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02/09/2021 | CJUE | N°C-226/20

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. G. Pitruzzella, présentées le 2 septembre 2021., Eurofer, Association Européenne de l'Acier, AISBL contre Commission européenne., 02/09/2021, C-226/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GIOVANNI PITRUZZELLA

présentées le 2 septembre 2021 ( 1 )

Affaire C‑226/20 P

Eurofer, Association Européenne de l’Acier, AISBL

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Dumping – Règlement d’exécution (UE) 2017/1795 – Importation de produits plats laminés à chaud, en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés – Clôture de la procédure concernant les importations originaires de Serbie – Règlement (UE) 2016/1036 – Article 3, paragraph

e 4, sous a), et article 9, paragraphes 2 et 3 – Détermination de l’existence d’un préjudice – Évaluation cumulative des effets des import...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GIOVANNI PITRUZZELLA

présentées le 2 septembre 2021 ( 1 )

Affaire C‑226/20 P

Eurofer, Association Européenne de l’Acier, AISBL

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Dumping – Règlement d’exécution (UE) 2017/1795 – Importation de produits plats laminés à chaud, en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés – Clôture de la procédure concernant les importations originaires de Serbie – Règlement (UE) 2016/1036 – Article 3, paragraphe 4, sous a), et article 9, paragraphes 2 et 3 – Détermination de l’existence d’un préjudice – Évaluation cumulative des effets des importations en provenance de plus d’un pays – Caractère “négligeable” du volume
des importations en provenance d’un pays donné – Clôture de la procédure – Article 20, paragraphe 2 – Violation des droits de la défense »

1. Dans le cadre d’une enquête antidumping, la Commission européenne peut‑elle considérer comme étant « négligeable » un volume d’importations dans l’Union européenne, en provenance d’un pays donné, qui représente une part de marché de 1,04 % et qui est donc – légèrement – supérieur au seuil de 1 % ? Dans ces conditions, la Commission peut-elle par conséquent décider de ne pas évaluer les effets des importations en provenance de ce pays de façon cumulative avec les importations en provenance des
autres pays faisant l’objet de l’enquête et, partant, décider de clôturer l’enquête en ce qui concerne les importations en provenance dudit pays ?

2. Telles sont en substance les questions que la Cour devra traiter dans la présente affaire qui porte sur un pourvoi par lequel Eurofer, Association Européenne de l’Acier, AISBL (ci-après « Eurofer ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 mars 2020, Eurofer/Commission ( 2 ) (ci-après l’« arrêt attaqué »), ayant rejeté le recours d’Eurofer tendant à l’annulation partielle du règlement d’exécution (UE) 2017/1795 ( 3 ) (ci-après le « règlement litigieux »), par lequel
la Commission a clôturé l’enquête antidumping concernant les importations dans l’Union de certains produits plats laminés à chaud, en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés originaires de Serbie.

I. Le cadre juridique

3. L’article 3 du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non-membres de l’Union européenne ( 4 ) (ci-après le « règlement de base »), intitulé « Détermination de l’existence d’un préjudice », prévoit à ses paragraphes 3 et 4 :

« 3.   En ce qui concerne le volume des importations faisant l’objet d’un dumping, on examine s’il y a eu une augmentation notable des importations faisant l’objet d’un dumping, soit en quantités absolues, soit par rapport à la production ou à la consommation dans l’Union. En ce qui concerne l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix, on examine s’il y a eu, pour les importations faisant l’objet d’un dumping, une sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un
produit similaire de l’industrie de l’Union ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites. Un seul ou plusieurs de ces facteurs ne constituent pas nécessairement une base de jugement déterminante.

4.   Lorsque les importations d’un produit en provenance de plus d’un pays font simultanément l’objet d’enquêtes antidumping, les effets de ces importations ne peuvent faire l’objet d’une évaluation cumulative que s’il a été établi que :

a) la marge de dumping établie en relation avec les importations en provenance de chaque pays est supérieure au niveau de minimis au sens de l’article 9, paragraphe 3, et le volume des importations en provenance de chaque pays n’est pas négligeable ; et

b) une évaluation cumulative des effets des importations est appropriée compte tenu des conditions de concurrence entre les produits importés et des conditions de concurrence entre les produits importés et un produit similaire de l’Union. »

4. L’article 5, paragraphe 7, du règlement de base dispose :

« Les éléments de preuve relatifs au dumping et au préjudice sont examinés simultanément afin de décider si une enquête sera ouverte ou non. Une plainte est rejetée lorsque les éléments de preuve relatifs au dumping ou au préjudice sont insuffisants pour justifier la poursuite du dossier. Une procédure n’est pas ouverte à l’encontre de pays dont les importations représentent une part de marché inférieure à 1 %, à moins que collectivement ces pays représentent 3 %, ou davantage, de la consommation
de l’Union. »

5. L’article 9 du règlement de base dispose à ses paragraphes 2 et 3 :

« 2.   Lorsque aucune mesure de défense ne se révèle nécessaire, l’enquête ou la procédure est close. [...]

3.   Pour les procédures ouvertes conformément à l’article 5, paragraphe 9, le préjudice est normalement considéré comme négligeable lorsque les importations concernées représentent moins que les volumes prévus à l’article 5, paragraphe 7. Ces mêmes procédures sont immédiatement closes lorsqu’il a été établi que la marge de dumping, en pourcentage des prix à l’exportation, est inférieure à 2 %, étant entendu que seule l’enquête est close lorsque la marge est inférieure à 2 % pour des exportateurs
individuels et que ceux‑ci restent soumis à la procédure et peuvent faire l’objet d’une nouvelle enquête lors de tout réexamen ultérieur effectué pour le pays concerné en vertu de l’article 11. »

6. L’article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement de base dispose :

« 1.   Les plaignants, importateurs et exportateurs ainsi que leurs associations représentatives et les représentants du pays exportateur peuvent demander à être informés des détails sous-tendant les faits et considérations essentiels sur la base desquels des mesures provisoires ont été instituées. Les demandes d’information sont adressées par écrit immédiatement après l’institution des mesures provisoires et l’information est donnée par écrit aussitôt que possible.

2.   Les parties mentionnées au paragraphe 1 peuvent demander une information finale sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures définitives ou la clôture d’une enquête ou d’une procédure sans institution de mesures, une attention particulière devant être accordée à l’information sur les faits ou considérations différents de ceux utilisés pour les mesures provisoires. »

II. Les faits et le règlement litigieux

7. Le cadre factuel est exposé aux points 1 à 12 de l’arrêt attaqué, auxquels je renvoie pour plus de détails. Aux fins de la présente procédure, je rappelle simplement qu’à la suite d’une plainte déposée le 23 mai 2016 par Eurofer, la Commission européenne a ouvert une enquête antidumping concernant les importations, dans l’Union européenne, de certains produits plats laminés à chaud, en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés, originaires du Brésil, d’Iran, de Russie, de Serbie et
d’Ukraine. L’enquête a porté sur la période comprise entre le 1er juillet 2015 et le 30 juin 2016 (ci-après la « période d’enquête »).

8. Cette enquête a abouti à l’adoption, par la Commission, le 5 octobre 2017, du règlement litigieux.

9. Il ressort des considérants 232 à 236 de ce règlement, repris aux points 52 à 58 de l’arrêt attaqué, que la Commission a considéré, dans ce règlement, les volumes des importations en provenance de Serbie comme étant « négligeables » au sens de l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base, au motif que ce volume avait baissé au cours de la période d’enquête et s’élevait à une part de marché de 1,04 % seulement. À cet égard, au considérant 232 du règlement litigieux, la Commission a observé ce
qui suit : « [l]a Commission a coutume de considérer comme “négligeable” toute part de marché inférieure au seuil de 1 % établi par le règlement de base au stade de l’ouverture. Toutefois, la Commission a considéré en l’espèce qu’un taux de 1,04 % restait négligeable, car le surplus de 0,04 % devait être considéré comme insignifiant, en particulier lorsque, par comparaison, les volumes d’importation provenant de Serbie sont considérablement inférieurs à ceux provenant de chacun des quatre autres
pays. De fait, les volumes d’importation provenant de Serbie représentaient pratiquement la moitié de ceux provenant du Brésil, deuxième pays présentant les volumes d’importation les plus faibles ».

10. La Commission a ensuite rejeté l’argumentation d’Eurofer faisant valoir que les importations serbes auraient dû faire l’objet d’une évaluation cumulative avec celles des autres pays étant donné qu’elles avaient dépassé le seuil de minimis de 1 %. À cet égard, au considérant 234 du règlement litigieux, la Commission a considéré ce qui suit :

« La décision d’évaluer les importations cumulativement ou non doit être prise sur la base de tous les critères énoncés à l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base. L’article 3, paragraphe 4, du règlement de base n’accorde pas d’importance particulière à l’un ou l’autre de ces critères individuels. S’il est vrai que les importations en provenance d’un pays ne peuvent pas être cumulées dès lors que leur volume est négligeable, l’inverse ne signifie pas qu’elles doivent être cumulées ipso
facto. En outre, le règlement de base ne fixe pas explicitement de seuils de minimis. Bien que l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base puisse apporter des orientations en ce qui concerne les volumes d’importation négligeables, l’article 3, paragraphe 4, ne renvoie pas à ces seuils. Au contraire, son libellé donne à la Commission suffisamment de marge de manœuvre pour mener une analyse au cas par cas tenant compte du fait que les volumes “supplémentaires” de 0,04 % n’étaient pas
significatifs. »

11. Ensuite, la Commission a relevé, au considérant 235 du règlement litigieux, que les prix à l’exportation serbes étaient différents de ceux des quatre autres pays concernés, dans la mesure où, d’une part, « bien que les prix de vente moyens serbes aient également diminué au cours de la période considérée, le prix de vente moyen pratiqué par la Serbie au cours de la période considérée [était] le plus élevé de la période d’enquête, et il [était] largement supérieur aux prix de vente moyens du
Brésil, de l’Iran, de la Russie et de l’Ukraine » et, d’autre part, « les prix de vente moyens serbes [étaient] nettement plus élevés que ceux des quatre autres pays concernés ».

