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06/10/2021 | CJUE | N°C-106/19

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. M. Bobek, présentées le 6 octobre 2021., République italienne et Comune di Milano contre Conseil de l'Union européenne et Parlement européen., 06/10/2021, C-106/19


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 6 octobre 2021 ( 1 )

Affaires jointes C‑106/19 et C‑232/19

République italienne (C‑106/19)

Comune di Milano (C‑232/19)

contre

Conseil de l’Union européenne

Parlement européen

« Recours en annulation – Recevabilité – Qualité pour agir – Intérêt direct et individuel – Règlement (UE) 2018/1718 portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence euro

péenne des médicaments – Prérogatives du Parlement européen – Décision adoptée par les représentants des États membres en marge d’une réunion du Cons...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 6 octobre 2021 ( 1 )

Affaires jointes C‑106/19 et C‑232/19

République italienne (C‑106/19)

Comune di Milano (C‑232/19)

contre

Conseil de l’Union européenne

Parlement européen

« Recours en annulation – Recevabilité – Qualité pour agir – Intérêt direct et individuel – Règlement (UE) 2018/1718 portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments – Prérogatives du Parlement européen – Décision adoptée par les représentants des États membres en marge d’une réunion du Conseil en vue de fixer le lieu d’implantation du siège d’un organisme – Absence d’effets contraignants dans l’ordre juridique de
l’Union – Pouvoir discrétionnaire exercé par le Parlement européen dans la procédure législative ordinaire – Limites »

I. Introduction

1. Le droit n’aime guère prendre de risques. Cela ne veut pas dire que, à l’instar des membres de toute autre profession, les juristes n’auraient pas parfois besoin d’un peu de chance. Voyons-y plutôt le signe que la rationalité et la raison (leur promesse) ont porté les systèmes juridiques modernes sur les fonts baptismaux. Même lorsque le recours au tirage au sort est bel et bien de nature à produire des résultats à la fois impartiaux et économiquement efficaces, son caractère intrinsèquement
irrationnel ne peut manquer de nous heurter. Cela vient de ce que le seul fait de parvenir à un résultat ne suffit pas. L’issue qui tend aujourd’hui à être escomptée d’une prise de décision dans le domaine juridique est au contraire celle d’une décision attribuable, et, partant, imputable et susceptible de recours ( 2 ).

2. Sans entrer directement dans les conséquences philosophiques de la prise de décision par tirage au sort ( 3 ), le Comune di Milano (commune de Milan, Italie) et la République italienne n’en contestent pas moins sans aucun doute le résultat d’un tel processus en l’espèce : la sélection par tirage au sort, en marge d’une réunion du Conseil de l’Union européenne, de la ville d’Amsterdam (Pays-Bas) comme nouveau siège de l’EMA. Cette sélection a donné lieu à deux séries de procédures devant la Cour.

3. En premier lieu, dans les affaires jointes C‑59/18 et C‑182/18, la République italienne et le Comune di Milano, respectivement, ont contesté la décision des représentants des États membres de fixer le nouveau siège de l’EMA à Amsterdam. J’examine les problèmes soulevés dans ces affaires, notamment la question de savoir si une décision des représentants des États membres peut faire l’objet d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, dans mes conclusions parallèles qui sont relatives
aux affaires jointes C‑59/18 et C‑182/18 ainsi qu’à l’affaire C‑743/19 [dans laquelle le Parlement européen a contesté la décision des représentants des États membres de fixer le siège de l’Autorité européenne du travail (ELA) à Bratislava (Slovaquie)] ( 4 ).

4. Le règlement (UE) 2018/1718 a ensuite fixé le nouveau siège de l’EMA à Amsterdam (ci-après le « règlement attaqué ») ( 5 ). Par les présents recours, qu’ils dirigent contre le Conseil et le Parlement, la République italienne et le Comune di Milano contestent principalement la légalité de ce règlement.

II. Le cadre juridique

5. Le règlement 2018/1718, adopté le 14 novembre 2018 et fondé sur l’article 114 et l’article 168, paragraphe 4, sous c), TFUE, contient les dispositions suivantes :

« Article premier

L’article suivant est inséré dans le règlement (CE) no 726/2004 :

“Article 71 bis

L’Agence a son siège à Amsterdam, aux Pays-Bas.

Les autorités compétentes des Pays-Bas prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir que l’Agence pourra être transférée vers son lieu d’implantation temporaire le 1er janvier 2019 au plus tard et qu’elle pourra être transférée vers son lieu d’implantation définitif le 16 novembre 2019 au plus tard.

Les autorités compétentes des Pays-Bas soumettent un rapport écrit au Parlement européen et au Conseil sur l’état d’avancement des adaptations apportées aux locaux temporaires et de la construction du bâtiment définitif au plus tard le 17 février 2019, puis tous les trois mois par la suite, jusqu’à ce que l’Agence ait été transférée vers son lieu d’implantation définitif.”

Article 2

Le présent règlement entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Il est applicable à compter du 30 mars 2019.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre. »

6. Au cours du processus législatif ayant conduit à l’adoption du règlement 2018/1718, le Parlement européen a adopté la résolution législative du 25 octobre 2018 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments ( 6 ). Dans cette résolution, le Parlement, notamment :

« 2. dénonce la déclaration commune du Parlement européen, du Conseil de l’Union européenne et de la Commission européenne sur les agences décentralisées du 19 juillet 2012, et l’approche commune qui y est annexée, et demande que le Parlement soit associé étroitement au processus décisionnel sur la fixation du siège et le transfert des agences et des organes eu égard aux prérogatives dont il peut se prévaloir en sa qualité de colégislateur au titre de la procédure législative ordinaire ; » [...]

« 5. regrette que le Parlement européen – et, en fin de compte, les représentants des citoyens de l’Union – n’ait pas été pleinement impliqué dans la procédure de sélection du nouveau siège de l’[EMA], qui s’est finalement conclue par un tirage au sort malgré l’importance de la décision ; note qu’il est nécessaire – et obligatoire d’un point de vue juridique – que les décisions relatives à la situation des organes et des agences soient prises, dans le plein respect des prérogatives du Parlement
européen, conformément à la procédure législative ordinaire qui place le Parlement européen et le Conseil sur un pied d’égalité en tant que colégislateurs [...] »

7. Les annexes de la résolution contiennent la déclaration suivante du Parlement :

« Le Parlement européen regrette que son rôle de colégislateur n’ait pas été dûment pris en compte puisqu’il n’a pas été associé à la procédure de sélection du nouveau siège de l’[EMA].

Le Parlement européen souhaite rappeler les prérogatives qui sont les siennes en sa qualité de colégislateur et exige le respect plein et entier de la procédure législative ordinaire lors la fixation du siège des organes et des agences.

Il est la seule institution de l’Union directement élue et représentant les citoyens de l’Union et est à ce titre le principal garant du respect du principe démocratique dans l’Union.

Le Parlement européen dénonce la procédure suivie pour la fixation du nouveau siège, dès lors qu’il a de facto été privé de ses pouvoirs dans la mesure où il n’a pas réellement été associé au processus, alors qu’on s’attend maintenant à ce qu’il se borne à entériner le choix du nouveau siège au titre de la procédure législative ordinaire.

Le Parlement européen rappelle que l’approche commune [annexée à] la déclaration commune du Parlement européen, du Conseil de l’Union européenne et de la Commission européenne sur les agences décentralisées, signée en 2012, ne présente pas un caractère juridiquement contraignant, comme le précise la déclaration elle‑même, et qu’elle est sans préjudice des compétences législatives des institutions.

Dans ces conditions, le Parlement européen insiste pour que la procédure suivie pour choisir le nouveau siège d’une agence soit revue et que cette méthode ne soit plus appliquée à l’avenir.

Enfin, le Parlement européen souhaite également rappeler que les trois institutions s’étaient engagées, dans l’accord interinstitutionnel “Mieux légiférer” du 13 avril [2016], à coopérer en toute loyauté et transparence et que l’accord avait rappelé le principe de l’égalité des deux colégislateurs, tel qu’il est consacré dans les traités. »

III. Les faits à l’origine du recours

8. L’Agence européenne pour l’évaluation des médicaments a été créée par le règlement (CEE) no 2309/93 du Conseil, du 22 juillet 1993, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance des médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et instituant une agence européenne pour l’évaluation des médicaments ( 7 ).

9. Le 29 octobre 1993, les chefs d’État ou de gouvernement des États membres ont décidé d’un commun accord de fixer son siège à Londres (Royaume‑Uni) ( 8 ).

10. Le règlement no 2309/93 a ensuite été abrogé et remplacé par le règlement (CE) no 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments ( 9 ). Par ce règlement, l’Agence européenne pour l’évaluation des médicaments a été renommée pour devenir l’EMA. Ce règlement ne contenait aucune
disposition relative au lieu d’implantation du siège de l’EMA.

11. Le 29 mars 2017, conformément à l’article 50, paragraphe 2, TUE, le Royaume-Uni a notifié au Conseil européen son intention de se retirer de l’Union.

12. Le 22 juin 2017, en marge du Conseil européen (article 50), les chefs d’État ou de gouvernement des 27 autres États membres ont accepté, sur proposition du président du Conseil européen et du président de la Commission européenne, la procédure de transfert du siège de l’EMA et de celui de l’Autorité bancaire européenne (ci-après les « règles de sélection ») ( 10 ).

13. Ces règles prévoyaient que la décision relative au futur siège des deux agences devrait être prise sur la base d’un processus décisionnel équitable et transparent, comprenant l’organisation d’un appel d’offres fondé sur des critères objectifs précis fixés au point 3 des règles de sélection.

14. Il était également prévu que, en cas de partage des voix au troisième (et dernier) tour de scrutin, la décision serait prise par la présidence, qui procéderait à un tirage au sort entre les offres se retrouvant ex æquo.

15. Le 20 novembre 2017, l’offre de la République italienne et celle du Royaume des Pays-Bas ont reçu le même nombre de voix lors du troisième tour de scrutin. L’offre du Royaume des Pays-Bas a ensuite été sélectionnée après le tirage au sort.

16. Ainsi, le même jour, les représentants des États membres ont-ils choisi, en marge de la 3579e session du Conseil des affaires générales, la ville d’Amsterdam comme nouveau siège de l’EMA (ci-après la « décision des représentants des États membres »). Cette décision a été annoncée dans le procès-verbal de la session du Conseil des affaires générales ( 11 ) et a donné lieu à un communiqué de presse ( 12 ). Il était précisé que « [l]a Commission va maintenant élaborer des propositions législatives
tenant compte du vote de ce jour, en vue de leur adoption dans le cadre de la procédure législative ordinaire, avec la participation du Parlement européen [...] ».

17. Le 29 novembre 2017, la Commission a adopté une proposition de règlement portant modification du règlement no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’EMA. Son exposé des motifs indiquait que les « États membres, en marge du Conseil des affaires générales (article 50), ont choisi Amsterdam, aux Pays-Bas, comme nouveau siège de l’[EMA] » ( 13 ).

18. En conséquence, le règlement no 726/2004 a été modifié par le règlement 2018/1718 afin de prévoir que « l’Agence a son siège à Amsterdam, aux Pays‑Bas » ( 14 ).

19. Quatre recours en annulation ont ensuite été introduits.

20. En premier lieu, dans son recours actuellement pendant dans l’affaire C‑59/18, le gouvernement italien demande à la Cour d’annuler la décision des représentants des États membres, dans la mesure où elle a établi qu’Amsterdam serait le nouveau siège de l’EMA, et, partant, d’attribuer ce siège à la ville de Milan (Italie).

21. En deuxième lieu, dans l’affaire C‑182/18, le Comune di Milano, soutenu par le gouvernement italien et la Regione Lombardia (région de Lombardie, Italie), demande à la Cour d’annuler la décision des représentants des États membres en ce qu’elle a établi qu’Amsterdam serait le nouveau siège de l’EMA.

22. Le 19 novembre 2019, le président de la Cour a décidé de joindre les affaires C‑59/18 et C‑182/18 aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

23. En troisième lieu, dans l’affaire C‑106/19, la République italienne demande l’annulation du règlement attaqué.

24. En quatrième lieu, dans l’affaire C‑232/19, le Comune di Milano demande à la Cour d’annuler le règlement attaqué et de déclarer que la décision des représentants des États membres ne produit pas d’effets juridiques obligatoires.

25. Le 19 décembre 2019, le président de la Cour a décidé de joindre les affaires C‑106/19 et C‑232/19 (ci-après les « présentes affaires ») aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

IV. La procédure devant la Cour

26. À la différence des recours dans les affaires jointes C‑59/18 et C‑182/18, qui portent sur la légalité de la décision des représentants des États membres, les présentes affaires posent avant tout la question de la légalité du règlement attaqué, qui a été adopté postérieurement à la décision des représentants des États membres.

A.   L’affaire C‑106/19

27. Le gouvernement italien demande à la Cour d’annuler le règlement attaqué et de condamner le Conseil et le Parlement aux dépens. Le Conseil et le Parlement demandent à la Cour de rejeter le recours et de condamner le gouvernement italien aux dépens. Le gouvernement néerlandais et la Commission, qui interviennent au soutien des conclusions du Conseil et du Parlement, demandent à la Cour de rejeter le recours. Le gouvernement néerlandais demande en outre à la Cour de condamner le gouvernement
italien aux dépens.

