de savoir si l’exposé des motifs en date du 7 février 2013 a été déposé dans le délai prévu par l’article 60 du règlement no 207/2009, il y a lieu de se référer en l’espèce à l’article 7, paragraphe 4, de la décision EX‑11‑3 du président de l’OHMI, du 18 avril 2011, concernant les communications électroniques de et vers l’OHMI, qui était applicable au moment où la décision de la division d’opposition a été rendue. Cette disposition est libellée comme suit :
« Sauf détermination exacte de la date de notification, celle-ci est réputée effectuée le cinquième jour civil suivant la date de création du document par les systèmes de l’[OHMI]. La date de création du document est indiquée sur celui-ci. Le document est déposé dans MAILBOX le plus tôt possible avant la fin de ce délai de cinq jours. »
19 La requérante et l’OHMI soutiennent que, en l’espèce, la date à laquelle la décision de la division d’opposition a été créée par les systèmes de l’[OHMI] est celle du 3 octobre 2012 et que, dès lors, la notification de la décision de la division d’opposition est réputée avoir été effectuée cinq jours après, soit le 8 octobre 2012.
20 À cet égard, il y a lieu de relever que la décision de la division d’opposition date du 3 octobre 2012, de sorte que la création du document par les systèmes de l’OHMI au titre de l’article 7, paragraphe 4, de la décision EX‑11‑3 n’a pu avoir lieu avant.
21 En vertu de la règle 70, paragraphes 1 et 2, du règlement no 2868/95, lue conjointement avec l’article 60, dernière phrase, du règlement no 207/2009, en l’espèce, le délai pour déposer un mémoire exposant les motifs de recours a par conséquent expiré au plus tôt le 8 février 2013.
22 Partant, l’exposé des motifs en date du 7 février 2013 a été déposé dans le délai requis et c’est à bon droit que la chambre de recours a déclaré le recours de la requérante recevable.
23 Il ressort de ce qui précède que le moyen de l’intervenante tiré de l’irrecevabilité du recours devant la chambre de recours doit être rejeté.
Sur la recevabilité des pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal
24 L’intervenante considère que le Tribunal ne doit pas tenir compte des nouveaux éléments de preuve de la requérante, en ce que ces éléments de preuve sont soumis pour la première fois dans le cadre de la présente procédure et en ce que leur teneur n’est pas de nature à modifier le raisonnement et les conclusions figurant dans la décision attaquée.
25 Les annexes 14 à 18 de la requête, extraites de sites Internet, produites pour la première fois devant le Tribunal, et dont des extraits sont repris dans le corps de la requête, ne peuvent être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement no 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des
documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée]. Il en est de même en ce qui concerne l’annexe 9 du mémoire en intervention.
26 Les annexes 13 et 19 de la requête, bien qu’elles aient été produites pour la première fois devant le Tribunal, ne sont pas des preuves proprement dites, mais concernent la pratique décisionnelle de l’OHMI et la jurisprudence du juge de l’Union européenne, à laquelle, même si elle est postérieure à la procédure devant l’OHMI, une partie a le droit de se référer [voir, en ce sens, arrêts ARTHUR ET FELICIE, point 25 supra, EU:T:2005:420, point 20, et du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI –
Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, Rec, EU:T:2005:438, point 16]. En effet, ni les parties ni le Tribunal lui-même ne sauraient être empêchés de s’inspirer, dans l’interprétation du droit de l’Union, d’éléments tirés de la jurisprudence du juge de l’Union, nationale ou internationale. Une telle possibilité de se référer à des jugements du juge de l’Union, nationaux ou internationaux n’est pas visée par la jurisprudence selon laquelle le recours porté devant le Tribunal vise au
contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours au regard des éléments présentés par les parties devant celles-ci, dès lors qu’il ne s’agit pas de reprocher à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte des éléments de fait dans un arrêt du juge de l’Union, ou un arrêt national ou international précis, mais qu’il s’agit d’invoquer des jugements à l’appui d’un moyen tiré de la violation par la chambre de recours d’une disposition du règlement no 207/2009 [voir, en ce sens,
arrêt du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT), T‑277/04, Rec, EU:T:2006:202, points 70 et 71].