12. La Commission a ajouté, au considérant 236 du règlement litigieux, que « la fixation des prix, associée au volume négligeable, indiqu[ait] que le producteur-exportateur serbe [était] davantage un “suiveur” qu’un “fixeur” de prix pour le produit concerné ». Selon elle, « [c]e constat [était] également illustré par le fait que la baisse de ses prix entre 2015 et la période d’enquête est aussi plus faible en termes relatifs, par rapport à celle des quatre autres pays concernés ».

13. L’article 2 du règlement litigieux dispose que « [l]a procédure antidumping concernant les importations, dans l’Union, du produit concerné originaire de Serbie est close conformément à l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base ».

III. La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

14. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 décembre 2017, Eurofer a introduit un recours aux fins de l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux.

15. Par ordonnance du 12 juillet 2018, le président de la huitième chambre du Tribunal a admis l’intervention de HBIS Group Serbia Iron & Steel LLC Belgrade (ci-après « HBIS »).

16. Devant le Tribunal, Eurofer a soulevé trois moyens de recours. Par son premier moyen, Eurofer a reproché à la Commission d’avoir décidé à tort de ne pas cumuler les importations serbes conformément à l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base. Par son deuxième moyen, Eurofer a reproché à la Commission d’avoir considéré à tort que des mesures de défense contre la République de Serbie n’étaient pas nécessaires. Dans son troisième moyen, Eurofer a invoqué la violation de l’article 20,
paragraphe 2, du règlement de base, la violation de son droit d’information et de ses droits de la défense ainsi que la violation du droit à une bonne administration, consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en ce que la Commission a refusé de communiquer les données relatives à la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe.

17. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a tout d’abord considéré, s’agissant des arguments soulevés par la Commission concernant la recevabilité du recours d’Eurofer, qu’il était justifié, en l’espèce, d’examiner le rejet du recours au fond sans statuer préalablement sur sa recevabilité, en application de la jurisprudence issue de l’arrêt du 26 février 2002, Conseil/Boehringer (C‑23/00 P, ci-après l’« arrêt Boehringer », EU:C:2002:118).

18. Sur le fond, le Tribunal a rejeté chacun des trois moyens soulevés par Eurofer et, partant, a rejeté le recours dans son ensemble.

IV. La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

19. Par son pourvoi, Eurofer demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, d’annuler l’article 2 du règlement litigieux, à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et de condamner la Commission et HBIS aux dépens de la procédure de pourvoi et de la procédure devant le Tribunal.

20. La Commission conclut à l’annulation de l’arrêt attaqué et à ce que le recours de première instance soit déclaré irrecevable, au rejet du pourvoi et à la condamnation d’Eurofer aux dépens de première instance et de la procédure de pourvoi.

21. HBIS conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation d’Eurofer aux dépens qu’elle a exposés dans la procédure de première instance et dans celle de pourvoi.

22. Par ordonnance du président de la Cour du 2 septembre 2020, Eurofer/Commission (C‑226/20 P, non publiée, EU:C:2020:669), il a été fait droit à la demande d’Eurofer d’accorder un traitement confidentiel, à l’égard de HBIS, des informations figurant à l’annexe A.4 du pourvoi d’Eurofer, correspondant à celles qui ont déjà bénéficié d’un traitement confidentiel et figurant en annexe à la requête de première instance présentée par Eurofer.

V. Analyse du pourvoi

23. À l’appui de son pourvoi, Eurofer soulève quatre moyens. Par son premier moyen, elle soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en interprétant l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base en ce sens que la Commission peut considérer comme « négligeable » un volume d’importations représentant une part de marché supérieure à 1 %. Par son deuxième moyen, Eurofer soutient que l’appréciation du Tribunal selon laquelle le volume des importations en provenance de Serbie était
« négligeable » au sens de l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base est entachée d’erreurs et d’une dénaturation des éléments de preuve. Dans son troisième moyen, Eurofer fait valoir que le Tribunal a commis plusieurs erreurs en ce qui concerne la conclusion selon laquelle aucune « mesure de défense » au sens de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base n’était nécessaire. Par son quatrième moyen, Eurofer fait valoir que le Tribunal a commis des erreurs de droit en considérant que
la Commission n’était pas tenue de lui communiquer les données concernant la sous-cotation des prix et des prix indicatifs.

24. Avant d’examiner au fond les moyens de pourvoi soulevés par Eurofer à l’encontre de l’arrêt attaqué, il convient d’analyser certains arguments présentés par la Commission et déjà soulevés par celle-ci devant le Tribunal au sujet de la recevabilité du recours de première instance.

A.   Sur la recevabilité du recours de première instance

25. Dans son mémoire en réponse, la Commission relève, à titre liminaire, que, devant le Tribunal, elle a soutenu que le recours en première instance est irrecevable. L’institution rappelle ses arguments selon lesquels le recours est irrecevable pour deux raisons : d’une part, l’article 2 du règlement litigieux ne saurait être dissocié du reste des dispositions de ce règlement ( 5 ) ; d’autre part, Eurofer, en tant qu’association à but non lucratif de droit belge, n’aurait pas démontré à suffisance
de droit qu’elle était directement et individuellement concernée par le règlement litigieux au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

26. Considérant que les parties ont déjà eu l’occasion de débattre suffisamment devant le Tribunal des questions de recevabilité qu’elle avait soulevées, la Commission demande à la Cour de se prononcer sur ces questions, sur lesquelles le Tribunal n’a pas statué, d’annuler l’arrêt attaqué et de déclarer irrecevable le recours de première instance.

27. À cet égard, il convient de relever que, aux points 31 à 33 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a explicitement décidé, en application de la jurisprudence issue de l’arrêt Boehringer, qu’il était justifié, en l’espèce, d’examiner au fond le recours sans statuer sur la recevabilité.

28. S’agissant de la demande de la Commission tendant à l’annulation de l’arrêt attaqué, dans la mesure où celle-ci doit être comprise comme un pourvoi incident, elle est selon moi irrecevable. Cette conclusion s’impose non seulement pour vice de forme ( 6 ), mais également parce que, comme j’ai récemment eu l’occasion de l’observer, lorsque le Tribunal décide, en application de l’arrêt Boehringer, de ne pas statuer sur la recevabilité du recours en première instance, il n’adopte aucune décision
susceptible de recours, même implicite, quant à la recevabilité, de sorte qu’aucun pourvoi, ni principal ni incident, ne saurait être formé à cet égard ( 7 ).

29. Si la demande de la Commission devait être en revanche comprise comme une demande de substitution de motifs ou comme une invitation adressée à la Cour de soulever d’office l’irrecevabilité du recours en première instance, je rappelle qu’il résulte d’une jurisprudence constante que la Cour, saisie d’un pourvoi au titre de l’article 56 de son statut, est tenue de se prononcer, au besoin d’office, sur la recevabilité d’un recours en annulation et, par conséquent, sur le moyen d’ordre public tiré de
la méconnaissance de la condition, posée par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, selon laquelle un requérant ne peut demander l’annulation d’une décision dont il n’est pas le destinataire que s’il est directement et individuellement concerné par celle-ci ( 8 ).

30. Toutefois, il ressort également de la jurisprudence qu’il appartient à la Cour d’apprécier si une bonne administration de la justice justifie, dans les circonstances de l’espèce, de rejeter au fond le recours sans statuer sur les questions de recevabilité ( 9 ).

31. En l’espèce, j’estime que des considérations d’économie de procédure le justifient. Il ressort en effet des développements qui suivent quant au fond du pourvoi que celui‑ci doit selon moi être rejeté et, plus particulièrement, qu’il ne s’agit pas d’un cas dans lequel il est nécessaire que la Cour, après avoir fait droit au pourvoi et annulé l’arrêt attaqué, décide d’évoquer l’affaire devant le Tribunal et de statuer sur le fond du recours en y faisant droit ( 10 ).

B.   Sur le fond

1. Sur le premier moyen de pourvoi, tiré de l’interprétation erronée de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base

32. Par son premier moyen de pourvoi, visant à contester les points 67 à 80 de l’arrêt attaqué, Eurofer soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en interprétant l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base en ce sens que la Commission peut considérer comme étant « négligeable », au sens de cette disposition, un volume d’importations, en provenance d’un pays donné, représentant une part de marché supérieure à 1 %.

a) L’arrêt attaqué

33. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le premier moyen d’Eurofer soutenant que la Commission avait eu tort de ne pas évaluer les importations serbes cumulativement avec celles des autres pays concernés, conformément à l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base, en les considérant comme négligeables au sens du point a) de cette disposition, alors qu’elles représentaient une part de marché supérieure à 1 %.

