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13/09/2018 | CJUE | N°C-225/17

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mme E. Sharpston, présentées le 13 septembre 2018., Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a. contre Conseil de l'Union européenne., 13/09/2018, C-225/17


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 13 septembre 2018 ( 1 )

Affaire C‑225/17 P

Islamic Republic of Iran Shipping Lines,

Hafize Darya Shipping Lines (HDSL),

Khazar Sea Shipping Lines Co.,

IRISL Europe GmbH,

IRISL Marine Services and Engineering Co.,

Irano Misr Shipping Co.,

Safiran Payam Darya Shipping Lines,

Shipping Computer Services Co.,

Soroush Sarzamin Asatir Ship Management,

South Way Shipping Agency Co. Ltd,

Valfajr 8th Shipping Line Co.

contre

Conseil de l’Union européenne

« Pourvoi – Mesures restrictives prises à l’encontre de l’Iran...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 13 septembre 2018 ( 1 )

Affaire C‑225/17 P

Islamic Republic of Iran Shipping Lines,

Hafize Darya Shipping Lines (HDSL),

Khazar Sea Shipping Lines Co.,

IRISL Europe GmbH,

IRISL Marine Services and Engineering Co.,

Irano Misr Shipping Co.,

Safiran Payam Darya Shipping Lines,

Shipping Computer Services Co.,

Soroush Sarzamin Asatir Ship Management,

South Way Shipping Agency Co. Ltd,

Valfajr 8th Shipping Line Co.

contre

Conseil de l’Union européenne

« Pourvoi – Mesures restrictives prises à l’encontre de l’Iran – Critères d’inclusion sur une liste des personnes et entités soumises à un gel des avoirs – Exception d’illégalité – Recevabilité – Plan d’action global commun – Incidence sur l’intérêt à agir dans le cadre du pourvoi – Base juridique – Confiance légitime – Sécurité juridique – Principe ne bis in idem – Autorité de la chose jugée – Droit à un recours juridictionnel effectif – Détournement de pouvoir – Droits de défense –
Proportionnalité – Droits fondamentaux – Erreur manifeste d’appréciation »

1.  La République islamique d’Iran (ci‑après l’« Iran ») est engagée dans un programme d’activités nucléaires posant un risque de prolifération et d’activités de mise au point de vecteurs d’armes nucléaires (ci‑après le « programme de prolifération nucléaire »). L’Organisation des Nations unies et l’Union européenne ont cherché de différentes manières à répondre à la menace qu’un tel programme a posée et continue de poser.

2.  Par le présent pourvoi, les requérantes ( 2 ) demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 17 février 2017, Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a./Conseil ( 3 ), dans la mesure où le Tribunal a rejeté comme étant non fondés, premièrement, leurs recours en annulation formés au titre de l’article 263 TFUE contre deux mesures par lesquelles leurs noms ont été inclus dans les listes de personnes ou entités dont les avoirs devaient être gelés dans le cadre de mesures
restrictives à l’encontre de l’Iran ( 4 ) et, deuxièmement, les exceptions d’illégalité opposées par ces entités, conformément à l’article 277 TFUE, à l’encontre de deux mesures établissant les critères généraux d’inclusion de personnes sur ces listes ( 5 ).

3.  Les moyens invoqués par les requérantes soulèvent d’importantes questions institutionnelles et constitutionnelles. En particulier, s’agissant de mesures restrictives appliquées à l’encontre de personnes et d’entités, quel est le pouvoir d’appréciation du Conseil de l’Union européenne lorsqu’il décide, après que les mesures initialement adoptées de manière illégale ont été annulées, d’adapter les critères d’application de ces mesures ou d’y soumettre la même entité ? Dans quelle mesure ce pouvoir
d’appréciation est-il limité par les principes généraux du droit de l’Union et la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte ») ?

Le droit international

Les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies

4. La prolifération nucléaire est sans conteste une des plus dangereuses menaces pour la paix et la sécurité internationales au XXIe siècle. Depuis le début de ce millénaire, l’Iran semble avoir cherché à développer un programme de prolifération nucléaire en violation des engagements internationaux, en particulier du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires conclu en 1968.

5. Le 23 décembre 2006, le Conseil de sécurité des Nations unies (ci‑après le « Conseil de sécurité ») a adopté la résolution 1737 (2006), dans laquelle il a exprimé de sérieuses inquiétudes quant au programme de prolifération nucléaire développé par l’Iran, et a cherché à exercer une pression sur cet État afin de « faire obstacle » au programme et de « suspendre » certaines de ses composantes en vue de maintenir la paix et la sécurité internationales ( 6 ).

6. À cette fin, le Conseil de sécurité a décidé, au point 12 de cette résolution, que tous les États devront geler les fonds, avoirs et ressources qui sont la propriété ou sous le contrôle des personnes ou entités désignées comme participant, étant directement associées ou apportant un appui au programme de prolifération nucléaire de l’Iran. Ce gel des avoirs concerne également les personnes ou entités agissant en leur nom ou sur leurs instructions, ou des entités qui sont leur propriété ou sont
sous leur contrôle, y compris par des moyens illicites.

7. Le 24 mars 2007, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1747 (2007). Au point 5, le Conseil de sécurité indique avoir décidé que « l’Iran ne doit fournir, vendre ou transférer, directement ou indirectement, à partir de son territoire ou par l’intermédiaire de ses nationaux ou au moyen de navires ou d’aéronefs battant son pavillon, aucune arme ni aucun matériel connexe et que tous les États devront interdire l’acquisition de ces articles auprès de l’Iran par leurs ressortissants, ou au
moyen de navires ou d’aéronefs battant leur pavillon, que ces articles aient ou non leur origine dans le territoire iranien » (ci‑après l’« embargo sur les armes »).

8. Le 3 mars 2008, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1803 (2008). Au point 11, le Conseil de sécurité a demandé à tous les États de « faire inspecter […] les chargements à destination et en provenance d’Iran des aéronefs et navires que possèdent ou contrôlent Iran Air Cargo et [IRISL], pour autant qu’il existe des motifs raisonnables de penser que tel aéronef ou navire transporte des biens prohibés par la présente résolution ou les résolutions 1737 (2006) ou 1747 (2007) ».

9. Par la résolution 1929 (2010) du 9 juin 2010, le Conseil de sécurité a introduit une série de mesures additionnelles à l’encontre d’IRISL. En particulier, les points 14 à 22 de cette résolution ont étendu les mesures de gel des avoirs qui figurent dans la résolution 1737 (2006) « aux entités de la compagnie [IRISL] qui figurent à l’annexe III et à toute personne ou entité agissant pour leur compte ou sur leurs ordres, ainsi qu’aux entités qui sont leur propriété ou sont sous leur contrôle, y
compris par des moyens illicites, ou dont le Conseil ou le Comité [des sanctions des Nations unies] aura établi qu’elles les ont aidées à se soustraire aux sanctions résultant [de ses] résolutions ou à en enfreindre les dispositions» ( 7 ).

10. Aucune des requérantes n’était visée par les mesures de gel des avoirs arrêtées par le Conseil de sécurité.

11. Le 14 juillet 2015, les représentants de la communauté internationale sont parvenus à trouver un accord avec l’Iran sur une solution à long terme de la question de son programme de prolifération nucléaire (Plan d’action global commun, ci‑après le « PAGC »). Un des éléments du PAGC était la levée des sanctions internationales imposées à l’Iran. Le 20 juillet 2015, le Conseil de sécurité a approuvé le PAGC par la résolution 2231 (2015).

12. Chaque résolution du Conseil de sécurité a été mise en œuvre dans l’Union européenne par l’intermédiaire de règles de droit dérivé.

Le droit de l’Union

13. Le 17 juin 2010, afin de se conformer à la résolution 1929 (2010), le Conseil européen a adopté la « déclaration sur l’Iran» ( 8 ). Au point 4, ce dernier a invité le Conseil à adopter des mesures mettant en œuvre celles prévues dans cette résolution ainsi que des mesures d’accompagnement, en vue de contribuer à répondre, par la voie des négociations, à l’ensemble des préoccupations que continue de susciter le développement par l’Iran de son programme de prolifération nucléaire. Ces mesures
devaient porter sur plusieurs secteurs essentiels de l’économie iranienne, en ce compris « le secteur iranien des transports, y compris [IRISL] et ses filiales» ( 9 ).

Inscription initiale des requérantes en 2010

14. Par la décision 2010/413/PESC du Conseil, du 26 juillet 2010, concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant la position commune 2007/140/PESC (JO 2010, L 195, p. 39), le Conseil a mis cette déclaration à exécution en adoptant des mesures restrictives supplémentaires. L’article 20, paragraphe 1, sous b), de cette décision imposait une obligation de geler les avoirs des entités « directement associées ou [qui] apportent un appui [au programme de prolifération nucléaire]
de l’Iran », des « entités qui ont aidé les personnes ou les entités désignées à se soustraire aux dispositions des résolutions 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010) du Conseil de sécurité […] ou à les enfreindre », et des « entités […] de la compagnie [IRISL] et les entités qui sont leur propriété, sont sous leur contrôle ou agissent pour leur compte, telles qu’énumérées à l’annexe II ». Le nom des requérantes étaient repris dans la liste figurant à l’annexe II.

15. L’inscription d’IRISL sur la liste reprise à l’annexe II de la décision 2010/413 était fondée sur les motifs suivants : « […] IRISL a participé au transport de marchandises de nature militaire, y compris de cargaisons interdites en provenance d’Iran. Trois incidents de ce type constituant des infractions manifestes ont été rapportés au Comité des sanctions du CNSU. Les liens de l’IRISL avec des activités présentant un risque de prolifération étaient tels que le [Conseil de sécurité] a demandé
aux États d’inspecter les navires de l’IRISL, pour autant qu’il existe des motifs raisonnables permettant de penser que les navires transportent des biens interdits au titre des résolutions 1803 et 1929 du [Conseil de sécurité] ». Les autres parties requérantes ont été inscrites sur la liste, car il s’agissait de sociétés détenues ou contrôlées par IRISL ou agissant pour son compte.

16. Le même jour, afin de rendre cette décision opposable aux tiers, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) no 668/2010 du Conseil, du 26 juillet 2010, mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 2, du règlement (CE) no 423/2007 (JO 2010, L 195, p. 25), par lequel les noms des requérantes ont été inscrits sur la liste figurant à l’annexe V du règlement (CE) no 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2007, L 103, p. 1)
(ci‑après les « inscriptions de 2010 »). Les avoirs des requérantes ont donc été effectivement gelés à compter du 26 juillet 2010. Les motifs d’inscription indiqués par le Conseil étaient en substance les mêmes que ceux invoqués afin d’inclure les requérantes dans l’annexe II de la décision 2010/413.

Première procédure devant le Tribunal

17. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 octobre 2010, les requérantes ( 10 ) ont introduit un recours en annulation de l’inscription de leur nom à l’annexe II de la décision 2010/413 et à l’annexe V du règlement no 423/2007.

18. Par son arrêt du 16 septembre 2013, Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a./Conseil ( 11 ), le Tribunal a annulé l’annexe II de la décision 2010/413 ainsi que les mesures qui s’y rapportaient dans la mesure où elles concernaient les requérantes dans cette affaire, et ce pour trois raisons principales. Premièrement, le Tribunal a considéré que le Conseil n’avait pas motivé à suffisance de droit son affirmation selon laquelle IRISL avait aidé, par les faits qui lui étaient reprochés, une
personne, une entité ou un organisme figurant sur une liste à enfreindre la législation de l’Union pertinente ainsi que les résolutions du Conseil de sécurité, au sens de l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413. Deuxièmement, selon le Tribunal, le Conseil n’a pas établi que, en ayant transporté, à trois reprises, du matériel militaire en violation de l’interdiction prévue au point 5 de la résolution 1747 (2007), IRISL avait apporté un appui à la prolifération nucléaire, au
sens de l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007. Troisièmement, le Tribunal a considéré que même si les requérantes autres qu’IRISL étaient effectivement détenues ou contrôlées par cette dernière ou avaient agi pour son compte, cette circonstance ne justifiait pas l’adoption et le maintien des mesures restrictives les visant, IRISL n’ayant pas été valablement reconnue comme apportant un appui à la prolifération
nucléaire.

19. Le Tribunal a maintenu les effets des mesures annulées jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi contre son arrêt, c’est‑à‑dire jusqu’au 26 novembre 2013.

Modification des critères d’inscription en 2013

20. Par la décision 2013/497/PESC du Conseil, du 10 octobre 2013, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2013, L 272, p. 46), le Conseil a étendu la portée ratione personae des mesures de gel des avoirs arrêtées à l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413, en ajoutant de nouveaux critères. Ces critères ont étendu le champ d’application desdites mesures afin qu’il couvre « les personnes et les entités qui se sont
soustraites aux dispositions des [résolutions du Conseil de sécurité] 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010) ou de la présente décision, [ou] les ont enfreintes » ainsi que les « personnes et entités qui fournissent des services d’assurance ou d’autres services essentiels à […] IRISL ou à des entités qui sont [sa] propriété ou sont sous [son] contrôle ou qui agissent pour [son] compte ».