Sur le fond
27 À l’appui de son recours, la requérante soulève deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’obligation de motivation prévue à l’article 75 du règlement no 207/2009, et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.
Sur le moyen tiré de la violation de l’article 75 du règlement no 207/2009
28 Par son premier moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a violé son obligation de motivation en ce que, au lieu d’examiner les faits et arguments avancés par les parties dans les procédures d’opposition et de recours, et d’exposer les faits décisifs et les considérations juridiques ayant conduit à la décision attaquée, elle s’est contentée de renvoyer à l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), en recopiant partiellement les points 36 à 38 de celui-ci, pour conclure que
les produits en cause étaient différents, sans examiner si les faits et le raisonnement sous-tendant cet arrêt étaient également applicables à la présente espèce.
29 En vertu de l’article 75, première phrase, du règlement no 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Il est de jurisprudence constante que cette obligation a la même portée que celle consacrée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et que la motivation exigée par ledit article doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. En effet, l’obligation de motivation des décisions de l’OHMI a pour double objectif de permettre, d’une part,
aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [arrêts du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec, EU:C:2004:649, points 64 et 65, et du 28 novembre 2013, Herbacin cosmetic/OHMI – Laboratoire Garnier (HERBA SHINE), T‑34/12, EU:T:2013:618, point 42].
30 Il ressort de la jurisprudence que la question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [voir arrêt du 26 octobre 2011, Bayerische Asphaltmischwerke/OHMI – Koninklijke BAM Groep (bam), T‑426/09, EU:T:2011:633, point 74 et jurisprudence citée].
31 Il ressort d’une jurisprudence constante qu’il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [voir arrêt du
9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec, EU:T:2008:268, point 55 et jurisprudence citée]. Il suffit que les chambre de recours exposent les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir arrêt du 30 juin 2010, Matratzen Concord/OHMI – Barranco Schnitzler (MATRATZEN CONCORD), T‑351/08, EU:T:2010:263, point 18 et jurisprudence citée].
32 En l’espèce, il ressort clairement du point 25 de la décision attaquée que, en premier lieu, la chambre de recours a estimé que la conclusion de l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), selon laquelle il n’existe aucune similitude entre les « articles de sport » et les « jouets, jeux et articles de jeu » était applicable, « par extension », aux produits en conflit en l’espèce, à savoir les « articles de sport », les « jouets pour le bain pour enfants » et les « jouets d’activités pour
l’éducation et le développement des enfants ».
33 En deuxième lieu, la chambre des recours a repris les motifs exposés dans l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), en précisant, au point 25 de la décision attaquée, qu’elle les estimait pertinents pour réfuter de façon définitive les arguments avancés par l’opposante en l’espèce.
34 Au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que, même si un rapprochement pourrait être établi entre les « articles de sport », d’une part, et certains jouets (par exemple les « jouets pour le bain pour enfants » et les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants »), d’autre part, dans la mesure où certains « articles de sport » peuvent être utilisés en tant que jouets et certains jouets peuvent également constituer des « articles de sport », une
telle hypothèse ne remet pas en cause le fait que ces deux catégories de produits ont, en substance, une destination différente, à savoir entraîner le corps par l’exercice physique pour les « articles de sport », amuser les jeunes enfants pour les « jouets pour le bain » et amuser et éduquer les enfants pour les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants ».
35 Par ailleurs, la chambre de recours a indiqué, au point 27 de la décision attaquée, que, bien qu’il soit possible que les « articles de sport » soient destinés aux enfants sous forme de jouets ou qu’ils soient confectionnés pour servir de produits complémentaires pour les jeux, de sorte qu’ils peuvent être fabriqués par les mêmes entreprises et proposés par les mêmes canaux de distribution, il s’agit de catégories de produits qui, de manière générale, sont fabriqués par des entreprises
spécialisées et se vendent dans des magasins spécialisés ou bien qui, s’agissant des grandes surfaces, sont vendus dans des départements spécialisés qui, même s’ils peuvent être proches, sont néanmoins distincts.