34. À cet égard, le Tribunal a tout d’abord relevé, d’une part, que, s’agissant de la deuxième condition prévue à l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base, selon laquelle le volume des importations ne doit pas être négligeable, cette disposition n’opère aucun renvoi à l’article 5, paragraphe 7, ni à aucune autre disposition de ce même règlement. D’autre part, le Tribunal a relevé que l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base porte sur un autre stade de l’enquête que
l’article 3, paragraphe 4, de ce règlement. En effet, la première disposition vise une situation dans laquelle la procédure n’est même pas encore ouverte, tandis que la seconde concerne une situation dans laquelle l’enquête a déjà été ouverte ( 11 ).

35. Le Tribunal en a déduit que si l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base peut apporter des orientations en ce qui concerne les volumes d’importations pouvant être considérés comme négligeables, cela ne signifie pas pour autant que, dans le cadre de l’article 3, paragraphe 4, de ce règlement, les importations en provenance d’un pays donné représentant une part de marché supérieure à 1 % ne puissent pas être considérées comme négligeables ( 12 ).

36. Le Tribunal a ensuite considéré que ni la pratique décisionnelle antérieure des institutions de l’Union ni la note explicative de la Commission datée de 2000, adressée à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ( 13 ), invoquées par Eurofer, ne justifiaient de remettre en cause la légalité du règlement litigieux ( 14 ).

37. Sur le fondement de ces considérations, le Tribunal a conclu que la Commission n’avait commis aucune erreur manifeste d’appréciation en considérant, en l’espèce, que le volume des importations en provenance de Serbie restait négligeable au sens de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base, et ce en dépit de l’augmentation du niveau de ces importations de 0,48 % en 2013 à 1,04 % pendant la période d’enquête ( 15 ).

b) Arguments des parties

38. Eurofer fait valoir que ce raisonnement du Tribunal est entaché d’une interprétation erronée de l’article 3, paragraphe 4, et de l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base. Selon Eurofer, ces dispositions, interprétées correctement, ne conféreraient à la Commission aucun pouvoir d’appréciation pour considérer que des importations représentant une part de marché supérieure à 1 % sont « négligeables ».

39. En premier lieu, Eurofer soutient qu’il résulte de la jurisprudence qu’il existe une relation de complémentarité entre l’article 3, paragraphe 4, et l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base, en ce sens que cette dernière disposition viserait à expliciter les circonstances dans lesquelles la part des importations dans l’Union est trop faible pour que ces importations puissent être considérées comme étant à l’origine d’un dumping ( 16 ). Il en résulterait que l’interprétation correcte de
l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base impliquerait d’appliquer le seuil de 1 % prévu à l’article 5, paragraphe 7, de ce règlement comme un seuil contraignant aux fins de l’appréciation du caractère « négligeable » du volume des importations. Cette interprétation serait confirmée tant par la pratique décisionnelle de la Commission, mentionnée dans les exemples cités aux points 73 et 74 de l’arrêt attaqué, que par la note explicative de 2000 précédemment évoquée.

40. En deuxième lieu, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal ne fournirait aucune motivation convaincante à l’appui de l’interprétation qu’il adopte. L’absence de renvoi explicite entre les deux dispositions ne signifierait pas qu’elles ne peuvent être lues conjointement. Le fait que l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base s’applique au stade initial de la procédure ne constituerait pas une raison logique de ne pas appliquer le seuil de 1 % à un stade ultérieur. En revanche, il serait plus
logique que les mêmes règles s’appliquent aux deux stades de la procédure, ce qui serait le cas pour d’autres dispositions du règlement de base. S’agissant du pouvoir d’appréciation de la Commission, Eurofer soutient que la question de savoir si les importations en provenance d’un pays particulier excèdent ou non le seuil de 1 % est une question binaire et n’impliquerait aucune analyse complexe. Les deux cas mentionnés par le Tribunal au point 79 de l’arrêt attaqué au soutien de son
interprétation seraient sans rapport avec le cas d’espèce et n’étayeraient donc nullement l’analyse du Tribunal.

41. En troisième lieu, l’approche retenue par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, selon laquelle des volumes d’importations représentant une part de marché supérieure à 1 % peuvent être considérés comme « négligeables », serait contraire au principe de sécurité juridique. Si, ainsi que l’a jugé le Tribunal, le seuil pour considérer comme négligeable un volume d’importations au sens de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base n’était pas pleinement aligné sur celui prévu à l’article 5,
paragraphe 7, du même règlement, au motif qu’ils concernent des stades différents de la procédure, il existerait alors une incertitude également sur l’applicabilité du seuil de 3 % prévu par cette dernière disposition, ce qui pourrait conduire à la conséquence absurde qu’une enquête pourrait être ouverte, mais jamais clôturée. En outre, un seuil pour lequel la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation, lui‑même soumis à un contrôle juridictionnel limité, serait une source d’insécurité
juridique, en l’absence de définition claire de la limite permettant de constater le caractère « négligeable » du volume des importations, ce qui contribuerait également à augmenter le risque d’ingérences politiques dans les enquêtes antidumping.

42. La Commission soutient que le premier moyen du pourvoi d’Eurofer est inopérant. Pour le surplus, cette institution ainsi que HBIS contestent sur le fond les arguments avancés par Eurofer.

c) Appréciation

43. Il convient d’emblée d’observer que, ainsi que l’a relevé le Tribunal ( 17 ), l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base, dont Eurofer invoque l’interprétation erronée dans son premier moyen de pourvoi, prévoit, sous a) et b), trois conditions qui doivent toutes être réunies pour qu’une évaluation cumulative des effets des importations en provenance de plus d’un pays faisant simultanément l’objet d’enquêtes antidumping soit permise aux fins de la détermination du préjudice causé à
l’industrie de l’Union. En premier lieu, la marge de dumping doit être supérieure au niveau de minimis défini à l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base ; en deuxième lieu, le volume des importations en provenance de chaque pays ne doit pas être négligeable, et, en troisième lieu, l’évaluation cumulative des effets des importations doit être appropriée compte tenu des conditions de concurrence. En revanche, il suffit que l’une de ces trois conditions ne soit pas remplie pour exclure
l’évaluation cumulative.

44. Eurofer soutient que le Tribunal a interprété de manière erronée la deuxième de ces conditions, à savoir le caractère négligeable du volume d’importations. Selon elle, la disposition prévoyant cette condition – à savoir la seconde phrase de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base – devrait être lue conjointement avec l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base, qui prévoit qu’aucune procédure n’est ouverte à l’encontre de pays dont les importations représentent une part de
marché inférieure à 1 %. Il s’ensuivrait que des volumes d’importations supérieurs à 1 % ne pourraient être considérés comme étant « négligeables ».

45. Tout d’abord, j’estime qu’il y a lieu de rejeter l’objection soulevée par la Commission selon laquelle le premier moyen serait inopérant au motif qu’Eurofer n’aurait pas contesté les points 63 à 66 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal aurait procédé à l’interprétation de cette disposition. En effet, bien que, dans son pourvoi, Eurofer ne mentionne explicitement que les points 67 à 80 de l’arrêt attaqué comme étant contestés, il ne fait pas de doute que, dans le cadre de son premier moyen
de pourvoi, elle entend contester l’intégralité du raisonnement du Tribunal contenu dans l’arrêt attaqué quant à l’interprétation de la disposition en cause.

46. Cela étant, je ne partage pas pour autant l’interprétation de l’article 3, paragraphe 4, sous a), seconde phrase, du règlement de base défendue par Eurofer et j’estime que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en interprétant cette disposition dans l’arrêt attaqué.

47. À cet égard, il convient tout d’abord de relever, d’un point de vue littéral, que, comme l’a relevé à juste titre le Tribunal et comme Eurofer elle‑même l’a du reste reconnu ( 18 ), la seconde partie de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base, relative à la deuxième condition, n’opère aucun renvoi explicite à aucune autre disposition du règlement de base et exige simplement, pour que la condition soit remplie, que le volume des importations en provenance de chaque pays ne soit
pas « négligeable », sans définir plus précisément ce dernier terme.

48. S’il est vrai que cette constatation d’ordre littéral, à caractère indicatif, n’exclut pas nécessairement en soi que la disposition en cause puisse être interprétée conjointement avec une autre disposition du règlement de base, elle se révèle pertinente au regard de la constatation, d’ordre systématique, selon laquelle, à la différence de cette disposition, la première partie de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base, qui définit la première condition (à savoir la condition
relative à la marge de dumping), opère, en revanche, un renvoi exprès au seuil de minimis au sens de l’article 9, paragraphe 3, de ce règlement, à savoir 2 %.

49. Ces considérations d’ordre littéral et systématique témoignent, à mon sens, de la volonté du législateur de laisser une certaine marge d’appréciation à la Commission en ce qui concerne la détermination du caractère négligeable ou non du volume des importations pour permettre une évaluation cumulative des effets des importations en provenance de plus d’un pays faisant simultanément l’objet d’enquêtes antidumping.

50. Du reste, la reconnaissance d’une certaine marge d’appréciation à cet égard, comme l’observe à juste titre le Tribunal ( 19 ), est conforme au pouvoir d’appréciation reconnu par la jurisprudence constante de la Cour aux institutions de l’Union dans le domaine de la politique commerciale commune, tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner ( 20 ). Comme j’ai eu
l’occasion de le rappeler encore récemment, la Cour a expressément reconnu que ce large pouvoir d’appréciation porte notamment sur la détermination de l’existence d’un préjudice causé à l’industrie de l’Union ( 21 ).