21. Pour donner effet à ces modifications, le Conseil a modifié l’article 23, paragraphe 2, sous b) et e), du règlement (UE) no 267/2012, par le règlement (UE) no 971/2013 du Conseil, du 10 octobre 2013, modifiant le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2013, L 272, p. 1) ( 12 ). À la suite de cette modification, cette disposition prévoyait l’inscription à l’annexe IX et le gel des avoirs des personnes physiques et morales, entités et
organismes ayant été reconnus :

« b) comme étant une personne physique ou morale, une entité ou un organisme s’étant soustrait aux dispositions du présent règlement, à la décision 2010/413/PESC […] ou aux résolutions 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010) du Conseil de sécurité […] ou les ayant enfreintes, ou ayant aidé une personne, une entité ou un organisme figurant sur une liste à se soustraire auxdites dispositions ou à les enfreindre ;

[…]

e) comme étant une personne morale, une entité ou un organisme détenu ou contrôlé par [IRISL], ou une personne physique ou morale, une entité ou un organisme agissant pour le compte de celle-ci, ou une personne physique ou morale, une entité ou un organisme fournissant des services d’assurance ou d’autres services essentiels à [IRISL] ou à des entités qui sont sa propriété ou sont sous son contrôle ou qui agissent pour son compte ».

Réinscription des requérantes en 2013

22. Par lettre du 22 octobre 2013, le Conseil a indiqué à IRISL qu’il considérait qu’elle avait participé au transport de matériel lié à des armes en provenance d’Iran, en violation des dispositions du point 5 de la résolution 1747 (2007) du Conseil de sécurité, et que, dès lors, elle remplissait le critère prévu à l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et à l’article 23, paragraphe 2, sous b), du règlement no 267/2012, relatif aux personnes et aux entités s’étant soustraites
à, ou ayant enfreint, certaines résolutions du Conseil de sécurité (ci‑après le « critère de violation de résolutions »). Il lui a dès lors communiqué son intention de réinscrire son nom sur les listes des personnes et des entités visées par les mesures restrictives figurant à l’annexe II de la décision 2010/413 et à l’annexe IX du règlement no 267/2012 (ci-après les « listes litigieuses »).

23. Par lettres datées, selon le cas, du 22 ou du 30 octobre 2013, le Conseil a indiqué à chacune des dix sociétés que, pour différentes raisons, il considérait qu’elles remplissaient également les critères prévus à l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et à l’article 23, paragraphe 2, sous e), du règlement no 267/2012 (ci‑après le « critère du lien avec IRISL »). Il a dès lors communiqué à ces dix sociétés son intention de réinscrire leur nom sur les listes litigieuses.

24. Par la décision 2013/685/PESC du Conseil, du 26 novembre 2013, modifiant la décision 2010/413 (JO 2013, L 316, p. 46), les noms des requérantes ont été réinscrits sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/413.

25. Par voie de conséquence, les noms des requérantes ont été réinscrits sur la liste figurant à l’annexe IX du règlement no 267/2012 par le règlement d’exécution (UE) no 1203/2013 du Conseil, du 26 novembre 2013, mettant en œuvre le règlement no 267/2012 (JO 2013, L 316, p. 1).

26. La décision de réinscription d’IRISL de 2013 était fondée sur les motifs suivants : « IRISL a participé au transport de matériel lié à des armes en provenance d’Iran, en violation des dispositions du point 5 de la résolution 1747 (2007) du [Conseil de sécurité]. Trois violations manifestes de ces dispositions ont été rapportées au Comité des sanctions contre l’Iran du [Conseil de sécurité] en 2009 ».

27. L’inscription du nom des dix sociétés sur les listes litigieuses était fondée sur les motifs suivants :

– Hafize Darya Shipping Co., Safiran Payam Darya Shipping Co. et Hoopad Darya Shipping Agency ont été inscrites au motif qu’elles « agissaient pour le compte d’IRISL » ;

– Khazar Sea Shipping Lines Co., IRISL Europe et Valfajr Shipping Line Co. ont été inscrites sur la liste au motif qu’elles étaient « détenues par IRISL » ;

– Qeshm Marine Services & Engineering Co. et Marine Information Technology Development Co. ont été inscrites sur la liste au motif qu’elles étaient « contrôlées par IRISL » ;

– Irano Misr Shipping Co. a été inscrite sur la liste au motif qu’elle « fourni[ssait] des services essentiels à IRISL » ;

– Rahbaran Omid Darya Ship Management Co. a été inscrite sur la liste au motif qu’elle « agi[ssait] […] pour le compte d’IRISL » et « lui fourni[ssait] des services essentiels ».

Seconde procédure devant le Tribunal

28. Par requêtes déposées au greffe du Tribunal les 6 janvier et 7 février 2014, les requérantes ont introduit un recours en annulation des actes procédant à ces réinscriptions (affaires jointes T‑14/14 et T‑87/14). Les parties ont comparu à l’audience du 12 juillet 2016.

29. Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté, pour absence de fondement, l’annulation de la décision de réinscription de 2013 ainsi que l’exception d’illégalité opposée aux critères de 2013, tout en condamnant les requérantes aux dépens ( 13 ).

Mesures d’exécution du PAGC

30. Entre-temps afin de mettre en œuvre la résolution 2231 (2015), le Conseil a adopté, le 18 octobre 2015, une série de mesures (ci‑après les « mesures de mise en œuvre du PAGC ») ayant notamment pour effets combinés de suspendre les mesures restrictives imposées aux personnes et aux entités énumérées à l’annexe VI (anciennement l’annexe II) de la décision 2010/413 telle qu’elle avait été modifiée et, par conséquent, de retirer leurs noms de la liste des personnes et entités soumises à des mesures
restrictives figurant à l’annexe IX du règlement no 267/2012 ( 14 ). En vertu de la décision (PESC) 2016/37 du Conseil, du 16 janvier 2016, concernant la date d’application de la décision (PESC) 2015/1863 modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2016, L 11 I, p. 1), ces mesures sont entrées en vigueur à compter de cette même date du 16 janvier 2016.

Le pourvoi

31. Par leur requête déposée le 27 avril 2017, les requérantes demandent à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, d’annuler la décision de réinscription de 2013 en application de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, de déclarer les critères de 2013 inapplicables en ce qui les concerne en application de l’article 277 TFUE, et de condamner le Conseil aux dépens.

32. À l’appui de leur pourvoi, les requérantes font valoir neuf moyens. Je les examinerai successivement. Avant cela, je traiterai une question préliminaire.

Recevabilité du pourvoi

Exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil

33. En substance, le Conseil soutient que comme les mesures restrictives en cause ont été suspendues et qu’il a abrogé les listes de personnes qui y étaient soumises pour mettre en œuvre le PAGC ( 15 ), les requérantes n’ont pas d’intérêt à l’issue du pourvoi. Celui-ci est par conséquent irrecevable.

34. Ces arguments ne me paraissent pas convaincants.

35. Il n’est pas contesté qu’au niveau de l’Union, le PAGC a eu pour conséquence un engagement de « lever toutes les sanctions» ( 16 ) et « toutes les mesures restrictives économiques et financières» ( 17 ), ainsi que de « mettre fin à l’application de toutes les sanctions économiques et financières liées au nucléaire» ( 18 ). Les mesures adoptées par le Conseil afin de mettre en œuvre le PGAC ont suspendu les mesures restrictives applicables aux personnes et entités énumérées à l’annexe VI
(anciennement l’annexe II) de la décision 2010/413 et de retirer les noms de ces personnes et entités de la liste des personnes et entités soumises à des mesures restrictives figurant à l’annexe IX du règlement no 267/2012.

36. Il est également clair que si le Conseil décide dans le futur de revenir sur cette suspension et de réinscrire les requérantes afin de leur réimposer ces mesures (ou des mesures similaires), il devra à nouveau modifier ces textes en conséquence. Les requérantes auront manifestement qualité pour contester ces actes, comme ils l’ont fait et le font en l’espèce.

37. Les mesures de mise en œuvre du PAGC produisent leurs effets ex nunc à compter du 16 janvier 2016. Par conséquent, elles n’éliminent pas de l’ordre juridique les effets produits par les critères de 2013 et la décision de réinscription de 2013 entre leurs dates d’entrée en vigueur respectives et le 15 janvier 2016. Les effets suspensifs des mesures de mise en œuvre du PAGC ne sont dès lors pas équivalents à ceux d’une annulation par la Cour ou par le Tribunal, ni à ceux d’une quelconque nullité
ex tunc.

38. Dans mes récentes conclusions dans l’affaire Gul Ahmed Textile Mills/Conseil ( 19 ), j’ai examiné en détails la question du maintien de l’intérêt à agir. Je me suis opposée à l’instauration d’exigences exorbitantes pour constater cet intérêt et ai conclu que la question de l’intérêt à agir doit être replacée dans le contexte plus large du droit fondamental à une protection juridictionnelle effective, consacré à l’article 47 de la Charte ( 20 ). Ces conclusions peuvent être transposées à la
situation qui nous occupe ( 21 ).

39. Il est de jurisprudence constante que même si un acte ne produit plus d’effets pour l’avenir, le requérant conserve un intérêt à agir lorsque l’annulation de cet acte est susceptible de lui procurer un bénéfice ( 22 ).

40. À la différence de la situation dans l’affaire Bank Mellat/Conseil ( 23 ), les mesures de gel des avoirs qui nous occupent étaient susceptibles d’affecter la situation non seulement juridique, mais également matérielle des requérantes pendant la période qui précède leur suspension ou leur levée. En principe, l’annulation demandée pourrait donc leur procurer un bénéfice matériel ou juridique.

41. Les requérantes font valoir deux moyens pour justifier leur intérêt. Ces moyens sont tirés de l’intérêt au rétablissement de leur réputation et de l’intérêt à former un recours en indemnité. Je les examinerai successivement.

42. Premièrement, la Cour a admis qu’il est concevable que le requérant qui demande l’annulation d’un acte imposant des mesures restrictives ait à tout le moins un intérêt moral à poursuivre la procédure, puisqu’une éventuelle annulation pourrait limiter l’atteinte à sa réputation, si ce n’est l’effacer ( 24 ).

43. À la différence de l’affaire Bank Mellat/Conseil ( 25 ), les mesures qui nous intéressent en l’espèce sont de nature individuelle, et non sectorielle. En tant que telles, l’on peut raisonnablement considérer qu’elles exposent les requérantes à l’opprobre, dans la mesure où elles montrent le lien établi par la communauté internationale entre ces différentes situations factuelles et le programme de prolifération nucléaire de l’Iran. En outre, en gelant une partie des avoirs des requérantes, les
mesures restrictives en cause sont également susceptibles d’avoir affecté leur liquidité financière et, partant, leur capacité à respecter leurs engagements contractuels antérieurs.

44. Deuxièmement, il est de jurisprudence constante qu’un requérant peut conserver un intérêt à demander l’annulation d’un acte qui lui fait grief, dans la mesure où une conclusion d’illégalité pourrait servir de fondement à un futur recours en indemnité lié au préjudice que lui cause l’acte litigieux ( 26 ).

45. Par conséquent, je ne peux partager l’argument du Conseil selon lequel, comme l’arrêt attaqué a rejeté les prétentions des requérantes en première instance, il leur est impossible de démontrer que le Conseil a commis une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit de l’Union ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers ( 27 ).

46. Cet arrêt n’est pas définitif, puisqu’il fait l’objet d’un pourvoi actuellement pendant. Tant que la Cour ne se sera pas prononcée sur ce pourvoi, l’arrêt attaqué ne permet de tirer aucune conclusion quant à l’existence ou à l’absence d’une violation caractérisée d’une règle de droit de l’Union.

47. Comme les critères de 2013 et la décision de réinscription de 2013 présentent un lien juridique étroit ( 28 ), l’analyse que je viens d’exposer vaut également pour les deux moyens soulevés dans le cadre du présent pourvoi. Je ne vois aucune raison valable justifiant d’apprécier l’intérêt à agir contre des critères d’inscription applicables à titre général différemment de l’intérêt à contester des mesures individuelles de gel des avoirs.

48. Je conclus que l’entrée en vigueur, le 16 janvier 2016, des mesures de mise en œuvre du PAGC n’entame pas l’intérêt persistant des requérantes à poursuivre la procédure devant le Tribunal jusqu’à la date de l’arrêt attaqué ( 29 ) ou à introduire le présent pourvoi.

Exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission

49. La Commission soutient que le pourvoi est irrecevable, dès lors qu’il reproduit dans une large mesure les moyens et arguments sur lesquels les requérantes s’étaient précédemment appuyées devant le Tribunal. Il s’apparente donc à une simple demande de réexamen du recours.