36 Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, les faits décisifs et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée sont clairement exposés dans la décision attaquée et permettent à la requérante de connaître les justifications de la décision attaquée afin de défendre ses droits, d’une part, et au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité, d’autre part.
37 Au demeurant, rien ne s’oppose, en principe, à ce que la chambre de recours fasse siens les motifs d’un arrêt du juge de l’Union, si elle estime que ceux-ci sont applicables au cas d’espèce. Ainsi, s’il est vrai que la chambre de recours a extensivement repris les points 36 à 38 de l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), elle a néanmoins clairement indiqué quels étaient les faits et le raisonnement sous-tendant cet arrêt qui étaient à son avis applicables à la présente espèce.
38 En troisième lieu, les autres arguments de la requérante ne permettent pas non plus de conclure que la décision attaquée viole l’article 75, première phrase, du règlement no 207/2009.
39 D’abord, la requérante fait valoir que, dans l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), le Tribunal avait déploré une absence de preuves soutenant le raisonnement de la décision attaquée, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.
40 Or, il convient de relever que la question de savoir si l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), est applicable en l’espèce, relève de l’examen du deuxième moyen, c’est-à-dire de l’examen au fond de la légalité de la décision attaquée, et non de l’examen de la motivation de la décision attaquée.
41 Ensuite, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a violé l’obligation qui lui incombait de prendre en compte les arguments des parties faisant référence aux décisions antérieures de l’OHMI et de motiver sa décision par rapport à cette pratique décisionnelle. Elle critique également l’absence de prise en compte de l’arrêt du 16 septembre 2013, Knut IP Management/OHMI – Zoologischer Garten Berlin (KNUT – DER EISBÄR) (T‑250/10, ci-après « arrêt KNUT », EU:T:2013:448).
42 À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que les décisions que les chambres de recours de l’OHMI sont amenées à prendre, en vertu du règlement no 207/2009, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur celui d’une
pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec, EU:C:2007:252, points 64 et 65, et ARTHUR ET FELICIE, point 25 supra, EU:T:2005:438, point 71).
43 En l’espèce, au vu de la jurisprudence visée aux points 31 et 42 ci-dessus, et dans la mesure où la chambre de recours a suffisamment exposé les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée, elle n’était pas tenue d’adopter une motivation spécifique pour justifier sa décision par rapport aux décisions antérieures de l’OHMI citées dans les écritures des parties ou par rapport à la jurisprudence de l’Union.
44 Au surplus, s’agissant plus spécifiquement de l’argument relatif à l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), il convient de constater que, en supposant que la chambre de recours ait pu prendre connaissance de cet arrêt en temps utile, on ne saurait exiger d’elle qu’elle commente tout arrêt du juge de l’Union, eu égard notamment au fait qu’elle s’est clairement exprimée en faveur de l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), qui concerne le même sujet que le cas d’espèce.
45 Partant, le premier moyen de la requérante doit être rejeté.
Sur le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009
46 Selon la requérante, la chambre de recours a conclu a tort à l’absence de similitude entre les produits concernés ainsi qu’à l’absence d’un risque de confusion.
47 Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de
confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement no 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.
48 Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de
l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].
49 Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006,
Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].
50 En l’espèce, la chambre de recours a estimé que le public pertinent comprenait les membres du grand public en Allemagne, l’État membre dans lequel les marques antérieures sont protégées, sans que cela soit contesté par les parties.
51 De même, il n’est pas contesté que, en ce qui concerne les marques verbales antérieures, les marques en conflit sont identiques et, en ce qui concerne la marque figurative antérieure, les marques en conflit sont similaires.
52 Il y a lieu d’entériner ces appréciations de la chambre de recours.
– Sur la comparaison des produits.
53 Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec, EU:C:1998:442, point 23). D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les
canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].
54 En l’espèce, il convient de comparer « les jouets pour le bain pour enfants » et les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants », désignés par la marque demandée, avec les « articles de sport » désignés par les marques antérieures.