51. Il convient par ailleurs d’ajouter que l’existence de cette marge d’appréciation ne signifie pas qu’elle est illimitée. Ainsi que le Tribunal l’a relevé aux points 67 et 78 de l’arrêt attaqué – et ainsi qu’il ressort par ailleurs de la pratique décisionnelle des institutions de l’Union dont il est question aux points 73, 74, 75 et 79 de l’arrêt attaqué –, le seuil prévu à l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base peut apporter des orientations et être utilisé comme point de référence pour
l’appréciation du caractère négligeable du volume des importations aux fins de l’évaluation cumulative des effets au sens de l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base. La Commission ne saurait cependant, en principe, s’en écarter de façon significative et doit, en tout état de cause, justifier les raisons pour lesquelles, dans un cas particulier, les circonstances de l’espèce justifiaient de s’écarter de ce seuil. Il n’en ressort cependant pas, selon nous, que ce seuil d’orientation
constitue un seuil rigide et strict au-delà duquel il serait juridiquement impossible à la Commission de conclure que les importations faisant l’objet de l’enquête antidumping en provenance d’un pays donné sont négligeables.

52. C’est en ce sens, selon moi, qu’il y a lieu d’interpréter la relation de complémentarité entre les deux dispositions en question, évoquée par le Tribunal dans son arrêt du 25 janvier 2017, Rusal Armenal/Conseil (T‑512/09 RENV, EU:T:2017:26), cité par Eurofer ( 22 ). Dans cet arrêt, le Tribunal a conclu que c’est sans commettre aucune erreur de droit que le Conseil a « pris en compte » le seuil de 1 % mentionné à l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base, aux fins d’interpréter la condition
tenant au caractère non négligeable des importations, figurant à l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base. Cet arrêt confirme ainsi que le seuil de 1 % est un seuil indicatif à « prendre en compte » et non nécessairement une indication impérative.

53. Cette interprétation est d’ailleurs corroborée par la circonstance, soulignée à juste titre par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, que les deux dispositions de l’article 3, paragraphe 4, et de l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base, respectivement, poursuivent des finalités procédurales différentes, puisqu’elles doivent en effet s’appliquer à des stades différents de la procédure, ce qui milite en faveur de la reconnaissance d’une relation de complémentarité non rigide entre les deux
dispositions.

54. La justesse de l’interprétation de l’article 3, paragraphe 4, sous a), seconde phrase, du règlement de base retenue par le Tribunal ne me semble pas remise en cause par les autres arguments soulevés par Eurofer.

55. En premier lieu, je relève que les considérations du Tribunal relatives à la pratique décisionnelle, figurant au point 76 de l’arrêt attaqué, sont conformes à la jurisprudence de la Cour à cet égard, dont il ressort que la légalité d’un règlement qui, comme en l’espèce, clôt la procédure sans instituer de droits antidumping, doit être appréciée au regard des règles de droit pertinentes et, en particulier, des dispositions du règlement de base et non sur le fondement de la prétendue pratique
décisionnelle antérieure des institutions de l’Union ( 23 ).

56. En outre, les constatations du Tribunal quant à la portée de la note explicative de 2000 sont également exemptes d’erreur et conformes à la jurisprudence ( 24 ). Le Tribunal a en effet relevé à juste titre que ce document ne constituait pas, pour la Commission, un acte d’autolimitation de l’exercice de son pouvoir d’appréciation discrétionnaire.

57. En second lieu, les arguments invoqués par Eurofer selon lesquels l’interprétation retenue par le Tribunal donnerait lieu à des problèmes de sécurité juridique ne sont pas convaincants. D’une part, ainsi qu’il a été relevé au point 51 des présentes conclusions, le pouvoir d’appréciation dont jouit la Commission, dans l’application de la disposition de l’article 3, paragraphe 4, sous a), seconde phrase, du règlement de base, n’est pas illimité et la Commission est tenue de prendre en compte le
seuil prévu à l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base en tant que point de référence. D’autre part, il convient de relever que, comme l’observe la Commission, c’est plutôt l’interprétation de l’article 3, paragraphe 4, sous a), seconde phrase, du règlement de base proposée par Eurofer qui met en péril l’effet utile de cette disposition. En effet, ainsi que le relève la Commission, si la disposition de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base devait s’appliquer uniquement
à des volumes d’importations en provenance d’un pays donné se situant en deçà du seuil de 1 %, elle ne s’appliquerait pratiquement jamais puisque la procédure concernant ces importations ne pourrait pas non plus être ouverte.

58. Il résulte de l’ensemble de ces considérations que le premier moyen de pourvoi soulevé par Eurofer doit selon moi être rejeté.

2. Sur le deuxième moyen de pourvoi, relatif à l’appréciation selon laquelle le volume des importations en provenance de Serbie était « négligeable » au sens de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base

59. Par son deuxième moyen de pourvoi, qui se subdivise en trois branches et vise à contester les points 81 à 84 de l’arrêt attaqué, Eurofer fait valoir que le Tribunal a commis des erreurs de droit, une erreur manifeste d’appréciation et une dénaturation des éléments de preuve en confirmant la conclusion de la Commission selon laquelle, en l’espèce, le volume des importations en provenance de Serbie était « négligeable » au sens de l’article 3, paragraphe 4, du règlement de base.

a) L’arrêt attaqué

60. Dans l’arrêt attaqué, dans le cadre de l’analyse du premier moyen de recours présenté par Eurofer – après avoir conclu que la Commission n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que le volume des importations en provenance de Serbie restait « négligeable » au sens de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base bien qu’il fût supérieur au seuil de 1 % –, le Tribunal a considéré que, en outre, la Commission avait pu, à bon droit, « considérer, au
considérant 248 du règlement attaqué, que le fait que les prix de vente moyens serbes au cours de la période d’enquête aient été considérablement plus élevés que ceux des quatre autres pays concernés confirm[ait] l’idée qu’un volume d’importation aussi faible ne saurait porter préjudice à l’industrie de l’Union » ( 25 ).

61. Le Tribunal a estimé que la question du caractère négligeable d’un volume des importations ne se résume pas à celle de la simple quantité de ce volume, mais s’étend à celle de sa qualité, c’est-à-dire aux autres éléments indicatifs des effets que ces importations sont susceptibles de produire. Dès lors, selon le Tribunal, c’est à juste titre que la Commission a pu considérer que, dans le cas où les prix associés aux importations d’un pays, dont le volume correspond à une part de marché peu
importante, sont élevés, ce seul fait, et sans qu’il soit besoin d’analyser lesdits prix d’une manière plus approfondie, comme le demandait Eurofer, peut corroborer le caractère négligeable de ces importations ( 26 ).

b) Arguments des parties

62. Eurofer conteste cette analyse. Dans la première branche de son deuxième moyen, elle soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en incluant des éléments de prix dans l’appréciation du caractère négligeable du volume des importations, laquelle serait uniquement une appréciation quantitative liée au volume des importations. L’examen des prix ne jouerait aucun rôle dans cette analyse, mais uniquement dans l’analyse de la troisième condition de l’article 3, paragraphe 4, du règlement de
base, à savoir celle relative aux conditions de concurrence. Le règlement de base aurait clairement distingué ces deux éléments et la jurisprudence confirmerait cette approche.

63. Dans la deuxième branche, soulevée à titre subsidiaire dans l’hypothèse où la Cour estimerait que l’analyse des prix joue un rôle dans la détermination du caractère négligeable du volume des importations, Eurofer avance que, en tout état de cause, le Tribunal a néanmoins commis une erreur de droit en omettant de tenir compte d’autres facteurs qui auraient constitué des indications plus précises des effets potentiellement préjudiciables que les importations serbes auraient été susceptibles de
produire sur l’industrie de l’Union. Plus précisément, la Commission aurait ignoré, dans son analyse, la sous-cotation des prix et des prix indicatifs, qui, ainsi qu’il ressort de l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base, seraient des éléments pertinents dans l’analyse. La Commission n’aurait donc pas pris en considération tous les éléments de preuve pertinents, contrairement aux exigences de la jurisprudence. Par conséquent, en confirmant l’approche de la Commission, le Tribunal aurait
commis une erreur de droit.

64. Dans la troisième branche, Eurofer soutient que le Tribunal aurait commis une erreur manifeste d’appréciation et dénaturé les éléments de preuve en constatant que les prix moyens associés au volume correspondant à une part de marché peu importante étayaient la constatation du caractère négligeable du volume des importations en cause. En effet, selon Eurofer, s’il est vrai que le prix moyen des importations en provenance de Serbie était supérieur à celui des importations en provenance d’autres
pays, les éléments de preuve versés au dossier indiqueraient cependant clairement que le prix moyen du producteur serbe unique visé par l’enquête était pratiquement identique au prix pratiqué par un exportateur russe et par un exportateur brésilien à l’égard desquels des droits antidumping ont pourtant été institués par la Commission. Le Tribunal aurait donc commis une erreur manifeste d’appréciation et une dénaturation des éléments de preuve en fondant son analyse sur les prix moyens et en
occultant le fait que la sous-cotation des prix et des prix indicatifs du producteur serbe aurait été semblable à celle de ces deux producteurs.

65. La Commission soutient que le deuxième moyen de pourvoi est inopérant dans son intégralité et que la troisième branche est partiellement irrecevable. En tout état de cause, la Commission et HBIS contestent ce moyen quant au fond.

c) Appréciation

66. Il convient, tout d’abord, d’analyser l’exception soulevée par la Commission selon laquelle le deuxième moyen serait inopérant dans son intégralité. La Commission estime, en effet, que les points 81 à 84 de l’arrêt attaqué, visés par ce moyen, ne contiendraient qu’un raisonnement surabondant qui ne serait pas nécessaire pour étayer la légalité de la constatation du Tribunal selon laquelle les importations en provenance de Serbie devaient être considérées comme étant négligeables au sens de
l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base. Cela serait démontré par l’emploi des termes « de plus » et « corroborer » aux points 81 et 83 de l’arrêt attaqué respectivement.