28. Dans son recours, le gouvernement italien invoque deux moyens à l’appui de sa thèse voulant que le règlement attaqué soit illégal. Le premier moyen est tiré d’une violation des articles 10, 13 et 14 TUE ainsi que de l’article 114, de l’article 168, paragraphe 4, sous c), et des articles 289 et 294 TFUE. Par son second moyen, il fait valoir que, quand bien même l’on conclurait qu’il n’y a pas eu violation des prérogatives du Parlement, l’illégalité du règlement attaqué n’en découlerait pas moins
de celle de la décision des représentants des États membres. Le gouvernement italien invoque à cet égard un détournement de pouvoir pour défaut d’examen et dénaturation des éléments de preuve. Pour un développement plus approfondi des arguments soulevés à cet égard, le gouvernement italien renvoie à son recours dans l’affaire C‑59/18, relatif à la légalité de la décision des représentants des États membres ( 15 ).

29. S’agissant du premier moyen de son recours, le gouvernement italien invoque, en premier lieu, une violation de l’article 10 TUE, qu’il tire du fait que la procédure suivie pour la sélection du nouveau siège de l’EMA n’a pas permis aux citoyens européens de participer à ce choix. Il en aurait également résulté une violation de l’article 14, paragraphe 1, TUE, en vertu duquel la fonction législative est exercée par le Parlement. En tout état de cause, la Commission et le Conseil auraient dû rendre
possible la participation du Parlement. Le fait même qu’ils ne l’aient pas fait a emporté une violation de l’équilibre institutionnel, ainsi que de la coopération loyale et transparente exprimée à l’article 13 TUE. S’agissant des articles 289 et 294 TFUE, lus en combinaison avec la base juridique du règlement attaqué, leur violation a résulté d’un respect purement formel de la procédure législative ordinaire, sans que le Parlement puisse réellement influer sur le choix du nouveau siège de l’EMA.

30. Dans son mémoire en défense, le Conseil fait valoir que le processus législatif s’est déroulé de manière normale. Le Parlement avait discuté des possibilités de transférer le siège en un autre lieu, notamment à Milan, avant de rejeter cette option. Le Parlement a ensuite présenté (et même obtenu) plusieurs amendements au règlement proposé. Le Conseil soutient en outre que la compétence pour choisir le siège d’une agence appartient aux États membres agissant d’un commun accord. Elle est fondée
sur l’article 341 TFUE. La désignation du nouveau siège de l’EMA dans le règlement attaqué est purement déclaratoire, dès lors que le colégislateur ne pouvait s’écarter du choix opéré à cet égard par les États membres. Le Parlement pouvait toutefois, dans le même temps, (co)définir les conditions du transfert, ce qu’il a fait en ajoutant au nouvel article 71 bis du règlement no 726/2004 deux nouveaux alinéas relatifs à la date limite du transfert, à la durée du lieu d’implantation temporaire,
ainsi qu’à l’obligation des autorités néerlandaises de soumettre un rapport écrit au Parlement et au Conseil.

31. Dans son mémoire en défense, le Parlement partage l’avis du gouvernement italien selon lequel la décision des représentants des États membres ne pouvait limiter les compétences du Parlement. Il estime néanmoins que la situation en cause n’a pas débouché sur l’illégalité du règlement attaqué du fait de l’absence de compétence des représentants des États membres pour fixer le siège de l’EMA. Cette compétence revient au législateur de l’Union, qui ne peut pas s’abstenir d’exercer ses fonctions. Il
ne saurait donc approuver purement et simplement une proposition antérieure faite par les États membres sans exercer de contrôle sur celle‑ci. La décision des représentants des États membres était purement politique, sans effets contraignants. Le fait que le choix opéré dans cette décision ait été repris dans la proposition de la Commission était, selon le Parlement, l’expression du pouvoir discrétionnaire de la Commission. En approuvant ce choix, le Parlement a également exercé son pouvoir
discrétionnaire de colégislateur.

32. Dans sa réplique, le gouvernement italien souligne les différences entre les positions respectives du Conseil et du Parlement en ce qui concerne la question centrale de la compétence pour choisir le siège d’une agence. Il semble en effet que ces institutions ne savaient pas quelles compétences étaient exercées, ou en tout cas avaient des vues différentes quant à celles qui l’étaient. Du fait de cette confusion, le gouvernement italien s’est abstenu de prendre position dans son recours sur la
nature de cette compétence, mais a cependant exclu qu’elle puisse relever des compétences exclusives des États membres. Le tableau dressé par le Parlement de son intervention serait formel et inacceptable. Il n’en ressortirait pas que le Parlement a exercé un rôle déterminant dans la sélection du nouveau siège de l’EMA.

33. Dans sa duplique, axée sur le premier moyen du recours, le Conseil souligne que sa position et celle du Parlement sur la question de la compétence sont en tout état de cause sans pertinence, puisque les deux institutions s’accordent sur le respect des prérogatives du Parlement. Le Conseil note également que l’exercice de ses fonctions par une institution est reflété par les actes qu’elle adopte. Les déclarations politiques sont dénuées de pertinence pour apprécier le bon exercice des
compétences. Le contrôle de la légalité d’un acte ne saurait s’étendre aux motifs politiques de l’adoption d’un acte. En outre, le Conseil rappelle que la compétence de choisir le siège des agences relève de la compétence exclusive des États membres. Il souligne que la compétence de fixer le siège d’une agence n’est pas la même que celle de réglementer un certain domaine. Elle s’en distingue par sa nature politique et symbolique, et est ancrée dans l’article 341 TFUE.

34. Le Parlement souligne dans sa duplique que, au cours de la procédure législative ayant conduit à l’adoption du règlement attaqué, il s’est efforcé de protéger sa position institutionnelle par tous les moyens disponibles, tout en poursuivant l’objectif principal de garantir la continuité des activités de l’EMA pendant le transfert de son siège. Grâce à l’initiative du Parlement, le règlement attaqué a été complété, indique-t-il, par un mécanisme de suivi et un calendrier. Adopter une position
rigoureuse dans le cadre de ce processus législatif n’aurait pas été compatible avec l’objectif de protection de la santé publique. La manière dont le Parlement a exercé ses prérogatives au cours de la procédure législative reposait donc sur un choix avisé et n’était pas constitutive d’une renonciation à exercer son rôle.

35. Le gouvernement néerlandais soutient, en ce qui concerne le premier moyen du recours, l’argumentation développée par le Conseil et le Parlement.

36. La Commission est d’avis que l’adoption de la décision des représentants des États membres ne pouvait entraver les compétences de la Commission ou des colégislateurs. Ni la Commission ni le Parlement ne sont liés par le choix politique des États membres quant au siège d’une agence. La compétence pour choisir le siège d’une agence relève de la compétence exclusive de l’Union. Lors des discussions ayant abouti à l’adoption du règlement attaqué, la possibilité de fixer le nouveau siège de l’EMA à
Milan a été débattue et écartée.

37. S’agissant du second moyen du recours, le gouvernement italien soutient, à titre subsidiaire, que, quand même l’on conclurait que le rôle du Parlement n’a pas été méconnu, l’illégalité du règlement attaqué n’en découlerait pas moins de l’illégalité de la décision des représentants des États membres. Cette décision est selon lui entachée d’un détournement de pouvoir, par suite de l’absence d’instruction et d’une dénaturation des faits. Le gouvernement italien présente un résumé de ses arguments
dans son recours dans l’affaire parallèle C‑59/18. Il expose ensuite des points supplémentaires pour étayer sa thèse selon laquelle l’offre du Royaume des Pays-Bas ne correspondait pas à la réalité et, en tout état de cause, ne répondait pas aux critères fixés dans le cadre du processus de sélection.

38. Dans son mémoire en défense, le Conseil souligne que le législateur ne saurait s’écarter du choix opéré par les représentants des États membres. Il lui appartient néanmoins de vérifier si l’acte litigieux a été adopté dans le respect des dispositions applicables. À cet égard, le règlement attaqué peut faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Toutefois, le législateur ne saurait vérifier le bien-fondé du choix opéré, en ce compris les critères ou le processus d’appréciation du bien‑fondé, ni
même apprécier la situation factuelle.

39. Par ailleurs, le Conseil estime que le motif relatif au détournement de pouvoir est irrecevable et, en tout état de cause, non fondé, car il n’est pas établi que la décision des représentants des États membres a été prise en vue ou avec pour objectif d’atteindre une finalité autre que celle réellement poursuivie par la procédure de sélection. Premièrement, la Commission n’était pas tenue de vérifier les informations contenues dans les différentes offres. Deuxièmement, la prétendue divergence
entre les conditions de l’offre et la réalité des faits après la sélection de celle-ci n’est pas pertinente pour conclure que la candidature du Royaume des Pays-Bas aurait été dénaturée pendant la procédure de sélection. Troisièmement, et en tout état de cause, il n’a pas été démontré que la prétendue dénaturation de l’offre du Royaume des Pays-Bas aurait conduit à une erreur d’appréciation d’une telle nature et d’une telle gravité qu’elle justifierait l’invalidation du processus de sélection.

40. Dans son mémoire en défense, le Parlement estime que, dans la mesure où le gouvernement italien renvoie à ses arguments présentés dans une autre affaire à laquelle le Parlement n’est pas partie, ce moyen ne satisfait pas aux conditions de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 120, sous c), du règlement de procédure de la Cour. Sur le fond, il n’existe selon lui aucun lien juridique ou procédural entre la décision des représentants des États membres et
le règlement attaqué. Ainsi, quand même conclurait-on que la décision des représentants des États membres était entachée d’irrégularité, cette circonstance n’aurait pour autant aucune incidence sur la validité du règlement attaqué.

41. Dans sa réplique, le gouvernement italien précise qu’il ne s’est pas borné à faire référence à ses arguments dans l’affaire C‑59/18. Il répète que le choix effectué par le Parlement n’était pas libre, puisqu’il était lié à la décision prise antérieurement par les États membres, si bien que les prérogatives du Parlement ont été violées.

42. Dans son mémoire en duplique, le Parlement répète également sa position sur l’absence de lien juridique entre la décision des représentants des États membres et le règlement attaqué. Au-delà de la recevabilité du second moyen, à laquelle le Parlement continue de s’opposer, le gouvernement italien ne présente pas d’autres arguments à l’encontre du règlement attaqué que ceux avancés dans le cadre du premier moyen. Les arguments soulevés dans le cadre du second moyen sont donc inopérants.

43. La Commission précise que le second moyen repose sur la prémisse selon laquelle le colégislateur se serait borné à « certifier » le choix politique. Or il n’en est tout bonnement pas allé ainsi, selon elle. Malgré la complexité de son adoption et la participation de la Commission au processus, la décision politique n’était pas contraignante. Dès lors, elle n’aurait pas pu prédéterminer le résultat de la procédure législative ordinaire.

44. Le gouvernement néerlandais précise que le second moyen est fondé sur la prémisse selon laquelle il n’a pas respecté ses engagements dans son offre du 28 juillet 2017. Le gouvernement néerlandais souligne que tous les éléments factuels invoqués par le gouvernement italien sont effectivement postérieurs à la décision des représentants des États membres, dont la légalité doit être appréciée au regard des faits existant au moment de son adoption. En tout état de cause, le gouvernement italien
n’aurait pas démontré l’existence d’une erreur d’appréciation dont la nature et la gravité entraîneraient l’illégalité de la décision des représentants des États membres. Enfin, le gouvernement néerlandais fait valoir que les arguments avancés par le gouvernement italien ne démontrent pas en quoi le Royaume des Pays-Bas n’a pas respecté ses engagements.

45. Dans sa réponse aux mémoires en intervention du gouvernement néerlandais et de la Commission, le gouvernement italien attire l’attention de la Cour sur l’introduction par le Parlement d’un recours dans l’affaire C‑743/19, dans lequel le Parlement conteste la décision (UE) 2019/1199 des représentants des États membres, prise d’un commun accord pour fixer le lieu du siège de l’ELA à Bratislava ( 16 ). Selon le gouvernement italien, le Parlement fait valoir, dans ce recours, que la décision en
cause a été adoptée non par les États membres, mais par le Conseil, et que son adoption constitue une ingérence dans les compétences du législateur de l’Union. Selon le gouvernement italien, ces arguments font ressortir que le Parlement défend en l’espèce sa position sans conviction. En tout état de cause, la position du Parlement est incompatible avec le grief tiré de la compétence exclusive de l’Union à cet égard.

46. Dans sa réponse au mémoire en intervention du gouvernement néerlandais, le Parlement estime ne pas pouvoir prendre position sur la candidature du Royaume des Pays-Bas. Dans sa réponse au mémoire en intervention de la Commission, le Parlement convient que les traités ne réservent pas aux États membres la compétence de choisir le siège des agences. L’importance politique de la décision de fixer le siège d’une agence ne saurait conduire à la conclusion que la compétence appartient aux États
membres. Le Parlement convient également que la complexité et la structure de la coopération entre les États membres, ainsi que la participation des institutions à la procédure de sélection, ne confèrent pas un caractère contraignant au résultat de cette coopération.

47. Dans sa réponse au mémoire en intervention présenté par la Commission, le Conseil admet que le Parlement a pleinement exercé ses prérogatives et a eu une influence significative sur le contenu du règlement attaqué. Le Conseil s’oppose néanmoins à l’affirmation selon laquelle la décision des représentants des États membres ne contiendrait qu’un choix politique dépourvu d’effets juridiques contraignants.

48. Le 11 février 2019, le gouvernement italien a demandé qu’il soit statué sur l’affaire C‑106/19 selon une procédure accélérée, en application de l’article 133 du règlement de procédure. Par décision du 15 février 2019, le président de la Cour a rejeté cette demande.

B.   L’affaire C‑232/19

49. Le Comune di Milano demande à la Cour d’annuler le règlement attaqué, de constater que la décision des représentants des États membres ne produit aucun effet juridique et de condamner le Conseil et le Parlement aux dépens afférents à la présente procédure ( 17 ).

50. Par un moyen séparé, le Parlement a soulevé une exception d’irrecevabilité à laquelle a répondu le Comune di Milano et qui a été jointe au fond.