50. La Cour a itérativement jugé qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné. Ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui ne comporte aucune argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt en question. Une simple énonciation abstraite des
moyens à l’appui du pourvoi ne répond donc pas aux exigences posées à l’article 58 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 168, paragraphe 1, sous d), de son règlement de procédure ( 30 ).

51. Certaines parties du pourvoi semblent ne pas remplir les critères établis par cette jurisprudence. Cependant, certains des arguments invoqués méritent un examen plus approfondi, dès lors qu’ils soulèvent des questions de principe qui peuvent être valablement débattues. Je ne considère dès lors pas que le pourvoi doive être déclaré irrecevable en soi.

Sur le fond du pourvoi

52. Les requérantes font valoir deux griefs à l’appui de leur pourvoi.

53. Le premier grief porte sur la contestation par les requérantes, en vertu de l’article 277 TFUE, de la validité des critères de 2013.

54. Les requérantes invoquent cinq moyens à l’appui de ce grief. Ceux‑ci portent sur les prétendues erreurs de droit commises par le Tribunal s’agissant, premièrement, de l’absence de base légale à l’adoption des critères 2013 ; deuxièmement, de la prétendue violation des principes d’autorité de la chose jugée, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime ainsi que du principe ne bis in idem et du droit des requérantes à un recours effectif ; troisièmement, du détournement de
pouvoir ; quatrièmement, de la prétendue violation du principe de proportionnalité, et cinquièmement, de la prétendue atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux des requérantes.

55. Le second grief porte sur la contestation directe par les requérantes, au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, de la légalité de la décision de réinscription de 2013, par laquelle leurs noms ont été ajoutés à la liste des entités soumises à des mesures individuelles de gel des avoirs ( 31 ).

56. À l’appui de ce grief, les requérantes invoquent quatre moyens. Ceux‑ci portent sur les prétendues erreurs de droit commises par le Tribunal, s’agissant, premièrement, d’erreurs manifestes d’appréciation commises en considérant que les critères d’inscription de 2013 étaient remplis, deuxièmement, d’une prétendue violation des droits de défense des requérantes lors de la procédure suivie pour les réinscrire sur la liste, troisièmement, de la prétendue violation des principes d’autorité de la
chose jugée, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime ainsi que du principe ne bis in idem et du droit des requérantes à un recours effectif et, quatrièmement, d’une prétendue violation des droits de défense des requérantes.

57. Par conséquent, trois des quatre moyens invoqués à l’appui du second grief se confondent avec des moyens invoqués à l’appui du premier grief.

58. Cependant, la nature juridique des actes attaqués dans le cadre du second grief est substantiellement différente. Ils diffèrent en particulier sur le plan de leur base légale (et, partant, la nature de la compétence exercée par le Conseil lors de leur adoption) et du pouvoir d’appréciation reconnu au Conseil dans le cadre de leur adoption. Le niveau de contrôle juridictionnel est donc également différent. Je les examinerai dès lors séparément.

Premier grief

Premier moyen : adoption des critères de 2013 sans base légale valable

59. Le Tribunal a jugé, aux points 60 à 77 de l’arrêt attaqué, que les critères de 2013 n’étaient pas arbitraires et respectaient le principe de proportionnalité.

60. Les requérantes soutiennent que le Conseil n’avait pas de base légale valable pour adopter les critères de 2013. Elles ne contestent pas le choix de la base légale en tant que tel. Au lieu de cela, elles font valoir que les critères de 2013 outrepassent le champ d’application de la base légale sur laquelle ils sont fondés, dès lors qu’ils n’étaient pas appropriés ni proportionnés au regard de l’objectif déclaré consistant à mettre un terme au programme de prolifération nucléaire de l’Iran.

61. En particulier, les requérantes font valoir que dans la mesure où le Tribunal a considéré (au point 101 de l’arrêt attaqué) que les critères de 2013 n’exigent pas un lien entre les activités de la personne ou de l’entité concernée et la prolifération nucléaire, ces critères ne peuvent pas être jugés appropriés en l’espèce. En outre, les requérantes soutiennent que le critère de violation de l’interdiction de vendre des armes imposée à l’Iran [point 5 de la résolution 1747 (2007)], et non de
violation des interdictions liées à la prolifération [point 7 de la résolution 1737 (2006)], n’est ni justifié ni proportionné. Elles allèguent également qu’il n’y avait pas de base légale pour introduire le critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité invoqué par le Conseil pour inscrire IRISL. Il s’ensuit que le Conseil ne saurait soutenir que le critère du lien avec IRISL est nécessaire pour contrer le risque d’un contournement des mesures de gel des avoirs imposées à cette
dernière.

62. Les requérantes critiquent encore le Tribunal pour n’avoir pas abordé plusieurs arguments spécifiques qu’elles avaient soulevés devant lui. Ces arguments sont les suivants : le Conseil n’avait aucune raison objective de modifier les critères d’inscription et n’a pas fourni de justification à cette modification ; en particulier, le Conseil n’avait pas de preuve d’un lien entre le transport d’armes et le programme de prolifération et ne pouvais pas valablement présumer l’existence d’un tel lien,
particulièrement à la lumière de l’arrêt du Tribunal de 2013 et du fait que le Conseil de sécurité n’avait imposé aucune mesure restrictive à IRISL ; enfin, le Conseil a « réécrit » les critères existants dans le seul but de « piéger » IRISL et les autres requérantes.

63. Je relève tout d’abord que, s’agissant des mesures qui ont établi les critères de 2013, la décision 2013/497 du Conseil est fondée sur l’article 29 TUE alors que le règlement du Conseil no 971/2013 est fondé sur l’article 215 TFUE. Ces dispositions des traités donnent au Conseil la compétence pour adopter des actes de portée générale, contenant des mesures restrictives autonomes, distinctes de mesures recommandées spécifiquement par le Conseil de sécurité. L’article 215, paragraphe 1, TFUE,
prévoit que le Conseil « adopte les mesures nécessaires » pour donner effet aux décisions adoptées, notamment, sur la base de l’article 29 TUE. L’article 215, paragraphe 2, TFUE, habilite le Conseil à adopter des mesures restrictives à l’encontre de personnes physiques ou morales, de groupes ou d’entités non étatiques. Il s’ensuit que, par principe, le Conseil dispose bel et bien d’une base légale pour adopter des mesures de gel des avoirs à l’encontre d’entités telles que les requérantes.

64. Il est de jurisprudence constante que dans leur contrôle juridictionnel des mesures restrictives, les juridictions de l’Union doivent reconnaître au Conseil un large pouvoir d’appréciation pour établir les critères généraux définissant la catégorie de personnes susceptibles d’être soumises à de telles mesures ( 32 ).

65. Cela ne signifie pas que le Conseil est autorisé à agir arbitrairement. Le caractère manifestement inapproprié d’une mesure par rapport à l’objectif que l’institution compétente entend poursuivre peut affecter la légalité de ladite mesure ( 33 ).

66. Même si le contrôle juridictionnel de l’appréciation du caractère approprié d’une telle mesure est par conséquent limité, les juridictions de l’Union doivent assurer un contrôle, en principe complet, de la légalité de l’ensemble des actes de l’Union au regard des droits fondamentaux ( 34 ).

67. Le Tribunal a correctement appliqué cette jurisprudence ( 35 ). La jurisprudence constante de la Cour explique que le régime de mesures à l’encontre de l’Iran a pour objectif d’exercer une pression sur cet État afin de l’obliger à mettre fin aux activités nucléaires posant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires ( 36 ). Cet objectif s’inscrit dans le prolongement des objectifs plus larges poursuivis par le traité UE en matière de relations de l’Union avec
le reste du monde et de politique étrangère et de sécurité commune (PESC) ( 37 ). Cet objectif doit également être compris à la lumière des objectifs des résolutions du Conseil de sécurité pertinentes, qui cherchent à « faire obstacle » au programme de prolifération nucléaire de l’Iran et à « suspendre » certaines de ses composantes en vue de maintenir la paix et la sécurité internationales ( 38 ).

68. L’analyse de la légalité des critères de gel des avoirs doit également prendre en compte le contexte historique ( 39 ). Les mesures restrictives à l’encontre de l’Iran ont évolué avec le temps. Elles sont, par nature, préventives. Leur champ d’application a légitimement pu être (et a été) progressivement étendu à de nombreuses reprises ( 40 ) afin de remédier à l’inefficacité apparente des mesures précédemment adoptées.

69. Les critères de 2013 indiquent laconiquement que les critères de désignation des personnes et des entités « devraient être adaptés », sans fournir aucune raison spécifique à cette démarche ( 41 ). Il ressort néanmoins clairement du contexte que l’objectif était d’élargir ces critères afin de viser des catégories supplémentaires de personnes ou d’entités en vue de réaliser les objectifs découlant des traités et des résolutions du Conseil de sécurité existantes. Il découle de la jurisprudence
qu’un tel objectif n’est pas intrinsèquement illicite ( 42 ). Je rejette l’affirmation gratuite des requérantes selon laquelle l’objectif non avoué était de contourner l’arrêt du Tribunal de 2013.

70. J’examine à présent plus en détail la légalité, premièrement, du critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité, et, deuxièmement, du critère du lien avec IRISL.

71. En guise d’introduction, je relève que ces deux critères se concentrent sur des situations ou des circonstances objectives plutôt que sur la démonstration d’un lien réel entre, d’une part, les personnes et les entités devant être soumises aux mesures de gel des avoirs ou entre leur comportement concret, et, d’autre part, l’objectif principal des mesures restrictives, en particulier celui de décourager le programme de prolifération nucléaire de l’Iran. La Cour a reconnu que de tels critères sont,
en principe, licites ( 43 ).

Critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité

72. IRISL a été inscrit sur la base du critère visant « les personnes et les entités qui se sont soustraites aux dispositions des [résolutions du Conseil de sécurité] 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010) [ou] les ont enfreintes ».

73. Ce critère a été ajouté au critère existant visant les personnes et les entités « qui ont aidé les personnes ou les entités désignées à se soustraire […] ou à […] enfreindre » ces dispositions. Envisagée dans cette perspective, cette addition apparaît éminemment raisonnable. S’il est justifié d’imposer des mesures restrictives aux personnes qui ont aidé d’autres personnes dans leur activité illicite, il est d’autant plus justifié d’imposer ces mesures aux personnes qui ont elles‑mêmes agi
illicitement.

74. Bien qu’IRISL ait été inscrite en raison de la violation d’une interdiction relative à l’embargo sur les armes, les résolutions du Conseil de sécurité pertinentes contiennent également nombre d’autres interdictions, dont certaines sont plus directement liées à la participation au développement du programme de prolifération. Par la résolution 1737 (2006), le Conseil de sécurité a notamment imposé un embargo sur le transfert de technologies sensibles. En outre, il a imposé à l’Iran un embargo sur
les armes par la résolution 1747 (2007).

75. L’on ne peut certes pas identifier de lien direct entre ces deux résolutions et le programme de prolifération nucléaire en tant que tel. C’est donc à juste titre que le Tribunal a constaté que le critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité ne semble pas exiger l’existence d’un tel lien entre le comportement d’une entité donnée et ce programme ( 44 ). Cependant, cette constatation ne suffit pas à rendre le choix de ce critère inapproprié ou illicite.

76. C’est à juste titre que le Tribunal a constaté que la résolution 1947 (2007) vise à s’assurer que le programme nucléaire iranien sert à des fins exclusivement pacifiques et à faire obstacle à la mise au point par l’Iran de technologies sensibles à l’appui de ses programmes nucléaires et de missiles ( 45 ). Compte tenu de la nature préventive des mesures restrictives adoptées à l’encontre del’Iran ( 46 ), le Conseil a légitimement pu considérer que les revenus provenant du commerce d’armes
pouvait directement ou indirectement fournir à l’Iran des ressources ou des facilités de diverse nature lui permettant de poursuivre ce programme ( 47 ). Sachant que les ressources économiques pouvaient être détournées afin de soutenir des activités nucléaires posant un risque de prolifération en Iran ( 48 ), le Conseil pouvait également considérer de manière légitime que la violation de l’embargo sur les armes était de nature à soutenir ou encourager ce programme.

77. Il est vrai que la résolution 1747 (2007) n’oblige pas les États à geler les avoirs des personnes ou des entités qui violent l’embargo sur les armes, mais leur demande seulement de faire preuve de vigilance à cet égard. Cependant, il ne saurait être déduit de cette recommandation l’absence de nécessité de geler les fonds de ces entités ( 49 ) et encore moins qu’une telle mesure de gel est manifestement inappropriée pour assurer l’efficacité de l’embargo.

78. Il n’était donc ni déraisonnable ni excessif, de la part du Conseil, de définir un critère de gel des avoirs présupposant un lien potentiel entre la violation de l’embargo sur les armes et le programme de prolifération, malgré le fait que le comportement individuel de l’entité relevant d’un tel critère ne montre pas nécessairement de lien direct ou indirect avec ce programme ( 50 ). A priori, un tel choix politique n’apparaît pas manifestement inapproprié ou arbitraire à la lumière des
résolutions du Conseil de sécurité pertinentes et de l’importance primordiale de la préservation de la paix et de la sécurité internationales.