67. À cet égard, je relève que, comme je l’ai mentionné au point 61 des présentes conclusions, le Tribunal, au point 82 de l’arrêt attaqué, a considéré que la question du caractère négligeable d’un volume des importations au sens de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base ne se résume pas à celle de la simple quantité de ce volume, mais s’étend à celle de sa qualité, c’est-à-dire à d’autres éléments indicatifs des effets que ces importations sont susceptibles de produire.

68. Dans son deuxième moyen de pourvoi, Eurofer remet en cause, en substance, tant la légalité de cette approche que, quod non, son application.

69. Dans la première branche, Eurofer remet en cause la légalité de cette approche en soutenant que le Tribunal a commis une erreur de droit en incluant des éléments « qualitatifs » relatifs au prix dans l’appréciation du caractère négligeable du volume des importations, laquelle serait uniquement, selon elle, une appréciation « quantitative » liée au volume des importations.

70. À cet égard, toutefois, il ressort de l’analyse du premier moyen du recours que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en concluant, au point 80 de l’arrêt attaqué, que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission, en vertu de la marge d’appréciation dont elle jouit, a pu considérer que, en l’espèce, le volume des importations en provenance de Serbie restait négligeable, bien que d’un niveau quantitatif égal à 1,04 % pendant la période d’enquête.

71. Par conséquent, même si la première branche devait être accueillie et que la Cour devait juger que l’analyse du caractère négligeable du volume des importations à laquelle la Commission doit procéder au titre de l’article 3, paragraphe 4, sous a), seconde phrase, du règlement de base devait être limitée à une analyse purement quantitative, de sorte que le Tribunal aurait commis une erreur à cet égard aux points 81 à 84 de l’arrêt attaqué, cette constatation ne remettrait pas en cause la
conclusion à laquelle est parvenu le Tribunal au point 80 de l’arrêt attaqué.

72. Il s’ensuit selon moi que, comme le fait valoir la Commission, la première branche est effectivement inopérante.

73. En tout état de cause, cette branche est à mon sens également non fondée. En effet, l’article 3, paragraphe 4, sous a), deuxième phrase, du règlement de base ne prévoit pas de méthode particulière d’analyse pour déterminer le caractère négligeable des importations en provenance d’un pays aux fins de l’évaluation cumulative de leurs effets avec celle des importations en provenance d’autres pays faisant simultanément l’objet d’enquêtes antidumping.

74. Il s’ensuit que, dans le cadre de la marge d’appréciation dont elle jouit en vertu de la jurisprudence mentionnée au point 50 des présentes conclusions, la Commission est libre d’apprécier les facteurs qu’elle considère comme étant pertinents aux fins de la détermination de ce caractère négligeable dans un cas concret.

75. Il en résulte que l’affirmation du Tribunal figurant au point 82 de l’arrêt attaqué, selon laquelle cette analyse peut s’étendre à des éléments qualitatifs quant au volume des importations en cause et, partant, inclure l’examen d’autres facteurs indicatifs des effets que ces importations sont susceptibles de produire, n’est entachée d’aucune erreur de droit.

76. S’agissant en revanche des deuxième et troisième branches du deuxième moyen, j’estime qu’elles ne sont pas inopérantes. En effet, dès lors qu’il est établi que l’analyse du caractère négligeable du volume des importations devant être effectuée au titre de l’article 3, paragraphe 4, sous a), deuxième phrase, du règlement de base peut s’étendre à des facteurs qualitatifs relatifs à des facteurs liés aux prix de ces importations, il n’est pas exclu que la constatation d’une erreur du Tribunal dans
l’appréciation de cette analyse effectuée concrètement par la Commission puisse conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué.

77. Cela étant, j’estime cependant que tant la deuxième que la troisième branche doivent être rejetées sur le fond.

78. En ce qui concerne la deuxième branche, Eurofer reproche au Tribunal de ne pas avoir constaté que la Commission aurait dû retenir dans son analyse la sous-cotation des prix et des prix indicatifs. Toutefois, je relève à cet égard, d’une part, que rien dans la disposition de l’article 3, paragraphe 4, sous a), deuxième phrase, du règlement de base n’indique l’existence d’une obligation pour la Commission d’analyser la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour déterminer le caractère
négligeable du volume des importations en provenance d’un pays donné aux fins de l’évaluation cumulative des effets des importations provenant de plus d’un pays faisant simultanément l’objet d’enquêtes antidumping. D’autre part, ainsi que l’a relevé la Commission, l’analyse de l’article 3, paragraphe 4, en ce qui concerne la possibilité d’effectuer ladite évaluation cumulative, constitue une étape antérieure à l’analyse proprement dite du préjudice au sens de l’article 3, paragraphes 2 et 3, du
règlement de base. Il en résulte que la référence d’Eurofer à l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base n’est pas pertinente dans ce contexte.

79. Il s’ensuit que le Tribunal n’a selon moi commis aucune erreur de droit lorsqu’il a jugé, au point 83 de l’arrêt attaqué, que la Commission, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation reconnu par la jurisprudence mentionnée au point 50 des présentes conclusions, avait pu considérer que, dans le cas où les prix associés aux importations d’un pays, dont le volume correspond à une part de marché peu importante, sont élevés, ce seul fait, sans qu’il soit besoin d’analyser lesdits prix d’une manière
plus approfondie, peut corroborer le caractère négligeable de ce volume.

80. En ce qui concerne la troisième branche du deuxième moyen de pourvoi, elle comporte deux griefs, l’un tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et l’autre tiré d’une dénaturation des éléments de preuve.

81. Quant au premier grief, selon lequel il ressort des éléments de preuve versés au dossier que le prix moyen du seul producteur-exportateur serbe aurait été pratiquement identique à celui pratiqué par un exportateur russe et un exportateur brésilien, j’estime que, dans la mesure où il vise à remettre en cause l’analyse des preuves effectuée par le Tribunal, il doit être considéré comme étant irrecevable au stade du pourvoi. En effet, il découle d’une jurisprudence constante que lorsque le Tribunal
a constaté ou apprécié les faits, la Cour est seulement compétente pour exercer, en vertu de l’article 256 TFUE, un contrôle sur la qualification juridique de ceux-ci et les conséquences de droit qui en ont été tirées. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour ( 27 ).

82. Si ce premier grief devait en revanche être compris en ce sens qu’Eurofer conteste une qualification juridique erronée des faits et des conséquences de droit que la Commission en a tirées, en ce qu’elle n’aurait pas imposé de droits antidumping dans des situations qui sont similaires sur le plan factuel ( 28 ), celui-ci est non fondé. En effet, le fait qu’un producteur-exportateur russe et un producteur-exportateur brésilien aient exporté vers l’Union le produit concerné à des prix comparables
au prix moyen de l’exportateur unique serbe n’enlève rien au fait que, au niveau du pays, les prix moyens des importations en provenance de Russie et du Brésil étaient inférieurs aux prix serbes, ce qui n’est pas contesté par Eurofer ( 29 ) et a permis à la Commission d’aboutir à des conclusions différentes en ce qui concerne les importations en provenance de ces pays.

83. En ce qui concerne le second grief, il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante qu’une dénaturation des éléments de preuve existe lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée. Toutefois, cette dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves. Par ailleurs, lorsqu’il
allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui‑ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation ( 30 ).

84. À cet égard, je relève que les arguments avancés par Eurofer dans le cadre de la troisième branche de son deuxième moyen ne démontrent aucune dénaturation des éléments de preuve. Eurofer ne remet aucunement en cause les constatations factuelles tirées des éléments de preuve figurant au dossier, à savoir les prix moyens des trois producteurs en question. Eurofer se borne à contester l’appréciation de ces faits, laquelle, ainsi qu’il a déjà été relevé, n’est pas recevable dans le cadre d’un
pourvoi. Le second grief de la troisième branche est donc également non fondé.

85. Il résulte des considérations qui précèdent que le deuxième moyen du pourvoi doit selon moi être rejeté comme étant en partie inopérant, en partie irrecevable et en partie non fondé.

3. Sur le troisième moyen du pourvoi, relatif à la conclusion de l’absence de nécessité d’adopter des mesures de défense au sens de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base

86. Dans son troisième moyen de pourvoi, qui se subdivise en deux branches et vise à contester les points 109 à 121 de l’arrêt attaqué, Eurofer fait valoir que le Tribunal a commis une erreur manifeste d’appréciation et une erreur de droit en confirmant, dans son analyse, la constatation de la Commission selon laquelle il n’était pas nécessaire d’adopter des mesures de défense pour les importations en provenance de Serbie au sens de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base.

a) L’arrêt attaqué

87. Dans l’arrêt attaqué, dans le cadre de l’analyse du deuxième moyen de recours soulevé par Eurofer, le Tribunal a considéré que la décision prise par la Commission, à l’article 2 du règlement litigieux, selon laquelle il n’était pas nécessaire de prendre des mesures de défense à l’égard des importations serbes au sens de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base n’était pas illégale.

