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02/09/2021 | CJUE | N°C-143/20

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. M. Bobek, présentées le 2 septembre 2021., A contre O et G. W. et E. S. contre A. Towarzystwo Ubezpieczeń Życie S.A., 02/09/2021, C-143/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 2 septembre 2021 ( 1 )

Affaires jointes C‑143/20 et C‑213/20

A

contre

O (C‑143/20)

et

G.W.,

E.S.

contre

« A. » Towarzystwo Ubezpieczeń Życie S.A. (C‑213/20)

[demande de décision préjudicielle formée par le Sąd Rejonowy dla Warszawy‑Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola, Varsovie, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs 

– Directive 2002/83/CE – Contrats collectifs d’assurance vie liés à des fonds d’investissement – Portée et contenu des obligations d’information précontractuelle – Di...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 2 septembre 2021 ( 1 )

Affaires jointes C‑143/20 et C‑213/20

A

contre

O (C‑143/20)

et

G.W.,

E.S.

contre

« A. » Towarzystwo Ubezpieczeń Życie S.A. (C‑213/20)

[demande de décision préjudicielle formée par le Sąd Rejonowy dla Warszawy‑Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola, Varsovie, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 2002/83/CE – Contrats collectifs d’assurance vie liés à des fonds d’investissement – Portée et contenu des obligations d’information précontractuelle – Directive 2005/29/CE – Pratiques commerciales déloyales – Omissions trompeuses »

I. Introduction

1. Les litiges au principal concernent des consommateurs polonais ayant adhéré à des contrats collectifs d’assurance vie. Ces consommateurs affirment ne pas avoir été informés avec le niveau de détail requis des caractéristiques et des risques de ces produits d’assurance. Ils demandent dès lors que toutes les sommes qu’ils ont investies dans lesdits produits leur soient remboursées. C’est dans ce contexte que le Sąd Rejonowy dla Warszawy-Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola,
Varsovie, Pologne) a formulé plusieurs questions relatives à la portée de l’obligation d’information prévue à l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2002/83/CE ( 2 ) (ci-après la « directive sur l’assurance vie ») et aux effets de la non-communication de cette information (complète).

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. La directive sur l’assurance vie

2. La directive sur l’assurance vie vise à éliminer les divergences entre les législations nationales en matière de contrôle en coordonnant certains aspects relatifs à l’accès aux activités d’assurance sur la vie et à leur exercice ( 3 ). À cet égard, le considérant 52 de cette directive énonce :

« Dans le cadre d’un marché intérieur de l’assurance, le consommateur aura un choix plus grand et plus diversifié de contrats. Afin de profiter pleinement de cette diversité et d’une concurrence accrue, il doit disposer des informations nécessaires pour choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins. Cette nécessité d’informations est d’autant plus importante que la durée des engagements peut être très longue. Il convient, en conséquence, de coordonner les dispositions minimales pour que
le consommateur reçoive une information claire et précise sur les caractéristiques essentielles des produits qui lui sont proposés et sur les coordonnées des organismes habilités à connaître des réclamations des preneurs, assurés ou bénéficiaires du contrat. »

3. L’article 36 de ladite directive, intitulé « Information des preneurs », dispose :

« 1.   Avant la conclusion du contrat d’assurance, au moins les informations énumérées à l’annexe III, point A, doivent être communiquées au preneur.

[...]

3.   L’État membre de l’engagement ne peut exiger des entreprises d’assurance la fourniture d’informations supplémentaires par rapport à celles énumérées à l’annexe III que si ces informations sont nécessaires à la compréhension effective par le preneur des éléments essentiels de l’engagement.

4.   Les modalités d’application du présent article et de l’annexe III sont arrêtées par l’État membre de l’engagement. »

4. Dans sa partie pertinente, l’annexe III de la même directive, intitulée « Information des preneurs », prévoit :

« Les informations suivantes, qui doivent être communiquées au preneur soit A. avant la conclusion du contrat, soit B. pendant la durée du contrat, doivent être formulées de manière claire et précise, par écrit, et être fournies dans une langue officielle de l’État membre de l’engagement.

[...]

A. Avant la conclusion du contrat

Information concernant l’entreprise d’assurance Information concernant l’engagement
[...] [...]

a.11. Énumération des valeurs de référence utilisées (unités de compte) dans les contrats à capital variable

a.12. Indications sur la nature des actifs représentatifs des contrats à capital variable

[...] »

2. La directive sur les pratiques commerciales déloyales

5. La directive 2005/29/CE ( 4 ) (ci-après la « directive sur les pratiques commerciales déloyales ») s’applique aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, telles que définies à l’article 5 de cette directive, avant, pendant et après une transaction commerciale portant sur un produit ( 5 ). L’article 5 de ladite directive, intitulé « Interdiction des pratiques commerciales déloyales », dispose :

« 1.   Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.

[...]

4.   En particulier, sont déloyales les pratiques commerciales qui sont :

a) trompeuses au sens des articles 6 et 7,

[...] »

6. L’article 7 de la même directive, intitulé « Omissions trompeuses », dispose :

« 1.   Une pratique commerciale est réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites propres au moyen de communication utilisé, elle omet une information substantielle dont le consommateur moyen a besoin, compte tenu du contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et, par conséquent, l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise
autrement.

[...]

5.   Les informations qui sont prévues par le droit [de l’Union] et qui sont relatives aux communications commerciales, y compris la publicité ou le marketing, et dont une liste non exhaustive figure à l’annexe II, sont réputées substantielles. »

B.   Le droit polonais

7. Au moment des faits du litige au principal, l’activité d’assurance était régie en Pologne par l’Ustawa o działalności ubezpieczeniowej (loi sur les activités d’assurance ; ci-après la « loi sur les activités d’assurance ») ( 6 ). Cette loi visait à transposer la directive sur l’assurance vie.

8. Dans sa partie pertinente, l’article 13 de la loi sur les activités d’assurance disposait :

« [...]

4.   En ce qui concerne les assurances sur la vie liées à des fonds d’investissement, visées par la partie I, groupe 3, de l’annexe à la loi, l’entreprise d’assurance est tenue de préciser ou d’inclure dans le contrat d’assurance :

1) la liste des fonds d’investissement proposés ;

2) les règles de détermination de la valeur des prestations et de la valeur de rachat de l’assurance, y compris les règles de remise des parts du fonds d’investissement et les délais de leur conversion en espèces et de versement de la prestation ;

3) le règlement régissant le placement des disponibilités du fonds d’investissement, contenant, en particulier, les caractéristiques des actifs entrant dans la composition du fonds, les critères de sélection des actifs, ainsi que les principes de leur diversification et les autres limites aux investissements ;

4) les règles et délais d’évaluation des parts du fonds d’investissement ;

5) les règles d’établissement du montant des frais et de toutes les autres charges déduites des primes d’assurance ou du fonds d’investissement ;

[...] »

III. Les faits à l’origine du litige, la procédure au principal et les questions préjudicielles

A.   L’affaire C‑143/20

9. O (ci-après la « défenderesse dans l’affaire C‑143/20 ») est une personne morale établie en Pologne. Elle a conclu un contrat collectif d’assurance vie à capital variable avec une société d’assurance vie. Cette dernière intervenait dans le contrat en qualité d’assureur, tandis que la défenderesse dans l’affaire C‑143/20 intervenait en qualité de preneur d’assurance.

10. Le contrat spécifique conclu entre cette défenderesse et l’entreprise d’assurance était lié à un fonds d’investissement. Le règlement de ce fonds précisait que les primes d’assurance seraient investies jusqu’à 100 % en certificats émis par B1. Les paiements au titre de ces certificats étaient fondés sur l’indice B2.

11. Le 8 octobre 2010, A, une personne physique (ci-après le « requérant dans l’affaire C‑143/20 »), a adhéré au contrat collectif d’assurance vie conclu par la défenderesse dans l’affaire C‑143/20 et l’entreprise d’assurance. Conformément aux dispositions de la déclaration d’adhésion au contrat, le requérant dans l’affaire C‑143/20 s’est engagé à verser une prime initiale, puis une prime régulière payable mensuellement. La période d’assurance était fixée à quinze ans.

12. Le contrat d’assurance ne précisait pas les règles d’évaluation des titres du fonds d’investissement, de l’actif net de l’ensemble du fonds, ni celles des certificats dans lesquels les primes payées par le requérant dans l’affaire C‑143/20 seraient investies. Il n’indiquait pas non plus comment était calculée la valeur de l’indice sur lequel était basé le paiement au titre des certificats.

13. Le règlement du fonds précisait toutefois que le montant garanti à l’échéance, qui serait payé par l’entreprise d’assurance au terme des quinze ans, ne serait pas inférieur à celui de la totalité des primes investies et que ce montant pourrait augmenter en cas d’évolution positive de l’indice B2. En cas de résiliation anticipée du contrat d’assurance, l’entreprise d’assurance s’engageait à rembourser à l’assuré un montant égal à la valeur de ses titres du fonds d’investissement au moment de la
résiliation.

14. Après une période de sept ans et compte tenu de l’importante dépréciation des fonds qu’il avait investis, le requérant dans l’affaire C‑143/20 a résilié son contrat. L’entreprise d’assurance lui a versé, au titre de la valeur de rachat, un montant correspondant à la valeur de ses titres du fonds d’investissement à la date de la résiliation du contrat d’assurance.

15. Le requérant dans l’affaire C‑143/20 a introduit une action en recouvrement devant le Sąd Rejonowy dla Warszawy-Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola, Varsovie). Il affirme avoir été induit en erreur quant à la nature de l’investissement dans lequel les primes seraient placées.

16. La juridiction de renvoi relève que, dans d’autres versions linguistiques, l’obligation d’information prévue à l’article 36, paragraphe 1, lu conjointement avec l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la directive sur l’assurance vie ainsi qu’avec l’article 185, paragraphe 3, de la directive 2009/138/CE ( 7 ) (ci-après la « directive solvabilité II »), exige qu’une information complète portant sur les instruments financiers et les stratégies d’investissement soit communiquée au requérant
dans l’affaire C‑143/20. La non-communication de cette information constituerait donc une pratique commerciale déloyale au sens des articles 5 et 7 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

17. Dans ce contexte factuel et juridique, le Sąd Rejonowy dla Warszawy-Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie‑Wola, Varsovie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Convient-il d’interpréter l’article 185, paragraphe 3, sous i), de la [directive solvabilité II] et l’article 36, paragraphe 1, lu conjointement à l’annexe III, point A, sous a.12, de la [directive sur l’assurance vie] en ce sens que, dans le cas de contrats d’assurance vie à capital variable (assurance vie liée à un fonds de placement), lorsque les actifs représentatifs du fonds sont constitués de produits dérivés (ou de produits structurés dans lesquels sont incorporés des produits
dérivés), l’assureur ou le preneur d’assurance (qui offre l’assurance, distribue le produit d’assurance, “vend” l’assurance) est tenu de fournir à l’assuré consommateur des indications sur la nature, les spécifications de type, les caractéristiques (en anglais “indication of the nature”, en allemand “Angabe der Art”) de l’instrument représentatif (produit dérivé ou produit structuré dans lequel est incorporé un produit dérivé), ou bien suffit-il d’indiquer le type des actifs représentatifs,
sans fournir les caractéristiques de cet instrument ?