51. Dans leurs mémoires en réplique respectifs, le Conseil et le Parlement demandent à la Cour de rejeter le recours comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, comme étant non fondé, et de condamner le Comune di Milano aux dépens de la présente procédure.

52. La Commission, intervenue au soutien du Conseil et du Parlement, demande à la Cour de rejeter le recours comme étant irrecevable et, à titre subsidiaire, comme étant non fondé. Le gouvernement néerlandais, intervenant au soutien des conclusions du Conseil et du Parlement, demande à la Cour de rejeter le recours et de condamner le Comune di Milano aux dépens afférents à la présente procédure.

53. Dans son recours, le Comune di Milano soulève quatre moyens. L’un est dirigé contre le règlement attaqué. Les trois autres sont dirigés contre la décision des représentants des États membres.

54. S’agissant du premier moyen, dirigé contre le règlement attaqué, le Comune di Milano relève que, d’une part, les principes de démocratie représentative (article 10 TUE) et de l’équilibre institutionnel et de coopération loyale (article 13 TUE) ont été violés. Il invoque, d’autre part, une violation des formes substantielles et de l’article 14 TUE. Le Parlement a été privé de ses compétences et de la possibilité de participer au processus de sélection du nouveau siège de l’EMA. Le nouveau siège a
été choisi par le seul Conseil et en dehors de la procédure législative ordinaire. Dans le cadre de la procédure législative ordinaire, le Parlement n’a disposé d’aucune marge d’intervention pour apprécier ou même mettre en cause cette décision. Selon le Comune di Milano, le fait pour le Parlement de bloquer la désignation d’Amsterdam comme nouveau siège de l’EMA aurait provoqué une crise politique préjudiciable à une agence indispensable à la protection de la santé des citoyens européens et
aurait pu aboutir à ce que les fonctionnaires et leurs familles de l’EMA restent sur le territoire d’un pays tiers.

55. S’agissant des deuxième, troisième et quatrième moyens, dirigés contre la décision des représentants des États membres, le Comune di Milano invoque un détournement de pouvoir, une violation des principes de transparence, de bonne administration et d’équité (deuxième moyen), une violation du principe de bonne administration, de transparence et de coopération (troisième moyen), ainsi qu’une violation de la décision du Conseil du 1er décembre 2009 ( 18 ) et des « règles de procédure du Conseil du
31 octobre 2017 » ( 19 ) (quatrième moyen).

56. Plus précisément, dans le cadre du deuxième moyen, le Comune di Milano conteste l’utilisation d’un processus décisionnel par tirage au sort, car un tel processus ne permettait pas de prendre en compte les critères techniques établis ni de sélectionner la meilleure offre. Il reproche également à la Commission de ne pas avoir procédé à une véritable enquête, chose que prévoyaient les règles de sélection. L’insuffisance de l’évaluation effectuée par la Commission a selon lui entraîné une violation
manifeste du principe de bonne administration. Elle a influencé le vote des États membres, au cours duquel la candidature du Royaume des Pays-Bas a été dénaturée. En outre, des modifications ultérieures de cette candidature, négociées entre le Royaume des Pays-Bas et l’EMA, ont violé les principes de transparence et de bonne administration.

57. S’agissant du troisième moyen, le Comune di Milano rappelle qu’un processus décisionnel par tirage au sort est illégal. Il critique, en outre, l’absence de procès-verbaux documentant le processus de vote et souligne que les principaux éléments de la procédure n’ont pas été rendus publics. Ces principaux éléments n’ont pas été compris par la Commission ni par les États membres (du fait de l’absence d’enquête) et ne leur ont pas été communiqués (en ce qui concerne les modifications ultérieures).
Enfin, les administrations locales candidates n’ont disposé d’aucune possibilité de contrôle.

58. S’agissant du quatrième moyen, le Comune di Milano relève que les caractéristiques du vote, ainsi que l’adoption de la décision des représentants des États membres, ont violé plusieurs règles procédurales du Conseil (auquel cette décision est imputable, selon cette partie). Dans ce contexte, le Comune di Milano fait valoir que l’absence du procès-verbal constitue un cas de violation de l’article 13 de la décision du Conseil du 1er décembre 2009 ( 20 ). Il souligne également le non‑respect des
exigences formelles définies dans les « règles de procédure du Conseil du 31 octobre 2017 » ( 21 ), à savoir : l’absence de motivation ; l’impossibilité pour les représentants des États membres de rester dans la salle pendant le décompte des voix, ainsi que l’absence de pause entre le troisième tour de scrutin et le tirage au sort, qui aurait permis une évaluation plus approfondie des candidatures.

59. Dans son mémoire en défense, le Conseil soutient que le recours est manifestement irrecevable en raison de l’absence de qualité pour agir du Comune di Milano au titre de l’article 263 TFUE. Sur le fond, le Conseil souligne, en ce qui concerne le premier moyen, qu’il n’a pas été démontré que les prérogatives du Parlement n’auraient pas été respectées. Le Parlement a participé au processus législatif et discuté d’autres options que celle de la ville d’Amsterdam, avant de les rejeter. Il a
également apporté et obtenu plusieurs amendements au projet de règlement. En outre, c’est aux États membres qu’appartient la compétence de choisir le siège d’une agence. La désignation du nouveau siège de l’EMA dans le règlement attaqué n’est que déclaratoire.

60. S’agissant des deuxième, troisième et quatrième moyens dirigés contre la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision des représentants des États membres, le Conseil affirme que rien ne permet d’établir que le processus par tirage au sort aurait été utilisé afin de poursuivre un objectif autre que celui de choisir le nouveau siège de l’EMA. Il est erroné d’affirmer que la sélection a été effectuée indépendamment de toute comparaison qualitative. La Commission n’était pas non plus tenue de
vérifier les éléments de fait. Les prétendues différences entre l’offre du Royaume des Pays-Bas et les faits qui sont apparus postérieurement à la procédure de sélection ne permettent pas de conclure que l’offre du Royaume des Pays-Bas a été dénaturée. En réalité, la prétendue dénaturation n’a pas été d’une gravité ni d’une nature telles qu’elle puisse invalider la procédure de sélection. En outre, la note du Conseil du 31 octobre 2017 ne prévoyait pas de pause entre le troisième tour de vote et
le tirage au sort.

61. Le Parlement explique, dans son mémoire en défense, que la décision des représentants des États membres ne saurait être considérée comme limitant ses pouvoirs, mais plutôt comme constituant une indication de la nature politique de cette décision. Elle ne saurait non plus être considérée comme étant une phase préparatoire de la procédure législative ordinaire ultérieure. Les traités n’attribuent pas aux États membres la compétence de décider du siège des agences. Les institutions ne peuvent pas
s’abstenir d’exercer leurs fonctions au profit des États membres. Lorsque le Parlement a approuvé le choix de la ville d’Amsterdam, il l’a fait en exerçant son pouvoir discrétionnaire. À aucun moment, le Parlement n’a été contraint par le choix des États membres. Le Parlement ajoute qu’il n’existe aucun lien juridique entre la décision des représentants des États membres et le règlement attaqué.

62. Dans son mémoire en réplique, le Comune di Milano rejette les arguments dirigés contre la recevabilité de son recours ratione personae et fait valoir, sur le fond, qu’il existe un lien entre la décision des représentants des États membres et le règlement attaqué, et que le Parlement n’a pas pu exercer une influence effective sur la sélection du nouveau siège de l’EMA.

63. Le Parlement et le Conseil ont présenté des dupliques. Le Parlement relève que la décision des représentants des États membres a été source d’ambiguïté lors des discussions législatives ayant conduit à l’adoption du règlement attaqué, ce qui explique également les analyses différentes que font le Parlement et le Conseil quant à sa nature juridique. C’est dans ce contexte que le Parlement a adopté sa déclaration annexée à la résolution législative du 25 octobre 2018, afin de clarifier où se situe
effectivement la compétence pour déterminer le siège d’une agence. Le Conseil relève que le désaccord sur cette question a conduit à l’affaire pendante C‑743/19, Parlement/Conseil (siège de l’ELA), et ajoute, concernant le quatrième moyen du recours, que son règlement intérieur ne s’appliquait pas à une décision des représentants des États membres.

64. Dans son mémoire en intervention, la Commission fait valoir que la décision des représentants des États membres est purement politique. Elle n’a pas de valeur contraignante et n’est donc pas susceptible de préempter le processus législatif. C’est au travers du processus législatif que les orientations politiques se traduisent en effets juridiques. La résolution législative du Parlement du 25 octobre 2018 n’est pas déterminante. L’expression décisive de la volonté politique du Parlement est celle
qui s’est manifestée par le vote favorable en faveur du règlement attaqué. Les moyens dirigés contre la décision des représentants des États membres reposent sur la prémisse selon laquelle ces derniers auraient prédéterminé la décision relative au nouveau siège de l’EMA dans le règlement attaqué. La Commission réfute une telle allégation.

65. En réponse aux deuxième, troisième et quatrième moyens, le gouvernement néerlandais conteste le grief que le Comune di Milano tire du caractère prétendument vicié de la procédure de sélection.

66. Dans sa réponse au mémoire en intervention de la Commission, le Conseil s’oppose à l’affirmation selon laquelle la décision des représentants des États membres est purement politique. Le nouveau siège de l’EMA a, selon lui, été déterminé par cette décision et non par le règlement attaqué.

67. Le Parlement et le Comune di Milano ont également répondu aux mémoires en intervention.

C.   La poursuite de la procédure devant la Cour

68. Par décision du président de la Cour du 19 décembre 2019, les présentes affaires ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

69. Le gouvernement italien, le Comune di Milano, le Parlement, le Conseil, le gouvernement néerlandais, ainsi que la Commission ont présenté des observations écrites dans ces affaires jointes.

70. Le gouvernement italien, le Comune di Milano, la Regione Lombardia (région de Lombardie), le Parlement, le Conseil, les gouvernements tchèque, irlandais, espagnol, français, luxembourgeois, néerlandais et slovaque, ainsi que la Commission ont été entendus lors de l’audience qui s’est tenue le 8 juin 2021. Cette audience a été commune pour les affaires jointes C‑59/18 et C‑182/18, pour les présentes affaires jointes C‑106/19 et C‑232/19, ainsi que pour l’affaire C‑743/19, Parlement/Conseil (siège
de l’ELA).

V. Analyse

71. Les présentes conclusions sont structurées comme suit. Je commencerai par la recevabilité du recours introduit dans l’affaire C‑232/19 par le Comune di Milano. Après avoir indiqué que le Comune di Milano a bien, selon moi, qualité pour agir contre le règlement attaqué (A), j’examinerai ensuite le fond des présentes affaires jointes, à tout le moins dans la mesure où le règlement attaqué y est effectivement contesté. À mon avis, aucun des arguments que soutiennent à cet égard le gouvernement
italien et le Comune di Milano ne saurait prospérer (B).

A.   Sur la recevabilité du recours dans l’affaire C‑232/19

72. Le Parlement, le Conseil et la Commission soutiennent que le recours introduit par le Comune di Milano est irrecevable. Selon eux, cette commune n’est ni directement ni individuellement concernée. Elle n’aurait pas non plus d’intérêt à agir.

73. Le Comune di Milano est une personne morale de droit italien. Une entité territoriale jouissant de la personnalité juridique en vertu du droit national peut former un recours en annulation en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE ( 22 ). Conformément à cette disposition, il existe trois situations dans lesquelles une personne physique ou morale peut former un recours en annulation. Premièrement, si l’acte attaqué lui est adressé. Deuxièmement, si cet acte la concerne directement et
individuellement. Troisièmement, si l’acte attaqué est un acte réglementaire qui ne comporte pas de mesures d’exécution et qui la concerne directement.

74. En l’espèce, le règlement attaqué n’est pas adressé au Comune di Milano. Ce règlement n’est pas non plus un acte réglementaire. La qualité pour agir du Comune di Milano doit donc être appréciée au regard des exigences du deuxième scénario de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE : l’acte doit le concerner directement (1) et individuellement (2). En outre, à titre d’exigence générale, le Comune di Milano doit démontrer qu’il a un intérêt à agir (3).

75. À mon avis, le Comune di Milano remplit toutes ces conditions en l’espèce.

1. Sur l’intérêt direct

76. Selon une jurisprudence constante, l’« intérêt direct » requiert que deux critères soient cumulativement réunis, à savoir que la mesure contestée, d’une part, produise des effets sur la situation juridique du particulier et, d’autre part, ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires ( 23 ). Je commencerai par
ce dernier critère (a), avant d’examiner la question de savoir si la situation juridique du Comune di Milano a été affectée (b).

a) Absence de pouvoir d’appréciation ou de mesures d’exécution

77. Le Comune di Milano soutient que le règlement attaqué, qui établit erga omnes le siège de l’EMA à Amsterdam, est un acte obligatoire et directement applicable en vertu de l’article 288 TFUE. Son application n’est pas subordonnée à l’adoption de mesures ultérieures de mise en œuvre.

78. Certes, comme le font valoir le Parlement et le Conseil, le fait que l’acte attaqué soit un règlement, d’application générale et directe, ne suffit pas en soi pour que les exigences relatives à la qualité pour agir soient remplies ( 24 ). En effet, l’« intérêt direct » ne se confond pas avec l’« applicabilité directe » d’un règlement ( 25 ). Il convient de procéder à une appréciation différente pour démontrer que ce règlement affecte directement la situation juridique du Comune di Milano.