88. Le Tribunal a tout d’abord estimé que, dès lors que cette disposition du règlement de base ne précise pas les circonstances dans lesquelles les mesures de défense ne sont pas nécessaires, elle laisse une certaine marge d’appréciation à la Commission ( 31 ). Le Tribunal a ensuite observé que, en principe, la décision sur la nécessité d’instituer un droit antidumping devrait être fondée sur une analyse détaillée, notamment, de l’existence d’un dumping et de l’existence d’un préjudice. Il a
toutefois considéré qu’il découlait du texte du règlement de base, et notamment de son article 9, paragraphe 3, qu’une telle analyse détaillée n’est pas toujours requise et que la clôture d’une enquête peut s’imposer, notamment, également sur la seule base de la marge de dumping ou des volumes d’importation ( 32 ).

89. Le Tribunal a ensuite considéré qu’il ressortait, en l’espèce, de la lecture du règlement litigieux que, d’une part, c’était précisément l’un de ces éléments, à savoir le volume des importations en provenance de Serbie, qui avait joué un rôle central dans le raisonnement de la Commission. D’autre part, le Tribunal a constaté que la conclusion selon laquelle il n’était pas nécessaire d’adopter des mesures de défense à l’encontre des importations en provenance de Serbie n’était pas fondée
uniquement sur le niveau de minimis des volumes de ces importations, mais sur l’interaction entre cet élément et la circonstance que les prix de vente moyens serbes étaient plus élevés que ceux des quatre autres pays concernés, ce fait confirmant l’idée qu’un volume d’importation aussi faible ne saurait porter préjudice à l’industrie de l’Union ( 33 ).

90. Le Tribunal en a conclu que la Commission n’avait pas outrepassé la marge d’appréciation dont elle disposait dans le cadre de l’application de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base ( 34 ).

b) Arguments des parties

91. Eurofer conteste cette analyse. Dans la première branche de son troisième moyen de pourvoi, elle fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en concluant que la Commission pouvait clore l’enquête concernant les importations serbes sans effectuer d’analyse du préjudice potentiel causé par ces importations. Selon Eurofer, bien que l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base ne précise pas les circonstances dans lesquelles aucune mesure de défense ne se révèle nécessaire, le
considérant 16 de ce même règlement contiendrait des orientations claires à cet égard. Il ressortirait de ce considérant, lequel devrait guider l’interprétation de cette disposition, que les enquêtes devraient être closes « lorsque la marge de dumping est de minimis ou que le préjudice est négligeable ».

92. L’article 9, paragraphe 3, du règlement de base ne changerait rien à cet égard. Il prévoirait simplement deux « seuils de sécurité » (« safe harbours »), l’un relatif à la marge de dumping et l’autre relatif au volume des importations. Cependant, en l’espèce, les importations serbes n’auraient relevé d’aucun de ces deux cas. La marge antidumping aurait nettement dépassé le seuil de minimis prévu à l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base et le volume des importations aurait été supérieur
au seuil de 1 % indiqué à l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base.

93. Par conséquent, la seule base sur laquelle la Commission aurait pu conclure que l’adoption de mesures de défense n’était pas nécessaire aurait été le caractère « négligeable » du préjudice potentiel causé par les importations serbes. En revanche, Eurofer estime qu’elle ne pouvait se fonder sur les volumes d’importations qui dépassaient le seuil pertinent. La Commission aurait donc dû examiner si les importations provenant de Serbie auraient pu en elles-mêmes contribuer à causer un préjudice à
l’industrie de l’Union, en effectuant l’analyse requise au sens de l’article 3 du règlement de base et en tenant compte, notamment, de l’existence de sous-cotations notables des prix, au sens du paragraphe 3 de cet article.

94. Dans la seconde branche, Eurofer soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit et une erreur manifeste en concluant que la Commission n’avait pas outrepassé la marge d’appréciation dont elle disposait dans le cadre de l’application de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base. Eurofer soutient que, si la Commission dispose d’un certain pouvoir d’appréciation dans ce domaine, cela n’empêche pas le Tribunal de contrôler si les éléments de preuve sont de nature à fonder ses
conclusions. En l’espèce, d’une part, le volume des importations serbes dépassait le seuil de 1 % et ne relevait donc pas du seuil de sécurité visé à l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base. Il ne pouvait dès lors pas être présumé qu’ils ne causeraient qu’un préjudice négligeable. D’autre part, la référence aux prix moyens d’importation aurait été trompeuse dans la mesure où la Serbie ne comptait qu’un seul producteur alors que les autres pays avaient plusieurs producteurs et qu’il
aurait été constaté que les ventes de certains producteurs-exportateurs russes et brésiliens avaient lieu à des prix comparables à ceux du producteur serbe unique.

95. En outre, l’absence de prise en compte par la Commission de données pertinentes constituerait une erreur manifeste. La Commission aurait systématiquement refusé de prendre en compte les données de sous-cotations des prix et des prix indicatifs des produits serbes. Eurofer estime cependant que ces données auraient manifestement été pertinentes pour l’analyse.

96. La Commission fait valoir que la seconde branche du troisième moyen de pourvoi est dépourvue de fondement. En tout état de cause, selon la Commission et HBIS, ce moyen est intégralement non fondé.

c) Appréciation

97. S’agissant de la première branche du troisième moyen de pourvoi, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base, lorsqu’aucune mesure de défense ne se révèle nécessaire, l’enquête ou la procédure est close. Il ressort du considérant 16 de ce règlement, invoqué à juste titre par Eurofer pour interpréter cette disposition, que les enquêtes ou procédures devraient être closes lorsque la marge de dumping est de minimis ou que le préjudice est négligeable,
et qu’il convient de définir ces situations.

98. L’article 9, paragraphe 3, du règlement de base définit ces situations. Il prévoit notamment, dans sa première phrase, que, pour les procédures ouvertes conformément à l’article 5, paragraphe 9, de ce règlement, à savoir celles pour lesquelles il existe des éléments de preuve suffisants pour ouvrir la procédure, le préjudice est normalement considéré comme étant négligeable lorsque les importations concernées représentent moins que les volumes spécifiés à l’article 5, paragraphe 7, dudit
règlement, c’est-à-dire sont inférieurs à 1 % ( 35 ).

99. Dans le cadre de la première branche du présent moyen, Eurofer reproche, en substance, au Tribunal d’avoir considéré à tort que ladite disposition figurant à la première phrase de l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base était applicable en l’espèce, alors que les importations en provenance de Serbie étaient supérieures au seuil susmentionné de 1 %.

100. À cet égard, j’estime cependant que cette disposition ne doit pas être interprétée en ce sens que ledit seuil de 1 % constitue un seuil rigide et strict, de sorte qu’il serait juridiquement impossible à la Commission de considérer comme étant négligeable le préjudice potentiellement causé par un volume d’importations supérieur à ce seuil, bien que cette disposition, contrairement à la disposition de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de base ( 36 ), opère un renvoi spécifique à
l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base.

101. À cet égard, en effet, d’une part, il y a lieu de relever que l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base utilise expressément dans son libellé l’adverbe « normalement ». L’utilisation de ce terme révèle selon moi de façon explicite l’intention du législateur de laisser à la Commission une certaine marge d’appréciation dans l’examen du caractère négligeable du préjudice potentiel que pourraient causer les importations proches d’un tel seuil. Cette marge d’appréciation, également conforme
dans ce contexte à la marge d’appréciation dont disposent les institutions dans le domaine des mesures de défense commerciale ( 37 ), vaut dans les deux sens. Elle permet à la Commission, le cas échéant, soit de pouvoir qualifier de « négligeable » le préjudice résultant de volumes d’importations qui, tout en étant très proches de ce seuil, le dépassent, soit de pouvoir considérer que des volumes d’importations qui sont proches de ce seuil, mais restent en deçà, peuvent néanmoins causer un
préjudice non négligeable.

102. D’autre part, ainsi qu’il ressort explicitement du libellé du considérant 16 et de l’article 9, paragraphe 3, première phrase, du règlement de base, la question fondamentale pour déterminer si l’enquête ou la procédure doivent être closes sans que des mesures de défense soient nécessaires n’est pas le dépassement du seuil en tant que tel, mais le caractère négligeable du préjudice. Il en résulte que, même en interprétant la disposition de cet article à la lumière du considérant pertinent, comme
le préconise Eurofer, il n’apparaît pas que ce seuil de 1 % soit, comme elle le soutient, un seuil rigide et strict.

103. Il résulte des considérations qui précèdent que le seul fait que le volume des importations en provenance de Serbie ait été supérieur au seuil de 1 % indiqué à l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base n’empêchait pas la Commission de considérer qu’il n’était pas nécessaire d’adopter des mesures de défense à l’encontre des importations en provenance de Serbie en se fondant sur le niveau de minimis des volumes de ces importations et sur l’interaction entre cet élément et la circonstance
que les prix de vente moyens serbes étaient plus élevés que ceux des quatre autres pays concernés. Je suis donc d’avis que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en confirmant l’analyse de la Commission à cet égard.

104. À la lumière des considérations qui précèdent, j’estime que la première branche du troisième moyen doit être déclarée non fondée.

105. En ce qui concerne la seconde branche, contrairement à ce que soutient la Commission, elle ne me semble pas irrecevable au motif qu’Eurofer contesterait uniquement des questions de fait. En effet, aux points 115 à 121 de l’arrêt attaqué, contre lesquels cette branche est dirigée, le Tribunal a énoncé des considérations de droit et l’argumentation d’Eurofer est dirigée contre celles-ci.