79. Enfin, le champ d’application de ce critère n’est pas limité aux violations de l’embargo sur les armes, mais vise à assurer le respect de toutes les dispositions des résolutions du Conseil de sécurité pertinentes. Contrairement à ce qu’affirment les requérantes, un critère formulé de cette manière est conforme aux objectifs du régime de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran. En revanche, il me semble qu’un critère limité aux violations ou interdictions directement liées à la prolifération,
mais laissant de côté d’autres interdictions imposées par les résolutions du Conseil de sécurité pertinentes, aurait été moins approprié en vue de faire respecter ces objectifs généraux.

80. Je conclus par conséquent que le premier moyen du premier grief, relatif au critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité, doit être déclaré non fondé.

Critère du lien avec IRISL

81. Les dix sociétés ont été inscrites sur la base du critère visant, en substance, les personnes et les entités i) détenues ou contrôlées par IRISL, ii) agissant pour le compte de celle-ci, ou iii) fournissant des services essentiels à IRISL ( 51 ).

82. Tout comme le critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité, le critère du lien avec IRISL ne présuppose aucun lien entre le comportement individuel des entités à inscrire et le programme de prolifération nucléaire. En effet, le fait d’être détenu ou contrôlé par IRISL n’a rien à voir avec le comportement individuel des entités concernées. C’est un fait objectif qui échappe à leur contrôle.

83. Cela ne suffit cependant pas à rendre ce critère illicite. Il ressort clairement de la jurisprudence que, lorsque les avoirs d’une personne ou d’une entité soumise à des mesures restrictives sont gelés, il existe un risque non négligeable que celle‑ci exerce alors une pression sur les entités qu’elle détient ou contrôle ou qui lui appartiennent, pour contourner l’effet des mesures auxquelles elle est elle-même soumise. Par conséquent, le gel des avoirs de ces entités est nécessaire et approprié
pour assurer l’efficacité des mesures adoptées et garantir que ces mesures ne sont pas contournées ( 52 ).

84. Cette jurisprudence concernait le risque de contournement des mesures de gel des avoirs adoptées à l’encontre de personnes elles‑mêmes impliquées dans l’appui au programme de prolifération nucléaire. J’estime que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, un tel risque existe à l’évidence aussi dans le contexte des autres critères, en ce compris ceux qui ne présupposent aucun lien entre le comportement individuel d’une personne inscrite sur la liste et le programme de prolifération
nucléaire, comme le critère qui nous occupe ici. Cependant, cette jurisprudence s’applique uniquement lorsque les mesures restrictives en cause s’appliquent à des personnes ou des entités détenues, contrôlées ou liées d’une autre manière à des personnes déjà soumises à ces mesures ( 53 ).

85. Lorsque les critères de 2013 ont été adoptés, IRISL était elle‑même soumise à des mesures de gel des avoirs ( 54 ). Il s’ensuit que, en principe, le critère en cause pouvait potentiellement être justifié par la nécessité d’éviter que ces mesures soient contournées.

86. Cependant, les actes établissant les critères de 2013 ne contiennent aucune motivation en sens justifiant le critère du lien avec IRISL. La décision 2010/413, par laquelle le Conseil a établi pour la première fois le critère du lien avec IRISL sous sa forme initiale (plus étroite) ne contient pas de motivation non plus ( 55 ). Par conséquent, l’on ne peut, tout au plus, que simplement présumer que le Conseil aurait justifié ce critère par la nécessité de contrer le contournement de ses mesures
antérieures visant IRISL elle‑même.

87. L’article 296, deuxième alinéa, TFUE, prévoit, notamment, que les actes juridiques de l’Union sont motivés. Une telle motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution de l’Union qui a adopté la mesure de manière à permettre à la Cour d’exercer son contrôle ( 56 ). Selon une jurisprudence constante, le point de savoir si une motivation remplit les critères de l’article 296 TFUE doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi
de son contexte ( 57 ).

88. Comme je viens de l’indiquer, le libellé ne contient pas de raisonnement justifiant le critère du lien avec IRISL. J’ai précédemment expliqué, dans les présentes conclusions, le contexte des critères de 2013 ( 58 ).

89. Lorsque le Conseil a établi les critères de 2013, il devait être conscient des questions suivantes. Premièrement, les mesures restrictives imposées par le Conseil de sécurité ne couvraient pas IRISL ni aucune des dix sociétés. Deuxièmement, que bien qu’il se soit précédemment fondé sur trois incidents lors desquels IRISL avait violé la résolution du Conseil de sécurité 1747 (2007), le Conseil n’a pas démontré à suffisance qu’IRISL avait apporté son soutien au programme de prolifération
nucléaire ( 59 ). Troisièmement, le Conseil n’a avancé aucun élément permettant d’établir qu’IRISL était en réalité une émanation de l’État iranien, à savoir une entité qui participait à l’exercice de la puissance publique ou qui gérait un service public sous le contrôle des autorités ( 60 ). Par conséquent, le Conseil ne pouvait se fonder sur l’existence présumée de liens d’une quelconque nature entre IRISL et l’État iranien ou son programme de prolifération nucléaire pour justifier le critère
du lien avec IRISL, particulièrement alors que la réglementation applicablene prévoyait aucune disposition en ce sens ( 61 ).

90. Lorsque le Conseil a établi les critères de 2013, il aurait été libre de tenir expressément compte du fait qu’IRISL était la plus grande compagnie de transport maritime opérant en Iran ( 62 ) et que le Conseil européen l’avait invité à imposer des mesures restrictives, entre autres, au « secteur iranien des transports, y compris [IRISL] et ses filiales» ( 63 ). Cela étant, les actes pertinents du Conseil ne contiennent aucune indication des motifs sur lesquels ce dernier s’est effectivement
fondé pour justifier l’instauration du critère du lien avec IRISL. Cela constitue une violation manifeste de l’obligation de motivation imposée par l’article 296 TFUE. Cela empêche également la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel et de vérifier si le critère en cause est approprié et proportionné au regard des objectifs qu’il poursuit. Le Tribunal a commis une erreur de droit en ne tranchant pas en ce sens.

91. Le premier moyen du premier grief doit par conséquent être accueilli et l’arrêt attaqué devrait être annulé sur ce point. Le critère du lien avec IRISL est par conséquent invalide. Dès lors que la décision de réinscription de 2013 était précisément basée sur ce critère, cette inscription doit également être annulée.

Deuxième moyen : l’adoption des critères de 2013 a prétendument violé les principes d’autorité de la chose jugée, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime ainsi que le principe ne bis in idem et le droit des requérantes à un recours effectif

92. Le Tribunal a constaté, aux points 79 à 90 de l’arrêt attaqué, que les critères de 2013 respectent les principes d’autorité de la chose jugée, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime ainsi que le principe ne bis in idem et le droit des requérantes à un recours effectif.

Première branche – principe d’autorité de la chose jugée

93. Les requérantes font valoir que le Tribunal a omis de reconnaître que le Conseil a contourné l’arrêt du Tribunal de 2013 en adoptant les critères de 2013. Ce faisant, le Tribunal aurait prétendument violé le principe d’autorité de la chose jugée.

94. La notion d’« autorité de la chose jugée » peut être diversement comprise dans les différents contextes juridiques nationaux. Il est cependant clair que dans le contexte du droit de l’Union, la conséquence d’un arrêt ayant l’autorité de la chose jugée est de faire obstacle à un recours si celui ayant donné lieu à l’arrêt en cause a opposé les mêmes parties, a porté sur le même objet et a été fondé sur la même cause ( 64 ). L’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux points de fait et de
droit qui ont été effectivement ou nécessairement tranchés par la décision judiciaire en cause ( 65 ).

95. Les arguments des requérantes semblent cependant soulever la question plus large du respect par le Conseil des limites de son pouvoir d’appréciation dans la mise en œuvre de cet arrêt.

96. La position du législateur de l’Union n’est susceptible d’être affectée par un arrêt antérieur que dans des circonstances très rares et très spécifiques. Ce n’est certainement pas le cas en l’espèce.

97. Dans quelle mesure l’arrêt du Tribunal de 2013 a-t-il affecté la capacité du Conseil d’agir en vertu de l’article 29 TUE et de l’article 215 TFUE ?

98. En vertu de l’article 266 TFUE, l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt annulant cet acte. Dans le cadre de la mise en œuvre d’un tel arrêt, l’institution concernée dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans le choix de ces mesures, étant entendu que celles-ci doivent être compatibles avec le dispositif de l’arrêt en cause ainsi qu’avec les motifs qui ont abouti à l’arrêt et en constituent le soutien nécessaire, en ce sens
qu’ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif ( 66 ).

99. J’ai fait observer par ailleurs que si l’annulation d’un acte illégal amène souvent l’institution concernée à adopter un nouvel acte, cette méthode n’est pas la seule qui permette de se conformer à l’arrêt en question ( 67 ). En particulier, lorsque l’annulation suffit à elle seule à éliminer l’illégalité identifiée par la Cour, l’institution concernée peut ne pas devoir entreprendre d’autre action. C’était clairement le cas en l’espèce.

100. L’objectif des critères de 2013 était, selon le sens usuel des termes employés, d’adapter les critères applicables à titre général de manière à pouvoir adopter dans le futur des mesures individuelles ayant un effet ex nunc ( 68 ). C’est donc à tort que les requérantes affirment que les critères de 2013 et la décision de réinscription de 2013 avaient pour objectif ou ont eu pour résultat d’inclure leurs noms dans les listes d’entités soumises rétroactivement (ex tunc) aux mesures de gel des
avoirs.

101. Il est de jurisprudence constante qu’une institution dont l’acte est annulé peut être amenée à éviter qu’un acte identique ne soit adopté ( 69 ). Elle doit éviter que tout acte destiné à remplacer l’acte annulé soit entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans l’arrêt d’annulation ( 70 ). Elle a également l’obligation d’exclure des textes nouveaux devant intervenir après l’arrêt d’annulation toute disposition ayant le même contenu que celle jugée illégale ( 71 ).

102. Sur quels points l’arrêt du Tribunal de 2013 était‑il définitif ? En d’autres termes : quelle est la portée de la « chose » que le Tribunal a réellement « jugée » ?

103. Dans cet arrêt, le Tribunal a notamment considéré que le Conseil n’avait pas établi à suffisance de droit qu’en ayant transporté, à trois reprises, du matériel militaire en violation de l’interdiction prévue au point 5 de la résolution 1747 (2007), IRISL a apporté un appui à la prolifération nucléaire, au sens de l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007. Par conséquent, il a annulé la décision 2010/413 dans la mesure
où elle incluait IRISL dans les listes de personnes soumises à des mesures de gel des avoirs ( 72 ).

104. L’erreur de droit qui a conduit à l’annulation des mesures de gel des avoirs en cause dans cette affaire était donc plutôt une erreur de procédure commise par le Conseil (puisqu’il « n’avait pas établi à suffisance de droit […] ») qu’un vice de fond. L’arrêt attaqué indique – à juste titre, selon moi – que l’arrêt du Tribunal de 2013 « ne s’est […] pas prononcé sur la validité des critères figurant à l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et à l’article 23, paragraphe 2,
sous a) et b), du règlement no 267/2012 dans leur version applicable aux faits de l’espèce» ( 73 ).

105. Je considère que tel est bien le cas, en dépit du fait que l’arrêt du Tribunal de 2013 a annulé les mesures de gel des avoirs imposées aux dix sociétés bien que « IRISL [n’ait] pas été valablement [reconnue] comme apportant un appui à la prolifération nucléaire » et bien que « les requérantes autres que […] IRISL soient effectivement détenues ou contrôlées par [cette dernière] ou agissent pour [son] compte» ( 74 ) et relevaient donc, en principe, du champ d’application de ce critère.

106. Il s’ensuit que ni le principe d’autorité de la chose jugée ni l’article 266 TFUE n’interdisaient au Conseil de maintenir les critères existants. Dès lors que le Conseil jouit d’un certain degré de latitude lorsqu’il définit la politique extérieure de l’Union, ces principes ne pouvaient a fortiori pas l’empêcher d’adapter ces critères afin, comme le Tribunal l’a adéquatement exprimé, de poursuivre plus efficacement son objectif consistant à exercer une pression sur l’Iran afin de l’obliger à
mettre fin à son programme de prolifération nucléaire ( 75 ).

Deuxième branche – principe ne bis in idem

107. En vertu de l’article 50 de la Charte, nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans l’Union par un jugement pénal définitif conformément à la loi. Le principe ne bis in idem interdit par conséquent de doubler tant les poursuites que les sanctions qui, aux fins de cet article, sont de nature pénale, lorsqu’elles concernent les mêmes actes et visent une même personne ( 76 ). Trois critères sont pertinents pour
déterminer si des poursuites ou des sanctions sont de nature pénale : i) la qualification juridique de l’infraction en droit interne, ii) la nature même de l’infraction et iii) la nature et le degré de sévérité de la sanction que risque de subir l’intéressé ( 77 ).