2) Dans l’hypothèse où la Cour répondrait à la première question en ce sens que l’assureur ou le preneur d’assureur (qui offre l’assurance, distribue le produit d’assurance, “vend” l’assurance à capital variable liée à un fonds de placement) est tenu de communiquer au consommateur des informations sur la nature, les spécifications de type, les caractéristiques de l’instrument représentatif (produit dérivé ou produit structuré dans lequel est incorporé un produit dérivé), convient-il
d’interpréter l’article 185, paragraphe 3, sous i), de la [directive solvabilité II] et l’article 36, paragraphe 1, lu conjointement à l’annexe III, point A, sous a.12, de la [directive sur l’assurance vie], en ce sens que les informations communiquées à l’assuré consommateur sur la nature, les spécifications de type, les caractéristiques de l’instrument représentatif (produit dérivé ou produit structuré dans lequel est incorporé un produit dérivé) doivent comprendre les mêmes informations
que celles exigées par l’article 19, paragraphe 3, de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 avril 2004, concernant les marchés d’instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil (JO 2004, L 145, p. 1), et par l’article 24, paragraphe 4, de la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014,
concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE (JO 2014, L 173, p. 349), c’est-à-dire des informations complètes sur les produits dérivés et les stratégies d’investissement proposées, lesquelles doivent inclure des orientations et des mises en garde appropriées sur les risques inhérents à l’investissement dans ces instruments ou à certaines stratégies d’investissement, dont notamment les informations relatives à la méthode
d’évaluation des instruments représentatifs pratiquée par l’assureur ou par l’agent de calcul pendant la durée de la période de garantie de l’assurance [et] les informations sur les risques inhérents au produit dérivé et à son émetteur, y compris celles concernant la modification de la valeur d’un produit dérivé dans le temps, les différents éléments qui déterminent les modifications et le degré de leur incidence sur la valeur ?

3) Convient-il d’interpréter l’article 185, paragraphe 4, de la [directive solvabilité II] en ce sens que, dans le cas de contrats d’assurance vie à capital variable (assurance vie liée à un fonds de placement), lorsque l’actif représentatif du fonds est constitué d’un produit dérivé (ou d’un produit structuré dans lequel est incorporé un produit dérivé), l’assureur ou le preneur d’assurance (qui offre l’assurance, distribue le produit d’assurance, “vend” l’assurance) est tenu de fournir à
l’assuré consommateur les mêmes informations que celles exigées par l’article 19, paragraphe 3, de la directive 2004/39 et par l’article 24, paragraphe 4, de la directive 2014/65, c’est-à-dire des informations complètes sur les produits dérivés et les stratégies d’investissement proposées, qui doivent inclure des orientations et des mises en garde appropriées sur les risques inhérents à l’investissement dans ces instruments ou à certaines stratégies d’investissement, dont notamment les
informations relatives à la méthode d’évaluation de l’instrument représentatif pratiquée par l’assureur ou par l’agent de calcul pendant la durée de garantie de la période d’assurance [et] les informations sur les risques liés au produit dérivé et à son émetteur, y compris celles concernant la modification de la valeur d’un produit dérivé dans le temps, les différents éléments qui déterminent ces modifications et le degré de leur incidence sur la valeur ?

4) En cas de réponse affirmative à la deuxième ou à la troisième question (ou aux deux), l’omission, de la part d’un assureur ou d’un preneur d’assurance proposant une assurance vie à capital variable (assurance vie liée à un fonds de placement), de fournir à l’assuré consommateur les informations requises (visées aux deuxième et troisième questions), lorsqu’il lui propose une assurance, constitue-t-elle une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5 de la [directive sur les pratiques
commerciales déloyales] et l’omission de fournir les informations requises s’analyse-t-elle en une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article 7 de cette directive ?

5) En cas de réponse négative aussi bien à la deuxième qu’à la troisième question, l’omission, de la part de l’assureur ou du preneur d’assurance (qui offre l’assurance, distribue le produit d’assurance, “vend” l’assurance vie à capital variable – assurance vie liée à un fonds de placement), d’informer clairement le consommateur que les liquidités du fonds d’investissement (assurance liée à un fonds de placement) sont placées dans des produits dérivés (ou dans des produits structurés dans
lesquels sont incorporés des produits dérivés) constitue-t-elle une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5 de la [directive sur les pratiques commerciales déloyales], et l’omission de fournir les informations requises s’analyse-t-elle en une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article 7 de cette directive ?

6) En cas de réponse négative aussi bien à la deuxième qu’à la troisième question, l’omission de la part de l’assureur ou du preneur d’assurance qui offre une assurance vie à capital variable (assurance vie liée à un fonds de placement) de fournir au consommateur des explications détaillées sur les caractéristiques précises du produit dans lequel sont placées les disponibilités du fonds d’investissement (assurance vie liée à un fonds de placement), comprenant des informations sur les règles de
fonctionnement d’un tel instrument, lorsqu’il s’agit d’un produit dérivé (ou d’un produit structuré dans lequel est incorporé un produit dérivé), constitue-t-elle une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5 de la [directive sur les pratiques commerciales déloyales], et l’omission de fournir les informations requises s’analyse-t-elle en une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article 7 de cette directive ? »

B.   L’affaire C‑213/20

18. A. Towarzystwo Ubezpieczeń Życie S.A. (ci-après la « défenderesse dans l’affaire C‑213/20 ») est une personne morale établie en Pologne qui commercialise des produits d’assurance vie. En juillet 2011, elle a conclu avec A S.A., une société active dans le secteur bancaire, un contrat collectif d’assurance vie à capital variable, dans le cadre duquel elle intervenait en qualité d’assureur et A S.A. en qualité de preneur d’assurance (ci-après le « preneur d’assurance dans l’affaire C‑213/20 »).

19. Le contrat particulier conclu par la défenderesse et le preneur d’assurance dans l’affaire C‑213/20 était lié à un fonds d’investissement. Le règlement de ce fonds précisait que les primes d’assurance seraient investies jusqu’à 100 % en obligations indexées émises par une société tierce.

20. Les personnes physiques G. W. et E. S. (ci-après les « requérants dans l’affaire C‑213/20 ») ont déposé respectivement le 28 et le 30 novembre 2011 des déclarations individuelles d’adhésion au contrat collectif d’assurance vie. Conformément aux dispositions de ces déclarations, les requérants dans l’affaire C‑213/20 se sont engagés à verser une prime initiale et ensuite des primes d’assurance mensuelles régulières. La période d’assurance était fixée à quinze ans.

21. L’offre d’adhésion au contrat collectif d’assurance vie leur a été présentée lors d’une unique réunion qui s’est tenue dans les locaux du preneur d’assurance dans cette affaire. Le produit d’assurance leur a été présenté comme un investissement en capital prenant la forme d’une épargne systématique. La présentation orale du produit d’assurance s’est concentrée sur la présentation de graphiques concernant les rendements potentiels de l’investissement dans une assurance liée à un fonds
d’investissement. Au cours de cette réunion, les requérants dans l’affaire C‑213/20 ont également reçu des documents, à savoir la déclaration d’adhésion et les clauses contractuelles types.

22. Aucune information sur les conditions d’achat des obligations indexées émises par la société tierce n’a toutefois été communiquée aux requérants dans l’affaire C‑213/20. Ces derniers ne disposaient donc d’aucune information sur les facteurs de risque liés à l’investissement dans de tels produits structurés. Les seules informations relatives aux risques mentionnées dans le règlement du fonds incluaient, notamment, les risques liés à la dépréciation de l’indice dans lequel les primes d’assurance
étaient investies en raison de l’évolution des marchés financiers et l’éventuelle perte d’une partie de ces primes investies en cas de résiliation du contrat d’assurance avant la fin de la période d’assurance.

23. Les requérants dans l’affaire C-213/20 ont signé, en même temps que les déclarations d’adhésion au contrat d’assurance, un document écrit contenant des informations expliquant que, pendant la période d’assurance, la valeur des titres du fonds pouvait varier fortement en fonction de l’évaluation des instruments financiers dans lesquels ce fonds investissait. Il leur a toutefois été assuré que, au terme de la période contractuelle de quinze ans, la totalité de la valeur des titres du fonds
d’investissement leur serait versée.

24. Conformément aux conditions générales du contrat collectif d’assurance vie, les primes versées par les requérants dans l’affaire C‑213/20 ont été investies en obligations indexées émises par la société tierce. Au cours de la période d’assurance, la valeur des titres du fonds d’investissement a progressivement diminué. Au bout de huit ans, le requérant G. W. a résilié son contrat avec effet au 23 janvier 2019.

25. L’entreprise d’assurance a versé à G. W. une valeur de rachat correspondant à la valeur de ses titres du fonds, diminuée de certains frais de liquidation. Au moment où la demande de décision préjudicielle a été présentée, le requérant E. S. continuait à payer les primes et n’avait pas encore mis fin à la relation juridique découlant du contrat auquel il avait adhéré.

26. Les requérants dans l’affaire C‑213/20 ont néanmoins formé un recours contre la défenderesse devant le Sąd Rejonowy dla Warszawy‑Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola, Varsovie). À l’appui de leurs conclusions, ces requérants font valoir que cette défenderesse ne leur a pas communiqué une information complète quant aux caractéristiques des obligations indexées émises par la société tierce et quant aux risques qui y sont liés. Dès lors, il n’y aurait pas eu de réelle
déclaration de volonté d’adhérer au contrat collectif d’assurance vie.

27. Bien que, d’un point de vue formel, les requérants dans l’affaire C‑213/20 ne soient pas parties au contrat d’assurance liant la défenderesse au preneur d’assurance, la juridiction de renvoi relève que l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie prévoit l’obligation de communiquer « au moins les informations énumérées à l’annexe III, point A » de cette directive, « avant » la conclusion d’un contrat d’assurance. Puisque, en l’espèce, le consommateur prend en charge une partie
des obligations du preneur d’assurance, en particulier celle du paiement des primes, la juridiction de renvoi se demande s’il faut communiquer à la personne assurée toutes les informations qui ont été transmises à ce preneur d’assurance lorsque ce dernier a conclu le contrat avec la défenderesse dans l’affaire C‑213/20. Dans l’affirmative, cela crée une incertitude quant au moment où ces informations doivent être communiquées et quant à la manière dont il convient d’interpréter la portée de
l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la directive sur l’assurance vie.

28. C’est pourquoi le Sąd Rejonowy dla Warszawy-Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola, Varsovie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Faut-il comprendre l’article 36, paragraphe 1, de la [directive sur l’assurance vie], lu conjointement avec l’annexe III, point A, sous a.12, de la même directive, en ce sens que l’obligation de communiquer les informations qui y sont visées couvre également l’assuré qui n’est pas concomitamment le preneur d’assurance et qui adhère, en qualité de consommateur et en qualité d’investisseur effectif des sommes versées au titre de la prime d’assurance, à un contrat collectif d’assurance sur la
vie liée à un fonds de placement conclu par une entreprise d’assurance et une entreprise preneuse d’assurance ?

2) En cas de réponse affirmative à la première question, faut-il comprendre l’article 36, paragraphe 1, de la [directive sur l’assurance vie], lu conjointement avec l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la même directive, en ce sens que, dans le cadre d’une relation juridique telle que celle évoquée dans la première question, l’obligation de fournir des informations sur la nature des actifs financiers du fonds de placement implique également que le consommateur assuré doit être informé de
manière exhaustive et compréhensible de tous les risques liés à l’investissement dans les actifs de ce fonds (tels que des obligations structurées ou des produits dérivés), de la nature de ces risques et de leur ampleur, ou suffit-il, en vertu de cette disposition, de ne fournir à l’assuré que les informations de base sur les principaux types de risques inhérents à l’investissement par l’intermédiaire du fonds de placement ?

3) Faut-il comprendre l’article 36, paragraphe 1, de la [directive sur l’assurance vie], lu conjointement avec l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la même directive, en ce sens que, dans le cadre de la relation juridique décrite dans les première et deuxième questions, le consommateur qui adhère, en tant qu’assuré, à un contrat d’assurance sur la vie doit avoir été informé de tous les risques d’investissement et des conditions qui y sont liées, dont l’émetteur des actifs (obligations
structurées ou produits dérivés) composant le fonds de placement a informé l’assureur ?

4) En cas de réponse positive aux questions précédentes, l’article 36, paragraphe 1, de la [directive sur l’assurance vie] doit-il être interprété en ce sens que le consommateur qui, en qualité d’assuré, adhère à un contrat collectif d’assurance sur la vie liée à un fonds de placement doit avoir été informé de la nature des actifs et des risques inhérents à l’investissement dans de tels actifs avant la conclusion du contrat, dans le cadre d’une procédure précontractuelle distincte, et cet
article fait-il obstacle à une disposition nationale, [telle que] l’article 13, paragraphe 4, de la [loi sur les activités d’assurance], en vertu de laquelle il suffit que ces informations soient simplement mentionnées dans le contrat d’assurance au moment de sa conclusion sans qu’il soit possible de distinguer clairement et sans ambiguïté le moment où les informations sont obtenues au cours de la procédure d’adhésion au contrat ?