55 Avant d’aborder les arguments au principal, il convient de constater que, de manière générale, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir identifié les produits relevant de la catégorie des « jouets pour le bain pour enfants » et « jouets d’activités pour [l’éducation et le développement des] enfants ». Il suffira de rappeler à cet égard qu’il ressort de la jurisprudence que, les modalités de commercialisation particulières des produits désignés par les marques pouvant varier
dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques [arrêts du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, EU:C:2007:171, point 59, et du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, Rec, EU:T:2008:319, point 63]. La chambre de recours n’était donc pas tenue d’identifier
les produits spécifiques visés par la marque demandée, dans la mesure où ceux-ci étaient susceptibles de varier.
56 À titre principal, la requérante soulève quatre catégories d’arguments visant à démontrer que les produits en cause sont similaires : leur nature, leur destination, leurs canaux de distribution et de fabrication, ainsi que la pratique décisionnelle de l’OHMI.
57 En premier lieu, s’agissant de la nature des produits, la requérante fait valoir que les « articles de sport » visés par les marques antérieures et les « jouets pour le bain pour enfants » et « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants », visés par la marque demandée, sont de même nature, puisqu’ils ont souvent la même composition (cuir, plastique, bois ou métal), que leur utilisation est la même, car elle nécessite la force physique, et qu’ils ont un même état physique
solide. La requérante fait également valoir, en s’appuyant sur l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), que bon nombre d’« articles de sport » sont proposés sous une forme simplifiée et une taille réduite comme jouets d’activités pour les enfants, de sorte qu’il est souvent difficile de différencier les « articles de sport » des jouets d’activités (voir, en ce sens, arrêt KNUT, point 41 supra, EU:T:2013:448, point 47).
58 Premièrement, s’agissant de l’argument de la requérante quant à la composition des produits en cause, ainsi qu’aux preuves qu’elle a présentées à ce sujet devant l’OHMI, il y a lieu de constater que le fait que les « articles de sport » désignés par les marques antérieures et les jouets désignés par la marque demandée puissent être composés des mêmes matériaux, au demeurant extrêmement variés, ne suffit pas, à lui seul, pour établir une similitude des produits, au vu de la grande variété des
produits susceptibles d’être fabriqués en cuir, plastique, bois, ou métal. En effet, une même matière ou un même matériau peut être utilisé pour fabriquer une grande gamme de produits tout à fait différents.
59 Deuxièmement, contrairement à ce que soutient la requérante, l’existence d’une forme simplifiée et d’une taille réduite pour les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants » permet justement de les distinguer des « articles de sport », et non pas de les confondre avec ces derniers. En l’espèce, les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants », comme l’intitulé l’indique, sont destinés à des enfants relativement jeunes et se distinguent des
« articles de sport » (même s’ils les imitent) par une technicité moindre, une apparence différente (taille réduite, faible poids), une sécurité adaptée aux enfants conformément à la directive 2009/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 18 juin 2009, relative à la sécurité des jouets (JO L 170, p. 1), ainsi qu’un prix généralement inférieur. Un coffret de golf miniature, pour reprendre un exemple de produits désignés par la marque demandée cité par la requérante, sera adapté à la taille
des enfants et les clubs manqueront de la précision des vrais clubs de golf et seront en plastique léger. Ce raisonnement s’applique a fortiori aux « jouets pour le bain pour enfants », qui n’ont pas d’équivalent « sportif ».
60 Troisièmement, s’agissant des arguments selon lesquels les produits en cause sont utilisés de la même manière, en ayant recours à la force physique, et partagent un même état physique, de tels faits ne sont en l’espèce pas significatifs, dans la mesure où c’est le cas de nombreux produits ayant une finalité première totalement distincte d’un sport (outils manuels, instruments de nettoyage, de construction, etc.).
61 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que les jouets visés par la marque demandée ont une nature différente de celle des « articles de sport » visés par les marques antérieures.