108. Je ne vois pas comment ce principe pourrait empêcher le Conseil d’appliquer les critères modifiés à certaines requérantes pour la première fois ( 78 ) ou d’appliquer les mêmes critères généraux à d’autres requérantes pour la seconde fois.

109. Il ressort sans équivoque des termes tant de la résolution 1737 (2006) (en particulier de ses points 2 et 12) que de la décision 2010/413 (en particulier de son neuvième considérant) que les mesures restrictives adoptées à l’encontre de l’Iran ont une vocation préventive en ce sens qu’elles visent à empêcher un risque de prolifération nucléaire dans cet État ( 79 ).

110. Il s’ensuit que les mesures restrictives en cause ne visent pas à sanctionner une quelconque faute que les personnes intéressées auraient pu commettre ( 80 ). Dans la mesure où les avoirs des personnes et entités visées par les mesures restrictives prévues par les critères de 2013 ne sont pas confisqués en tant que produits du crime, mais gelés à titre conservatoire, ces mesures ne constituent pas une sanction pénale. De même, elles n’impliquent aucune accusation de cette nature ( 81 ).

111. La décision du Conseil de soumettre une personne ou une entité à des mesures de gel des avoirs n’est pas la constatation de la commission effective d’une infraction pénale, cette décision étant adoptée dans le cadre et aux fins d’une procédure administrative à visée préventive, destinée, en d’autres termes, à éviter que les personnes et les entités concernées ne commettent certains actes jugés illégaux au regard du droit international. La seule utilité de cette procédure est de permettre au
Conseil d’exercer une pression sur l’Iran afin d’empêcher ou de freiner de manière efficace son programme de prolifération nucléaire ( 82 ).

112. Ces mesures ne suggèrent par conséquent aucun aspect relevant du droit pénal. Partant, aucune des trois conditions mentionnées au point 107 n’est remplie. Le principe ne bis in idem ne s’applique dès lors pas dans le contexte des mesures restrictives adoptées par le Conseil en vertu des pouvoirs que lui confèrent l’article 29 TUE et l’article 215 TFUE, telles que les critères de 2013 en cause dans la présente affaire.

113. En particulier, l’arrêt du Tribunal de 2013 annulant les mesures de gel des avoirs précédemment imposées aux requérantes ne peut par conséquent pas être considéré comme un « acquittement définitif » aux fins de l’article 50 de la Charte, et l’argument des requérantes ne saurait être accueilli.

Troisième branche – principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

114. Les requérantes soutiennent, en substance, que dans la mesure où l’arrêt du Tribunal de 2013 a annulé leurs inscriptions précédentes, les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime imposaient au Conseil de ne pas entreprendre d’autre action à leur égard.

115. À juste titre, le Tribunal a rappelé que, selon une jurisprudence constante, le principe de sécurité juridique implique que la législation de l’Union soit certaine et que son application soit prévisible pour les justiciables ( 83 ).

116. Les requérantes n’identifient aucun aspect des critères de 2013 qui manquerait de précision ou de clarté. Elles n’ont pas non plus identifié de passage de l’arrêt du Tribunal de 2013 susceptible de faire naître une attente légitime selon laquelle le Conseil serait empêché d’entreprendre d’autres actions, basées sur des critères et une procédure licites ainsi que sur des éléments de preuve adéquats, qui pourraient aboutir à leur réinscription. Cet argument doit donc être rejeté comme étant
manifestement non fondé.

117. Les requérantes font également valoir qu’il était illicite, pour le Conseil, de retenir des critères se rapportant au comportement passé, ou à des faits ou circonstances préexistants ou dont le Conseil n’avait même pas connaissance au moment de l’adoption desdits critères. À cet égard, elles ne précisent pas le principe juridique ou la disposition du traité sur laquelle elles se basent, mais considèrent que ce que le Conseil a fait a conféré à ces critères un effet « rétroactif ».

118. Premièrement, les mesures restrictives sont de nature préventive. Dans les limites de son large pouvoir d’appréciation, le Conseil, agissant en sa qualité de législateur de l’Union, peut établir des critères en vue d’appliquer des mesures restrictives de divers types. La nature et le contenu de ces mesures dépendra des objectifs poursuivis.

119. Il est inhérent aux mesures destinées à contrer les risques liés au programme de prolifération nucléaire de l’Iran d’être une réponse, basée sur certaines connaissances générales ou spécifiques, à la situation dans cet État. Par conséquent, si le Conseil considère, par exemple, que les violations des dispositions des résolutions du Conseil de sécurité procurent un avantage en vue de ce programme ou sont susceptibles de le faire dans le futur, il peut légitimement instaurer un critère relatif à
ces violations. Les mesures restrictives destinées à contrer le risque de terrorisme international sont une autre illustration du même phénomène ( 84 ). Par leur nature profonde, ces mesures sont basées sur des décisions nationales relatives au comportement passé de personnes ou de groupes présentant un tel risque ( 85 ).

120. Deuxièmement, il s’ensuit inévitablement que ces critères sont, par nature, prospectifs. Ils sont conçus pour être appliqués en tant que mesures appropriées à un comportement ou une situation futurs.

121. Le Conseil peut dès lors choisir d’établir des critères se rapportant de manière générique à des catégories de faits antérieurs à leur adoption. Les faits relevant d’une inscription spécifique peuvent cependant n’être portés à la connaissance du Conseil qu’ultérieurement. Il est évident que lorsqu’il formule ses critères, le Conseil peut vouloir se référer rétrospectivement aux faits ou aux circonstances qui, en raison des risques établis qu’ils présentaient à ce moment, ont provoqué l’adoption
desdits critères.

122. L’argument des requérantes aboutit à une conclusion paradoxale, selon laquelle le Conseil devrait accorder une immunité inconditionnelle aux personnes et aux entités qui, à la lumière des objectifs poursuivis par le législateur de l’Union, étaient connus comme présentant des risques avérés ou présentaient effectivement de tels risques, bien que ces risques n’aient pas été connus au moment de l’adoption des critères d’inscription. La seule possibilité ouverte au législateur de l’Union serait de
viser les personnes et les entités qui, à la lumière de ces objectifs légitimes, n’étaient pas connues comme présentant de tels risques, voire ne présentaient pas de tels risques lors de l’adoption des critères d’inscription.

123. Par conséquent, selon les arguments des requérantes, le Conseil devrait (par exemple) démontrer qu’une entité donnée a activement soutenu le programme de prolifération nucléaire après que le critère pertinent a été instauré, ou qu’elle n’a été créée, acquise ou n’a commencé à être effectivement contrôlée par une entité soumises à des mesures restrictives qu’après cette date.

124. Dans le premier exemple, le Conseil ne serait en mesure d’« activer » le critère pertinent que s’il peut démontrer que les mesures restrictives ont échoué à prévenir le risque dont elles devaient éviter la réalisation. Dans le second exemple, le Conseil serait confronté à un défi probatoire qui, compte tenu du refus systématique des autorités iraniennes de coopérer avec la communauté internationale, serait, en pratique, insurmontable dans la plupart des cas.

125. De toute évidence, cela priverait les mesures restrictives de leur efficacité et, en termes pratiques, rendrait inopérantes les compétences que les auteurs des traités ont conféré à l’Union par l’article 29 TUE et l’article 215 TFUE.

126. Aucune disposition d’un traité ni aucun principe général du droit de l’Union n’implique – ni, a fortiori, ne requiert – qu’une restriction si draconienne soit imposée à la compétence conférée au Conseil par ces dispositions.

127. J’ai déjà conclu que les mesures restrictives n’impliquent pas une sanction de nature pénale et ne présentent aucun aspect relevant du droit pénal ( 86 ). Le principe général de légalité des peines ne s’applique dès lors pas dans ce contexte ( 87 ). Il en va de même du principe de non rétroactivité de la loi pénale ( 88 ).

128. Il s’ensuit que même si le Tribunal n’a pas analysé les arguments des requérantes à la lumière de ces deux principes, il n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il a rejeté cet argument aux points 88 et 89 de l’arrêt attaqué.

129. C’est également à juste titre que le Tribunal a rappelé que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable à l’égard duquel une institution de l’Union a fait naître des espérances fondées du fait d’assurances précises qu’elle lui aurait fournies. Toutefois, lorsqu’un opérateur économique prudent et avisé est en mesure de prévoir l’adoption d’une mesure de l’Union de nature à affecter ses intérêts, il ne saurait invoquer le bénéfice de ce
principe lorsque cette mesure est adoptée ( 89 ).

130. Ni le fait que le Tribunal ait maintenu, dans son arrêt de 2013, les effets des actes annulés jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi, ni le fait que le Conseil ait décidé de ne pas exercer son droit de former un pourvoi contre cet arrêt ne sauraient être considérés comme de nature à faire naître une attente légitime selon laquelle le Conseil s’abstiendrait ultérieurement d’adapter les critères généraux ou de réinscrire les noms des requérantes sur les listes de personnes soumises à des
mesures de gel des avoirs (que ce soit sur le fondement des critères existants ou sur celui de critères modifiés).

131. C’est d’autant moins le cas que le Tribunal a expressément indiqué, au point 64 de cet arrêt, qu’il était loisible au Conseil, dans son rôle de législateur, d’élargir les hypothèses dans lesquelles des mesures restrictives pouvaient être adoptées.

132. Par conséquent, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en rejetant, dans l’arrêt attaqué, l’argument des attentes légitimes invoqué par les requérantes.

Quatrième branche – droit à un recours effectif

133. Les requérantes soutiennent que le Tribunal aurait dû constater qu’en l’absence de nouveaux faits ou de nouvelles raisons objectivement justifiées, le Conseil ne pouvait pas les réinscrire. Ce faisant, le Tribunal aurait violé leur droit à un recours effectif consacré par l’article 47 de la Charte.

134. Premièrement, cet argument n’a pas été soulevé devant le Tribunal et n’est invoqué pour la première fois qu’au stade du pourvoi. Le Tribunal a certes mentionné ce principe au point 172 de l’arrêt attaqué, mais en réponse au moyen relatif à la violation des droits de défense. L’argument soulevé ici par les requérantes constitue donc un moyen nouveau qui, conformément à l’article 170, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, n’est pas recevable au stade du pourvoi ( 90 ).

135. Deuxièmement, bien qu’il participe de l’exception d’illégalité, cet argument repose sur les circonstances relatives à la décision de réinscription de 2013. Je ne vois pas comment ces circonstances, postérieures à l’adoption des critères de 2013, pourraient affecter la légalité de ces mesures. Cet argument doit dès lors être rejeté comme étant inopérant.

136. Enfin, bien que ce soit évident, je souligne que les requérantes avaient l’opportunité de contester leur inscription antérieure et l’ont d’ailleurs fait avec succès. L’arrêt du Tribunal de 2013 a annulé, à compter du 27 novembre 2013, les mesures de gel des avoirs imposées en 2010 par le Conseil, éliminant ainsi rétroactivement ces mesures de l’ordre juridique de l’Union. Si les requérantes l’avaient voulu, elles auraient pu essayer de se prévaloir de cette annulation pour fonder une demande
d’indemnisation pour le préjudice prétendument subi.

137. Le fait que le Conseil ait décidé d’adapter les critères d’inscription et qu’il ait ensuite appliqué les critères modifiés aux requérantes ne modifie par rétroactivement leur situation. Il n’y a dès lors pas d’atteinte à l’avantage tiré de cette annulation, ni à leur droit à un recours effectif.

138. Les requérantes sont toujours en mesure de se prévaloir utilement du droit à un recours effectif dans le futur. Si elles obtiennent gain de cause dans la présente procédure, elles seront rétablies dans leur situation initiale et pourront, si elles le souhaitent, solliciter une indemnisation pour le préjudice prétendument causé par les mesures annulées.

139. À cet égard, l’argument des requérantes relatif aux perspectives prétendument « illusoires » d’obtenir une indemnisation satisfaisante n’est pas pertinent. Il est de jurisprudence constante qu’un recours indemnitaire donne accès à la justice, mais ne participe pas du système de contrôle juridictionnel. Le fait que le recours puisse ne pas être accueilli, notamment lorsque l’annulation de mesures restrictives illégales est, à elle seule, de nature à constituer une forme de réparation du
préjudice immatériel subi ( 91 ), ne signifie pas que le justiciable concerné serait privé d’une protection juridictionnelle effective ( 92 ).

140. Enfin, il semble probable que le mécontentement des requérantes trouve sa réelle origine dans le fait que malgré l’annulation prononcée dans l’arrêt du Tribunal de 2013, elles sont restées soumises à des mesures ininterrompues de gel des avoirs depuis 2010. Cependant, il s’agit là de la conséquence de l’effet combiné des deux trains de mesures restrictives adoptées par le Conseil (les mesures en cause dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt du Tribunal de 2013 et celles en cause dans la
présente affaire) et de la décision, prise par le Tribunal dans son arrêt de 2013, de maintenir les effets des mesures annulées en application de l’article 264, second alinéa, TFUE ( 93 ).