106. Cela étant, j’estime néanmoins que la seconde branche n’est pas non plus fondée.

107. S’agissant du premier argument de cette seconde branche, selon lequel la Commission aurait outrepassé sa marge d’appréciation dans la mesure où, en l’espèce, le volume des importations serbes dépassait le seuil de 1 % et ne relevait donc pas du seuil de sécurité spécifié à l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base, il doit être rejeté à la lumière des considérations concernant la première branche du présent moyen. En effet, il découle de ces considérations que le Tribunal n’a commis
aucune erreur en considérant que la Commission pouvait, sans outrepasser la marge d’appréciation dont elle dispose à cet égard, considérer, au vu des circonstances de la présente affaire, comme étant négligeable au sens de cette disposition le préjudice potentiellement causé par ces importations, bien que leur volume ait dépassé de 0,04 % le seuil de 1 % indiqué à l’article 5, paragraphe 7, du règlement de base.

108. S’agissant du deuxième argument de la seconde branche, tiré de ce qu’un producteur-exportateur russe et un producteur-exportateur brésilien ont exporté vers l’Union le produit concerné à des prix comparables au prix moyen de l’exportateur unique serbe, il a déjà été considéré comme étant non pertinent dans le cadre de l’analyse du deuxième moyen du pourvoi. Dès lors qu’il n’est pas contesté, comme cela a été indiqué au point 82 des présentes conclusions, que, au niveau du pays, les prix moyens
des importations en provenance de Russie et du Brésil étaient inférieurs aux prix serbes, la circonstance invoquée par Eurofer n’est nullement de nature à démontrer que la Commission aurait outrepassé sa marge d’appréciation.

109. S’agissant du troisième argument, tiré de l’absence de prise en considération, par la Commission, des données relatives aux sous‑cotations des prix et des prix indicatifs des produits serbes, il repose sur la prémisse selon laquelle, puisque le volume des importations en provenance de Serbie dépassait le seuil de 1 %, la Commission ne pouvait considérer le préjudice potentiel causé par ces importations comme étant négligeable au sens de l’article 9, paragraphe 3, du règlement de base et aurait
dû par conséquent effectuer une analyse complète du préjudice potentiel que les importations serbes auraient causé à l’industrie de l’Union au sens de l’article 3, paragraphe 3, de ce règlement. Il résulte cependant des considérations qui précèdent que cette prémisse est erronée et que le Tribunal a pu conclure sans commettre d’erreur que, en l’espèce, la Commission pouvait clore la procédure en considérant que le préjudice était négligeable sans devoir procéder à l’analyse complémentaire
demandée par Eurofer. Il s’ensuit que le troisième argument doit également être rejeté.

110. Il résulte des considérations qui précèdent que la seconde branche du troisième moyen du pourvoi est également, selon moi, non fondée et que ce moyen doit donc être rejeté dans son intégralité.

4. Sur le quatrième moyen de pourvoi, tiré de l’absence de communication des données concernant la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe

111. Par le quatrième moyen de pourvoi, qui se subdivise en trois branches et vise à contester les points 135 à 148 de l’arrêt attaqué, Eurofer fait valoir que le Tribunal a commis plusieurs erreurs de droit en constatant que la Commission n’était pas tenue de lui communiquer les données relatives à la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe.

a) L’arrêt attaqué

112. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté qu’il ressortait du dossier qu’Eurofer avait été informée à plusieurs reprises des considérations ayant amené la Commission à conclure, d’une part, que les importations en provenance de Serbie ne devaient pas faire l’objet d’une évaluation cumulative avec les importations des quatre autres pays et, d’autre part, qu’il convenait de clôturer la procédure s’agissant de ces importations en provenance de Serbie ( 38 ). Le Tribunal en a déduit que,
conformément à l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base, Eurofer avait été informée des faits et des considérations essentiels sur le fondement desquels il était envisagé de recommander la clôture de la procédure en ce qui concerne les importations en provenance de Serbie sans institution de mesures et qu’elle avait eu la possibilité de faire connaître utilement son point de vue, de sorte que ses droits de la défense avaient donc été respectés en l’espèce ( 39 ).

113. Le Tribunal a ensuite considéré que, dans la mesure où ni Eurofer ni ses membres ne se trouvaient dans une situation comparable à celle d’une entreprise qui risque de se voir infliger une sanction ou un droit antidumping, elle ne pouvait utilement tirer argument de la jurisprudence concernant le respect des droits de la défense à l’égard de telles entreprises ( 40 ).

114. Enfin, le Tribunal a rejeté l’argument d’Eurofer visant à invoquer la méconnaissance du principe de bonne administration. Le Tribunal a considéré qu’il découlait de l’examen du deuxième moyen que c’est à juste titre que la Commission avait décidé de clôturer la procédure concernant les importations en provenance de Serbie sur le seul fondement des volumes d’importation et des données relatives aux prix de vente moyens, et sans analyser les données sur la sous-cotation des prix et des prix
indicatifs. Par conséquent, selon le Tribunal, la Commission avait examiné tous les éléments pertinents du cas d’espèce. Le Tribunal a ensuite considéré que cette conclusion ne pouvait être remise en cause par les marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs concernant les importations serbes qu’Eurofer avait demandé de produire et que, partant, la demande de production de ces données devait également être rejetée ( 41 ).

b) Arguments des parties

115. Eurofer conteste cette analyse du Tribunal. Dans la première branche de ce moyen, elle soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant que ses droits de la défense n’avaient pas été violés. Les données relatives à la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe constituaient selon elle des informations essentielles permettant de montrer l’incidence que les importations ont eue sur les prix et étaient nécessaires pour permettre à Eurofer de faire
connaître son point de vue sur la question de savoir si les importations serbes avaient causé un préjudice à l’industrie de l’Union et si la constatation de la Commission quant à leur caractère négligeable était correcte. Selon Eurofer, les droits de la défense ne reposeraient pas uniquement sur la connaissance des informations sur lesquelles la Commission fonde son argumentation, comme le prévoit l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base, mais également sur l’accès à d’autres éléments
pertinents dans le dossier de la Commission susceptibles de mettre en question son analyse.

116. Dans sa deuxième branche, Eurofer soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant que, en sa qualité de représentante de l’industrie de l’Union, elle ne pouvait pas se prévaloir des exigences découlant du respect des droits de la défense, car elle ne risquait pas de se voir infliger un droit antidumping. Il ressortirait, au contraire, de la jurisprudence que la distinction à cet égard entre exportateurs et industrie de l’Union n’aurait aucune base juridique.

117. Dans sa troisième branche, Eurofer soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant que le règlement litigieux respectait le principe de bonne administration consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux. Eurofer fait valoir que, si le deuxième ou le troisième des moyens du pourvoi devaient être accueillis, ses arguments tirés de la violation du principe de bonne administration devraient également être accueillis. En outre, Eurofer soutient que le Tribunal a
commis une erreur de droit en rejetant sa demande tendant à ce qu’il soit ordonné à la Commission de produire les éléments de preuve concernant la sous-cotation des prix et des prix indicatifs.

118. La Commission fait valoir que la deuxième branche du présent moyen est inopérante. En tout état de cause, selon la Commission et HBIS, ce moyen est intégralement non fondé.

c) Appréciation

119. S’agissant de la première branche du quatrième moyen soulevé par Eurofer, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base que les parties visées au paragraphe 1, dont fait partie Eurofer en l’espèce, peuvent demander à être informées des faits et considérations essentiels sur le fondement desquels il est envisagé de recommander la clôture d’une enquête ou d’une procédure sans institution de mesures définitives.

120. Cependant, ainsi qu’il ressort des points 135 et 136 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté qu’Eurofer avait été informée des éléments ayant amené la Commission à conclure que les importations en provenance de Serbie ne devaient pas faire l’objet d’une évaluation cumulative avec les importations des quatre autres pays et qu’il convenait de clôturer la procédure concernant ces importations.

121. Il ressort, en outre, de l’analyse des précédents moyens du pourvoi, et notamment des points 78, 79 et 109 des présentes conclusions, que le Tribunal a constaté, sans commettre d’erreur, que la Commission avait pu considérer que, en l’espèce, à la lumière des éléments pris en considération, il n’était pas nécessaire d’approfondir l’analyse de l’éventuel préjudice résultant des importations serbes, ni aux fins de la constatation au titre de l’article 3, paragraphe 4, sous a), du règlement de
base, ni aux fins de la décision de clore la procédure aux termes de l’article 9, paragraphes 2 et 3, de ce règlement. Il s’ensuit que, dans la mesure où les données relatives à la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe ne constituaient pas des faits ou considérations sur le fondement desquels la Commission avait envisagé de recommander la clôture de l’enquête concernant les importations serbes sans institution de mesures, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de
droit en jugeant que la Commission n’avait pas violé l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base en ne communiquant pas ces données à Eurofer.

122. Dans le cadre de la première branche, Eurofer soutient néanmoins également que, indépendamment de la disposition de l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base, ses droits de la défense auraient été violés dans la mesure où ces données constituaient d’autres éléments pertinents figurant dans le dossier de la Commission susceptibles de mettre en question son analyse. Dans le cadre de la deuxième branche, elle fait également valoir qu’elle bénéficierait en substance des mêmes droits de la
défense que ceux reconnus par la jurisprudence aux exportateurs qui risquent de se voir imposer un droit antidumping.