62 En deuxième lieu, s’agissant de la destination des produits désignés par les marques en conflit, la requérante fait valoir qu’elle est identique, en ce qu’ils sont tous créés dans la perspective d’une activité physique, et d’un divertissement. Elle fait notamment valoir que, comme l’indique l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), il existe un certain « passage continu » entre les « articles de sport », d’une part, et les jeux, d’autre part, dans la mesure, notamment, où il est notoire que
des « articles de sport » s’utilisent pour des jeux et que certains jeux peuvent également être assimilés à des « articles de sport » (arrêt KNUT, point 41 supra, EU:T:2013:448, point 47).
63 Premièrement, ainsi qu’il ressort de l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), lui-même, il n’existe pas, en principe, de rapport d’interchangeabilité et de complémentarité entre, d’une part, les produits « articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes » de la classe 28 et, d’autre part, les « poupées (jouets), jeux ; jouets ; animaux en peluche » de la même classe, dans la mesure où les produits en question ont une destination différente. En effet, tandis que les
articles de gymnastique et de sport sont destinés avant tout à la mise en forme physique, les jeux de même que les jouets ont, en principe, pour fonction de divertir (arrêt KNUT, point 41 supra, EU:T:2013:448, points 44 et 45).
64 En effet, le fait qu’une destination (par exemple l’activité physique) ne soit pas exclusive d’une autre destination (par exemple le loisir) et que deux destinations puissent « s’entremêler » dans un produit, comme le souligne la requérante, n’empêche pas de pouvoir identifier une finalité dominante ou autrement dite « première » dans un produit. L’intervenante fait ainsi remarquer à juste titre que, par « utilisation », il convient d’entendre l’utilisation généralement prévue d’un produit et non
une utilisation détournée ou occasionnelle.
65 Il s’ensuit que l’existence d’un certain « passage continu » ou d’une zone de chevauchement entre deux catégories de produits ayant des destinations en substance différentes ne signifie pas pour autant que l’ensemble des produits concernés par ces catégories de produits soient similaires.
66 Au surplus, il ressort de la jurisprudence que le fait que deux produits peuvent, dans une certaine mesure, satisfaire un même besoin, n’empêche pas que le consommateur pertinent puisse les percevoir comme des produits distincts [voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2008, Coca-Cola/OHMI – San Polo (MEZZOPANE), T‑175/06, Rec, EU:T:2008:212, point 66].
67 En l’espèce, dans la décision attaquée, la chambre de recours a estimé à bon droit que les produits en conflit avaient en substance une destination différente, en se référant aux points 35 et 36 de l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291).
68 Il ressort en effet de l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), que, même s’il n’est pas exclu que, pour certains « articles de sport et de gymnastique », d’une part, et certains « jouets, jeux et articles de jeu », d’autre part, un rapprochement puisse être établi dans la mesure où certains « articles de sport » peuvent être utilisés pour les « jeux » et certains « jeux » peuvent également constituer des « articles de sport », en l’absence d’indications précises des instances de l’OMHI
quant aux produits spécifiques concernés et quant à la manière selon laquelle ils seraient affectés, une telle hypothèse ne remet pas en cause le fait que ces deux catégories de produits ont, en substance, une destination différente. En effet, même si, par leur nature, ces deux catégories de produits sont vouées à divertir le public, elles servent aussi d’autres buts. Les « articles de sport et de gymnastique » sont destinés à entraîner le corps par l’exercice physique, tandis que les « jouets,
jeux et articles de jeu » visent avant tout à amuser leurs utilisateurs (arrêt BETWIN, point 12 supra, EU:T:2013:291, points 35 et 36).
69 De manière encore plus évidente que pour les « jouets, jeux et articles de jeux » concernés dans l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants » visent avant tout à amuser leurs utilisateurs, dans une perspective éducative (apport de connaissances de base sur les mots, lettres, chiffres, etc.) et de développement général, qui peut certes inclure le développement physique, mais pas de manière à faire de la mise en forme
physique leur destination première. À cet égard, la requérante fait valoir que le terme « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants » impliquerait principalement une activité physique. Or, non seulement le terme « activité » peut désigner également une activité intellectuelle, mais l’ajout des mots « pour l’éducation et le développement des enfants » accentue l’idée que l’activité désignée n’a pas une finalité première purement physique, mais au contraire une finalité
avant tout pédagogique.