5) En cas de réponse positive aux trois premières questions, faut-il également interpréter l’article 36, paragraphe 1, de la [directive sur l’assurance vie], lu conjointement avec l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la même directive, en ce sens qu’il y a lieu de considérer que la mise en œuvre correcte de l’obligation d’information ainsi définie constitue un élément essentiel du contrat collectif d’assurance sur la vie liée à un fonds de placement et qu’en conséquence, la mise en œuvre
incorrecte de cette obligation peut conférer à l’assuré consommateur le droit de réclamer le remboursement de toutes les primes d’assurance versées en raison de l’éventuelle constatation de la nullité du contrat ou de son inefficacité ab initio, ou encore en raison de l’éventuelle constatation de la nullité ou de l’inefficacité de la déclaration individuelle d’adhésion audit contrat ? »

C.   La procédure devant la Cour

29. Par décision du 24 mars 2021, les affaires C‑143/20 et C‑213/20 ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

30. Les requérants dans l’affaire C‑213/20, la défenderesse dans l’affaire C‑213/20, les gouvernements grec, italien et polonais ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites. Les requérants dans l’affaire C‑213/20, la défenderesse dans l’affaire C‑213/20, les gouvernements italien et polonais ainsi que la Commission ont également répondu aux questions écrites qui leur ont été posées le 23 mars 2021.

IV. Analyse

31. Les présentes conclusions sont structurées de la manière suivante. Je commencerai par définir et analyser la nature des produits d’assurance en cause avant de résumer les circonstances factuelles communes aux deux affaires qui se révèleront pertinentes pour les présentes conclusions (section A). Je m’attacherai ensuite à l’ordre des questions posées par la juridiction de renvoi (section B) pour en aborder ensuite le fond : sur qui repose l’obligation d’information prévue à l’article 36,
paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie (section C) ; quelles informations faut-il communiquer (section D) ; quand faut-il les communiquer (section E), et quelles sont les conséquences d’un manquement à cette obligation (section F) ?

A.   Les produits d’assurance collective sur la vie et le contexte factuel pertinent

32. Le secteur de l’assurance est un domaine particulièrement sensible en ce qui concerne la nécessité de protéger les consommateurs ( 8 ). Les contrats d’assurance sont des produits financiers juridiquement complexes, susceptibles de différer considérablement selon l’assureur qui les offre et d’impliquer des engagements financiers importants et potentiellement d’une très longue durée. Dans ce contexte, le consommateur se trouve naturellement dans une situation de faiblesse par rapport à
l’assureur ( 9 ). En 2013, dans son rapport sur la directive sur les pratiques commerciales déloyales, la Commission a relevé un élément inquiétant, à savoir que, en ce qui concerne les services financiers et les biens immobiliers, les pratiques déloyales les plus fréquemment dénoncées dans les États membres sont le manque ou l’absence d’informations essentielles au stade de la publicité et la description trompeuse des produits ( 10 ).

33. C’est pour cette raison que la jurisprudence de la Cour a ouvert une solide protection « parapluie » au-dessus des consommateurs ( 11 ). Bien que cette protection ne soit pas absolue ( 12 ), le niveau élevé que lui reconnaît la Cour tend à rééquilibrer la position de négociation de la partie la plus faible qui noue des relations contractuelles avec une entreprise d’assurance (c’est-à-dire le preneur d’assurance ou le consommateur) ( 13 ).

34. Ces considérations restent valables pour le secteur de l’assurance. Si, de manière générale, l’assurance couvre des risques qui sont susceptibles de se réaliser (et n’a donc de valeur qu’en cas de sinistre), certaines assurances font référence à une couverture financière qui couvre, moyennant rémunération, un événement certain. Ces dernières promettent donc une prestation consistant soit en un minimum garanti, soit en la valorisation des investissements au moment de la prestation.

35. Un contrat collectif d’assurance vie est un contrat unique d’assurance vie conclu entre une entreprise d’assurance et un preneur d’assurance. Les consommateurs peuvent adhérer à ce contrat collectif en déposant des déclarations distinctes exprimant leur volonté d’y adhérer. En contrepartie du paiement de primes régulières, ces consommateurs bénéficient de la protection qu’offre le régime sous‑jacent au contrat.

36. De nombreux produits ou contrats d’assurance vie sont toutefois conçus et vendus exclusivement comme des instruments financiers d’investissement personnel ou comme des instruments présentant de nombreux éléments similaires à ces derniers. Ils sont souvent commercialisés comme une méthode d’épargne retraite. C’est le cas des contrats d’assurance à capital variable (ou liés à des titres de fonds d’investissement). Dans ce type de contrats, les primes versées sont investies en « titres » d’un fonds
d’investissement. La valeur de ces titres dépend alors des actifs de ce fonds. Si la valeur de ces actifs sous‑jacents fluctue, la valeur des titres dans lesquels les primes du preneur ont été investies fluctuera également. Afin de répondre à la demande de sécurité face à de telles fluctuations possibles de la valeur, les contrats d’assurance à capital variable peuvent prévoir des « garanties à l’échéance ». En substance, ces garanties fixent le niveau minimum de la valeur du contrat à
l’échéance, c’est-à-dire au terme de ce contrat, indépendamment de la valeur de marché des actifs sous-jacents.

37. Les contrats collectifs d’assurance vie à capital variable en cause au principal sont des produits d’assurance populaires. Ils sont commercialisés auprès de consommateurs moyens avec la promesse de réaliser un investissement sûr, à long terme et susceptible de produire un rendement élevé au terme de la période d’assurance ou à la survenance de l’événement assuré ( 14 ). En effet, comme l’indique la juridiction de renvoi, les affaires au principal ne sont que deux exemples des nombreux litiges
similaires actuellement pendants devant elle.

38. Avant d’aborder le fond (complexe) des litiges au principal, il est peut-être utile de rappeler brièvement le cadre factuel pertinent et commun dans lequel s’inscrivent ces litiges.

39. À une date non communiquée par la juridiction de renvoi, deux contrats d’assurance vie, indépendants et sans lien, ont été conclus entre une entreprise d’assurance et un preneur d’assurance. Ces derniers sont tous deux des personnes morales. En 2010 et 2011, les requérants au principal, qui sont des personnes physiques résidant en Pologne et apparemment également des consommateurs au sens de la législation pertinente de l’Union, ont volontairement adhéré à ces contrats pour une durée de quinze
ans. En contrepartie, ils se sont engagés à payer mensuellement une prime fixe, pendant toute cette période.

40. Les assurances vie en cause étant liées à un fonds d’investissement, l’entreprise d’assurance devait investir les primes versées par les requérants en « unités de compte » (en d’autres termes, en titres) de ce fonds. Ces investissements étaient soumis au risque que la valeur de ces titres subisse d’importantes fluctuations pendant la période d’assurance.

41. Il a toutefois été assuré aux requérants que, au terme de la période contractuelle de quinze ans, le montant total des primes investies au moins (affaire C‑143/20) ou la totalité de la valeur des titres du fonds d’investissement (affaire C‑213/20) leur serait versé. Le montant de la prestation pouvait également être plus élevé en cas d’augmentation de la valeur des fonds auxquels étaient respectivement liés les contrats collectifs d’assurance vie concernés au cours de la période d’assurance
pertinente.

42. En cas de résiliation du contrat d’assurance avant la date d’échéance, les requérants au litige au principal ne devaient être remboursés qu’à concurrence de la valeur de leurs titres respectifs dans le fonds d’investissement, évaluée au moment du retrait, diminuée d’une redevance de liquidation. Dans les litiges au principal, cela signifie que la valeur de la totalité des fonds remboursés était nettement inférieure à l’investissement de ces requérants.

43. Les requérants au principal affirment qu’ils n’ont pas été suffisamment informés de la nature et des caractéristiques des instruments financiers sous‑jacents aux contrats collectifs d’assurance vie auxquels ils ont adhéré. Par conséquent, ils n’ont pas pu se faire une image suffisamment claire des risques encourus. Ils ont dès lors introduit des recours, respectivement contre le preneur d’assurance (affaire C‑143/20) et contre l’entreprise d’assurance (affaire C‑213/20), afin d’obtenir que les
déclarations d’adhésion aux contrats collectifs d’assurance vie en cause soient invalidées et que toutes les sommes investies dans ces contrats leur soient restituées.

B.   Reformulation et ordre des questions

44. Avant d’examiner le fond des questions posées par la juridiction de renvoi, il faut commencer par préciser deux aspects des présentes affaires : le droit de l’Union applicable, d’une part, et, s’appuyant sur celui-ci, la formulation et la simplification des questions posées, d’autre part.

45. Premièrement, dans plusieurs questions, la juridiction de renvoi demande une interprétation de certaines dispositions de la directive solvabilité II. Toutefois, ainsi que le relèvent à juste titre le gouvernement polonais et la Commission, l’entrée en application de cette directive a été reportée au 1er janvier 2016 ( 15 ). Dès lors, étant donné que les requérants au principal ont signé leurs déclarations d’adhésion aux contrats collectifs d’assurance vie en cause, respectivement, le 8 octobre
2010 (C‑143/20) et les 28 et 30 novembre 2011 (C‑213/20), la directive solvabilité II n’est pas applicable ratione temporis aux présentes affaires.

46. De même, par sa deuxième question dans l’affaire C‑143/20, la juridiction de renvoi demande une comparaison de la portée de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, d’une part, et de l’article 19, paragraphe 3, de la directive 2004/39 et de l’article 19, paragraphe 3, de la directive 2014/65, d’autre part. Toutefois, les directives 2004/39 et 2014/65 excluent explicitement les entreprises d’assurance de leur champ d’application ( 16 ). En outre, la directive 2014/65 n’est
pas applicable ratione temporis aux faits des litiges au principal. Dès lors, toute appréciation au titre de cette directive serait purement théorique ( 17 ).

47. Par conséquent, je propose de reformuler les première et deuxième questions dans l’affaire C‑143/20 ainsi que les première, deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑213/20 en ce sens qu’elles visent uniquement à obtenir une interprétation de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie. En outre, puisque la troisième question dans l’affaire C‑143/20 ne demande qu’une interprétation de l’article 185, paragraphe 4, de la directive solvabilité II, elle devient sans objet
et il n’est donc pas nécessaire que la Cour y réponde.

48. Deuxièmement, les questions, reformulées et simplifiées, envisagent la communication d’informations avant l’adhésion à un contrat d’assurance au titre de la directive sur l’assurance vie sous quatre angles différents : qui est la personne tenue d’informer les consommateurs des caractéristiques et des risques des produits d’assurance vie à capital variable ; quelles sont les informations qu’il convient de leur communiquer ; quand cette communication doit-elle avoir lieu, et quelles sont les
conséquences de la non-communication ?

49. La première question dans l’affaire C‑143/20 et la première question dans l’affaire C‑213/20 demandent, en substance, de déterminer sur qui exactement pèse l’obligation d’informer le preneur d’assurance en vertu de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie. Dans les circonstances factuelles particulières des litiges au principal, le fait que le « vendeur » du produit d’assurance ne soit pas une entreprise d’assurance, mais une autre personne (morale) rend cette
détermination plus difficile (section C).

50. La deuxième question dans l’affaire C‑143/20 ainsi que les deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑213/20 visent, en substance, à obtenir une interprétation de quelles sont les informations visées. Telles qu’elles sont reformulées, ces questions portent sur le type d’informations qui doivent être communiquées aux requérants au principal et sur leur degré de précision, en vertu de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, lu en combinaison avec l’annexe III,
point A, sous a.11 et a.12, de cette directive (section D).

51. Le comment fait l’objet de la quatrième question dans l’affaire C‑213/20. Par cette question, il est demandé si l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie implique l’obligation de mettre en place une procédure précontractuelle distincte au cours de laquelle les informations visées à l’annexe III, point A, de cette directive doivent être communiquées au consommateur. Si tel est le cas, la juridiction de renvoi demande ensuite si cet article s’opposerait à une disposition
nationale, telle que l’article 13, paragraphe 4, de la loi sur les activités d’assurance, qui ne précise pas à quel moment l’obligation de publicité doit intervenir (section E).