123. À cet égard, et sans qu’il soit besoin de se prononcer définitivement sur la question de l’applicabilité ou non à une entité telle qu’Eurofer de la jurisprudence concernant les droits de la défense des exportateurs, je relève que, en tout état de cause, selon la jurisprudence, l’existence d’une irrégularité se rapportant aux droits de la défense ne saurait conduire à l’annulation du règlement litigieux que dans la mesure où il existerait une possibilité que, en raison de cette irrégularité, la
procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent ( 42 ).

124. Il découle du point 121 des présentes conclusions et des points qui y sont cités que, en l’espèce, d’une part, les données relatives à la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe n’étaient pas nécessaires pour fonder les décisions au titre de l’article 3, paragraphe 4, sous a), et de l’article 9, paragraphes 2 et 3, du règlement de base et que, d’autre part, la Commission n’était pas tenue de procéder à une analyse complète du préjudice au sens de l’article 3,
paragraphe 3, du règlement de base pour les importations en provenance de Serbie pour adopter de telles décisions. Il en résulte que, en principe, en ne communiquant pas ces données, la Commission n’a commis aucune irrégularité.

125. Dans ces conditions, Eurofer ne saurait, à mon sens, invoquer une violation des droits de la défense en se bornant à faire valoir que les données concernant la sous-cotation des prix et des prix indicatifs pour l’exportateur serbe ne lui avaient pas été communiquées, sans spécifier aucunement pour quelle raison, si cette communication avait eu lieu, elle aurait été en mesure de mieux assurer sa défense et la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

126. Il s’ensuit que, à mon avis, tant la première que la deuxième branche du quatrième moyen doivent être rejetées. Il s’ensuit également que, contrairement à ce que soutient Eurofer, dans ces circonstances, le Tribunal n’était pas tenu d’ordonner à la Commission de produire lesdites données.

127. En ce qui concerne la troisième branche, je relève qu’elle repose non pas sur des arguments juridiques propres, mais sur un simple renvoi aux deuxième et troisième moyens de pourvoi. Il s’ensuit que, puisque ces moyens doivent selon moi être rejetés, cette branche doit également être rejetée.

128. Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu, selon moi, de rejeter également le quatrième moyen de pourvoi et que, partant, le pourvoi doit être rejeté dans son intégralité.

VI. Sur les dépens

129. En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

130. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

131. Eurofer ayant succombé en ses moyens et la Commission ainsi que HBIS ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter les dépens exposés par celles-ci.

VII. Conclusion

132. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit :

– le pourvoi est rejeté ;

– Eurofer, Association Européenne de l’Acier, AISBL supportera les dépens exposés par la Commission européenne et par HBIS Group Serbia Iron & Steel LLC Belgrade.

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( 1 ) Langue originale : l’italien.

( 2 ) T‑835/17, EU:T:2020:96.

( 3 ) Règlement d’exécution de la Commission du 5 octobre 2017 instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés, originaires du Brésil, d’Iran, de Russie et d’Ukraine et clôturant l’enquête sur les importations de certains produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés, originaires de Serbie (JO 2017, L 258, p. 24 ; rectificatif publié au JO 2017,
L 319, p. 81).

( 4 ) JO 2016, L 176, p. 21.

( 5 ) La Commission se réfère à cet égard à l’arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil (C‑205/16 P, EU:C:2017:840, points 37 et suiv.).

( 6 ) En effet, au sens de l’article 176, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, le pourvoi incident doit être formé par acte séparé, distinct du mémoire en réponse.

( 7 ) Voir sur ce point mes conclusions dans les affaires jointes Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland/Commission (C‑174/19 P et C‑175/19 P, EU:C:2021:199, en particulier points 44 et 45).

( 8 ) Voir arrêts du 29 novembre 2007, Stadtwerke Schwäbisch Hall e.a./Commission (C‑176/06 P, non publié, EU:C:2007:730, point 18), et du 29 juillet 2019, Bayerische Motoren Werke et Freistaat Sachsen/Commission (C‑654/17 P, EU:C:2019:634, point 44).

( 9 ) Voir, à cet égard, en application de l’arrêt Boehringer, arrêts du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce (C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 193), et du 21 décembre 2016, Club Hotel Loutraki e.a./Commission (C‑131/15 P, EU:C:2016:989, points 67 et 68).

( 10 ) Voir, à cet égard, les considérations du point 126 de mes conclusions dans les affaires jointes World Duty Free Group et Espagne/Commission (C‑51/19 P et C‑64/19 P, EU:C:2021:51).

( 11 ) Voir points 65 et 66 de l’arrêt attaqué.

( 12 ) Voir points 66 et 67 de l’arrêt attaqué.

( 13 ) Note explicative de la Commission du 21 septembre 2000 adressée au Comité de pratique antidumping (Groupe ad hoc sur la mise en œuvre) de l’Organisation mondiale du commerce (ci-après la « note explicative de 2000 »). Voir points 37, 71 et 77 de l’arrêt attaqué.

( 14 ) Voir points 71 à 79 de l’arrêt attaqué.

( 15 ) Voir point 80 de l’arrêt attaqué.

( 16 ) Eurofer se réfère à l’arrêt du 25 janvier 2017, Rusal Armenal/Conseil (T‑512/09 RENV, EU:T:2017:26, points 101 à 105).

( 17 ) Voir point 51 de l’arrêt attaqué.

( 18 ) Voir points 63 et 65 de l’arrêt attaqué.

( 19 ) Voir point 68 de l’arrêt attaqué.

( 20 ) Voir, entre autres, arrêt du 19 septembre 2019, Trace Sport (C‑251/18, EU:C:2019:766, point 47 et jurisprudence citée).

( 21 ) Voir à cet égard mes récentes conclusions dans l’affaire Commission/Hubei Xinyegang Special Tube (C‑891/19 P, EU:C:2021:533, point 29), renvoyant à l’arrêt du 10 juillet 2019, Caviro Distillerie e.a./Commission (C‑345/18 P, non publié, EU:C:2019:589, point 15 et jurisprudence citée).

( 22 ) Voir points 101 à 105 de cet arrêt et plus particulièrement point 105.

( 23 ) Voir à cet égard, dans le même sens et par analogie, arrêt du 10 février 2021, RFA International/Commission (C‑56/19 P, EU:C:2021:102, point 79 et jurisprudence citée).

( 24 ) Voir, entre autres, arrêts du 8 juillet 1999, Hercules Chemicals/Commission (C‑51/92 P, EU:C:1999:357, point 75), et du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 211).

( 25 ) Voir point 81 de l’arrêt attaqué.

( 26 ) Voir points 82 à 84 de l’arrêt attaqué.

( 27 ) Voir, entre autres, arrêt du 28 janvier 2021, Qualcomm et Qualcomm Europe/Commission (C‑466/19 P, EU:C:2021:76, point 42 et jurisprudence citée).

( 28 ) C’est-à-dire dans une situation dans laquelle les prix d’importation pratiqués, d’une part, par l’exportateur unique serbe et, d’autre part, par les deux exportateurs, l’un russe et l’autre brésilien, mentionnés par Eurofer, étaient comparables. L’argument d’Eurofer semble pratiquement invoquer une violation du principe d’égalité de traitement.

( 29 ) Voir à cet égard tableau 4 au considérant 235 du règlement litigieux.

( 30 ) Voir, entre autres, arrêt du 27 février 2020, Lituanie/Commission (C‑79/19 P, EU:C:2020:129, point 71 et jurisprudence citée).

( 31 ) Voir points 110 à 112 de l’arrêt attaqué.

( 32 ) Voir points 113 et 114 de l’arrêt attaqué.

( 33 ) Voir points 115 à 119 de l’arrêt attaqué.

( 34 ) Voir points 120 et 121 de l’arrêt attaqué.

( 35 ) Sauf si l’ensemble des pays concernés représentent un pourcentage égal ou supérieur à 3 %.

( 36 ) Voir points 47 et 48 des présentes conclusions.

( 37 ) Voir point 50 des présentes conclusions.

( 38 ) Comme cela a déjà été précisé, ces conclusions reposaient sur trois considérations : en premier lieu, les marges de dumping relatives aux importations en question étaient supérieures au seuil de minimis ; en deuxième lieu, les volumes d’importation en provenance de Serbie avaient été jugés négligeables, et, en troisième lieu, les prix à l’exportation serbes étaient différents de ceux des quatre autres pays concernés. Voir points 52, 135 et 136 de l’arrêt attaqué.

( 39 ) Voir points 136 et 137 de l’arrêt attaqué.

( 40 ) Voir points 140 à 142 de l’arrêt attaqué.

( 41 ) Voir points 143 à 148 de l’arrêt attaqué.

( 42 ) Voir, entre autres, arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP (C‑191/09 P et C‑200/09 P, EU:C:2012:78, point 79 et jurisprudence citée).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-226/20
Date de la décision : 02/09/2021
Type d'affaire : Pourvoi
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Dumping – Importation de produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés originaires du Brésil, d’Iran, de Russie, de Serbie et d’Ukraine – Clôture de la procédure concernant les importations originaires de Serbie – Détermination de l’existence d’un préjudice – Évaluation cumulative des effets des importations en provenance de plus d’un pays tiers – Règlement (UE) 2016/1036 – Article 3, paragraphe 4 – Clôture de la procédure sans institution de mesures – Article 9, paragraphe 2 – Caractère “négligeable” des importations – Seuil de minimis – Pouvoir d’appréciation de la Commission européenne.

Politique commerciale

Dumping


Parties
Demandeurs : Eurofer, Association Européenne de l'Acier, AISBL
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Pitruzzella

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:689

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