141. Si cette dernière décision n’avait pas été prise, les mesures annulées auraient donc expiré à la date du prononcé de l’arrêt (16 septembre 2013). Le fait que les requérantes aient été soumises à des mesures de gel des avoirs ininterrompues ne peut donc pas être attribué aux critères de 2013. Qui plus est, les requérantes n’ont jamais contesté la légalité de cette disposition de l’arrêt du Tribunal de 2013. Il me semble que ces éléments règlent le sort de l’argument des requérantes tiré d’une
violation, par le Conseil, de leur droit à un recours juridictionnel effectif.

Conclusion quant à la deuxième branche du moyen

142. Eu égard à ce qui précède, j’estime qu’il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme étant pour partie non fondé et pour partie irrecevable.

Troisième moyen : l’adoption des critères de 2013 aurait prétendument constitué un détournement de pouvoir

143. Aux points 91 à 95 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que le Conseil n’a pas commis de détournement de pouvoir en adoptant les critères de 2013.

144. Les requérantes soutiennent que la seule véritable raison pour laquelle le Conseil a modifié les critères d’inscription était de les viser personnellement. Elles contestent en particulier la conclusion du Tribunal selon laquelle le rétablissement du critère du lien avec IRISL, juste après que le Tribunal a jugé dans son arrêt de 2013 qu’il n’y avait pas de base justifiant d’inscrire IRISL, était conforme aux objectifs de la PESC.

145. Selon une jurisprudence constante, un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité CE pour parer aux circonstances de l’espèce ( 94 ).

146. En l’espèce, l’objectif poursuivi par le Conseil lorsqu’il a adopté les critères de 2013 était manifestement d’élargir les critères d’inscription préexistants afin de viser des catégories supplémentaires de personnes ou d’entités en vue de réaliser l’objectif plus large consistant à exercer une pression sur l’Iran pour l’obliger à mettre fin aux activités nucléaires posant un risque de prolifération ainsi qu’à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires. Cet objectif s’inscrit parfaitement
dans le prolongement des objectifs plus larges poursuivis par le traité UE en matière de relations de l’Union avec le reste du monde et de politique étrangère et de sécurité commune ( 95 ).

147. Par conséquent, l’adaptation par le Conseil des critères applicables à titre général de manière à pouvoir viser un groupe spécifique d’entités en vue d’atteindre plus efficacement ces objectifs n’est pas illicite en soi.

148. Les requérantes ne produisent aucun élément de preuve montrant que l’objectif exclusif ou, à tout le moins, prépondérant poursuivi par le Conseil lorsqu’il a adopté les critères de 2013 n’était pas celui exposé ci‑dessus.

149. La question de la motivation suffisante des critères de 2013 par le Conseil et la question de l’adéquation de ces critères à la réalisation de l’objectif poursuivi sont des problématiques distinctes, qui n’influencent pas mes conclusions sur le détournement de pouvoir allégué ( 96 ).

150. Je conclus que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il a jugé que le Conseil n’avait pas commis de détournement de pouvoir.

Quatrième moyen : prétendue violation des droits de défense des requérantes lors de l’adoption des critères de 2013

151. Aux points 96 à 99 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que le Conseil n’avait pas violé les droits de défense des requérantes en adoptant les critères de 2013.

152. Les requérantes soutiennent que comme le critère du lien avec IRISL a expressément nommé IRISL et constitue par conséquent un critère ad hominem qui concerne directement cette dernière, le Conseil avait l’obligation de les informer des modifications qu’elle projetait d’effectuer. Le Tribunal aurait commis une erreur de droit en ne se prononçant pas en ce sens.

153. L’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, prévoit que toute personne a le droit d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre. Il ressort donc clairement de cette disposition qu’elle ne concerne que les mesures individuelles.

154. La Cour a jugé que la jurisprudence relative au droit d’être entendu ne saurait être transposée au contexte d’un processus législatif aboutissant à l’adoption de lois d’ordre général qui impliquent un choix de politique économique et s’appliquent à la généralité des opérateurs concernés ( 97 ). Cependant, en cas d’actes de portée générale imposant des mesures individuelles de gel des avoirs au titre de la PESC (qui ont par conséquent une double nature, puisque bien qu’ayant une portée générale,
ils affectent directement et individuellement les personnes concernées par ces mesures) ( 98 ), la Cour a jugé que le droit d’être entendu d’une personne concernée par ces mesures de gel des avoirs doit pleinement s’appliquer, de sorte qu’elle doit se voir offrir la possibilité de faire effectivement valoir son point de vue sur les éléments de preuve retenus contre elle ( 99 ).

155. Il n’est pas contesté que les dix sociétés ne sont pas individuellement concernées par le critère du lien avec IRISL. Les critères de 2013 sont des actes de portée générale, applicables à une catégorie de personnes ou d’entités définies dans des termes objectifs et abstraits, ce que ces requérantes ne contestent pas.

156. Bien qu’IRISL soit expressément nommée dans les mesures en cause, je ne suis pas convaincue qu’elle réussisse à démontrer que ces mesures la concernent directement et individuellement, d’autant plus qu’elle ne fait pas valoir d’argument spécifique montrant de quelle manière ces mesures affectent sa situation.

157. Même si elle parvenait à le faire, ce ne lui serait d’aucune aide, car son moyen d’illégalité devrait alors être rejeté en tant que tentative irrecevable de contournement des limites temporelles prévues par l’article 263, sixième alinéa, TFUE ( 100 ).

158. Si le Tribunal a omis d’aborder cette dernière possibilité, un tel défaut n’est pas de nature à affecter l’issue de l’affaire ni, par conséquent, à entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué. Je suggère par conséquent à la Cour de rejeter le quatrième moyen comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, non fondé.

Cinquième moyen : l’adoption des critères de 2013 aurait prétendument porté atteinte de manière disproportionnée aux droits fondamentaux des requérantes

159. Aux points 100 à 105 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que les critères de 2013 ne constituaient pas une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux des requérantes.

160. Les requérantes semblent soutenir que les critères de 2013 seraient disproportionnés dans la mesure où ils ne présupposent pas l’existence d’un lien entre les personnes devant être inscrites et le programme de prolifération nucléaire. Dès lors qu’ils causent un grave préjudice à la réputation et aux affaires des requérantes, ces critères constituaient une restriction disproportionnée de leurs droits fondamentaux.

161. Dans le contexte des mesures restrictives, l’article 52, paragraphe 1, de la Charte admet des limitations à l’exercice des droits consacrés par celle-ci, pour autant que la limitation concernée respecte le contenu essentiel du droit fondamental en cause et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elle soit nécessaire et réponde effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ( 101 ).

162. En l’espèce, les requérantes n’ont pas précisément identifié les droits fondamentaux dont elles se prévalent ni de quelle manière ceux‑ci auraient prétendument été restreints ou violés de quelque manière que ce soit.

163. La seule affirmation suffisamment précise des requérantes semble être qu’elles ont spécifiquement contesté les constatations du Tribunal selon lesquelles les critères en cause sont distincts du critère relatif à la fourniture d’un appui à la prolifération nucléaire et, partant, n’imposent pas au Conseil d’établir un lien entre les activités de la personne ou de l’entité soumise à des mesures restrictives et la prolifération nucléaire ( 102 ).

164. J’ai d’ores et déjà conclu que, en principe, il n’est pas manifestement inapproprié que le Conseil établisse des critères se basant sur des circonstances ou des faits objectifs plutôt que sur le comportement individuel des personnes et entités devant être soumises aux mesures de gel des avoirs ( 103 ) .

165. Si la Cour considère tout comme moi que ces critères sont appropriés au regard de l’objectif poursuivi, aucun des éléments qui lui sont soumis ne suggère qu’ils seraient de nature à causer une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux des requérantes.

166. Les requérantes ne sont pas susceptibles d’être personnellement associées à un comportement présentant un risque pour la paix et la sécurité internationales précisément parce que les critères de 2013 ne présupposent pas leur implication personnelle directe ou indirecte dans la prolifération nucléaire. Par conséquent, toute défiance éventuelle à l’égard des requérantes et, partant, toute atteinte à la réputation sera vraisemblablement moins importante que dans le cas d’individus ou d’entités
clairement identifiées comme appuyant ce programme. Dès lors que la Cour a déjà reconnu que l’atteinte à la réputation et les restrictions à la liberté d’exercer une activité économique ainsi qu’au droit de propriété de telles personnes ou de telles entités, causées par les mesures de gel des avoirs, n’étaient pas démesurées par rapport aux buts visés, les requérantes doivent succomber dans leur argument ( 104 ).

167. Pour le surplus, j’estime que l’argument des requérantes ne répond pas aux exigences minimales de clarté et de motivation établies par la jurisprudence ( 105 ).

168. Je suggère par conséquent à la Cour de rejeter le cinquième moyen comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, non fondé.

Conclusions sur le premier grief invoqué à l’appui du pourvoi

169. Eu égard aux considérations qui précèdent, je suggère d’accueillir le premier grief dans la mesure où il vise le critère du lien avec IRISL. En ne se prononçant pas sur ce point, le Tribunal a commis une erreur de droit. Pour le surplus, le premier grief doit être rejeté.

170. Par conséquent, la Cour devrait i) annuler sur ce point l’arrêt attaqué, ii) déclarer le critère du lien avec IRISL invalide et iii) annuler la décision de réinscription de 2013 dans la mesure où elle était basée sur ce critère.

Deuxième grief : annulation de la décision de réinscription de 2013

Premier moyen : erreurs manifestes d’appréciation commises en considérant que les critères d’inscription étaient remplis

171. À l’issue d’un examen approfondi (points 109 à 165 de l’arrêt attaqué), le Tribunal a considéré que le Conseil n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation lorsqu’il a inclus les noms des requérantes sur les listes en cause en adoptant la décision de réinscription de 2013.

172. Par leur premier moyen, les requérantes font valoir que, par l’intermédiaire de la décision de réinscription de 2013, le Conseil les a soumises à des mesures de gel des avoirs sans avoir vérifié si elles étaient impliquées dans le programme de prolifération nucléaire ou si elles constituaient elles-mêmes « une menace actuelle ou future » dans le cadre de ce programme. Les requérantes nient avoir eu de quelconques liens avec ce programme et critiquent le Tribunal pour avoir commis de nombreuses
erreurs dans ses constatations en fait. À cet égard, les requérantes soutiennent que le Tribunal n’a pas correctement apprécié la valeur probatoire des témoignages joints à la requête introduite devant lui. Elles ajoutent que la réinscription d’IRISL est illicite, dès lors qu’en l’absence de tout fait nouveau, celle‑ci repose sur les mêmes faits que ceux sur lesquels le Conseil s’est appuyé pour les inscrire en 2010. Le comportement imputé à IRISL n’était pas suffisamment récent pour justifier
sa réinscription.

173. Je ne suis convaincue par aucun de ces arguments.

174. Premièrement, la Cour a jugé, dans le contexte du critère consistant à « être détenu ou contrôlé », que l’adoption d’une mesure de gel des fonds « n’a pas à être motivée par le fait que l’entité détenue ou contrôlée participe elle-même à cette prolifération » et que, par conséquent, un tel critère implique que le Conseil peut « geler les avoirs d’une telle entité sans contrôler si elle participe elle-même à la prolifération nucléaire» ( 106 ).

175. Cette jurisprudence est aisément transposable aux autres critères fondés sur des circonstances objectives plutôt que sur le comportement individuel des personnes ou entités soumises aux mesures restrictives. Le Tribunal n’a par conséquent pas commis d’erreur de droit.

176. Deuxièmement, dans la mesure où les requérantes font valoir, en particulier, qu’elles n’ont jamais apporté de soutien au programme de prolifération nucléaire, elles demandent en réalité un réexamen des faits sans alléguer que le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve qui lui étaient soumis.

177. Selon la jurisprudence constante de la Cour, le Tribunal est seul compétent pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour ( 107 ). L’argument doit par
conséquent être rejeté comme étant irrecevable.

178. Troisièmement, dans la mesure où les requérantes sont en désaccord avec les constatations du Tribunal relatives à la valeur probatoire des déclarations de certains témoins, il résulte de la jurisprudence de la Cour que la méconnaissance alléguée des règles applicables en matière de preuve constitue une question de droit qui est recevable au stade du pourvoi ( 108 ).

179. Le Tribunal a tenu compte du fait que ces déclarations émanaient de personnes employées par IRISL et y exerçant des fonctions directoriales. Il a considéré que les témoignages de ces personnes devaient par conséquent être assimilés aux déclarations d’IRISL, particulièrement dès lors qu’ils avaient été faits à sa demande, à l’occasion de son recours, et lui avaient été adressées à cette fin.