52. Les quatrième à sixième questions de l’affaire C‑143/20 et la cinquième question de l’affaire C‑213/20 portent sur les conséquences de la non‑communication des informations nécessaires pour informer le consommateur de la nature et des caractéristiques d’un produit d’assurance. Elles le font, respectivement, sous l’angle de la directive sur les pratiques commerciales déloyales et sous celui de la directive sur l’assurance vie (section F).

53. J’examinerai successivement ces différents points.

C.   Qui est tenu de communiquer l’information et qui en est le destinataire ?

54. Par ses premières questions, dans l’affaire C‑213/20 comme dans l’affaire C‑143/20, la juridiction de renvoi demande, en substance, s’il faut communiquer les informations visées par l’obligation d’information prévue à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie à la personne assurée, qui n’est pas le preneur d’assurance et qui a simplement adhéré, en tant que consommateur, à un contrat collectif d’assurance vie à capital variable.

55. La défenderesse dans l’affaire C‑213/20 estime qu’il convient de répondre par la négative à ces questions. Elle fait valoir que l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie ne prévoit d’obligation d’information qu’entre l’entreprise d’assurance et le preneur d’assurance. Lorsque le consommateur adhère à un contrat collectif d’assurance vie conclu entre une entreprise d’assurance et un preneur d’assurance, sans toutefois devenir lui‑même un preneur d’assurance à part entière,
l’article 36, paragraphe 1, de cette directive n’est pas applicable.

56. Les requérants dans l’affaire C‑213/20, les gouvernements italien et polonais ainsi que la Commission soutiennent, en substance, qu’il résulte d’une interprétation systématique et téléologique de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie que l’obligation d’information qu’il contient doit être interprétée en ce sens qu’elle s’étend aux consommateurs qui adhèrent à un contrat collectif d’assurance vie lorsque ceux‑ci assument les principales obligations du preneur (telles que
celles de payer la prime et de supporter le risque d’investissement sous-jacent au contrat).

57. Je partage cette seconde position.

58. Selon ses considérants 2, 3 et 5, la directive sur l’assurance vie tend à promouvoir un marché intérieur dans le secteur de l’assurance vie, tout en assurant une protection adéquate des preneurs et des bénéficiaires dans l’Union européenne.

59. S’agissant de ce dernier objectif, cette directive vise à protéger les consommateurs en leur permettant d’effectuer un choix en étant informés ( 18 ). Cette approche est reflétée par le considérant 52 de la directive sur l’assurance vie, qui indique que cette directive vise notamment à coordonner les dispositions minimales pour que le consommateur reçoive une information claire et précise sur les caractéristiques essentielles des produits qui lui sont proposés. Ainsi qu’il est relevé à ce
considérant, afin de profiter pleinement, dans le cadre d’un marché unique de l’assurance, du choix plus grand et plus diversifié de contrats et d’une concurrence accrue, le consommateur doit disposer des informations nécessaires pour choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins ( 19 ).

60. Cette protection adéquate doit être garantie, notamment, par l’obligation d’information prévue à l’article 36 de la directive sur l’assurance vie. Le paragraphe 1 de cet article prévoit qu’au moins les informations énumérées à l’annexe III, point A, de cette directive doivent être communiquées au « preneur » avant la conclusion d’un « contrat d’assurance ». Conformément au paragraphe 2 dudit article, ce « preneur d’assurance » doit être tenu informé de toute modification des informations
énumérées à l’annexe III, point B, de ladite directive pendant la durée du contrat d’assurance. L’article 36, paragraphe 3, de cette même directive prévoit ensuite que, lorsque cela se révèle nécessaire à la compréhension effective par le « preneur » des éléments essentiels de l’engagement, les États membres peuvent imposer aux « entreprises d’assurance » des obligations d’information plus importantes que celles contenues aux paragraphes 1 et 2 de ce même article. Conformément à l’article 36,
paragraphe 4, de la directive sur l’assurance vie, le droit national règle les modalités de mise en œuvre de ces obligations.

61. Les deux premiers paragraphes de l’article 36 de la directive sur l’assurance vie sont rédigés à la voix passive. Ils ne précisent pas l’entité sur laquelle pèsent les obligations d’information qu’ils imposent. Ils se différencient en cela du paragraphe 3 de cet article, par exemple, qui désigne spécifiquement les « entreprises d’assurance » comme étant les entités susceptibles d’être soumises à des obligations d’information allant au-delà de celles harmonisées par cette directive.

62. Pourquoi le législateur de l’Union n’a-t-il pas précisé sur qui pèse l’obligation d’information prévue à l’article 36, paragraphes 1 et 2, de la directive sur l’assurance vie ? Les observations des parties ne fournissent aucune indication sur les raisons de ce choix rédactionnel. Les travaux préparatoires de la directive sur l’assurance vie ne permettent pas non plus de les comprendre.

63. Dans le cas de contrats simples entre deux cocontractants, où il n’y a qu’un seul assureur et un seul preneur d’assurance, il est simple et intuitif de déterminer sur qui pèse l’obligation d’information. C’est moins évident en présence de constructions juridiques plus complexes, dans lesquelles interviennent plus de deux parties. Quid lorsque le preneur d’assurance (initial, nominal) invite d’autres personnes à adhérer au contrat, ou lorsqu’il vend ce produit à des tiers et que ces derniers
assument effectivement les risques juridiques et/ou économiques découlant du contrat d’assurance ?

64. La qualification juridique exacte de ces régimes complexes dépendra probablement pour beaucoup des catégories du droit (civil) national applicables et du type de construction juridique adopté dans ce cadre. Toutefois, indépendamment de la taxonomie qui sera finalement établie, la lecture de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, à la lumière des considérants 2, 3 et 52 de cette directive, ne permet tout simplement pas de conclure que le consommateur, que l’obligation
d’information visée à l’article 36 de ladite directive a toujours entendu protéger, disparaîtrait complètement du tableau. Le choix d’un certain modèle commercial ou d’un modèle de vente de produits d’assurance, et donc l’introduction d’un plus grand nombre d’acteurs que ce que prévoyait précédemment la réglementation, ne saurait avoir pour conséquence que les obligations prévues par cette même directive ne soient pas respectées.

65. Je reconnais que faire entrer des situations plus complexes dans le libellé de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie nécessite d’étendre quelque peu la portée de cette disposition ( 20 ). Toutefois, compte tenu de la logique et de la finalité de cette dernière, ainsi que de ce domaine du droit dans son ensemble, cette extension est assez naturelle. Elle est en outre compatible avec la voie passive utilisée à l’article 36, paragraphes 1 et 2, de cette directive, qui
indique qui doit obtenir les informations, mais pas qui doit les communiquer.

66. En effet, replacées dans ce contexte, les obligations d’information visées aux deux premiers paragraphes de l’article 36 de la directive sur l’assurance vie s’imposent à toute partie qui conclut un contrat d’assurance avec un « preneur d’assurance ». Ces paragraphes imposent une obligation d’information « dynamique » et « mouvante » lorsque, dans le cadre d’un contrat d’assurance, le cocontractant change. En revanche, l’éventuelle obligation supplémentaire visée à l’article 36, paragraphe 3, de
cette directive ne s’impose jamais qu’aux « entreprises d’assurance », lesquelles forment un groupe défini et fermé conformément aux exigences de l’article 4 de la directive sur l’assurance vie, si les États membres décident d’aller au-delà des normes minimales harmonisées contenues dans cette directive. Lorsqu’une telle obligation supplémentaire existe, elle ne s’applique par conséquent qu’à un type de cocontractant (c’est-à-dire aux « entreprises d’assurance »). Cette obligation demeure donc
« statique ».

67. Afin de déterminer sur qui pèse l’obligation d’information dynamique prévue à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, il convient, avec une rigueur toute mathématique, d’apprécier deux éléments. Le premier a trait à l’existence d’un « contrat d’assurance » et le second à la présence d’un « preneur d’assurance ». J’examinerai si ces deux éléments sont présents dans les circonstances de l’affaire au principal (sous-sections 1 et 2), avant de proposer une réponse à la
première question de l’affaire C‑143/20 et à la première question de l’affaire C‑213/20 (sous-section 3).

1. Sur l’existence d’un « contrat d’assurance »

68. Qu’est-ce qu’un « contrat d’assurance » au sens de la directive sur l’assurance vie ? Cette directive reste muette sur cette notion. Elle ne renvoie pas non plus expressément au droit des États membres sur ce point. En effet, le considérant 44 de ladite directive précise expressément que cette même directive ne vise pas à harmoniser les législations des États membres en matière de contrats. Au contraire, la directive sur l’assurance vie laisse aux États membres le soin de décider du contenu de
ces législations sauf disposition contraire ( 21 ). La portée de la notion de « contrat d’assurance » doit donc être recherchée en tenant compte du contexte dans lequel s’insère cette directive et doit trouver une interprétation autonome et uniforme propre au droit de l’Union ( 22 ).

69. La Cour de l’Association européenne de libre-échange (AELE) a déjà eu l’occasion d’indiquer que, parmi les principes de base du « contrat d’assurance » au sens de la directive sur l’assurance vie, figure l’existence d’une opération juridique qui entraîne « la prise en charge, nouvelle et indépendante, d’un risque contre rémunération » ( 23 ). C’est également la position qu’a adoptée la Cour, dans différents contextes, lorsqu’elle a examiné les caractéristiques fondamentales d’une opération
d’assurance. Pour la Cour également, le fait que l’assureur se charge, moyennant le paiement préalable d’une prime, de procurer à l’assuré, en cas de réalisation du risque couvert, la prestation convenue lors de la conclusion du contrat constitue l’élément fondamental ( 24 ). Une telle opération implique l’existence d’une relation contractuelle entre (d’ordinaire) le prestataire du service d’assurance et la personne dont les risques sont couverts par l’assurance ( 25 ).

70. L’élément commun à ces deux définitions est l’accent qui est mis sur la logique économique (à savoir la prise en charge du risque) plutôt que sur les modalités contractuelles formelles. Dans le cas particulier des produits d’assurance vie, le « risque » supporté par l’entité (institutionnelle) (typiquement l’entreprise d’assurance) réside dans le fait que le versement peut être déclenché pendant la durée convenue et dans l’obligation d’indemniser le preneur d’assurance pour les pertes
éventuelles à l’échéance du contrat. L’obligation à laquelle s’engage le preneur d’assurance consiste généralement dans le paiement d’une prime pendant toute la durée du contrat.

71. Il est clair que l’article 36 de la directive sur l’assurance vie tend à aider les preneurs d’assurance à opérer un choix calculé lorsqu’ils s’engagent dans une nouvelle relation contractuelle dans le cadre de produits d’assurance. En effet, le considérant 52 de cette directive explique qu’au cœur de l’obligation d’information réside l’intention de permettre aux preneurs d’assurance et aux consommateurs de prendre leurs propres décisions lorsqu’ils réalisent une opération juridique aboutissant à
la conclusion d’un contrat d’assurance vie ( 26 ). Cela signifie que ladite directive entend fournir à ces parties tous les outils nécessaires pour leur permettre d’effectuer leur propre évaluation des risques qu’elles sont susceptibles de prendre en charge ( 27 ).

72. Ainsi, lorsqu’un consommateur assume la prise en charge, nouvelle et indépendante, d’un risque (ou d’une obligation) en entrant dans ce type de relations juridiques avec un tiers, les obligations d’information pré- et postcontractuelle découlant de l’article 36 de la directive sur l’assurance vie tendent à lui permettre de choisir en connaissance de cause le contrat qui lui convient le mieux avant la conclusion et pendant la durée de ce contrat.