70 C’est donc à juste titre que la chambre de recours a estimé, au point 26 de la décision attaquée, que les « articles de sport » sont destinés à entraîner le corps par l’exercice physique tandis que les jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants visent à la fois à amuser et à éduquer les enfants.
71 C’est également à bon droit que la chambre de recours a estimé, au point 26 de la décision attaquée, que les « jouets pour le bain » visent « clairement uniquement à amuser les jeunes enfants ». En effet, la finalité de pur amusement des « jouets pour le bain pour enfants » est encore plus évidente que pour les « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants ».
72 Deuxièmement, les produits visés par les marques en conflit ne sont pas concurrents, contrairement à ce que fait valoir la requérante.
73 Celle-ci argue notamment que les consommateurs peuvent facilement permuter ce type de produits (elle donne l’exemple de ballons ou de kits de volleyball de plage).
74 Or, il ressort des points 61, 70 et 71 ci-dessus que, la nature et la destination des produits visés par les marques en conflit étant différentes, ils ne sont pas interchangeables et donc pas concurrents. En tout état de cause, s’il peut parfois, le cas échéant, exister une certaine interchangeabilité entre les produits en cause, elle n’existe alors que dans un sens, c’est-à-dire que seuls les consommateurs de certains jouets désignés par la marque demandée sont susceptibles de se tourner vers
les « articles de sport » correspondants désignés par les marques antérieures, en cas de hausse du prix desdits jouets. Il est évident que, même si le prix des « articles de sport » augmentait, les consommateurs d’« articles de sport » ne se tourneraient pas pour autant vers ces jouets afin de remplacer de véritables « articles de sport ».
75 Troisièmement, c’est à tort que la requérante fait valoir que, dans l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), le Tribunal n’a pas catégoriquement exclu que les produits en cause aient une destination similaire, mais s’est contenté de déclarer qu’une telle similitude ne pouvait être présumée « en l’absence d’indications précises […] quant aux produits spécifiques concernés et quant à la manière selon laquelle ils seraient affectés ». À cet égard, il y a lieu de constater que cette précision,
au point 36 de l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), n’a pas d’effet sur la portée de l’affirmation contenue au sein du même point, selon laquelle les « articles de sport » et les « jeux, jouets et articles de jeu », ont, en substance, une destination différente. Le Tribunal a seulement rappelé par-là que l’OHMI n’avait pas apporté la preuve contraire. Par ailleurs, il ressort du point 55 ci-dessus que l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques doit se faire au
regard de la description des produits issue des demandes d’enregistrement des marques.
76 En tout état de cause, en l’espèce, la requérante a fourni des preuves devant l’OHMI concernant les produits spécifiques désignés par la marque demandée (des sets de mini-golf, des « raquettes wow », du « jungle croquet », des trampolines, des frisbees, etc.). Ces dernières ne permettent pas, contrairement à ce qu’elle indique, de démontrer que les produits désignés par les marques en conflit partagent la même destination, ou sont interchangeables, dans la mesure où il en ressort que les jeux
d’activités pour l’éducation et le développement des enfants de l’intervenante s’adressent même à de jeunes enfants, ce qui accentue leur finalité pédagogique et de divertissement.
77 Quatrièmement, concernant l’argument de la requérante selon lequel certains « articles de sport » ont pour destination première et principale le « divertissement » plutôt que « l’entraînement du corps au moyen d’exercices physiques » (tels que les clubs de golf, le bowling, le billard, les fléchettes, le frisbee), il convient de constater que, en tout état de cause, il ressort des points 57 à 61 ci-dessus que leur nature est différente de celle des produits de la marque demandée. De plus il
n’appartient pas à l’OHMI de se prononcer pour l’ensemble de la catégorie générale des « articles de sport » au regard de certains produits spécifiques qu’elle contient (voir points 64 et 65 ci-dessus).
78 Cinquièmement, la requérante fait encore valoir que les produits en cause ont une clientèle manifestement commune, à savoir les enfants, et que, s’agissant également des adultes qui les achètent pour leurs enfants, les consommateurs dans l’esprit desquels une confusion est créée sont identiques.