180. Ce faisant, le Tribunal a correctement appliqué la jurisprudence imposant de vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui figure dans une déclaration, en tenant compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, et en se demandant si, d’après son contenu, ledit document semblait sensé et fiable ( 109 ). L’argument des requérantes doit dès lors être rejeté comme étant non fondé.

181. Quatrièmement, comme les requérantes le font observer à juste titre, les fondements qui ont motivé la décision de réinscription de 2013 semblent être, en substance, identiques à ceux sur lesquels le Conseil s’est basé pour inscrire les requérantes en 2010.

182. Ce fait n’a cependant pas d’importance. Je ne vois pas de disposition ou de principe du droit de l’Union qui empêcherait le Conseil, par principe, de se baser sur les mêmes faits que ceux sur lesquels il s’est fondé pour l’inscription initiale lorsqu’il décide de maintenir les mesures restrictives. Le Conseil n’est pas tenu d’invoquer de nouveaux faits pour autant que les faits motivant l’inscription initiale soient pertinents et suffisent à maintenir la partie concernée sur la liste ( 110 ).

183. Les mesures restrictives que le Conseil impose afin de répondre au risque de terrorisme international ou à des situations spécifiques dans divers pays tiers font en général l’objet de procédure de réexamen périodique. S’il était interdit au Conseil d’encore se baser sur les mêmes faits qu’auparavant afin de maintenir une inscription, il serait empêché, dans un grand nombre de cas, de continuer à inscrire des personnes et entités concernées.

184. La légalité de la décision d’inscription de 2013 dépend du point de savoir si les faits sur lesquels le Conseil s’est basé aux fins de ces inscriptions étaient établis à suffisance de droit et s’ils remplissaient les conditions objectives établies dans les critères de 2013.

185. C’est donc sans commettre aucune erreur de droit que le Tribunal a considéré que la simple définition du critère de violation des résolutions du Conseil de sécurité présupposait que la réinscription devait nécessairement reposer sur un comportement qui lui est antérieur ( 111 ). Le Tribunal n’a pas non plus commis d’erreur de droit lorsqu’il a examiné, premièrement, si IRISL avait effectivement violé la résolution du Conseil de sécurité 1747 (2007) ( 112 ) et, deuxièmement, si les autres
requérantes étaient détenues ou contrôlées par IRISL, agissaient pour son compte ou lui fournissaient des services essentiels ( 113 ).

186. Cinquièmement, Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il a considéré qu’aux fins de la décision de réinscription de 2013, le Conseil était en droit de se baser sur des faits qui s’étaient déroulés quatre ans plus tôt, soit en 2009, puisqu’ils étaient suffisamment récents ( 114 ).

187. Je conclus au rejet du premier moyen.

Deuxième moyen : violation des droits de défense des requérantes lors de la procédure suivie pour les réinscrire

188. Aux points 166 à 181 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que le Conseil n’avait pas violé les droits de défense des requérantes lors de la procédure qui a précédé l’adoption de la décision de réinscription de 2013.

189. Dans leur deuxième moyen, les requérantes soutiennent que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne constatant pas que le Conseil avait violé leur droit d’être entendues avant qu’il n’adopte la décision de réinscription de 2013. Il est inconcevable que le Conseil ait pu tenir compte de la moindre de leurs observations, dès lors qu’il avait décidé de réinscrire IRISL bien avant d’adopter les critères de 2013 et avant d’avoir reçu les observations de cette dernière en réponse à son courrier
informant IRISL de son intention de la réinscrire. Le Conseil a également adopté la décision de réinscription de 2013 avant de répondre aux observations des requérantes et avant de leur fournir les documents justifiant ces mesures.

190. Premièrement, le moment pertinent pour apprécier si le Conseil a respecté le droit d’être entendu des requérantes est la date d’adoption de la décision de réinscription de 2013. L’argument des requérantes, qui fait référence à un hypothétique moment auquel le Conseil aurait soi-disant « décidé » d’adopter les critères de 2013 et la décision de réinscription de 2013, repose sur des affirmations gratuites et doit être rejeté comme tel.

191. Deuxièmement, il ressort de la jurisprudence que lorsqu’il adopte un acte entraînant des mesures restrictives à l’égard d’une personne ou d’une entité, le Conseil communique les motifs sur lesquels cet acte est fondé, dans toute la mesure du possible, soit au moment où cet acte est adopté, soit, à tout le moins, aussi rapidement que possible après qu’il l’a été, afin de permettre à ces personnes ou entités l’exercice de leur droit de recours ( 115 ). En particulier, dans le cadre de l’adoption
d’une décision maintenant le nom d’une personne ou d’une entité sur une liste de personnes ou d’entités visées par des mesures restrictives, le Conseil doit respecter le droit de cette personne ou de cette entité d’être préalablement entendue lorsqu’il retient à son égard, dans la décision portant maintien de l’inscription de son nom sur la liste, de nouveaux éléments, à savoir des éléments qui ne figuraient pas dans la décision initiale d’inscription de son nom sur cette liste ( 116 ).

192. En analysant le contenu de la correspondance entre le Conseil et les requérantes, le Tribunal a établi que le Conseil se basait sur des motifs essentiellement identiques à ceux communiqués aux requérantes en rapport avec leur inscription initiale en 2010 et que la communication répondait à toutes les exigences résultant de la jurisprudence antérieure à l’adoption de la décision de réinscription de 2013 ( 117 ).

193. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le Conseil n’est pas tenu de répondre avant l’adoption des mesures de gel des avoirs aux observations de la personne intéressée en réponse au courrier du Conseil l’informant de son intention de l’inscrire et lui communiquant les motifs d’inscription proposés.

194. Je conclus au rejet du deuxième moyen.

Troisième moyen : violation des principes d’autorité de la chose jugée, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime ainsi que du principe ne bis in idem et du droit des requérantes à un recours effectif

195. Aux points 183 à 199 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré qu’en adoptant la décision de réinscription de 2013, le Conseil n’avait pas violé les principes d’autorité de la chose jugée, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime, ni le principe ne bis in idem ou le droit des requérantes à un recours effectif.

196. À l’appui de ce moyen, les requérantes ne font valoir qu’un seul argument. Elles soutiennent qu’en se basant, aux fins de la décision de réinscription de 2013, sur les mêmes faits que ceux qui avaient servi de base à l’inscription de 2010, annulée par l’arrêt du Tribunal de 2013, le Conseil a agi en violation de ces principes.

197. Le Conseil s’est en effet fondé sur la même base factuelle pour inscrire les requérantes en 2010 et pour les réinscrire en 2013. En outre, alors que IRISL, Irano Misr Shipping Co. et Rahbaran Omid Darya Ship Management Co. ont été inscrites sur la base de critères nouvellement introduits, les autres requérantes ont été inscrites pour la seconde fois sur la base d’un critère identique à celui invoqué en 2010 ( 118 ).

198. J’ai d’ores et déjà conclu que le principe ne bis in idem ne s’applique pas dans le contexte des mesures restrictives ( 119 ). J’ai également conclu que, dans la situation qui nous occupe, le principe d’autorité de la chose jugée n’interdit pas au Conseil de se baser sur les mêmes critères ( 120 ) et qu’il est inhérent aux critères d’application de mesures de gel des avoirs de pouvoir se référer au comportement ou à la situation passés ( 121 ).

199. Par souci d’exhaustivité, j’ajoute que conformément au principe tempus regit actum, le contrôle juridictionnel, par les juridictions de l’Union, de la légalité de la décision de réinscription de 2013 consiste à vérifier si les faits sur lesquels le Conseil s’est basé justifiaient à suffisance de droit, à la date du 26 novembre 2013, l’adoption de la décision de réinscription de 2013 ( 122 ).

200. Le fait que le Conseil se soit basé sans succès sur certains faits aux fins des inscriptions de 2010 en date du 26 juillet 2010 n’interdit pas comme tel à ce dernier de se baser licitement sur ces mêmes faits en date du 26 novembre 2013 en vue d’une réinscription des requérantes sur la base des critères de 2013.

201. Il est également inhérent aux mesures adoptées dans le cadre de la PESC d’être sujettes à un réexamen périodique et d’être appliquées de manière répétée lors de périodes ultérieures. C’est notoirement le cas lorsque malgré les mesures restrictives précédemment appliquées, la situation géopolitique n’évolue pas ou, dans certains cas, évolue dans un sens contraire aux objectifs poursuivis, après une amélioration temporaire.

202. Dans la première situation, le Conseil doit être autorisé à poursuivre l’application des mesures nécessaires, même si la situation n’a pas changé, pour autant que les faits à la base du maintien des mesures restrictives continuent de justifier leur application au moment de leur adoption ( 123 ), notamment en ce qui concerne le caractère suffisamment récent des faits ( 124 ). Dans la seconde situation, le Conseil doit pouvoir rétablir les critères et les mesures de gel des avoirs précédemment
révoqués ou suspendus à titre provisoire, indépendamment du fait que la situation personnelle des entités ait pu entre-temps évoluer.

203. En l’espèce, la décision de réinscription de 2013 avait pour but de continuer à exercer une pression sur l’Iran et même de l’augmenter, précisément parce que les mesures appliquées jusqu’alors s’étaient révélées inefficaces.

204. Les pouvoirs du Conseil seraient réduits de manière arbitraire et injustifiée s’il n’était pas en mesure de poursuivre l’application des mesures de gel des avoirs à l’égard de personnes ou d’entités déjà inscrites à moins que la situation légale ou factuelle des intéressées ne connaisse une évolution négative substantielle ou à moins que de nouveaux éléments de preuve ne soient portés à sa connaissance.

205. Les inscriptions de 2010 ont été annulées en raison de vices de forme ( 125 ). Dans ce contexte, l’arrêt du Tribunal de 2013, lu au regard du principe d’autorité de la chose jugée et de l’article 266 TFUE, ne constitue pas, en soi, un obstacle à la réinscription ( 126 ). Comme le Tribunal l’a judicieusement constaté, l’annulation d’un acte pour vices de forme ou de procédure ne porte aucunement préjudice au droit de l’institution auteur de cet acte d’adopter un nouvel acte en se fondant sur les
mêmes éléments de fait et de droit que ceux qui avaient été à la base de l’acte annulé, pour autant qu’elle respecte, à cette occasion, les règles de forme ou de procédure dont la violation a été sanctionnée et que la confiance légitime des intéressés soit dûment respectée ( 127 ). Une décision de réinscription adoptée sur le fondement des mêmes motifs que ceux retenus lors de la première inscription peut suffire à justifier ladite inscription pour autant que les éléments de preuve apportés par
le Conseil étayent à suffisance de droit lesdits motifs ( 128 ).

206. J’ai d’ores et déjà conclu que le fait que cette réinscription puisse aboutir à un rétablissement des mesures de gel des avoirs malgré l’annulation des mesures précédemment adoptées n’affecte pas, en soi, le droit des requérantes à un recours juridictionnel effectif ( 129 ).

207. De même, rien n’interdit au Conseil de considérer, après avoir procédé à un réexamen complet à la date du rétablissement des mesuresrestrictives, que les mêmes faits répondent à un critère différent de celui précédemment invoqué et justifient dès lors d’appliquer à nouveau les mesures de gel des avoirs sur cette nouvelle base ( 130 ). À cet égard, je rappelle qu’il suffit que l’un des motifs invoqués, considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette décision, soit étayé ( 131 ).

208. Je conclus par conséquent que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il s’est prononcé en ce sens au point 189 de l’arrêt attaqué. Le moyen des requérantes, selon lequel la décision de réinscription de 2013 serait illicite, car elle a été adoptée sur la base des mêmes critères ou des mêmes circonstances légales et factuelles que les inscriptions de 2010, ne saurait dès lors être accueilli.

209. Les autres arguments des requérantes ne sont qu’une énonciation abstraite des moyens à l’appui du pourvoi et ne répondent dès lors pas aux exigences de recevabilité ( 132 ). Je conclus par conséquent au rejet de ce troisième moyen.

Quatrième moyen : violation du principe de proportionnalité

210. À l’appui de leur moyen relatif à une prétendue violation du principe de proportionnalité, les requérantes font valoir que le Tribunal n’a pas examiné si leur inscription était conforme aux objectifs poursuivis. Elles soutiennent que leur inscription est disproportionnée, dès lors qu’elle n’est basée sur aucun comportement lié au programme de prolifération nucléaire ni sur aucun lien avec le gouvernement iranien. Elles semblent également soutenir que, pour ces raisons, le Tribunal a eu tort de
considérer, au point 209 de l’arrêt attaqué, que les conséquences sur leur réputation et leurs affaires n’étaient pas disproportionnées.

211. Aucun de ces arguments ne me semble convaincant.

212. Le Tribunal s’est à juste titre référé à la jurisprudence constante selon laquelle le principe de proportionnalité fait partie des principes généraux du droit de l’Union et exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre ( 133 ).