73. La question de savoir si une telle obligation a été contractée devient alors une appréciation des faits de l’affaire que la juridiction de renvoi est la mieux placée pour effectuer. Toutefois, il ressort des observations présentées devant la Cour qu’il est constant que les requérants au principal ont signé des « déclarations » individuelles d’adhésion aux contrats collectifs d’assurance vie en cause. Ce faisant, ils ont accepté certains droits et obligations. Il a été indiqué que ces obligations
incluaient la charge économique du paiement régulier des primes que l’entreprise d’assurance investirait ensuite en titres des fonds d’investissement liés. Ces droits auraient notamment pris la forme d’une garantie à l’échéance en vertu de laquelle, au terme d’une période de quinze ans, ces requérants recevraient un paiement d’un montant potentiellement supérieur ou au moins égal à leur investissement global dans le contrat. Compte tenu de l’existence de ces éléments essentiels, il semblerait
que, du point de vue de la directive sur l’assurance vie, les déclarations d’adhésion au contrat collectif d’assurance vie en cause aient débouché sur la conclusion de « contrats d’assurance » au sens de cette directive.

74. Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’explication de la juridiction de renvoi selon laquelle, en vertu du droit polonais, lorsqu’un consommateur adhère à un contrat collectif d’assurance vie, il ne devient pas véritablement partie au contrat, mais acquiert seulement la qualité de « personne assurée ».

75. Il n’appartient pas à la Cour d’interpréter ni de commenter le droit national. Je ne vois cependant pas comment une personne pourrait acquérir la qualité de personne assurée sans qu’il y ait de contrat. Logiquement, je suppose qu’une personne assurée dans cette situation doit se trouver dans une certaine relation juridique (contractuelle). En effet, la déclaration d’adhésion, qui a apparemment été signée par les requérants au principal, pourrait être considérée comme une adhésion au contrat
initial entre l’assureur et le preneur d’assurance, ces requérants devenant des preneurs d’assurance (affiliés) dans le cadre du contrat initial. Ou encore, cette déclaration pourrait être considérée comme un second contrat conclu entre le preneur d’assurance et la personne assurée. Il y aurait donc, au regard du droit national, deux contrats successifs : le premier entre l’assureur et le preneur initial, le second entre le preneur d’assurance et le consommateur.

76. Il m’est toutefois difficile de concevoir que le droit national ne prévoit réellement aucun de ces deux cas de figure et que les assurés se trouvent effectivement dans une sorte de vide juridique (sans contrat) ( 28 ).

77. Au vu des éléments fournis par la juridiction de renvoi, la seconde option semble la plus plausible. Dans cette hypothèse, il y aurait en réalité deux contrats successifs relevant du droit national. Il y aurait tout d’abord la relation juridique « en amont » entre l’entreprise d’assurance et le preneur d’assurance « initial », qui constitue le fondement du contrat collectif d’assurance vie. Il y aurait ensuite la relation juridique « en aval », nouvelle et indépendante, entre le preneur
d’assurance et le consommateur.

78. Il semble donc que les requérants au principal ont conclu un « contrat d’assurance », au sens de la directive sur l’assurance vie, indépendamment de la qualification juridique peu claire et spécifique de cette réalité en droit polonais, et que cette relation juridique se noue distinctement du contrat d’assurance « initial » (et « en amont ») qui lie l’entreprise d’assurance au preneur d’assurance.

2. Qui est le « preneur d’assurance » dans les contrats d’assurance en cause ?

79. En ce qui concerne la notion de « preneur d’assurance », là encore, la directive sur l’assurance vie ne contient ni définition ni renvoi au droit national. Il ressort néanmoins de la structure de cette directive que, si la notion de « preneur d’assurance » est généralement comprise comme désignant la personne sollicitée dans la relation juridique qui caractérise un « contrat d’assurance » ( 29 ), ces notions ne doivent pas nécessairement coïncider ( 30 ).

80. S’agissant de l’article 36 de la directive sur l’assurance vie, la Cour a récemment indiqué que la référence au « preneur d’assurance » doit être interprétée largement afin d’inclure également la notion de « consommateur » compte tenu de l’objectif de protection des consommateurs énoncé au considérant 52 de cette directive ( 31 ).

81. La même logique devrait, à mon avis, également prévaloir dans les présentes affaires.

82. Comme je l’ai expliqué aux points 77 et 78 des présentes conclusions, dans les affaires au principal, les requérants semblent avoir conclu des « contrats d’assurance » individuels, au sens de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, avec des preneurs d’assurance différents. En vertu de ces contrats, qui découlent « en aval » de la relation entre l’entreprise d’assurance et les preneurs d’assurance, ces derniers ont agi en qualité d’offrants dans le cadre de l’adhésion au
contrat collectif d’assurance vie. Le fait que ces preneurs n’aient probablement agi qu’en tant qu’intermédiaires chargés de promouvoir le contrat collectif d’assurance vie auprès de tiers (à savoir les requérants au principal) n’affecte pas leur qualité d’offrants dans le cadre des contrats d’assurance « en aval » respectifs. En effet, comme l’explique la juridiction de renvoi, le consommateur qui adhère à un contrat collectif d’assurance vie peut s’attendre à bénéficier des mêmes droits et à
assumer les mêmes obligations que ceux découlant d’un contrat individuel d’assurance vie conclu directement avec une entreprise d’assurance.

83. Par conséquent, et sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, bien qu’étant simplement des consommateurs d’un contrat collectif d’assurance vie, les requérants au principal ont effectivement assumé les mêmes droits et obligations que les « preneurs d’assurance », au sens de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, lorsqu’ils ont signé les « déclarations » en cause avec les preneurs d’assurance en cause au principal.

3. Résolution de l’équation

84. Maintenant que les deux éléments de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie ont été clarifiés, il est possible de déterminer si cette disposition s’applique en l’espèce.

85. Comme je l’ai expliqué au point 66 des présentes conclusions, compte tenu de sa nature, l’obligation d’information précontractuelle visée à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie est une obligation d’information dont la source est « mouvante » et s’articule autour du besoin de protection du consommateur concerné.

86. Ainsi que le relève à juste titre le gouvernement polonais, lorsque les preneurs d’assurance concernés ont proposé aux requérants au principal de créer des relations juridiques distinctes, en vertu desquelles ces derniers prendraient en charge des risques nouveaux et indépendants en contrepartie du droit de bénéficier de la couverture de l’assurance vie collective, ces preneurs sont devenus des offrants dans le cadre des contrats d’assurance en cause. Ils ont ainsi activé l’obligation
d’information « dynamique » prévue à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie. Ils devaient donc communiquer aux requérants au principal au moins les informations énumérées à l’annexe III, point A, de cette directive afin de leur permettre d’évaluer les effets et les risques de la couverture d’assurance vie de groupe applicable et de choisir cette couverture en ayant pleinement connaissance de tous les éléments pertinents.

87. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la première question dans l’affaire C‑143/20 et à la première question dans l’affaire C‑213/20 de la manière suivante :

L’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie doit être interprété en ce sens que l’obligation d’information précontractuelle qu’il prévoit oblige le cocontractant d’un consommateur qui adhère à un contrat collectif d’assurance vie sans devenir preneur d’assurance au titre du contrat d’assurance initial sous‑jacent à communiquer à ce consommateur au moins les informations énumérées à l’annexe III, point A, de cette directive.

D.   Quelles informations faut-il communiquer ?

88. Par la deuxième question dans l’affaire C‑143/20 ainsi que par les deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑213/20, la juridiction de renvoi s’interroge, en substance, sur la nature et le degré de précision des informations qu’il convient de communiquer aux requérants au principal en vertu de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, lu en combinaison avec l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de cette directive. La juridiction de renvoi ajoute qu’il ressort
d’une analyse comparative des versions en langues allemande, française, polonaise et anglaise de l’annexe III, point A, sous a.12, de ladite directive que la version en langue polonaise de cette même directive exige un seuil moins élevé (« wskazanie » ou « indications ») que les versions en langue allemande, française et anglaise qui, toutes, requièrent des informations sur la nature, les spécificités et les caractéristiques des actifs sous-jacents.

89. Dans l’affaire C‑143/20, le requérant soutient, dans le cadre de la procédure au principal, qu’il fallait lui communiquer des informations détaillées sur les caractéristiques de l’investissement et les règles régissant l’allocation des primes d’assurance aux différents titres composant l’indice. Il n’était pas suffisant d’indiquer que l’investissement portait sur des « certificats », comme semble l’avoir fait la défenderesse dans cette affaire. Dans l’affaire C‑213/20, les requérants font valoir
qu’ils auraient dû recevoir des informations « complètes » sur les caractéristiques des obligations structurées acquises par les fonds d’investissement, y compris des informations « détaillées » et « exhaustives » sur la portée, l’étendue et la nature de « tous les risques » liés à ces investissements.

90. Pour sa part, la défenderesse dans l’affaire C‑213/20 fait valoir que l’annexe III, point A, sous a.12, de la directive sur l’assurance vie n’exige pas la communication d’une description « détaillée » du niveau, de l’étendue et de la nature du risque d’investissement inhérent aux actifs du fonds d’investissement. Les informations de ce type ne relèveraient pas de la « nature » des actifs représentatifs des contrats à capital variable au sens de cette disposition.

91. Le gouvernement polonais et la Commission suivent largement ce point de vue. Ils soutiennent en substance que seules les caractéristiques essentielles de l’actif représentatif sous-jacent au fonds d’investissement doivent être communiquées de façon claire et précise. Cela suppose que soit communiquée une information sur la nature économique et juridique de cet actif, ainsi que sur le risque qui y est associé.

92. Je partage cette dernière position.

93. Il ressort de l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la directive sur l’assurance vie que les informations qu’il convient de communiquer au consommateur avant la conclusion d’un contrat collectif d’assurance vie doivent inclure deux éléments. Le premier élément, visé au point A, sous a.11, de cette annexe, consiste en l’énumération des valeurs de référence utilisées (unités de compte) dans les contrats à capital variable. Le second élément, visé au point A, sous a.12, de ladite annexe,
consiste en « indications sur la nature des actifs » représentatifs des contrats à capital variable.

94. À défaut de plus de précisions, « l’énumération des valeurs de référence » d’un fonds d’investissement peut être extrêmement détaillée, mais elle ne doit pas nécessairement l’être. De même, la « nature des actifs » représentatifs du contrat pourrait, en soi, être expliquée par un terme financier général (tel que « produit dérivé »), mais elle pourrait également exiger une explication plus détaillée du type et du fonctionnement de l’actif en question.

95. C’est ici que le considérant 52 de la directive sur l’assurance vie prend toute son importance. Il énonce un certain nombre de critères qui devraient guider l’interprétation de l’article 36, paragraphe 1, et de l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie ( 32 ). À cette fin, ce considérant indique, en sa partie pertinente, que cette directive devrait coordonner la portée de l’information minimale entre les États membres de manière que soient communiquées au consommateur « des
informations nécessaires pour choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins ». L’information communiquée doit être « claire et précise sur les caractéristiques essentielles des produits qui lui sont proposés » ( 33 ).

96. Selon moi, tous ces éléments amènent à formuler trois observations. Premièrement, la directive sur l’assurance vie n’entendait pas réaliser une harmonisation complète des informations dont doit disposer le consommateur avant de conclure un contrat d’assurance. Une certaine marge était laissée au droit national afin que celui-ci puisse aller au-delà des exigences de la directive sur l’assurance vie. Deuxièmement, le degré de précision de l’information qu’il convient de communiquer dépend de
l’appréciation des besoins exprimés par le consommateur. Toutefois, ces besoins doivent être mis en balance au travers du prisme objectif de la « nécessité ». Troisièmement, l’information communiquée au terme de ce processus de mise en balance doit couvrir au moins les « caractéristiques essentielles » du produit d’assurance. Aux fins de l’obligation d’information visée à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, ces caractéristiques sont énoncées notamment à l’annexe III,
point A, sous a.11 et a.12, de cette directive ( 34 ).

97. Il est évident que le troisième élément ne saurait faire l’objet d’une appréciation abstraite. Compte tenu de la complexité des produits d’assurance, les « caractéristiques essentielles » d’un produit ne sont pas nécessairement les mêmes que celles d’un autre produit. Il convient donc de se conformer à l’obligation d’information visée à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie au cas par cas en fonction des circonstances de fait particulières, en tenant compte de la mise
en balance exposée au point précédent des présentes conclusions.

98. S’il n’appartient pas à la Cour de procéder à cette vérification en l’espèce, il peut néanmoins être utile de formuler trois remarques portant sur l’exposé par la juridiction de renvoi de l’appréciation en droit et en fait qu’elle a effectuée.