79 Il y a lieu d’observer que cet argument doit être rejeté comme ne suffisant pas à lui seul à établir une similitude entre produits, dans la mesure où tous les produits qui s’adressent aux mêmes consommateurs ne sont pas forcément identiques ou similaires.
80 En troisième lieu, s’agissant des canaux de distribution et de fabrication des produits désignés par les marques en conflit, il convient de constater que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, ils sont différents.
81 La chambre de recours a relevé à juste titre qu’il s’agit en l’espèce de catégories de produits qui, de manière générale, sont fabriqués par des entreprises spécialisées et se vendent dans des magasins spécialisés.
82 Premièrement, il y a lieu de constater, comme dans l’arrêt BETWIN, point 12 supra (EU:T:2013:291), que, s’il est possible que les « articles de sport », d’une part, et les « jouets pour le bain pour enfants » et « jouets d’activités pour l’éducation et le développement des enfants », d’autre part, soient fabriqués par les mêmes entreprises et proposés par les mêmes canaux de distribution, de tels phénomènes sont des phénomènes de marges et ne sauraient, sans d’autres preuves à l’appui, mener le
Tribunal à considérer que ces deux catégories de produits partagent les mêmes canaux de distribution (voir, en ce sens, arrêt BETWIN, point 12 supra, EU:T:2013:291, point 38).
83 Deuxièmement, il convient de relever que le fait que les produits en cause puissent être vendus dans les mêmes établissements commerciaux, tels que des grands magasins ou des supermarchés, n’est pas particulièrement significatif, dès lors que l’on peut trouver dans ces points de vente des produits de natures très diverses, sans que les consommateurs leur attribuent automatiquement une même origine. [voir arrêt du 24 mars 2010, 2nine/OHMI – Pacific Sunwear of California (nollie), T‑364/08,
EU:T:2010:115, point 40 et jurisprudence citée].
84 Troisièmement, les éléments de preuve fournis par la requérante ne sont pas de nature à inverser la conclusion de la décision attaquée. La requérante fait valoir les preuves qu’elle a fournies en annexe 4 de son exposé des motifs du 7 février 2013 devant la chambre de recours, visant à montrer que des grands magasins du Royaume-Uni et d’Espagne vendent des articles de sport à côté de jouets d’activités.
85 D’abord, concernant les sites des grands magasins généralistes de type « Jarrold » ou « El Corte Ingles », il ressort de ces preuves que les articles de sport sont vendus dans la catégorie « fitness » tandis que les jouets d’extérieurs sont vendus sous la catégorie « jouets », ou « jouets d’extérieurs », qui, si elles peuvent être proches, correspondent néanmoins à deux départements distincts, ainsi que le relève la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée.
86 Ensuite, il y a lieu de rappeler que, en tout état de cause, le public pertinent est constitué des membres du grand public en Allemagne et que, par conséquent, des preuves relatives aux distributeurs localisés dans d’autres pays n’ont qu’une valeur très limitée, voire nulle, dans l’appréciation de la similitude des produits.
87 Enfin, concernant les preuves de la requérante apportées devant l’OHMI et visant à démontrer que des fabricants de sport tels que « Nike » ou « Adidas », fabriquent aussi des jouets d’activités, il y a lieu de constater que ces jouets ne s’apparentent pas à des jouets d’activités pour l’éducation et le développement, mais plutôt à des articles promotionnels, et que, en tout état de cause, ces cas sont marginaux, car ils ne concernent que des marques de sport très renommées et ne sont pas de
nature à infirmer la conclusion selon laquelle, en règle générale, les produits des marques en conflit sont fabriqués par des entreprises distinctes et spécialisées.
88 En quatrième lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas tenu compte de la pratique constante de l’OHMI, confirmant qu’il existe une similitude au moins ténue entre les « articles de sport » et les « jouets, jeux et articles de jeux », ni d’une décision de la Cour fédérale allemande citée dans l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), ou encore de l’arrêt KNUT lui-même, ainsi que des décisions ultérieures de l’OHMI.