79. Or, il est constant que le règlement attaqué ne laisse aucune marge d’appréciation quant au choix d’Amsterdam comme nouveau siège de l’EMA. La désignation du siège de l’EMA est automatique et résulte de ce seul règlement, sans que d’autres règles intermédiaires soient nécessaires. Le critère lié à l’« absence de pouvoir d’appréciation ou de mesures d’exécution » est donc manifestement rempli en l’espèce.

b) Effets juridiques du règlement attaqué

80. Le Comune di Milano soutient que sa situation juridique est directement affectée, dès lors que, par l’intermédiaire de l’offre de la République italienne ayant présenté Milan comme ville candidate, il a participé à la procédure ayant abouti à la désignation du siège de l’EMA et qu’il a obtenu le nombre de voix le plus élevé. Le règlement attaqué officialise le rejet de la candidature du requérant et confirme que le siège de l’EMA ne sera pas situé sur son territoire.

81. Le Conseil et le Parlement, soutenus par la Commission, font valoir que le Comune di Milano n’est pas directement concerné par le règlement attaqué.

82. Selon le Parlement, la décision relative au siège de l’EMA appartient au législateur. À cet égard, la décision des représentants des États membres du 20 novembre 2017 est privée d’effets juridiques obligatoires. Dès lors qu’il n’existe aucun lien juridique entre cette décision des représentants des États membres et la proposition de la Commission ayant conduit à l’adoption du règlement attaqué, le choix de la ville d’Amsterdam, qui découle de l’action conjointe des États membres, ne saurait en
soi conduire à ce que le Comune di Milano soit directement concerné. Le règlement attaqué établit simplement que le siège de l’EMA se situera à Amsterdam. À aucun moment, le législateur ne s’est vu présenter de proposition tendant à fixer le siège de l’EMA à Milan.

83. Pour le Conseil, le Comune di Milano n’a pas démontré avoir subi d’effets préjudiciables du fait de l’adoption du règlement attaqué, dès lors que ce règlement a un caractère purement déclaratif. En effet, la décision relative au siège de l’EMA appartient aux États membres et, à cet égard, la décision des représentants des États membres est contraignante. Les arguments relatifs à la participation de Milan au processus de sélection se rapportent aux choix d’opportunité internes à l’État membre. Le
Conseil en conclut que de tels arguments ne permettent pas de conclure que le Comune di Milano est directement concerné. Le fait que la ville de Milan, en tant que lieu géographique, a été choisie par la République italienne dans le cadre de son offre ne signifie pas que le Comune di Milano, en tant qu’entité territoriale, constitue une personne directement concernée.

84. Malgré les positions diamétralement opposées du Parlement et du Conseil quant à la nature juridique de la décision des représentants des États membres, les deux institutions semblent convenir que la désignation d’Amsterdam dans le règlement attaqué ne concerne pas directement le Comune di Milano. À première vue, les arguments présentés permettent aisément d’écarter l’« intérêt direct » du requérant. En effet, d’une part, si la décision des représentants des États membres n’est pas juridiquement
contraignante pour le législateur, le processus de tirage au sort qui y conduit n’a aucune incidence sur la situation juridique du requérant. Le fait que la République italienne a présenté la ville de Milan comme candidate ne confère aucune espèce d’intérêt juridique au Comune di Milano, puisque, devant le législateur de l’Union, cette candidature n’a tout simplement jamais existé. En revanche, si la décision des représentants des États membres est contraignante, le règlement attaqué a un
caractère purement déclaratoire. Cette argumentation semble indiquer que, dans une telle situation, le règlement attaqué peut être considéré comme constituant un acte confirmatif, ce qui entraîne également l’irrecevabilité du recours ( 26 ).

85. La combinaison de ces deux argumentations alternatives aboutit à un sophisme remarquable : le choix d’Amsterdam comme siège de l’EMA ne peut être contesté (i) parce qu’il a été décidé par un acte non contraignant, (ii) qui a ensuite été repris dans un acte contraignant, lui‑même simplement confirmatif. Il apparaît donc que la décision relève du miracle : elle s’est simplement matérialisée dans le temps et dans l’espace, sans que personne l’ait prise et sans que personne n’en soit responsable. Il
va sans dire qu’une telle création (divine) revient à priver un requérant potentiel de toute issue, proposition qu’il est assez difficile d’admettre, en particulier dans le cas d’un règlement qui est clairement un acte des institutions de l’Union.

86. Pour les raisons exposées en détail dans mes conclusions parallèles dans les affaires EMA 1/ELA ( 27 ), je conviens certes que la décision des représentants des États membres est un acte dépourvu de tout effet de droit dans l’ordre juridique de l’Union. Elle n’est donc pas susceptible de faire l’objet d’un contrôle au titre de l’article 263 TFUE.

87. Le règlement attaqué est toutefois un acte des institutions de l’Union. Il est donc en principe soumis à un contrôle juridictionnel complet de la part de la Cour. Il ne saurait en aller autrement : tout (grand) pouvoir s’accompagne d’une (grande) responsabilité. En effet, le pouvoir de prendre une décision va de pair avec l’obligation d’en être comptable.

88. Aussi la question de savoir si la situation juridique du Comune di Milano est affectée doit-elle s’apprécier au seul regard du règlement attaqué. Existe-t-il un lien direct entre le règlement attaqué et la situation juridique du requérant ?

89. C’est à mon avis le cas. Milan, représentée par le Comune di Milano en tant qu’entité territoriale dotée de la personnalité juridique, était une concurrente directe pour la fixation du siège de l’EMA.

90. Dans d’autres domaines du droit, la Cour a déclaré que les concurrents peuvent être directement concernés par des actes du droit de l’Union qui décident des résultats d’une telle concurrence. Les domaines notables dans lesquels il en est allé ainsi sont, par exemple, les mesures antidumping, les aides d’État, ou encore les cas de contestation de décisions déclarant des concentrations compatibles avec le marché intérieur ( 28 ). Loin d’être uniquement un élément factuel ( 29 ), l’existence d’une
situation de concurrence définit souvent une position juridique dans différents domaines du droit de l’Union. La Cour l’a admis dans le domaine des aides d’État, où elle a jugé que, si un requérant démontre qu’une décision de la Commission est susceptible de le placer dans une position concurrentielle défavorable, il en résulte que celle-ci produit des effets sur sa situation juridique ( 30 ).

91. C’est néanmoins le domaine des marchés publics qui offre l’analogie la plus forte possible avec les présentes affaires. Les soumissionnaires non retenus sont directement concernés par les décisions d’attribution des marchés aux autres soumissionnaires ( 31 ). Toutefois, dans ce domaine du droit, l’« intérêt direct » des soumissionnaires non sélectionnés ne pose généralement pas problème, puisque la décision d’attribuer un marché à un soumissionnaire est accompagnée de la décision de rejeter les
soumissionnaires non retenus ( 32 ). Cela dit, le fait que l’« intérêt direct » des concurrents dans ce domaine soit en quelque sorte un « non-sujet » n’enlève rien au fait que la situation de concurrence dans laquelle se trouvent les différents soumissionnaires suffit en soi à faire naître l’intérêt direct. Le fait que le droit dérivé accorde des droits procéduraux aux soumissionnaires évincés constitue au contraire une reconnaissance expresse de la qualité de personnes directement concernées
par les résultats de la procédure d’appel d’offres.

92. Certes, un ensemble de régimes spécifiques de droit dérivé peut difficilement être déterminant pour une situation très particulière comme celle de la présente affaire. Je persiste toutefois à penser qu’en dehors ou au-delà des particularités de ces régimes spécifiques, il existe une seule et même idée : les concurrents peuvent être juridiquement concernés lorsqu’ils sont en concurrence pour un bien ou une ressource directement attribués par le droit de l’Union. Une décision d’allouer un bien à
une personne concerne directement les autres concurrents qui ne sont pas en mesure d’obtenir ce même bien. Leur situation juridique est modifiée, puisque de candidats potentiellement retenus, ils deviennent des candidats écartés. L’exemple probablement le plus clair de ce raisonnement assez simple est offert par l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Les Verts, où l’octroi d’une aide par le bureau du Parlement aux formations politiques rivales a été considéré, avec relativement peu de discussion,
comme concernant directement l’association requérante ( 33 ).

93. Cela dit, il existe certainement des limites à une telle logique. On ne saurait se plaindre de ne pas avoir gagné à la loterie si l’on n’a pas au préalable acheté un billet. En d’autres termes, le Comune di Milano ne pourrait pas être considéré comme étant directement concerné s’il ne s’était pas d’abord présenté lui-même comme un concurrent.

94. Or tel n’est manifestement pas le cas. Il est constant que, d’un point de vue factuel, Milan était l’une des villes candidates pour le siège de l’EMA. Cette circonstance est surtout déterminante pour la détermination de l’intérêt individuel du requérant. Elle est cependant également pertinente lorsqu’il s’agit de déterminer la situation juridique d’un requérant en tant que concurrent aux fins de vérifier son intérêt direct. Il suffit de constater, à ce stade, non seulement que la ville de Milan
était à l’évidence l’une des villes candidates au cours de la procédure ayant abouti à la décision des représentants des États membres, mais aussi que sa candidature a été expressément examinée au cours de la procédure législative, en faisant l’objet de plusieurs propositions d’amendement dans le cadre de la procédure devant le Parlement. La position de Milan en tant que concurrente ne saurait donc être mise en doute.

95. Le Comune di Milano est-il ainsi concerné ? Si je comprends bien la thèse défendue par le Conseil, le fait qu’une ville, en tant que lieu géographique, soit choisie comme siège d’une agence de l’Union ne signifie pas que l’entité territoriale, qui est dotée de la personnalité juridique, en l’occurrence le Comune di Milano, soit elle-même concernée.

96. Il est clair qu’un tel argument ne saurait être fondé. Poussé à la limite de ses conséquences logiques, il reviendrait à ce que la ville sélectionnée comme siège d’une agence de l’Union ne soit elle‑même pas directement concernée par l’acte de l’Union qui l’établit comme siège. De même, une ville où était situé le siège d’une agence avant que celui-ci ne soit déplacé dans un autre lieu ne serait pas non plus concernée ( 34 ).

97. Une telle conclusion ne me paraît guère admissible. Il est en effet difficile d’ignorer la portée particulièrement significative des conséquences de fait, mais aussi de droit, qu’entraîne pour une collectivité locale la désignation d’un siège d’agence, non seulement sur le plan des avantages et des enjeux, mais aussi en matière de droits et d’obligations. Bien que les droits et obligations spécifiques des entités locales puissent être précisés de manière plus détaillée dans l’accord de siège à
conclure avec l’État membre concerné, il est incontestable que l’entité territoriale locale est directement concernée par la décision d’établir le siège dans une ville, et non dans une autre. Indépendamment de toute conséquence pratique liée à d’éventuels avantages économiques et sociaux, le fait même de désigner une ville comme siège d’une agence de l’Union emporte de façon intrinsèque et immédiate une incidence sur la situation juridique de celle‑ci en tant que concurrente pour ce siège ( 35
).

98. Le rôle des villes européennes qui sont (ou souhaitent être) le siège d’agences de l’Union ne saurait être réduit à celui d’un simple lieu physique dans un État membre. Contrairement à la position du Conseil, la désignation d’une ville comme siège d’une agence ne saurait être considérée comme étant une question interne à l’État membre. Il peut être utile de souligner que, contrairement à certains autres cas dans le passé, le règlement attaqué établit le siège d’une agence en désignant
spécifiquement une ville en tant qu’unité territoriale, et non en désignant un État membre ( 36 ).

99. L’argument développé par le Conseil me paraît donc impossible à soutenir. Certes, la sélection initiale visant à déterminer quelle ville à l’intérieur d’un État membre pourra concourir est une question interne à cet État membre. Il n’en demeure pas moins que le choix de la ville qui accueillera le siège de l’agence, et le rejet simultané de tous les autres concurrents, n’est plus une « simple question interne à l’État membre ». Il est clair que l’acte de l’Union est constitutif d’une décision
prise à l’échelon de la ville individuelle, et non pas purement au niveau d’un État membre, de sorte qu’il la rend concernée ( 37 ).

100. Par analogie, faudrait-il également en déduire qu’une personne physique, telle qu’un commissaire, n’est pas directement concernée par l’acte du droit (de l’Union) relatif à sa nomination (ou à sa révocation) en tant que commissaire, puisque, au bout du compte, c’est un État membre qui a en premier lieu proposé son nom ? ( 38 ) Que la « nomination » initiale soit le fait d’un État membre ne saurait signifier qu’une entité dotée d’une personnalité juridique distincte et autonome ne sera à jamais
qu’un « objet », sans pouvoir être considérée comme étant un « sujet », même s’il est clair qu’elle est directement concernée par les actes qui la mentionnent expressément et affectent sa situation juridique.

101. En conclusion, j’estime que la situation juridique du Comune di Milano a été directement modifiée par l’adoption du règlement attaqué. En effet, ce règlement a fixé, avec des effets juridiquement contraignants, la ville d’Amsterdam comme siège de l’EMA, en ayant ainsi pour effet automatique d’exclure Milan comme siège de cette agence.

2. Sur l’intérêt individuel

102. Pour qu’un acte de portée générale adopté par une institution de l’Union concerne individuellement une personne physique ou morale, il faut que cette dernière soit atteinte par l’acte en cause en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et l’individualise d’une manière analogue à celle d’un destinataire ( 39 ).