99. Premièrement, une divergence quant au sens de l’annexe III, point A, sous a.11, de la directive sur l’assurance vie dans la version en langue polonaise ne modifie pas la portée des informations qu’il convient de communiquer en vertu de cette annexe. Conformément à la jurisprudence constante de la Cour, il est clair que la formulation utilisée dans l’une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition ou se
voir attribuer un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques. La nécessité d’une interprétation uniforme d’une disposition du droit de l’Union exclut que celle-ci soit considérée isolément dans l’une de ses versions linguistiques, mais exige qu’elle soit interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément ( 35 ).

100. Deuxièmement, s’agissant de la situation du requérant dans l’affaire C‑143/20, je partage l’avis de la juridiction de renvoi, du gouvernement polonais et de la Commission, selon lequel une simple définition en deux mots des parts du fonds d’investissement, consistant à indiquer que celles-ci sont composées de « produits dérivés » ou de « produits structurés », ne suffit pas pour satisfaire aux exigences de l’annexe III, point A, sous a.11, de la directive sur l’assurance vie. Il est évident que
les « caractéristiques essentielles » d’un produit nécessitent à tout le moins une description économique et/ou juridique de ce produit afin que le consommateur puisse déterminer si ledit produit convient à ses besoins.

101. En outre, la juridiction de renvoi relève que le contrat présenté au requérant dans l’affaire C‑143/20 ne contenait ni les règles d’évaluation des titres du fonds ni celles de l’actif net du fonds envisagé dans son ensemble, et qu’il ne comportait aucune information sur la manière de choisir les certificats dans lesquels les primes seraient investies. Des informations d’une portée aussi limitée sont manifestement insuffisantes pour permettre au consommateur de comprendre la nature économique et
juridique des actifs sous‑jacents et d’en apprécier les risques. C’est toutefois à la juridiction de renvoi qu’il revient en définitive d’évaluer ces informations par rapport au seuil d’informations figurant à l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la directive sur l’assurance vie.

102. Troisièmement, en ce qui concerne les requérants dans l’affaire C‑213/20, s’il est tenu compte du considérant 52 de cette directive, l’information qui doit leur être fournie ne saurait être aussi « détaillée » ou « exhaustive » sur la portée ou la nature de « tous les risques » liés à l’investissement. Par définition, les « caractéristiques essentielles » d’un produit ne sont ni « détaillées » ni « exhaustives ». Elles ne couvrent que ses éléments « essentiels ». Il est en effet impossible de
détailler tous les risques d’un produit d’investissement complexe. Il est seulement requis d’indiquer la véritable nature de l’instrument sous‑jacent et les risques structurels qui y sont inhérents, qui sont connus ou raisonnablement prévisibles au moment où l’information est communiquée. Cela étant, il appartient au seul juge national de déterminer si les demandes des requérants dans l’affaire C‑213/20 sortent du champ d’application de l’annexe III, point A, sous a.11 et a.12, de la directive
sur l’assurance vie, comme l’exige l’article 36, paragraphe 1, de cette directive.

103. Au vu de ces observations, je propose à la Cour de répondre à la deuxième question dans l’affaire C‑143/20 et aux deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑213/20 de la manière suivante :

L’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie doit être interprété en ce sens qu’il exige que soient communiquées des informations sur la véritable nature du produit sous-jacent et les risques structurels inhérents à celui-ci. Ces informations comprennent une définition des titres auxquels sont liés les avantages des contrats à capital variable et l’indication de la nature des actifs sous-jacents à ces contrats, qui inclut au moins les caractéristiques économiques et/ou
juridiques essentielles de ces titres et de ces actifs sous-jacents.

Il appartient à la juridiction nationale de déterminer si, eu égard aux circonstances particulières de l’espèce, les informations communiquées au consommateur satisfont à ce seuil.

E.   Quand faut-il communiquer ces informations ?

104. Par sa quatrième question dans l’affaire C‑213/20, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie impose la mise en place d’une procédure précontractuelle distincte au cours de laquelle les informations visées à l’annexe III, point A, de cette directive doivent être communiquées au consommateur. Si tel est le cas, la juridiction de renvoi demande si cet article s’oppose à une disposition nationale, telle que l’article 13,
paragraphe 4, de la loi sur les activités d’assurance, en vertu de laquelle il suffit que les informations requises par l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie soient communiquées pour la première fois dans le contrat d’assurance et lors de la signature de celui-ci.

105. Les requérants dans l’affaire C‑213/20 soutiennent que les informations visées à l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie auraient dû leur être communiquées avant qu’ils ne signent les déclarations d’adhésion au contrat collectif d’assurance vie en cause et non pas au moment de la signature de ces déclarations. Ce n’est qu’ainsi que le consommateur peut choisir en connaissance de cause le contrat qui convient le mieux à ses besoins.

106. La défenderesse dans l’affaire C‑213/20 et le gouvernement polonais ne partagent pas cette position. Ils considèrent, en substance, que l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie n’indique ni la nécessité d’une procédure précontractuelle ni le moment précis auquel les informations visées à l’annexe III, point A, de cette directive doivent être communiquées au consommateur. Sur ce fondement, ils soutiennent que, dès lors que l’article 13, paragraphe 4, de la loi sur les
activités d’assurance ne précise pas le moment où l’information doit être communiquée, l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie ne s’y oppose pas.

107. La Commission opère une analogie avec la jurisprudence existante en matière de crédit à la consommation et de droits des consommateurs, dans laquelle la Cour a interprété des obligations similaires concernant l’obligation de communiquer des informations « en temps utile » avant la signature du contrat ( 36 ). À ce titre, il ne suffit pas que les informations visées à l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie soient communiquées au moment de la conclusion du contrat.

108. Je partage la position de la Commission.

109. Il faut partir du libellé de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie. Cette disposition indique qu’au moins les informations énumérées à l’annexe III, point A, de cette directive doivent être communiquées au preneur « [a]vant la conclusion du contrat d’assurance » ( 37 ). Le moment où cette communication doit intervenir n’est pas précisé, de même qu’il n’est pas indiqué si la réglementation nationale doit mettre en place une procédure « précontractuelle » distincte.
L’annexe III, paragraphe 1, de ladite directive ajoute simplement que ces informations doivent être formulées « de manière claire et précise, par écrit, dans une langue officielle de l’État membre de l’engagement ».

110. Le texte de la directive sur l’assurance vie exige donc que les informations minimales que cette directive prévoit soient communiquées avant la conclusion du contrat d’assurance en cause. En soi, cela s’opposerait déjà logiquement à ce que « le moment de la communication des informations » coïncide avec « le moment de la conclusion du contrat ».

111. Par ailleurs, ainsi que l’a relevé à juste titre le gouvernement polonais, il ressort clairement de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, lu en combinaison avec le considérant 52 de cette directive, que le but recherché en distinguant ces deux moments est de permettre au consommateur de disposer d’un certain laps de temps pendant lequel il peut tirer pleinement parti de la diversité de l’offre et de la concurrence accrue (dans le marché intérieur de l’assurance) afin
de « choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins ».

112. Toutefois, à la différence d’autres instruments du droit de l’Union ( 38 ), la directive sur l’assurance vie ne fixe pas de délai minimal à cet égard. En l’absence de règles en la matière, les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits des consommateurs doivent être réglées dans l’ordre juridique interne de chaque État membre, en vertu du principe d’autonomie procédurale. Ces modalités ne peuvent cependant pas être moins favorables que les règles
régissant des situations similaires soumises au droit interne (principe d’équivalence) et ne rendent pas impossible en pratique ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par le droit de l’Union (principe d’effectivité) ( 39 ).

113. Rien n’indique que les litiges au principal soulèvent des questions d’équivalence. Toutefois, ainsi que le suggère la juridiction de renvoi, dans la mesure où l’article 13, paragraphe 4, de la loi sur les activités d’assurance permet de communiquer les informations visées à l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie au moment même de la conclusion du contrat d’assurance vie, il y a lieu d’examiner cette disposition au regard de l’effectivité de l’objectif poursuivi par la
directive sur l’assurance vie et, en particulier, par son article 36, paragraphe 1.

114. À cet égard, il ressort des observations des parties versées au dossier que l’article 13, paragraphe 4, de la loi sur les activités d’assurance reprend le libellé ouvert de l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie, sans toutefois préciser le moment auquel les informations visées à l’annexe III, point A, de cette directive doivent être communiquées.

115. En soi, cela ne pose pas de problème. Même interprété à la lumière de l’objet et de la finalité de la directive sur l’assurance vie, l’article 36 de cette directive n’exige pas que la loi nationale qui le transpose prévoie un moment précis, un délai minimal pour la communication, ni même une procédure de communication distincte. Toutefois, dans les faits, le consommateur doit disposer d’un délai suffisant pour pouvoir choisir en connaissance de cause le contrat d’assurance qu’il souhaite
conclure. Ce consommateur ne peut effectuer un tel choix éclairé que s’il reçoit, par écrit, les informations minimales pertinentes et s’il dispose d’un certain laps de temps, sauf s’il y renonce explicitement, pour évaluer les risques et les avantages découlant de sa décision de conclure le contrat.

116. Il est évident que le principe d’effectivité s’oppose à ce que de telles informations soient fournies soit uniquement oralement, soit par écrit seulement au moment de la signature du contrat d’assurance. C’est pourquoi certaines directives en matière de protection des consommateurs font référence à la nécessité de transmettre aux consommateurs certaines informations minimales « en temps utile » avant que ceux-ci prennent une décision de consommation ( 40 ). La Cour a également interprété une
formulation subjective similaire de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2011/83/UE sans que cette directive contienne de tels termes ( 41 ).

117. L’objet et la finalité de la directive sur l’assurance vie demandent qu’un même type de période « tampon » soit prévu avant que le consommateur prenne une décision. La durée exacte de ce délai de réflexion dépend du cas d’espèce, elle est fonction d’éléments tels que la complexité du contrat d’assurance proposé, la situation du consommateur en cause ainsi que les circonstances de la conclusion du contrat et de sa présentation. Compte tenu de ce qui précède, la signification exacte des termes
« en temps utile » et le « délai de réflexion raisonnable » à respecter peuvent naturellement varier d’un cas particulier à l’autre.

118. Je propose donc à la Cour de répondre à la quatrième question dans l’affaire C‑213/20 de la manière suivante :

L’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui ne garantit pas que le consommateur reçoive au moins les informations prévues à l’annexe III, point A, de cette directive à un moment quelconque avant la conclusion du contrat, par écrit et d’une manière claire et précise qui lui permette, après un délai de réflexion, de faire un choix en connaissance de cause.

Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si ces conditions ont été respectées dans l’affaire au principal.

F.   Quelles sont les conséquences de la non-communication desdites informations ?

119. Les quatrième à sixième questions dans l’affaire C‑143/20 et la cinquième question dans l’affaire C‑213/20 portent sur les conséquences de la non‑communication des informations minimales visées à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie.

120. Ces questions sont soulevées sous l’angle, respectivement, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales et de la directive sur l’assurance vie. Étant donné que cette seconde directive prime sur la première en cas de conflit entre ces deux instruments ( 42 ), il convient d’examiner tout d’abord la cinquième question dans l’affaire C‑213/20. La quatrième question dans l’affaire C‑143/20 ne devra en effet être examinée que si la cinquième question dans l’affaire C‑213/20 fait
apparaître que la directive sur l’assurance vie ne régit pas les conséquences de la non-communication des informations minimales visées à l’annexe III, point A, de cette directive.

1. L’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie régit-il la non-communication des informations en cause ?

121. La cinquième question dans l’affaire C‑213/20 vise à savoir s’il convient d’interpréter l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie en ce sens que, si l’obligation qu’il prévoit n’est pas exécutée correctement, le consommateur a le droit de demander le remboursement de l’intégralité des primes d’assurance versées, que ce soit ou non sur le fondement d’une éventuelle déclaration d’invalidité ou de nullité du contrat.