89 Concernant l’argument tiré de la pratique décisionnelle de l’OHMI et de la jurisprudence de l’Union, il ressort de la jurisprudence citée au point 42 ci-dessus que la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement no 207/2009 et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci.
90 Cela étant, il convient de rappeler que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe d’égalité de traitement et le principe de bonne administration. Eu égard à ces deux derniers principes, l’OHMI doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière
sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens. Les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent toutefois se concilier avec le respect de la légalité. Par conséquent, aucune partie à une procédure devant l’OHMI ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuellement commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration, l’examen de toute demande
d’enregistrement doit être strict et complet et avoir lieu dans chaque cas concret [voir arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec, EU:C:2011:139, points 73 à 77 et jurisprudence citée].
91 En l’espèce, pour les motifs qui précèdent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que les produits en cause étaient différents. Force est de constater que les décisions mises en avant par la requérante et celles mises en avant par l’intervenante ne font que révéler l’existence d’une pratique décisionnelle non entièrement cohérente au sein de l’OHMI, contrairement à ce qu’allègue la requérante.
92 Par ailleurs, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel les offices nationaux des marques au sein de l’Union et plus spécifiquement la Cour fédérale allemande des brevets dans l’« affaire 32 W (pat) 6/01 », évoquée dans l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), considèrent que ces produits sont similaires, il y a lieu de rappeler que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont
spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêt du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec, EU:T:2000:283, point 47]. Il ressort d’une jurisprudence constante que les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres ne constituent que des éléments qui, sans être déterminants, peuvent seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque communautaire [arrêts du 16 février 2000, Procter & Gamble/OHMI
(Forme d’un savon), T‑122/99, Rec, EU:T:2000:39, point 61, et du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec, EU:T:2001:221, point 58].
93 Au surplus, quant au raisonnement fondé sur l’arrêt KNUT, point 41 supra (EU:T:2013:448), il ressort des points 59 et 65 ci-dessus qu’il ne peut être transposé au cas d’espèce.
94 Par ailleurs, il convient de rejeter les arguments de la requérante relatifs à la limitation de la demande d’enregistrement (voir point 9 ci-dessus), dans la mesure où il n’est plus nécessaire, au vu de l’analyse qui précède, de se prononcer sur l’incidence de cette limitation quant à la similitude des produits.
– Sur le risque de confusion
95 Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].
96 La requérante fait valoir que ce n’est que lorsque les produits sont manifestement et indubitablement dépourvus de similitude que l’une des conditions essentielles de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’est pas remplie et que l’opposition est rejetée sans évaluer la similitude des signes et le risque de confusion. Or tel ne serait pas le cas en l’espèce.
97 Il convient de constater que la décision attaquée a considéré à juste titre que les produits en conflit étaient différents, indiquant clairement par là qu’il n’y avait aucune similitude entre eux. Dès lors elle a considéré à bon droit qu’il ne pouvait exister aucun risque de confusion, même en tenant compte de l’identité des signes, puisqu’une condition indispensable à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, à savoir l’identité ou la similitude des produits,
n’était pas satisfaite.
98 Au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de rejeter le second moyen soulevé par la requérante comme étant non fondé.
99 Aucun des moyens soulevés par la requérante au soutien de ses conclusions n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
100 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.
101 En outre, l’intervenante a conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’elle a exposés dans la procédure administrative devant l’OHMI. À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme des dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division
d’opposition. Partant, la demande de l’intervenante tendant à ce que la requérante, ayant succombé en ses conclusions, soit condamnée aux dépens de la procédure administrative devant l’OHMI ne peut être accueillie que s’agissant des seuls dépens indispensables exposés par l’intervenante aux fins de la procédure devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2006, Devinlec/OHMI – TIME ART (QUANTUM), T‑147/03, Rec, EU:T:2006:10, point 115].
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre élargie)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) BH Stores BV est condamnée aux dépens, y compris les frais indispensables exposés par Alex Toys LLC aux fins de la procédure devant la chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).
Jaeger
Van der Woude
Kancheva
Wetter
Ulloa Rubio
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 juillet 2015.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.