103. Dans sa requête, le Comune di Milano indique avoir été pleinement associé à la préparation de l’offre et au processus de sélection dont il est fait état au considérant 1 et à l’article 1er du règlement attaqué. Dans sa situation particulière de ville candidate dans le cadre de la procédure de sélection, le Comune di Milano est individuellement concerné par le règlement attaqué. En effet, Milan aurait été mentionnée à l’article 1er du règlement attaqué si la ville d’Amsterdam n’avait pas été
choisie. Au surplus, en présentant Milan comme l’offre italienne, le Comune di Milano a entendu, conformément à l’article 3 de son statut, favoriser le développement socio-économique et industriel de son territoire. La fixation du siège de l’EMA à Amsterdam entrave la capacité de cette commune à exercer ses compétences de la manière dont elle l’entend. Par ailleurs, le Comune di Milano a effectué des dépenses et procédé à des recherches. Il a même reçu une délégation de l’EMA afin de mieux
appréhender les critères de sélection et de mieux y répondre. Cette commune rappelle également que la Cour tient compte, dans sa jurisprudence, de la situation dans laquelle une personne est expressément mentionnée dans les actes préparatoires des actes de l’Union qui sont attaqués, ainsi que des cas où ces actes prennent en considération des éléments spécifiques relatifs aux requérants. À cet effet, le Comune di Milano se réfère à la jurisprudence en matière de droits antidumping ( 40 ) et de
marchés publics ( 41 ).

104. Le Conseil et le Parlement, soutenus par la Commission, font valoir que le Comune di Milano n’est pas individuellement concerné.

105. Le Conseil soutient que, même s’il invoque l’article 3 de son statut, le Comune di Milano n’a pas démontré en quoi l’adoption du règlement attaqué aurait affecté l’exercice spécifique de ses compétences, telles qu’attribuées par l’ordre juridique national. Les dépenses finales de cette commune sont également sans pertinence. Elles se rapportent en effet uniquement à une question d’organisation interne qui doit être traitée par l’État italien. Le Conseil fait en outre valoir que le Comune di
Milano n’a aucunement été associé à la procédure d’adoption du règlement attaqué. Sa participation à la préparation de la candidature italienne ne suffit pas à établir l’intérêt individuel. Les règles de sélection du 22 juin 2017 ne confèrent aucun droit à un autre sujet que les États membres : il leur appartient de présenter les offres, d’échanger des informations avec la Commission et de participer au processus de vote. Le fait que certains États membres aient associé leurs villes candidates
lors de la préparation de leurs offres respectives est dénué de pertinence.

106. Pour sa part, le Parlement soutient que la coopération entre les États membres par la voie des règles de sélection du 22 juin 2017 diffère totalement du processus décisionnel de l’Union. Toute participation du requérant dans ce cadre de coopération ne saurait l’« individualiser » de manière à satisfaire à l’exigence tenant à l’intérêt individuel. Par ailleurs, aucune disposition du droit de l’Union n’obligeait le législateur à tenir compte de la situation du requérant au cours de la procédure
qui a conduit à l’adoption du règlement attaqué. En tout état de cause, sans préjudice de la valeur des règles de sélection du 22 juin 2017, celles-ci ne conféraient de rôle qu’aux États membres, et non pas aux autorités locales ( 42 ).

107. Je partage la thèse du Parlement et du Conseil selon laquelle les arguments avancés par le Comune di Milano au sujet de l’incidence socio-économique qu’aurait eue la désignation du siège sur son territoire, ainsi que des dépenses et efforts qu’il a consentis pour préparer l’offre italienne, ne sont pas en eux-mêmes de nature à établir l’intérêt individuel. Qu’une entité régionale fasse valoir qu’un acte de l’Union est susceptible d’affecter certaines conditions socio‑économiques relevant de sa
compétence territoriale ne suffit pas pour que cette entité soit considérée comme étant concernée ni, a fortiori, comme étant individuellement concernée ( 43 ).

108. Je conviens également avec le Conseil que l’on ne saurait considérer que le Comune di Milano a été affecté dans l’exercice de ses prérogatives par le règlement attaqué. Le critère établi dans l’arrêt Vlaamse Gewest/Commission ( 44 ) (ci-après le « test Vlaamse Gewest ») n’est selon moi pas pertinent pour la présente procédure. Je ne vois pas en quoi le fait que le règlement attaqué a désigné Amsterdam comme siège de l’EMA à la place de Milan pourrait faire obstacle à ce que celle-ci exerce ses
compétences autonomes aux fins du test Vlaamse Gewest. Le lien avec l’exercice de ses compétences est tout au plus indirect et hypothétique.

109. La présente affaire n’est toutefois pas relative à une entité territoriale concernée au motif qu’elle s’est vu empêcher d’exercer comme elle l’entendait ses compétences propres (le test Vlaamse Gewest) ( 45 ). L’intérêt du Comune di Milano en l’espèce découle de sa situation de concurrent, étant entendu que la ville de Milan n’a pas été choisie comme siège d’une agence de l’Union en vertu du règlement attaqué. L’intérêt individuel de cette commune doit précisément s’apprécier au regard du choix
spécifique du siège de l’EMA qu’a opéré le règlement attaqué. Le critère pertinent à cet égard est celui qu’il est communément convenu d’appeler le « test Plaumann » : le critère décisif repose sur les qualités particulières au requérant, ou, à titre subsidiaire, sur la situation de fait qui le caractérise par rapport à toute autre personne et l’individualise d’une manière analogue à celle d’un destinataire ( 46 ).

110. En effet, il existe plusieurs éléments qui « individualisent » la situation du Comune di Milano et, de ce fait, caractérisent celui-ci par rapport à toute autre personne, en rendant sa situation analogue à celle d’un destinataire. Il convient de mettre l’accent sur la situation factuelle que le règlement attaqué et la procédure ayant conduit à son adoption ont fait peser sur le Comune di Milano.

111. D’une part, le tout premier considérant du règlement attaqué précise que le choix d’Amsterdam comme nouveau siège pour l’EMA résulte de la décision des représentants des États membres. Ce considérant incarne l’objet même de l’adoption du règlement attaqué. Indépendamment de la question de savoir si cette décision produit ou non des effets juridiques, elle constitue, d’un point de vue factuel, la base sur laquelle le siège de l’EMA a été établi. Dès lors, toujours d’un point de vue factuel, l’on
ne saurait ignorer que Milan a fait partie des villes candidates envisagées, et qu’elle a recueilli des voix. En tant que telle, la ville de Milan, et plus précisément le Comune di Milano, n’a pas seulement appartenu au cercle fermé et bien délimité des villes candidates, mais elle a en outre été individualisée par la voie de la procédure de sélection devant les États membres, où elle est arrivée au stade final en tant que seule concurrente directe d’Amsterdam, et elle a vu son offre rejetée en
raison de l’application des règles relatives au tirage au sort.

112. D’autre part, ainsi que le Conseil l’a fait valoir dans son mémoire en défense dans l’affaire C‑106/19, Milan a également été évoquée en tant que siège possible de l’EMA au cours de la procédure législative, plusieurs amendements (restés infructueux) ayant été présentés au cours des travaux parlementaires ( 47 ).

113. En résumé, la procédure ayant abouti à la décision des représentants des États membres ainsi que la procédure législative qui a abouti à l’adoption du règlement attaqué révèlent les circonstances factuelles particulières qui caractérisent et même individualisent le Comune di Milano. En tant qu’incarnation juridique de l’une des villes candidates, cette commune est individuellement concernée par le règlement, qui détermine le sort réservé à ses chances d’être choisie comme siège de l’EMA ( 48 ).

3. Sur l’intérêt à agir

114. Selon une jurisprudence constante de la Cour, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle‑même, d’avoir des conséquences juridiques. Le recours peut ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté. La preuve d’un tel intérêt, qui s’apprécie au jour où le recours est formé
et qui constitue la condition essentielle et première de tout recours en justice, doit être rapportée par le requérant ( 49 ).

115. Dans sa requête, le Comune di Milano soutient qu’il a un intérêt à agir. D’abord, si son recours était accueilli, la ville de Milan pourrait être choisie comme siège de l’EMA sans qu’une nouvelle procédure de sélection soit nécessaire. Dans l’hypothèse où une telle procédure devrait être réitérée, l’offre italienne serait celle qui aurait les meilleures chances de succès au regard de ses qualités objectives. Même si le siège de l’EMA n’était pas attribué à la ville de Milan pour quelque raison
que ce soit, celle-ci conserverait son intérêt à agir. Elle pourrait demander que sa situation soit rétablie sous la forme d’une compensation économique. Elle pourrait également en tirer profit si elle répondait à de futurs appels à candidatures pour le siège d’autres agences ou organismes de l’Union, puisque les procédures de sélection ne seraient alors plus affectées par les irrégularités que la Cour aurait constatées dans le cadre du présent recours. Enfin, le Comune di Milano a intérêt à
agir compte tenu de l’incidence socio-économique et industrielle importante du transfert du siège de l’EMA sur son territoire.

116. Le Conseil, le Parlement et la Commission considèrent que le Comune di Milano n’a pas d’intérêt à agir. Premièrement, le Conseil et le Parlement soutiennent, en substance, que le succès du recours du requérant ne se traduirait pas nécessairement par l’attribution du siège de l’EMA à Milan. Même si la République italienne décidait de présenter de nouveau la candidature de Milan, il serait impossible de prévoir les résultats des désignations futures. Tout intérêt potentiel futur à l’égard d’une
procédure de sélection qui serait organisée à l’avenir et ne serait pas entachée d’illégalité est effectivement hypothétique. Il n’y a pas d’intérêt direct et actuel, mais seulement potentiel et indirect. Deuxièmement, selon le Conseil, l’argument relatif à une éventuelle demande d’indemnisation devrait également être rejeté. Le règlement attaqué n’est pas à l’origine du prétendu préjudice subi par le Comune di Milano. Troisièmement, les conséquences liées aux intérêts socio-économiques et
industriels sont dénuées de pertinence, dès lors que la Cour a précisé que ces considérations ne suffisent pas à démontrer un intérêt à agir. Quatrièmement, selon le Parlement, ce règlement n’interfère pas avec l’autonomie législative ou financière du requérant. Il ne saurait non plus invoquer un intérêt personnel tiré de sa participation à la procédure de sélection. Le Comune di Milano ne dispose pas d’un intérêt personnel différent de celui de l’État italien.

117. Je conviens que, même si, en principe, la possibilité d’un recours en indemnité est suffisante pour justifier d’un intérêt à agir ( 50 ), cette action ne peut être purement hypothétique. Le Comune di Milano ne saurait se borner à évoquer la simple possibilité d’introduire un tel recours sans apporter d’éléments concrets concernant les conséquences concrètes de l’illégalité alléguée et la nature du préjudice ( 51 ).

118. Toutefois, indépendamment de la possibilité ou non d’engager un éventuel recours en indemnité dans le futur, le Comune di Milano a suffisamment démontré son intérêt à agir.

119. En cas d’annulation du règlement attaqué, force est de constater que ressurgirait la possibilité pour une autre ville qu’Amsterdam d’être désignée comme siège de l’EMA. C’est le cas de Milan, puisqu’elle a été l’une des concurrentes ayant le mieux réussi lors de la procédure qui a débouché sur la décision des représentants des États membres.

120. À cet égard, bien que les arrêts en la matière aient été rendus dans un domaine différent et spécifique du droit de l’Union, la logique fondamentale de la jurisprudence de la Cour en matière de marchés publics est de nouveau pleinement applicable en l’espèce. Un concurrent a un intérêt à agir dans la mesure où l’annulation de l’acte attaqué emporterait la réouverture de la procédure d’appel d’offres et lui permettrait de présenter une nouvelle candidature ( 52 ). L’intérêt peut même subsister
lorsque le concurrent a perdu toute chance de remporter l’appel d’offres, puisqu’il pourrait à l’avenir bénéficier de procédures « exemptes d’erreurs » de même type ( 53 ). La justification tirée de la volonté d’éviter qu’une illégalité ne se reproduise à l’avenir dépasse en effet le cadre spécifique de la jurisprudence sur les marchés publics ( 54 ). De nouveau, et bien que la procédure de sélection litigieuse ait été très spécifique et sui generis par nature, on voit mal quelle autre logique,
dans un contexte aussi particulier, ressemble à ce point, de par la façon dont ses créateurs l’ont conçue, à celle d’un appel d’offres.

121. Enfin, il est sans incidence que le gouvernement italien ait introduit son propre recours. Selon une jurisprudence constante, la coexistence de l’intérêt à agir d’un État membre et de celui de l’une de ses entités à l’encontre d’un même acte ne signifie pas que l’intérêt à agir de l’entité ne soit pas suffisant pour justifier la recevabilité d’un recours en annulation introduit sur la base de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE ( 55 ).

122. En résumé, je considère que le Comune di Milano a qualité pour contester le règlement attaqué et qu’il a intérêt à le faire. Je suis bien conscient que la jurisprudence de la Cour est stricte quant à la qualité pour agir des requérants non privilégiés en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. Malgré sa rigueur certaine, on ne doit cependant pas pour autant faire basculer cette jurisprudence dans la dimension du bizarre et donc de l’injuste. Avant qu’elle ne soit obscurcie par une
avalanche de jurisprudence encombrée de détails expliquant les raisons pour lesquelles personne ne peut rien contester directement devant les juridictions de l’Union, la question de la qualité pour agir du Comune di Milano est en réalité assez simple, dès lors qu’on l’examine en faisant preuve d’une certaine intuition de base : dans des circonstances aussi particulières et rares, cette ville est clairement concernée par le fait qu’elle n’a pas été choisie.

123. À cet égard, j’ai toujours trouvé très utile de vérifier occasionnellement avec des personnes « normales » les solutions juridiques que j’envisage : c’est‑à‑dire des personnes qui ne sont pas des juristes spécialisés en droit de l’Union, et, dans l’idéal, qui ne sont même pas juristes. Appelons cela un contrôle à l’aune de la réalité. Suis-je en mesure d’expliquer certaines idées et propositions juridiques à des êtres humains intelligents ? Si ce n’est pas le cas, il est probable que ces idées
ne soient guère convaincantes. À moins qu’elles ne soient tout simplement erronées. Je juge assez difficile d’expliquer (et de justifier), à cet égard, la proposition qui voudrait qu’une personne n’ayant pas été choisie après avoir participé à une procédure de sélection (fermée) ne soit pas concernée par le résultat de cette procédure et n’ait aucune espèce d’intérêt à la contester. Et ce avant même d’ajouter que, si une telle personne n’a pas qualité pour agir devant cette Cour, elle ne pourra
raisonnablement trouver aucune autre issue.