122. Selon moi, cela ne saurait être le cas. Comme le soulignent à juste titre toutes les parties, à l’exception des requérants dans l’affaire C‑213/20, l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie ne saurait être interprété en ce sens. En effet, cette directive ne régit tout simplement pas les conséquences d’un manquement à l’obligation d’information que prévoit son article 36, paragraphe 1 ( 43 ).

123. En effet, ainsi que la Cour l’a jugé, bien qu’en relation avec la disposition antérieure à celle qui est désormais l’article 36, paragraphe 3, de la directive sur l’assurance vie, « les effets que le droit interne attache à la non-communication de ces informations sont, en principe, dépourvus de pertinence quant à la conformité de l’obligation de communication à [cette disposition] » ( 44 ).

124. Rien n’indique, et aucun argument n’a été présenté en ce sens, que la conclusion devrait être différente pour l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie. Certes, la non-communication des informations minimales visées à l’annexe III, point A, de cette directive doit avoir des conséquences. Toutefois, c’est au droit national qu’il revient de les prévoir conformément au principe de l’autonomie procédurale nationale et sous réserve des exigences d’équivalence et d’effectivité.

125. J’estime dès lors que l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie ne régit pas les conséquences de la non-communication des informations minimales énoncées à l’annexe III, point A, de cette directive et qu’il revient donc au droit national de les prévoir.

2. Les articles 5 et 7 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales s’appliquent-ils aux circonstances des litiges au principal ?

126. Les quatrième à sixième questions dans l’affaire C‑143/20 portent sur le point de savoir si la non‑communication des informations minimales requises par l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie constitue une pratique commerciale déloyale, au sens de l’article 5 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, ou une omission trompeuse, au sens de l’article 7 de cette directive.

127. Compte tenu de la réponse que je propose d’apporter aux première et deuxième questions dans l’affaire C‑143/20 ( 45 ), les cinquième et sixième questions soulevées dans cette affaire deviennent sans objet. Dans le cadre de cette présente section, je n’aborderai donc que la quatrième question dans l’affaire C‑143/20 et examinerai ainsi si le fait de ne pas communiquer au consommateur certaines informations minimales peut constituer une pratique commerciale déloyale, au sens de l’article 5 de la
directive sur les pratiques commerciales déloyales, ou une omission trompeuse, au sens de l’article 7 de cette directive.

128. Le gouvernement polonais et la Commission considèrent, en substance, que la non‑communication des informations minimales requises par l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie est susceptible de constituer une pratique commerciale déloyale, au sens de l’article 5 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales. Elle pourrait en particulier constituer une omission trompeuse, au sens de l’article 7 de cette directive, lorsqu’elle amène ou est susceptible d’amener le
consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

129. Le gouvernement polonais ajoute que cette considération n’est pas remise en cause par l’article 3, paragraphe 4, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales. Cette directive n’est pas en conflit avec la directive sur l’assurance vie. Au contraire, elle la complète en ce qui concerne les conséquences du non‑respect des exigences d’information minimale prévues par le droit de l’Union.

130. Je partage largement le point de vue du gouvernement polonais et de la Commission.

131. Le considérant 10 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales indique que la « clause de conflit » de l’article 3, paragraphe 4, de cette directive ne s’applique que « lorsqu’il n’existe pas de dispositions [de l’Union] spécifiques régissant des aspects particuliers des pratiques commerciales déloyales, telles que des prescriptions en matière d’information ou des règles régissant la présentation des informations au consommateur ». La primauté est donc donnée aux autres dispositions
du droit de l’Union qui prévoient de telles conséquences ( 46 ).

132. Toutefois, ainsi qu’il a été indiqué aux points 121 à 125 des présentes conclusions, la directive sur l’assurance vie ne régit pas la question spécifique des conséquences du non‑respect de l’obligation d’information visée à l’article 36, paragraphe 1, de cette directive. Dès lors, l’application simultanée de ces deux directives ne saurait entraîner de conflit entre ces deux instruments juridiques ( 47 ). Au contraire, la directive sur les pratiques commerciales déloyales complète la directive
sur l’assurance vie sur ce point, en précisant simplement quelles sont les exigences au titre de l’article 36 de la seconde directive qui peuvent être considérées comme « substantielles » aux fins de l’article 7 de la première directive ( 48 ).

133. Cela étant précisé, il est nécessaire de déterminer si le non‑respect de l’obligation d’information prévue à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie est susceptible de constituer une pratique commerciale déloyale, au sens de l’article 5 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, ou une omission trompeuse, au sens de l’article 7 de cette directive.

134. La directive sur les pratiques commerciales déloyales vise à établir des règles uniformes relatives aux pratiques commerciales déloyales des entreprises à l’égard des consommateurs, afin de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d’assurer à ces derniers un niveau élevé de protection ( 49 ). Elle s’applique aux pratiques déloyales survenant avant, pendant et après une transaction commerciale ( 50 ). Dans ce cadre, il est constant que, en adhérant au contrat collectif d’assurance
vie à capital variable, les défenderesses et les requérants au principal se sont engagés dans des « pratiques commerciales » au sens de l’article 2, sous d), de cette directive ( 51 ).

135. L’article 5 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales porte sur l’interdiction des pratiques commerciales déloyales. Le paragraphe 1 de cet article énonce cette interdiction générale ( 52 ). Le paragraphe 2 dudit article précise ce qu’il convient de considérer comme déloyal, à savoir des pratiques commerciales qui sont contraires aux exigences de la diligence professionnelle et qui altèrent ou sont susceptibles d’altérer de manière substantielle le comportement économique du
« consommateur moyen » ( 53 ). Le paragraphe 4 de ce même article définit ensuite deux catégories particulières de pratiques commerciales « déloyales ». L’une de ces catégories concerne les pratiques commerciales « trompeuses ».

136. L’article 7 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales constitue une expression de la catégorie particulière des « pratiques commerciales trompeuses ». Il concerne les « omissions trompeuses » ( 54 ). Le paragraphe 1 de cet article impose aux professionnels l’obligation positive de fournir au consommateur toute information considérée comme « substantielle », dont l’omission est sanctionnée conformément au droit national ( 55 ), à condition que cette omission amène ou soit
susceptible d’amener le consommateur à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

137. Par ailleurs, le considérant 15, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 5, et l’annexe II de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, instaure une présomption légale selon laquelle les informations exigées par l’article 36 de la directive sur l’assurance vie, y compris son paragraphe 1, doivent être considérées comme « substantielles » au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales ( 56 ).

138. Dès lors, il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier, au regard de l’ensemble des circonstances de fait dont elle a connaissance, d’une part, si le preneur d’assurance dans l’affaire C‑143/20 a omis de communiquer les « informations substantielles » visées à l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie et, d’autre part, si, du fait de cette omission, le requérant dans l’affaire C‑143/20 (considéré comme un consommateur moyen et raisonnablement avisé) a pris ou était
susceptible de prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement ( 57 ).

139. Fondamentalement, il s’agit d’une appréciation qui ne peut être effectuée que par le seul juge national qui a pleinement connaissance des circonstances de fait à l’origine du litige au principal. Cela dit, il me semble utile de formuler deux observations qui méritent d’être prises en considération par la juridiction de renvoi dans le cadre de son appréciation au titre de l’article 7 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

140. En premier lieu, il convient de tenir compte du fait que, par l’article 7, paragraphe 5, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, le législateur de l’Union a présumé que l’information visée à l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie constitue le minimum absolu à communiquer pour les produits d’assurance vie. Si cette information n’est pas communiquée, le considérant 52 de la directive sur l’assurance vie indique que le consommateur n’est pas en mesure de
choisir « le contrat qui convient le mieux à ses besoins ». Ces présomptions doivent donc jouer un rôle important lorsqu’il s’agit d’apprécier si la non-communication a amené ou était susceptible d’amener un consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

141. En second lieu, le niveau de contrôle lors de l’appréciation de la question de savoir si un consommateur moyen aurait pris la décision commerciale en cause revêt un caractère objectif. Il tient compte d’un consommateur normalement informé et avisé ( 58 ). En cela, le critère de référence est détaché de tout souhait subjectif particulier ou propre à un consommateur donné. En particulier, les sentiments subjectifs d’un consommateur, à savoir le fait que, personnellement, il aurait aimé recevoir
davantage d’informations, ne sont pas déterminants dans le cadre de cette appréciation (nécessairement objectivée).

142. Eu égard à ce qui précède, je propose à la Cour de répondre à la quatrième question dans l’affaire C‑143/20 de la manière suivante :

L’article 7, paragraphes 1 et 5, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales doit être interprété en ce sens que l’omission de communiquer au moins les informations visées à l’article 36, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie constitue une pratique commerciale trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de l’ensemble de ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites du moyen de communication, le consommateur moyen n’a pas reçu l’information
dont il a besoin, selon le contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et que, de ce fait, cette omission l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans l’affaire au principal.

V. Conclusion

143. Je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Sąd Rejonowy dla Warszawy-Woli w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie-Wola, Varsovie, Pologne) de la manière suivante :

Première question dans l’affaire C‑143/20 et première question dans l’affaire C‑213/20 :

L’article 36, paragraphe 1, de la directive 2002/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 novembre 2002, concernant l’assurance directe sur la vie doit être interprété en ce sens que l’obligation d’information précontractuelle qu’il prévoit oblige le cocontractant d’un consommateur qui adhère à un contrat collectif d’assurance vie sans devenir preneur d’assurance au titre du contrat d’assurance initial sous-jacent à communiquer à ce consommateur au moins les informations énumérées à
l’annexe III, point A, de cette directive.

Deuxième question dans l’affaire C‑143/20 et deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑213/20 :

L’article 36, paragraphe 1, de la directive 2002/83 doit être interprété en ce sens qu’il exige que soient communiquées des informations sur la véritable nature du produit sous-jacent et les risques structurels inhérents à celui-ci. Ces informations comprennent une définition des titres auxquels sont liés les avantages des contrats à capital variable et l’indication de la nature des actifs sous-jacents à ces contrats, qui inclut au moins les caractéristiques économiques et/ou juridiques
essentielles de ces titres et des actifs sous-‑jacents. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier si, eu égard aux circonstances particulières de l’espèce, les informations communiquées au consommateur satisfont à ce seuil.

Quatrième question dans l’affaire C‑213/20 :

L’article 36, paragraphe 1, de la directive 2002/83 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui ne garantit pas que le consommateur reçoive au moins les informations prévues à l’annexe III, point A, de cette directive à un moment quelconque avant la conclusion du contrat, par écrit et d’une manière claire et précise qui lui permette, après un délai de réflexion, de faire un choix en connaissance de cause. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier
si ces conditions ont été respectées dans l’affaire au principal.

Quatrième question dans l’affaire C‑143/20 :

L’article 7, paragraphes 1 et 5, de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil doit être interprété en ce sens que l’omission de communiquer au
moins les informations visées à l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2002/83 constitue une pratique commerciale trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de l’ensemble de ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites du moyen de communication, le consommateur moyen n’a pas reçu l’information dont il a besoin, selon le contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et que, de ce fait, cette omission l’amène ou est susceptible de
l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans l’affaire au principal.

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( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 5 novembre 2002 concernant l’assurance directe sur la vie (JO 2002, L 345, p. 1).

( 3 ) Considérant 2 de la directive sur l’assurance vie.

( 4 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (JO 2005, L 149, p. 22).

( 5 ) Article 3, paragraphe 1, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

( 6 ) Cette loi a été abrogée le 1er janvier 2016 par l’Ustawa o działalności ubezpieczeniowej i reasekuracyjnej (loi sur les activités d’assurance et de réassurance) du 11 septembre 2015 (Dz. U. 2015, position 1844).

( 7 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (JO 2009, L 335, p. 1).

( 8 ) Voir arrêt du 4 décembre 1986, Commission/Allemagne (205/84, EU:C:1986:463, point 33), dans lequel la Cour a reconnu que, en matière d’assurance vie, des raisons impérieuses liées à l’intérêt général peuvent justifier des restrictions à la libre prestation des services.

( 9 ) À cet égard, voir arrêt du 19 décembre 2013, Endress (C‑209/12, EU:C:2013:864, point 29).