B.   Sur le bien-fondé

124. Sur le fond, si les présentes affaires sont certes extrêmement complexes, elles n’en peuvent pas moins concomitamment être assez simples.

125. À première vue, certains arguments soulevés par les parties dans les présentes affaires sont tout bonnement déroutants, en ne s’apparentant à rien de moins qu’à d’imaginatives acrobaties juridiques. Un État membre et une entité locale cherchent à protéger les prérogatives du Parlement européen dans un cas spécifique, apparemment contre la volonté de ce même Parlement, tandis que, dans une procédure parallèle, ce dernier insiste pour maintenir ces mêmes prérogatives. Tout en prétendant que les
États membres ne sont pas compétents pour prendre une décision sur les sièges des agences, un État membre n’en était pas moins antérieurement disposé à participer à ces mêmes procédures de sélection et l’est apparemment aussi pour l’avenir. Quant au Conseil, il affirme que la décision des représentants des États membres sur le siège d’une agence de l’Union, adoptée en vertu de l’article 341 TFUE, s’impose à tous, sans que personne ne soit ensuite véritablement limité dans ses compétences
législatives, notamment en ce qui concerne le lieu exact où cette question doit être réglée.

126. Plusieurs raisons expliquent le caractère déroutant des différentes positions argumentatives. Le présent litige rassemble cinq affaires distinctes dans lesquelles différents acteurs poursuivent des intérêts quelque peu divergents. Il existe également une complexité importante du fait du lien, qui existe certainement d’un point de vue factuel et dans la pratique institutionnelle antérieure, entre la décision des représentants des États membres et sa « mise en œuvre » ultérieure dans l’ordre
juridique de l’Union. Dans de telles conditions, il est en effet impossible de maintenir une position globale cohérente dans toutes les affaires, et de rattacher les différents types de pratiques suivies dans le passé à l’ordre constitutionnel actuel, tout en veillant à ce que l’ensemble s’accorde parfaitement.

127. Toutefois, si la Cour devait partager la solution que je propose dans mes conclusions parallèles dans les affaires EMA 1/ELA au sujet de la question cruciale (située en amont) relative à la nature juridique de la décision des représentants des États membres énonçant leurs préférences quant au lieu où doit être fixé le siège d’une nouvelle agence de l’Union, la solution aux questions (situées en aval) que soulèvent les présentes affaires jointes en ce qui concerne un acte de droit de l’Union ne
serait pas si difficile à apporter. En m’appuyant sur cette hypothèse, j’indiquerai, dans la section suivante, que ne sauraient selon moi prospérer ni le moyen tiré de la violation des prérogatives du Parlement (1), ni celui tiré de l’allégation selon laquelle la procédure (législative ordinaire) interne à l’Union aurait été en substance viciée par son association avec la décision des représentants des États membres (2).

1. Sur les premiers moyens dans l’affaire C‑106/19 et dans l’affaire C‑232/19 : la prétendue violation des prérogatives du Parlement

128. Par son premier moyen dans l’affaire C‑106/19, le gouvernement italien invoque une violation des articles 10, 13 et 14 TUE ainsi que de l’article 114, de l’article 168, paragraphe 4, sous c), et des articles 289 et 294 TFUE. Le Comune di Milano fait écho à ces arguments dans son premier moyen dans l’affaire C‑232/19. Il ressort en substance de ces arguments, qui seront traités ensemble, que le rôle du Parlement, en tant que colégislateur, a été diminué lors du processus menant à la sélection du
nouveau siège de l’EMA.

129. Il me semble nécessaire de commencer, en premier lieu, par rappeler que, à la différence des affaires jointes C‑59/18 et C‑182/18, les présentes affaires ne soulèvent pas la question de savoir si le règlement attaqué est un acte dont la légalité peut être contrôlée au titre de l’article 263 TFUE. Le règlement attaqué a été adopté dans le cadre de la procédure législative ordinaire en vertu de l’article 294 TFUE et constitue donc un acte législatif ( 56 ).

130. En deuxième lieu, les arguments du gouvernement italien et du Comune di Milano, selon lesquels le Parlement a été exclu du processus de sélection du nouveau siège de l’EMA, semblent reposer sur la prémisse selon laquelle il existe un lien juridiquement contraignant entre la décision des représentants des États membres et le règlement attaqué. Cette prémisse consiste à présenter cette décision comme la source contraignante de ce règlement en ce qui concerne la sélection du nouveau siège de
l’EMA.

131. À l’instar des thèses exposées par le Parlement et la Commission dans le cadre de la présente procédure, je considère que cette prémisse est erronée. Comme je l’explique en détail dans mes conclusions parallèles dans les affaires EMA 1/ELA ( 57 ), la décision politique des représentants des États membres a été adoptée sur la base des règles procédurales spécifiques convenues par ces États membres en dehors du système du droit de l’Union.S’il est vrai que ces règles attribuaient un rôle
spécifique à la Commission, elles n’en attribuaient aucun au Parlement.

132. Dès lors, le simple fait que le Parlement n’a pas été impliqué dans une procédure ayant abouti à la décision politique des États membres sur le nouveau siège de l’EMA – laquelle n’est pas contraignante en droit de l’Union – ne saurait être considéré comme une violation ou un contournement des prérogatives du Parlement en tant que colégislateur à part entière.

133. En troisième lieu, et comme le rappelle à juste titre la Commission dans son mémoire en intervention dans l’affaire C‑232/19, la Cour a jugé, dans son arrêt Pologne/Parlement et Conseil, qu’il appartient « exclusivement [au Parlement et au Conseil] de déterminer le contenu d’un acte » dans l’exercice du pouvoir législatif qui leur est « réservé [...] à l’article 14, paragraphe 1, TUE et à l’article 16, paragraphe 1, TUE [...] » ( 58 ).

134. Contrairement à ce que prétend le Conseil dans sa réponse au mémoire en intervention de la Commission, la pertinence de cette jurisprudence ne me paraît pas limitée aux orientations politiques du Conseil européen. Le rôle du Conseil européen est certes décrit à l’article 15 TUE. Toutefois, tel ne saurait logiquement être le cas d’une procédure instituée, entre eux, par les États membres en dehors de la structure des institutions de l’Union, qui ne saurait produire, dans l’ordre juridique de
l’Union, aucun effet juridique. Le point commun entre la situation en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 juin 2018, Pologne/Parlement et Conseil (EU:C:2018:483), et la présente situation, c’est qu’une décision politique prise en dehors de la procédure législative ne saurait préjuger de celle-ci quant à son résultat concret.

135. C’est à la lumière de ce contexte, pris comme point de départ, qu’il convient de contrôler la légalité du règlement attaqué. Ce faisant, le niveau de contrôle est nécessairement circonscrit par la nature du pouvoir d’appréciation politique exercé par une institution de l’Union telle que le Parlement ( 59 ).

136. S’agissant de la procédure législative ordinaire ayant conduit à l’adoption du règlement attaqué, je rappelle que le Parlement bénéficie de droits procéduraux découlant de sa qualité de colégislateur, laquelle le place sur un pied d’égalité avec le Conseil, comme le prévoit l’article 294 TFUE. Ces droits procéduraux, qui peuvent être exercés dans les commissions de lecture respectives ou au sein du comité de conciliation, confèrent effectivement au Parlement la possibilité non seulement
d’influencer, mais aussi de codéterminer l’issue du processus législatif. Le cas échéant, le Parlement peut même rejeter l’acte législatif proposé.

137. Il en résulte que, si le Parlement ne partageait pas la décision de transférer le siège de l’EMA à Amsterdam, il disposait de la possibilité d’empêcher que la décision politique prise précédemment par les États membres et qu’avait proposée la Commission ne soit consacrée dans le contenu d’un acte législatif contraignant du droit de l’Union. Or il n’en est manifestement pas allé ainsi au cours de la procédure législative ordinaire qui s’est tenue dans les présentes affaires, comme l’a lui‑même
souligné le Parlement.

138. Premièrement, le Parlement a examiné le projet de proposition législative de la Commission ( 60 ) lors de ses travaux du 12 au 15 mars 2018. Il a adopté un certain nombre d’amendements, tout en n’exprimant aucun désaccord avec la décision selon laquelle l’EMA devrait avoir son siège à Amsterdam ( 61 ). Avant cela, et comme le Conseil le mentionne dans l’affaire C‑106/19, des amendements ont été déposés au sein de la commission respective indiquant que le nouveau siège de l’EMA devrait être
situé à Milan ( 62 ). La justification de l’un de ces amendements mentionnait : « Un certain nombre de déclarations officielles et de rapports de presse font référence à l’impossibilité de trouver des locaux appropriés, même provisoires, pour le siège de l’Agence européenne des médicaments à Amsterdam avant mars 2019. Il en ressort que la décision du Conseil [sic] ne peut pas être mise en œuvre à l’heure actuelle. Le choix de Milan, qui peut offrir un siège tout à fait adapté et immédiatement
opérationnel, permettrait d’éviter des inconvénients, des coûts supplémentaires et des répercussions sur le droit des citoyens à la santé et permettrait d’assurer la continuité des activités » ( 63 ). Le Parlement n’a toutefois pas retenu ces suggestions ( 64 ).

139. Deuxièmement, les amendements du Parlement ont été soumis au Conseil ( 65 ). Des négociations informelles entre le Conseil et le Parlement ont suivi, au cours desquelles plusieurs points soulevés par ce dernier ont été retenus, ainsi qu’il ressort du texte final du règlement attaqué sur lequel les deux colégislateurs se sont accordés le 16 octobre 2018 ( 66 ).

140. Troisièmement, le Parlement a voté sur le projet d’acte législatif le 25 octobre 2018, en tenant compte d’un certain nombre d’échanges informels qui avaient eu lieu entre le Conseil, le Parlement et la Commission dans l’intention de parvenir à un accord sur cette question en première lecture, en évitant ainsi la nécessité d’une deuxième lecture ou d’une conciliation ( 67 ).

141. Enfin, le règlement attaqué a été adopté le 14 novembre 2018 et publié au Journal officiel le 16 novembre 2018 ( 68 ).

142. Compte tenu des détails du processus législatif décrit ci-dessus, qui a conduit à l’adoption du règlement attaqué, je vois mal en quoi le rôle du Parlement aurait été réduit à un rôle purement formel.

143. Là encore, si le Parlement souhaitait exprimer son désaccord avec le choix d’Amsterdam comme nouveau siège de l’EMA, il a eu plusieurs occasions formelles et informelles de le faire. Cependant, la procédure législative révèle que de nombreux amendements du Parlement ont en fait été acceptés par le Conseil et se sont retrouvés dans le texte final du règlement attaqué. Or le siège lui-même n’a jamais été contesté par le Parlement au cours de la procédure législative ordinaire.

144. Ce n’est, à mon sens, qu’au vu de ce contexte global que l’on peut valablement apprécier les « regrets » exprimés par le Parlement en annexe à sa résolution du 25 octobre 2018 ( 69 ). En effet, à cette occasion, le Parlement a relevé que son rôle de colégislateur n’avait « pas été dûment pris en compte puisqu’il n’a[vait] pas été associé à la procédure de sélection du nouveau siège de l’Agence européenne des médicaments » ( 70 ).

145. Toutefois, cette déclaration doit d’abord être comprise comme se rapportant au processus de sélection qui a eu lieu lors de la réunion des représentants des États membres, qui s’est déroulée en amont de la procédure législative ordinaire, à laquelle le Parlement n’a pas été associé parce que les États membres n’ont pas souhaité que cette institution le soit. Le fait que les États membres n’ont pas souhaité associer le Parlement ne saurait en soi constituer une violation des prérogatives de ce
dernier, dès lors que, s’agissant de ce qui se déroule en dehors de l’ordre juridique de l’Union, celui-ci ne dispose d’aucune des prérogatives de codécision prévues par les traités.

146. Deuxièmement, quant aux répercussions d’une décision déjà prise par les États membres en dehors du système des traités, il est certes tout à fait possible de comprendre la volonté du Parlement, exprimée dans la résolution susmentionnée, d’être associé au processus informel qui précède le processus législatif ordinaire, surtout si une décision sur le siège d’une agence devait déjà y être prise.

147. Toutefois, il n’appartient pas à cette Cour d’agir au sujet de regrets politiques relatifs au passé ni à propos de souhaits pour l’avenir. L’essentiel reste que le Parlement a eu l’occasion de s’exprimer sur la question dans le cadre de la procédure législative ordinaire. Il a néanmoins décidé, quelle qu’en soit la raison, de ne pas contester le choix du siège fait précédemment par les représentants des États membres, et de ne pas défendre sa position à cette occasion ( 71 ). En réalité, ces
choix ne sont qu’une question d’opportunité, d’annonce et de stratégie politiques, sans rien qui puisse faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.

148. C’est ce que paraît confirmer la position adoptée par le Parlement dans l’affaire C‑232/19. Le Parlement fait d’ailleurs valoir que le contenu du règlement attaqué a été adopté indépendamment de la décision des représentants des États membres, dans le cadre d’une procédure dans laquelle le Parlement a joué son rôle autonome de colégislateur, en exerçant son pouvoir d’appréciation et sans être contraint à aucun moment par le choix politique effectué par les États membres.