( 10 ) Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen, Premier rapport sur l’application de la [directive sur les pratiques commerciales déloyales] [COM (2013)139 final, p. 25].

( 11 ) Voir, par exemple, arrêts du 13 décembre 2001, Heininger (C‑481/99, EU:C:2001:684, point 47) ; du 19 décembre 2013, Endress (C‑209/12, EU:C:2013:864, point 30) ; du 23 avril 2015, Van Hove (C‑96/14, EU:C:2015:262, point 50), et du 29 avril 2015, Nationale‑Nederlanden Levensverzekering Mij (C‑51/13, EU:C:2015:286, point 21).

( 12 ) Arrêt du 1er mars 2012, González Alonso (C‑166/11, EU:C:2012:119, point 27 et jurisprudence citée).

( 13 ) Arrêt du 19 décembre 2013, Endress (C‑209/12, EU:C:2013:864, points 29 et 30). Voir également, à cet égard, arrêt du 23 avril 2015, Van Hove (C‑96/14, EU:C:2015:262, point 50).

( 14 ) Comme le relève à juste titre la Commission, les produits en question sont différents des contrats d’assurance de groupe où l’adhésion est obligatoire, comme ceux conclus dans le cadre d’un contrat de travail. Ces types de contrats sont exclus du champ d’application de l’article 3 de la directive sur l’assurance vie.

( 15 ) Article 311 de la directive solvabilité II, tel que modifié par la directive 2013/58/UE du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, modifiant la [directive solvabilité II] en ce qui concerne ses dates de transposition et d’entrée en application et la date d’abrogation de certaines directives (solvabilité I) (JO 2013, L 341, p. 1).

( 16 ) Voir article 2, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/39 et article 2, paragraphe 1, sous a), de la directive 2014/65 ainsi que considérant 27 de la directive 2014/65.

( 17 ) Voir articles 94 et suiv. de la directive 2014/65.

( 18 ) Arrêt de la Cour AELE du 10 mai 2016, Franz-Josef Hagedorn/Vienna-Life Lebensversicherung AG et Rainer Armbruster/Swiss Life (Liechtenstein) AG (affaires jointes E‑15/15 et E‑16/15, point 52).

( 19 ) À cet égard, voir arrêts du 5 mars 2002, Axa Royale Belge (C‑386/00, EU:C:2002:136, point 20), et du 29 avril 2015, Nationale-Nederlanden Levensverzekering Mij (C‑51/13, EU:C:2015:286, point 19).

( 20 ) Sans toutefois atteindre, selon moi, le niveau d’interprétation extensive que la Cour a été prête à atteindre dans le passé afin de combler les lacunes dans la protection efficace des consommateurs qui pouvaient être attribuées à un libellé ou une formulation/conception problématique ou lacunaire des dispositions légales. Voir, à titre d’illustration, arrêt du 19 novembre 2009, Sturgeon e.a. (C‑402/07 et C‑432/07, EU:C:2009:716, points 49 à 54).

( 21 ) Voir également considérant 7 et article 36, paragraphe 4, de la directive sur l’assurance vie.

( 22 ) Arrêts du 1er mars 2012, González Alonso (C‑166/11, EU:C:2012:119, point 25 et jurisprudence citée), ainsi que du 31 mai 2018, Länsförsäkringar Sak Försäkringsaktiebolag e.a. (C‑542/16, EU:C:2018:369, point 49). Voir également, par analogie, arrêt du 19 décembre 2013, Koushkaki (C‑84/12, EU:C:2013:862, point 34).

( 23 ) Arrêt de la Cour AELE du 10 mai 2016, Franz-Josef Hagedorn/Vienna-Life Lebensversicherung AG et Rainer Armbruster/Swiss Life (Liechtenstein) AG (affaires jointes E-15/15 et E-16/15, point 61).

( 24 ) Arrêt du 31 mai 2018, Länsförsäkringar Sak Försäkringsaktiebolag e.a. (C‑542/16, EU:C:2018:369, point 50), qui fait référence aux arrêts du 25 février 1999, CPP (C‑349/96, EU:C:1999:93, point 17), et du 26 mars 2015, Litaksa (C‑556/13, EU:C:2015:202, point 28).

( 25 ) Arrêt du 31 mai 2018, Länsförsäkringar Sak Försäkringsaktiebolag e.a. (C‑542/16, EU:C:2018:369, point 50), qui fait référence à l’arrêt du 17 mars 2016, Aspiro (C‑40/15, EU:C:2016:172, point 23 et jurisprudence citée).

( 26 ) En ce sens, voir arrêt du 2 avril 2020, kunsthaus muerz (C‑20/19, EU:C:2020:273, points 35, 36 et 41).

( 27 ) Arrêt du 2 avril 2020, kunsthaus muerz (C‑20/19, EU:C:2020:273, point 39). À cet égard, voir également arrêts du 13 décembre 2001, Heininger (C‑481/99, EU:C:2001:684, points 45 et 47), ainsi que du 19 décembre 2013, Endress (C‑209/12, EU:C:2013:864, points 28 et 29).

( 28 ) Si ce devait être le cas en vertu du droit national, j’estimerais alors que la plupart (voire la totalité) des questions posées par la juridiction de renvoi dans les affaires C-143/20 et C-231/20 sont superflues. Les requérants au principal pouvaient simplement demander le remboursement en invoquant l’enrichissement sans cause du preneur d’assurance, puisque ce dernier aurait reçu leur argent sans aucun titre juridique.

( 29 ) Comparer aux considérants 44 à 47, à l’article 35 et à l’article 38, paragraphes 1, 2 et 5, de la directive sur l’assurance vie.

( 30 ) Voir, par exemple, considérants 2 et 39 ainsi que l'article 14, paragraphe 5, et article 53, paragraphe 6, de la directive sur l’assurance vie. Voir également conclusions de l’avocate générale Sharpston dans l’affaire Nationale-Nederlanden Levensverzekering Mij (C‑51/13, EU:C:2014:1921, point 37).

( 31 ) Voir arrêt du 2 avril 2020, kunsthaus muerz (C‑20/19, EU:C:2020:273, points 35, 36 et 41).

( 32 ) À cet égard, arrêt du 2 avril 2020, kunsthaus muerz (C‑20/19, EU:C:2020:273, points 35, 36 et 41).

( 33 ) Mise en italique par mes soins.

( 34 ) Voir, par analogie, arrêt du 5 mars 2002, Axa Royale Belge (C‑386/00, EU:C:2002:136, point 24), concernant l’article 31, paragraphe 3, l’annexe II et le considérant 23 de la directive 92/96/CEE du Conseil, du 10 novembre 1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe sur la vie, et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE (troisième directive assurance vie) (JO 1992, L 360, p. 1).

( 35 ) Voir, notamment, arrêts du 27 octobre 1977, Bouchereau (30/77, EU:C:1977:172, point 14) ; du 23 novembre 2016, Bayer CropScience et Stichting De Bijenstichting (C‑442/14, EU:C:2016:890, point 84), et du 25 février 2021, Bartosch Airport Supply Services (C‑772/19, EU:C:2021:141, point 26).

( 36 ) Arrêts du 18 décembre 2014, CA Consumer Finance (C‑449/13, EU:C:2014:2464, point 46), et du 25 juin 2020, Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände (C‑380/19, EU:C:2020:498, points 33 à 35).

( 37 ) Mise en italique par mes soins.

( 38 ) Voir, par exemple, article 3, paragraphe 1, de la directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 septembre 2002, concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE (JO 2002, L 271, p. 16), et article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la
directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66).

( 39 ) Voir, à cet égard, arrêts du 16 décembre 1976, Rewe-Zentralfinanz et Rewe-Zentral (33/76, EU:C:1976:188, point 5) ; du 19 décembre 2013, Endress (C‑209/12, EU:C:2013:864, point 23), et du 22 avril 2021, Profi Credit Slovakia (C‑485/19, EU:C:2021:313, point 52 et jurisprudence citée).

( 40 ) Voir note en bas de page 38 des présentes conclusions.

( 41 ) Arrêt du 25 juin 2020, Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände (C‑380/19, EU:C:2020:498, point 34), qui interprète l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du
Conseil (JO 2011, L 304, p. 64).

( 42 ) Voir considérant 10 et article 3, paragraphe 4, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

( 43 ) Comparer avec les conséquences énoncées à l’article 35, paragraphe 1, de la directive sur l’assurance vie. Voir également, par analogie, arrêt du 7 juillet 2016, Citroën Commerce (C‑476/14, EU:C:2016:527, point 44).

( 44 ) Arrêt du 29 avril 2015, Nationale-Nederlanden Levensverzekering Mij (C‑51/13, EU:C:2015:286, point 36). Voir également, à cet égard, arrêt de la Cour AELE du 13 juin 2013, Beatrix Koch, Dipl. Kfm. Lothar Hummel et Stefan Müller c/ Swiss Life (Liechtenstein) AG (E‑11/12, point 73).

( 45 ) Voir points 54 à 103 des présentes conclusions.

( 46 ) Voir, par analogie, arrêt du 13 septembre 2018, Wind Tre et Vodafone Italia (C‑54/17 et C‑55/17, EU:C:2018:710, points 61, 68 et 69).

( 47 ) Voir, par analogie, mes conclusions dans l’affaire Ministerstwo Sprawiedliwości (C‑55/20, EU:C:2021:500, points 77 à 81).

( 48 ) Voir, par analogie, arrêt du 16 juillet 2015, Abcur (C‑544/13 et C‑545/13, EU:C:2015:481, point 78).

( 49 ) Voir arrêt du 25 juillet 2018, Dyson (C‑632/16, EU:C:2018:599, point 28 et jurisprudence citée). Voir également, à cet égard, arrêt du 19 décembre 2013, Trento Sviluppo et Centrale Adriatica (C‑281/12, EU:C:2013:859, point 31).

( 50 ) Article 3, paragraphe 1, de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

( 51 ) Sur l’interprétation large de cette notion, voir arrêt du 25 juillet 2018, Dyson (C‑632/16, EU:C:2018:599, point 30 et jurisprudence citée).

( 52 ) Comparer avec le considérant 11 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

( 53 ) Le consommateur est une personne qui exerce son propre jugement, sans avoir recours ni à un rapport d’expertise ni à une recherche professionnelle. Voir, par exemple, arrêts du 4 juin 2015, Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände (C‑195/14, EU:C:2015:361, point 36 et jurisprudence citée), ainsi que du 21 janvier 2016, Viiniverla (C‑75/15, EU:C:2016:35, point 25 et jurisprudence citée).

( 54 ) À cet égard, arrêts du 19 décembre 2013, Trento Sviluppo et Centrale Adriatica (C‑281/12, EU:C:2013:859, point 27 et jurisprudence citée), ainsi que du 7 septembre 2016, Deroo‑Blanquart (C‑310/15, EU:C:2016:633, point 44).

( 55 ) Voir article 13 de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

( 56 ) Indépendamment de la question de savoir si l’« information substantielle » a effectivement la même portée que l’annexe III, point A, de la directive sur l’assurance vie.

( 57 ) Les mêmes références s’appliquent évidemment à l’affaire C‑213/20, dans le cas où la juridiction de renvoi souhaiterait procéder à cette appréciation dans la procédure au principal.

( 58 ) Voir note en bas de page 53 des présentes conclusions.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-143/20
Date de la décision : 02/09/2021
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sąd Rejonowy dla Warszawy-Woli w Warszawie.

Renvoi préjudiciel – Libre prestation de services – Assurance directe sur la vie – Contrats d’assurance-vie à capital variable liés à des fonds de placement dits “unit-linked” – Directive 2002/83/CE – Article 36 – Directive 2002/92/CE – Article 12, paragraphe 3 – Obligation d’information précontractuelle – Informations sur la nature des actifs représentatifs des contrats d’assurance “unit-linked” – Champ d’application – Portée – Directive 2005/29/CE – Article 7 – Pratiques commerciales déloyales – Omission trompeuse.

Droit d'établissement

Libre prestation des services

Libre circulation des capitaux

Protection des consommateurs


Parties
Demandeurs : A
Défendeurs : O et G. W. et E. S.

Composition du Tribunal
Avocat général : Bobek

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:687

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