149. En outre, il convient de relever que ni le gouvernement italien ni le Comune di Milano ne reprochent au Parlement de ne pas avoir exercé son pouvoir d’appréciation en qualité de colégislateur de telle sorte qu’il en aurait résulté une violation des normes requises. On pourrait de nouveau rappeler que le large pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions de l’Union dans l’exercice de leurs pouvoirs législatifs est, en principe, soumis à un contrôle juridictionnel restreint, dans le but
de déterminer, notamment, le caractère suffisant de sa motivation et l’absence d’erreurs manifestes d’appréciation ( 72 ).

150. À cet égard, le préambule du règlement attaqué se réfère au contexte créé par la décision du Royaume‑Uni de se retirer de l’Union et à la décision des représentants des États membres du 20 novembre 2017 (considérant 1), ainsi qu’à la nécessité de « garantir le bon fonctionnement de l’[EMA] dans son nouveau lieu d’implantation » ou le « fonctionnement ininterrompu de l’[EMA] durant et après le transfert » (considérants 3 et 4). Il reconnaît en outre le « caractère extraordinaire de la
situation » (considérant 4) ainsi que l’« urgence » (considérant 6).

151. Bien qu’étant assez concises, ces affirmations fournissent certainement des raisons plausibles et, compte tenu du standard de contrôle, une motivation suffisante quant au choix de la ville d’Amsterdam comme nouveau siège de l’EMA par le législateur de l’Union.

152. Au vu de ce qui précède, je propose à la Cour de rejeter le premier moyen du recours dans l’affaire C‑106/19 et le premier moyen du recours dans l’affaire C‑232/19.

2. Sur le second moyen dans l’affaire C‑106/19, tiré du fait que l’illégalité du règlement attaqué découle de celle de la décision des représentants des États membres, et sur les deuxième, troisième et quatrième moyens dans l’affaire C‑232/19

153. Le second moyen que soulève le gouvernement italien dans l’affaire C‑106/19 ainsi que les deuxième, troisième et quatrième moyens dans l’affaire C‑232/19 consistent dans la thèse selon laquelle l’illégalité du règlement attaqué résulte de l’illégalité initiale de la décision des représentants des États membres. Cette thèse est fondée sur un argument correspondant au principe du « fruit de l’arbre empoisonné » : la décision initiale des représentants des États membres ayant été adoptée de
manière illégale, le choix du siège de l’EMA, qu’a ensuite consacré le règlement attaqué, est naturellement entaché du même vice.

154. Deux réponses doivent être apportées à ces arguments.

155. D’une part, étant donné que le Parlement n’avait aucun rôle à jouer dans la phase informelle de la sélection du nouveau siège de l’EMA, les prérogatives du Parlement n’ont pas pu être violées lors de cette phase informelle. Pour les raisons déjà exposées dans la section précédente des présentes conclusions, ces prérogatives n’ont pas non plus été violées lors de la procédure législative ordinaire qui a précédé l’adoption du règlement attaqué.

156. D’autre part, la décision des représentants des États membres relative au siège d’une agence, qui ne relève pas de l’article 341 TFUE et ne peut donc pas être fondée sur celui-ci, ne constitue pas un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE. Or un tel acte émanant des États membres ne produit pas d’effets juridiques obligatoires dans l’ordre juridique de l’Union. En tant que telles, les institutions participant à la procédure législative ordinaire relative à la désignation d’un organisme
peuvent naturellement faire abstraction d’une telle volonté politique non contraignante quant au lieu d’implantation du nouveau siège d’un organisme. Il en résulte toutefois que les vices éventuels ayant entaché cet acte (non contraignant) ne sauraient affecter la légalité de la procédure législative ordinaire qui est indépendante dudit acte.

157. En définitive, comme la décision n’est pas contraignante, la logique de l’« illégalité par association », qu’invoquent à ce titre le gouvernement italien et le Comune di Milano, est tout simplement inopérante. Par ailleurs, pour le surplus, le second moyen dans l’affaire C‑106/19 et les deuxième, troisième et quatrième moyens de l’affaire C‑232/19 sont en réalité dirigés contre une décision des États membres qui échappe à la compétence de la Cour.

158. Ainsi, au vu de ce qui précède, je propose à la Cour de rejeter le second moyen dans l’affaire C‑106/19 ainsi que les deuxième, troisième et quatrième moyens dans l’affaire C‑232/19.

159. En conclusion, j’ajouterai que l’on peut comprendre le mécontentement d’un candidat ayant perdu après avoir participé à une compétition qui, tout en commençant comme un concours fondé sur des mérites mesurés à l’aune d’une liste définie de critères servant à évaluer les concurrents, s’achève par une décision relevant en définitive du plus pur hasard, prise à l’issue d’un tirage au sort.

160. Cela dit, d’un point de vue structurel, et pour nuancer les propos tenus au début des présentes conclusions, il pourrait bien exister des circonstances dans lesquelles l’issue non contrôlable d’un tirage au sort est effectivement d’une grande pertinence, y compris en matière de prise de décisions de nature juridique. Une telle procédure présente notamment de l’intérêt pour adopter une décision (efficace quant aux coûts) en vue de départager des candidats qui, au stade de la décision, sont tous
autant susceptibles d’être retenus. Il existe une différence naturelle dans la logique d’un tirage au sort considéré en tant que seul critère de sélection (lorsque le mérite n’importe pas et que tout est laissé au hasard), par rapport à un tirage au sort effectué à l’issue d’une sélection fondée sur les mérites, lorsque la situation hypothétique est qu’il n’y a plus que quelques candidats ex æquo, dont les mérites sont tous plus ou moins équivalents (et qu’il n’y a pas d’appétit particulier à
passer les jours suivants enfermés dans une chapelle Sixtine, à effectuer des tours de scrutin successifs jusqu’à ce qu’émerge une fumée blanche).

161. Quoi qu’il en soit, lors de la fixation des règles relatives à la sélection litigieuse, la République italienne, tout comme l’ensemble des autres États membres adhérant à ces règles, se trouvait derrière un « voile d’ignorance » presque parfait quant au résultat du processus de sélection. En effet, il ne fait guère de doute que ces États membres acceptaient ces règles dans l’abstrait, sans savoir si, par la suite, celles‑ci finiraient par être appliquées à leur profit ou à leur détriment. À en
croire la philosophie politique sur ce point, les règles ainsi convenues sont par définition plus justes que toute autre réglementation ( 73 ).

162. Cela ne veut pas dire que la procédure concrète de sélection n’a pas été sans faille. Il s’agit plutôt de suggérer que, si, de façon plus générale, au regard des objectifs et intérêts qui ont été proclamés, la République italienne ou tout autre État membre, et, compte tenu de la compétence de l’Union pour décider du siège d’un organisme, les institutions de l’Union, ne croient plus aujourd’hui au caractère approprié de telles règles, ils sont naturellement libres de mieux les (co)concevoir à
l’avenir.

VI. Sur les dépens

163. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens.

164. Sur le plan formel, il est vrai que, dans les présentes affaires, le Comune di Milano et la République italienne ont succombé dans la mesure où il a été établi que les moyens dirigés contre le règlement attaqué ne sont pas fondés et que la Cour n’est pas compétente pour connaître des moyens qui ont été soulevés dans l’affaire C‑232/19 contre la décision des représentants des États membres.

165. Toutefois, étant entendu (i) qu’il s’agit d’un contentieux complexe et intrinsèquement institutionnel, qui a porté aussi bien sur les affaires antérieures que sur la clarification des règles pour l’avenir ; (ii) que l’issue des présentes affaires jointes est effectivement devenue liée à la solution d’un autre ensemble d’affaires jointes, dans le cadre duquel la déclaration que demandait le Comune di Milano dans la présente procédure a en réalité été indirectement fournie, et (iii) que la Cour a
joint les présentes affaires et a tenu une audience commune englobant les affaires C‑59/18, C‑182/18 et C‑743/19, à la suite de laquelle une affectation rétroactive des dépens exacts pour chaque cas individuel pourrait constituer un exercice relativement complexe, j’estime qu’il serait plus juste et équitable d’appliquer exceptionnellement l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure de la Cour et d’ordonner que chaque partie supporte ses propres dépens.

VII. Conclusion

166. Dans l’affaire C‑106/19, je propose que la Cour statue de la façon suivante :

– le recours est rejeté ;

– la République italienne, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen supportent leurs propres dépens ;

– le Royaume des Pays-Bas et la Commission européenne supportent leurs propres dépens.

167. Dans l’affaire C‑232/19, je propose que la Cour statue de la façon suivante :

– le recours est rejeté ;

– la Cour n’est pas compétente pour connaître du recours dans la mesure où elle est invitée à déclarer sans effet la décision des représentants des États membres qui a été adoptée le 20 novembre 2017 en marge d’une réunion du Conseil de l’Union européenne et qui a fixé le nouveau siège de l’Agence européenne des médicaments à Amsterdam (Pays‑Bas) ;

– le Comune di Milano (commune de Milan, Italie), le Conseil et le Parlement européen supportent leurs propres dépens ;

– le Royaume des Pays-Bas et la Commission européenne supportent leurs propres dépens.

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( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Duxbury, N., Random Justice: On Lotteries and Legal Decision-Making, Clarendon Press, Oxford, 1999, notamment p. 5 et 14.

( 3 ) Tout en s’y engageant indirectement, puisque le Comune di Milano fait notamment valoir dans ses écritures que cette façon de sélectionner le nouveau siège de l’Agence européenne des médicaments (EMA) était entachée d’un détournement de pouvoir et qu’elle portait atteinte aux principes de transparence, de bonne administration et d’équité.

( 4 ) Conclusions dans les affaires République italienne et Comune di Milano/Conseil (siège de l’Agence européenne des médicaments), et Parlement/Conseil (siège de l’Autorité européenne du travail) (affaires jointes C‑59/18 et C‑182/18, et affaire C‑743/19) (ci-après « EMA 1/ELA »), présentées le même jour que les présentes conclusions.

( 5 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments (JO 2018, L 291, p. 3).

( 6 ) Document P8_TA (2018) 0427, résolution législative du Parlement européen [COM(2017) 0735 – C8 ‑0421/2017 – 2017/0328(COD)] (JO 2020, C 345, p. 456).

( 7 ) JO 1993, L 214, p. 1.

( 8 ) Décision prise du commun accord des représentants des gouvernements des États membres réunis au niveau des chefs d’État ou de gouvernement relative à la fixation des sièges de certains organismes et services des Communautés européennes ainsi que d’Europol (JO 1993, C 323, p. 1).

( 9 ) JO 2004, L 136, p. 1.

( 10 ) Note du Conseil XT 21045/17 – Procédure conduisant à une décision relative au transfert de l’Agence européenne des médicaments et de l’Autorité bancaire européenne dans le cadre du retrait du Royaume‑Uni de l’Union.

( 11 ) Document du Conseil 14559/17 – Résultats de la session du Conseil [3579e session du Conseil, Affaires générales (article 50)].

( 12 ) Communiqué de presse du 20 novembre 2017, « Transfert de l’Agence européenne des médicaments à Amsterdam, aux Pays-Bas » – https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2017/11/20/european-medicines-agency-to-be-relocated-to-city-country/.

( 13 ) Voir la dernière phrase du point 1 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments [COM/2017/0735 final – 2017/0328(COD)].

( 14 ) Voir article 71 bis du règlement no 726/2004, tel que modifié par l’article 1er du règlement 2018/1718.

( 15 ) Dans un souci d’exhaustivité, il convient d’admettre que, avant de détailler les deux moyens invoqués, le gouvernement italien expose également, dans le cadre de la présente procédure de contestation de la légalité du règlement attaqué, son point de vue sur les raisons pour lesquelles la décision relative au siège des agences relève de la compétence exclusive de l’Union et non pas des États membres. J’examine toutefois de façon circonstanciée ces arguments dans mes conclusions parallèles dans
les affaires EMA 1/ELA (note en bas de page 4), auxquelles le gouvernement italien a participé et où il a été pleinement entendu. Aussi limiterai-je, aux fins des présentes conclusions, l’exposé de la position du gouvernement italien aux deux moyens qu’il a invoqués spécifiquement à l’encontre du règlement attaqué.

( 16 ) Décision prise d’un commun accord entre les représentants des gouvernements des États membres le 13 juin 2019 fixant le siège de l’Autorité européenne du travail (JO 2019, L 189, p. 68). La décision relative au siège de l’ELA a été instituée par le règlement (UE) 2019/1149 du Parlement européen et du Conseil, du 20 juin 2019, instituant l’Autorité européenne du travail, modifiant les règlements (CE) no 883/2004, (UE) no 492/2011 et (UE) 2016/589, et abrogeant la décision (UE) 2016/344 (JO
2019, L 186, p. 21).

( 17 ) Le recours a été initialement introduit devant le Tribunal (affaire T‑75/19). Le 13 mars 2019, le Tribunal a décidé, conformément à l’article 54, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 128 du règlement de procédure du Tribunal, de se dessaisir au profit de la Cour afin que celle-ci puisse statuer sur ce recours, étant entendu que l’affaire T‑75/19 soulevait la question de la validité du même acte que dans l’affaire C‑106/19 (ordonnance du
13 mars 2019, Comune di Milano/Parlement et Conseil, T‑75/19, non publiée, EU:T:2019:163).

( 18 ) Décision portant adoption de son règlement intérieur (2009/937/UE) (JO 2009, L 325, p. 35).

( 19 ) Les guillemets sont ajoutés. Il résulte de l’annexe 5 du recours de la Comune di Milano que cette partie se réfère à la note du Conseil du 31 octobre 2017 XT 21092/17 – Procédure conduisant à une décision relative au transfert de l’Agence européenne des médicaments et de l’Autorité bancaire européenne dans le cadre du retrait du Royaume‑Uni de l’Union, qui complète les règles de sélection sur les questions pratiques relatives au vote (note du Conseil XT 21045/17, voir note en bas de page 10
des présentes conclusions).

( 20 ) Décision portant adoption de son règlement intérieur (2009/937/UE) (JO 2009, L 325, p. 35).

( 21 ) Voir note en bas de page 19 des présentes conclusions.

( 22 ) Ordonnance du 9 juillet 2013, Regione Puglia/Commission (C‑586/11 P, non publiée, EU:C:2013:459, point 30 et jurisprudence citée).

( 23 ) Arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci (C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 42 et jurisprudence citée).

( 24 ) Ordonnance du 12 octobre 2011, GS/Parlement et Conseil (T‑149/11, non publiée, EU:T:2011:590, point 24 et jurisprudence citée).

( 25 ) De même que l’« effet direct » n’équivaut pas à l’« intérêt direct » en ce qui concerne la qualité pour agir contre les directives – voir mes conclusions dans l’affaire Nord Stream 2/Parlement et Conseil (C‑348/20 P, EU:C:2021:831, points 35 à 46).

( 26 ) Voir, par exemple, arrêts du 25 octobre 1977, Metro SB-Großmärkte/Commission (26/76, EU:C:1977:167, point 4), et du 15 décembre 1988, Irish Cement/Commission (166/86 et 220/86, EU:C:1988:549, point 16).

( 27 ) Voir mes conclusions dans les affaires EMA 1/ELA, points 164 à 176.

( 28 ) Pour une systématisation de la jurisprudence relative à la qualité pour agir des concurrents dans ces domaines, voir arrêt du 3 mai 2018, Distillerie Bonollo e.a./Conseil (T‑431/12, EU:T:2018:251, points 54 à 59).

( 29 ) La position concurrentielle sur le marché a, dans certains cas, été considérée comme étant un élément factuel. Voir, par exemple, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil (C‑583/11 P, EU:C:2013:21, point 71), et arrêt du 3 mai 2018, Distillerie Bonollo e.a./Conseil (T‑431/12, EU:T:2018:251, point 52).

( 30 ) Arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci (C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 47).

( 31 ) Pour un exemple récent, voir arrêt du 10 février 2021, Sophia Group/Parlement (T‑578/19, non publié, EU:T:2021:77). Voir également arrêt du 20 mars 2013, Nexans France/Entreprise commune Fusion for Energy (T‑415/10, EU:T:2013:141, point 55 et jurisprudence citée).

( 32 ) Voir, par exemple, article 170 du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1).

( 33 ) Arrêt du 23 avril 1986, Les Verts/Parlement (294/83, EU:C:1986:166, points 29 à 31).

( 34 ) En l’espèce, la ville de Londres se trouverait dans une situation analogue à celle de la ville d’Amsterdam elle-même, dans la mesure où la nationalité n’est pas pertinente aux fins de la qualité pour agir au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, même lorsqu’il s’agit de la qualité pour agir des États tiers, voir arrêt du 22 juin 2021, Venezuela/Conseil (Affectation d’un État tiers) (C‑872/19 P, EU:C:2021:507). Le raisonnement développé aux points 40 à 53 de cet arrêt est entièrement
applicable aux entités territoriales d’États tiers.

( 35 ) Il va de soi que la jurisprudence relative aux fonds européens ne saurait, de ce fait, faire l’objet d’une application par analogie dans ce contexte. Voir, par exemple, arrêt du 22 mars 2007, Regione Siciliana/Commission (C‑15/06 P, EU:C:2007:183).

( 36 ) Voir, par exemple, article 4, paragraphe 2, du règlement (CEE) no 1365/75 du Conseil, du 26 mai 1975, concernant la création d’une Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (JO 1975, L 139, p. 1), qui prévoit que « le siège de la Fondation est fixé en Irlande ». De même, les représentants des gouvernements des États membres, réunis au niveau des chefs d’État ou de gouvernement le 29 octobre 1993, ont décidé que l’Office de l’harmonisation dans le marché
intérieur (marques, dessins et modèles) aurait son siège en Espagne, dans une ville que le gouvernement espagnol désignerait – Décision prise du commun accord des représentants des gouvernements des États membres réunis au niveau des chefs d’État ou de gouvernement relative à la fixation des sièges de certains organismes et services des Communautés européennes ainsi que d’Europol (JO 1993, C 323, p. 1).

( 37 ) Si l’on suit le raisonnement du Conseil jusqu’à sa conclusion (il)logique, et qu’il ne s’agit là effectivement que d’une question « purement interne » à un État membre, l’État membre dont la ville proposée a été sélectionnée devrait aussi avoir toute latitude de tout simplement « transférer » le siège de l’agence en un autre lieu de son territoire géographique. Ainsi le Royaume des Pays-Bas resterait-il libre de déplacer à tout moment le siège de l’EMA vers, par exemple, Tilbourg ou Lelystad.

( 38 ) Au demeurant, aucune discussion sur l’exigence de l’« intérêt direct » ne figure dans l’arrêt du 12 mai 2015, Dalli/Commission (T‑562/12, EU:T:2015:270), qui concerne un recours en annulation dirigé contre une décision verbale qu’aurait prétendument prise le président de la Commission d’alors en vue d’exercer, conformément à l’article 17, paragraphe 6, TUE, son pouvoir de demander la démission du requérant en tant que membre de la Commission.

( 39 ) En ce sens, voir arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 223), et du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission (C‑453/19 P, EU:C:2021:608, point 33 et jurisprudence citée).

( 40 ) Arrêt du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil (C‑358/89, EU:C:1991:214, points 14 et 15 ainsi que jurisprudence citée).

( 41 ) Arrêt du 28 octobre 1982, Groupement des Agences de voyages/Commission (135/81, EU:C:1982:371, point 11).

( 42 ) Le Parlement cite par analogie l’ordonnance du 2 juin 2008, WWF-UK/Conseil (T‑91/07, non publiée, EU:T:2008:170, point 72).

( 43 ) En ce sens, voir ordonnances du 16 juin 1998, Comunidad Autónoma de Cantabria/Conseil (T‑238/97, EU:T:1998:126, points 49 et 50 ainsi que jurisprudence citée), et du 23 octobre 1998, Regione Puglia/Commission et Espagne (T‑609/97, EU:T:1998:249, points 21 et 22).

( 44 ) Voir, notamment, arrêts du 30 avril 1998, Vlaamse Gewest/Commission (T‑214/95, EU:T:1998:77, point 29) ; du 15 juin 1999, Regione Autonoma Friuli-Venezia Giulia/Commission (T‑288/97, EU:T:1999:125, point 32) ; du 23 octobre 2002, Diputación Foral de Guipúzcoa e.a./Commission (T‑269/99, T‑271/99 et T‑272/99, EU:T:2002:258, point 41), et du 5 octobre 2005, Land Oberösterreich et Autriche/Commission (T‑366/03 et T‑235/04, EU:T:2005:347, point 28). Pour une analyse plus approfondie de cette
jurisprudence, voir mes conclusions dans l’affaire Région de Bruxelles-Capitale/Commission (C‑352/19 P, EU:C:2020:588, points 58 à 62).

( 45 ) En tout état de cause, le test Vlaamse Gewest n’est manifestement pas le seul moyen par lequel une entité régionale pourrait prouver son intérêt direct et individuel – voir, par exemple, arrêt du 10 février 2000, Nederlandse Antillen/Commission (T‑32/98 et T‑41/98, EU:T:2000:36, points 50 à 57).

( 46 ) Voir note en bas de page 39 des présentes conclusions.

( 47 ) Voir amendements 39, 46, 47 et 48 de la proposition de règlement du 31 janvier 2018 par la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, « Amendements 1 – 51, Projet de rapport, Giovanni La Via, Emplacement du siège de l’Agence européenne des médicaments », [COM(2017) 0735 – C8‑0421/2017 – 2017/0328(COD)] –https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/ENVI-AM-616891_FR.pdf.

( 48 ) Voir, par analogie, arrêts du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission (92/78, EU:C:1979:53, points 25 et 26), ainsi que du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta (C‑496/99 P, EU:C:2004:236, point 57).

( 49 ) Voir, par exemple, arrêt du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil (C‑236/17 P, EU:C:2019:258, point 91).

( 50 ) En ce sens, voir arrêts du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission (C‑33/14 P, EU:C:2015:609, points 69 et 79 ainsi que jurisprudence citée), et du 7 novembre 2018, BPC Lux 2 e.a./Commission (C‑544/17 P, EU:C:2018:880, point 43). On pourrait également rappeler, à cet égard, que, même lorsqu’elles agissent en dehors du cadre juridique de l’Union, ses institutions ne sont pas préservées d’éventuels recours en indemnité au titre des articles 268 et 340 TFUE. Voir, à cet égard, arrêt du
20 septembre 2016, Ledra Advertising e.a./Commission et BCE (C‑8/15 P à C‑10/15 P, EU:C:2016:701, points 54 à 60).

( 51 ) Voir arrêt du 30 avril 2020, Izba Gospodarcza Producentów i Operatorów Urządzeń Rozrywkowych/Commission (C‑560/18 P, EU:C:2020:330, points 73 et 74).

( 52 ) Arrêt du 6 juillet 2000, AICS/Parlement (T‑139/99, EU:T:2000:182, point 33).

( 53 ) Voir, par exemple, arrêts du 11 mai 2010, PC-Ware Information Technologies/Commission (T‑121/08, EU:T:2010:183, point 40), et du 20 septembre 2011, Evropaïki Dynamiki/BEI (T‑461/08, EU:T:2011:494, points 64 à 66).

( 54 ) Voir arrêts du 6 septembre 2018, Bank Mellat/Conseil (C‑430/16 P, EU:C:2018:668, point 64) ; du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission (C‑362/05 P, EU:C:2007:322, points 50 à 52), et du 22 mars 2018, De Capitani/Parlement (T‑540/15, EU:T:2018:167, point 32).

( 55 ) Arrêts du 30 avril 1998, Vlaamse Gewest/Commission (T‑214/95, EU:T:1998:77, point 30), et du 15 décembre 1999, Freistaat Sachsen e.a./Commission (T‑132/96 et T‑143/96, EU:T:1999:326, point 92). Voir également arrêt du 10 février 2000, Nederlandse Antillen/Commission (T‑32/98 et T‑41/98, EU:T:2000:36, point 58).

( 56 ) Voir, à cet égard, ordonnance du 6 septembre 2011, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil (T‑18/10, EU:T:2011:419, point 60).

( 57 ) Voir mes conclusions dans les affaires EMA 1/ELA, points 83 à 143 et 164 à 176.

( 58 ) Arrêt du 21 juin 2018, Pologne/Parlement et Conseil (C‑5/16, EU:C:2018:483, point 84 et jurisprudence citée).

( 59 ) Voir, à cet égard, arrêt du 19 décembre 2019, Puppinck e.a./Commission (C‑418/18 P, EU:C:2019:1113, points 95 et 96).

( 60 ) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments [COM/2017/0735 final – 2017/0328 (COD)].

( 61 ) Amendements du Parlement européen, adoptés le 15 mars 2018, à la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments [COM(2017) 0735 – C8‑0421/2017 – 2017/0328(COD)] (JO 2019, C 162, p. 147).

( 62 ) Voir amendements 39, 46, 47 et 48 de la proposition de règlement du 31 janvier 2018 par la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, « Amendements 1 - 51, Projet de rapport, Giovanni La Via, Emplacement du siège de l’Agence européenne des médicaments », [COM(2017) 0735 – C8‑0421/2017 – 2017/0328(COD)] –https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/ENVI-AM-616891_FR.pdf.

( 63 ) Ibid., justification de l’amendement 46.

( 64 ) Amendements du Parlement européen, adoptés le 15 mars 2018, à la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments [COM(2017) 0735 – C8‑0421/2017 – 2017/0328(COD)] .

( 65 ) Dossier interinstitutionnel 2017/0328 (COD), no 7098/18 du 21 mars 2018.

( 66 ) Dossier interinstitutionnel 2017/0328 (COD), no 13176/18 du 16 octobre 2018.

( 67 ) Dossier interinstitutionnel 2017/0328 (COD), no 13316/18 du 30 octobre 2018.

( 68 ) Note sans pertinence dans la version en langue française des présentes conclusions.

( 69 ) Résolution législative du Parlement européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) no 726/2004 en ce qui concerne la fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments [COM(2017) 0735 – C8‑0421/2017 – 2017/0328(COD)].

( 70 ) Ibid., annexe « Déclaration du Parlement européen ».

( 71 ) Contrairement à l’affaire pendante parallèle C‑743/19, Parlement/Conseil (siège de l’ELA), où le Parlement a décidé de procéder différemment.

( 72 ) Voir note en bas de page 60 des présentes conclusions.

( 73 ) Rawls, J., A Theory of Justice, Revised Edition, Harvard University Press, 1999, p. 118 et suiv.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-106/19
Date de la décision : 06/10/2021
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

Recours en annulation – Droit institutionnel – Règlement (UE) 2018/1718 – Fixation du siège de l’Agence européenne des médicaments (EMA) à Amsterdam (Pays-Bas) – Article 263 TFUE – Recevabilité – Intérêt à agir – Qualité pour agir – Affectation directe et individuelle – Décision adoptée par les représentants des gouvernements des États membres en marge d’une réunion du Conseil en vue de fixer le lieu d’implantation du siège d’une agence de l’Union européenne – Absence d’effets contraignants dans l’ordre juridique de l’Union – Prérogatives du Parlement européen.

Dispositions institutionnelles


Parties
Demandeurs : République italienne et Comune di Milano
Défendeurs : Conseil de l'Union européenne et Parlement européen.

Composition du Tribunal
Avocat général : Bobek

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:816

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