213. Lors de l’examen approfondi de la proportionnalité des mesures de gel des avoirs, il importe de garder à l’esprit leur objectif et le contexte dans lequel elles sont adoptées.

214. J’ai précédemment abordé, dans les présentes conclusions, les objectifs des mesures en cause ( 134 ).

215. Pour ce qui a trait au contexte de ces mesures, celles‑ci participent de la réponse de l’Union aux nombreux rapports de l’Agence internationale de l’énergie atomique et au nombre élevé de résolutions du Conseil de sécurité. Elles ont été adoptées de manière progressive. Chacune des mesures successives était justifiée au regard de l’absence de succès des mesures adoptées précédemment. Il résulte de cette démarche, fondée sur la progressivité de l’atteinte aux droits en fonction de l’effectivité
des mesures, que la proportionnalité de ces dernières est, par principe, établie ( 135 ).

216. J’ai également déjà analysé, dans les présentes conclusions, les conséquences des mesures sur la réputation et les affaires des requérantes ( 136 ).

217. Contrairement à ce qu’affirment les requérantes, le Tribunal a longuement examiné chacun de ces éléments ( 137 ).

218. Les requérantes n’ont fait valoir aucun argument de nature à démontrer qu’en raison de leur situation ou de leurs caractéristiques particulières, les mesures de gel des avoirs en cause les auraient affectées de manière disproportionnée, de sorte que la jurisprudence précédemment citée au point 215 devrait être considérée comme non transposable au cas d’espèce et ne devrait pas leur être appliquée.

219. Enfin, j’ai déjà précédemment conclu, dans les présentes conclusions, que le Conseil pouvait licitement établir des critères d’inscription n’exigeant aucun lien direct entre les requérantes et le programme de prolifération nucléaire du gouvernement iranien ( 138 ). Par conséquent, lorsqu’il applique de tels critères, le Conseil n’était, par définition, pas tenu de vérifier si la personne ou l’entité concernée contribue elle‑même aux risques que ces critères cherchent à combattre ( 139 ). L’on
ne saurait dès lors critiquer le Tribunal pour avoir limité son contrôle de la légalité de la décision de réinscription de 2013 à un contrôle objectif, consistant à déterminer si les requérantes répondaient aux critères pertinents.

220. Je conclus au rejet du quatrième moyen.

221. Par conséquent, le deuxième grief doit être rejeté dans sa totalité.

Dépens

222. Eu égard à tout ce qui précède, j’estime que la Cour devrait accueillir le premier grief en ce qui concerne le critère du lien avec IRISL prévu par les critères de 2013. Partant, la décision de réinscription de 2013 devrait être annulée dans la mesure où les dix sociétés sont concernées.

223. IRISL est une partie qui succombe au sens de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, lu en combinaison avec l’article 184, paragraphe 1, du même texte, et doit dès lors être condamnée à supporter ses propres dépens. Les autres requérantes sont les parties ayant obtenu gain de cause au sens de ces dispositions.

224. Le Conseil a obtenu gain de cause à l’égard d’IRISL, mais a succombé à l’égard des dix autres sociétés. En application de l’article 138, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure de la Cour, lu en combinaison avec l’article 184, paragraphe 1, du même texte, je suggère de condamner le Conseil à supporter l’intégralité de ses propres dépens, outre les dépens des dix autres sociétés.

225. En application de l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, lu en combinaison avec l’article 184, paragraphe 1, du même texte, la Commission, qui est intervenue à la cause en soutien du Conseil, devrait supporter ses propres dépens.

Conclusion

226. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je conclus à ce qu’il plaise à la Cour :

– accueillir le premier grief en ce qu’il vise le critère relatif aux personnes et entités i) détenues ou contrôlées par IRISL, ii) agissant pour le compte d’IRISL, ou iii) fournissant des services essentiels à IRISL, prévu à l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413/PESC du Conseil, du 26 juillet 2010, concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant la position commune 2007/140/PESC, et à l’article 23, paragraphe 2, sous e), du règlement (UE)
no 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement (UE) no 961/2010 ;

– annuler sur ce point l’arrêt du Tribunal du 17 février 2017, Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a./Conseil (T‑14/14 et T‑87/14, EU:T:2017:102) ;

– déclarer ce critère invalide ;

– annuler la décision 2013/685/PESC du Conseil, du 26 novembre 2013, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran, ainsi que le règlement d’exécution (UE) no 1203/2013 du Conseil, du 26 novembre 2013, mettant en œuvre le règlement no 267/2012 concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran, dans la mesure où les requérantes autres que Islamic Republic of Iran Shipping Lines sont concernées ;

– déclarer le recours non fondé pour le surplus ;

– condamner Islamic Republic of Iran Shipping Lines à supporter ses propres dépens ;

– condamner le Conseil à supporter ses propres dépens ainsi que les dépens des requérantes autres que Islamic Republic of Iran Shipping Lines, et

– condamner la Commission à supporter ses propres dépens.

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( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Les requérantes sont Islamic Republic of Iran Shipping Lines (ci-après « IRISL ») et dix autres entités (ci‑après les « dix sociétés »). Toutes ces sociétés sont iraniennes, à l’exception de IRISL Europe GmbH qui est une société allemande. Toutes sont actives dans le secteur du transport maritime. Leur nom apparaît sur la page de garde des présentes conclusions et ne sera pas reproduit dans leur contenu. Je ferai ci‑après conjointement référence à IRISL et aux dix sociétés sous le terme
« requérantes ».

( 3 ) Arrêt du 17 février 2017, Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a./Conseil (T‑14/14 et T‑87/14, EU:T:2017:102) (ci‑après l’« arrêt attaqué »).

( 4 ) Décision du Conseil 2013/685/PESC, du 26 novembre 2013, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2013, L 316, p. 46) et règlement d’exécution (UE) no 1203/2013 du Conseil, du 26 novembre 2013, mettant en œuvre le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2013, L 316, p. 1). Je ferai ci‑après conjointement référence à ces mesures sous les termes « décision de réinscription de
2013 ».

( 5 ) Décision 2013/497/PESC du Conseil, du 10 octobre 2013, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2013, L 272, p. 46) et règlement (UE) no 971/2013 du Conseil, du 10 octobre 2013, modifiant le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2013, L 272, p. 1). Je ferai ci‑après conjointement référence à ces mesures sous les termes « critères de 2013 ».

( 6 ) Voir huitième considérant et point 2. Pour un bref aperçu du droit international applicable dans le contexte de la prolifération nucléaire, voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:776, points 2 et suivants).

( 7 ) Le Conseil de sécurité a également autorisé tous les États à saisir les articles interdits par ses précédentes résolutions et à les neutraliser ; interdit la prestation de tous services aux navires qui appartiennent à l’Iran ou sont affrétés par ce pays ; demandé aux États de communiquer toute information disponible sur les transferts à d’autres compagnies ou sur les activités d’[IRISL] qui auraient pu être réalisés dans le but de se soustraire aux sanctions résultant de ses résolutions ;
décidé que les États doivent exiger de leurs nationaux qu’ils fassent preuve de vigilance en particulier lorsqu’ils font affaire avec [IRISL] et toute entité qui leur est liée.

( 8 ) Annexe II des conclusions du Conseil européen du 17 juin 2010 (document EUCO 3/10).

( 9 ) Mis en italique par nos soins.

( 10 ) Les requérantes ont agi avec six autres parties requérantes, qui ne sont pas partie à la procédure qui nous occupe et dont je ne reproduirai dès lors pas les noms.

( 11 ) Arrêt du 16 septembre 2013, Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a./Conseil (T‑489/10, EU:T:2013:453) (ci‑après l’« arrêt du Tribunal de 2013 »).

( 12 ) Le règlement (UE) no 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2012, L 88, p. 1) a abrogé le règlement (UE) no 961/2010 du Conseil, du 25 octobre 2010, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2010, L 281, p. 1), qui a lui-même abrogé le règlement (CE) no 423/2007 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2007, L 103 , p. 1).

( 13 ) Le Tribunal a également rejeté, pour cause d’irrecevabilité, les demandes d’annulation des critères de 2013. Le pourvoi ne conteste pas l’arrêt attaqué sur ce point.

( 14 ) Voir règlement (UE) 2015/1861 du Conseil, du 18 octobre 2015, modifiant le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2015, L 274, p. 1), points 105, 125, 128, 129, 142, 155, 239, 251, 264, 265 et 290 de la section II de l’annexe au règlement d’exécution (UE) 2015/1862 du Conseil, du 18 octobre 2015, mettant en œuvre le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2015, L 274,
p. 161), et article 1er, paragraphe 16, de la décision (PESC) 2015/1863 du Conseil, du 18 octobre 2015, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2015, L 274, p. 174).

( 15 ) Voir points 11 et 30 des présentes conclusions.

( 16 ) Considérant 9 de la décision 2015/1863.

( 17 ) Considérants 5 et 6 du règlement 2015/1861.

( 18 ) Considérant 14 de la décision 2015/1863.

( 19 ) Conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Gul Ahmed Textile Mills/Conseil (C‑100/17 P, EU:C:2018:214, points 25 à 49).

( 20 ) Voir conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Gul Ahmed Textile Mills/Conseil (C‑100/17 P, EU:C:2018:214, points 42 et 45).

( 21 ) Les critères d’appréciation de l’intérêt à agir, envisagé en tant que condition de recevabilité d’une action au moment de son introduction, ne devraient pas être différents du contrôle de la persistance de l’intérêt à l’issue du pourvoi. Sur cette question, je rejoins le point de vue exprimé par l’avocat général Mengozzi dans les conclusions dans l’affaire Bank Mellat/Conseil (C‑430/16 P, EU:C:2018:345, point 28).

( 22 ) Dans une telle situation, la Cour doit apprécier la persistance de l’intérêt à agir du requérant in concreto, en tenant compte, notamment, des conséquences de l’illégalité alléguée et de la nature du préjudice prétendument subi. Voir arrêt du 23 décembre 2015, Parlement/Conseil (C‑595/14, EU:C:2015:847, point 18 et jurisprudence citée).

( 23 ) Dans cette affaire, à la suite de l’annulation de mesures individuelles de gel des avoirs, la requérante a contesté les mesures applicables à titre général aux institutions financières. L’avocat général Mengozzi a relevé que les deux trains de mesures s’appliquaient simultanément à la requérante et que les mesures individuelles avaient des effets plus profonds sur sa situation. Il a par conséquent conclu qu’elle n’avait pas d’intérêt à l’annulation des mesures générales moins sévères, dont
les effets n’affectaient en pratique pas sa situation. La Cour a retenu cette analyse dans son arrêt du 6 septembre 2018, Bank Mellat/Conseil (C‑430/16 P, EU:C:2018:668, points 61 et 62).

( 24 ) Voir, par analogie, arrêt du 28 mai 2013, Abdulrahim/Conseil et Commission (C‑239/12 P, EU:C:2013:331, points 70 à 72).

( 25 ) Arrêt du 6 septembre 2018, Bank Mellat/Conseil (C‑430/16 P, EU:C:2018:668, points 54 à 59).

( 26 ) Voir arrêt du 31 mars 1998, France e.a./Commission (C‑68/94 et C‑30/95, EU:C:1998:148, point 74).

( 27 ) En ce sens, voir arrêt du 19 avril 2012, Artegodan/Commission (C‑221/10 P, EU:C:2012:216, point 80 et jurisprudence citée). Voir également conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Bank Mellat/Conseil (C‑430/16 P, EU:C:2018:345, point 43).

( 28 ) Arrêt du 10 juin 1986, Usinor/Commission (81/85 et 119/85, EU:C:1986:234, point 13).

( 29 ) Je relève que, à ce moment-là, la procédure devant le Tribunal était pendante. Il est surprenant que, alors que l’arrêt attaqué est postérieur à l’entrée en vigueur de ces mesures, le Tribunal n’ait mentionné ni ces mesures ni leurs effets sur la situation juridique des requérantes et, en particulier, sur l’intérêt persistant de ces dernières à poursuivre la procédure. Cela ne vicie cependant pas en soi l’arrêt attaqué, dès lors que celui‑ci est nécessairement, bien qu’implicitement, fondé
sur la prémisse que les requérantes ont justifié d’un tel intérêt tout au long de la procédure.

( 30 ) Arrêt du 16 février 2017, Brandconcern/EUIPO et Scooters India (C‑577/14 P, EU:C:2017:122, point 37 et jurisprudence citée).

( 31 ) IRISL et Irano Misr Shipping Co. ont été inscrites sur la base des critères supplémentaires, alors que les autres requérantes ont été inscrites sur la base des critères préexistants. En outre, Rahbaran Omid Darya Ship Management Co. a également été inscrite sur la base d’un critère nouvellement créé.

( 32 ) Voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 120), et arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil (C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 41).

( 33 ) Arrêt du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C‑440/14 P, EU:C:2016:128, point 77).

( 34 ) À cet égard, voir arrêt du 16 juillet 2014, National Iranian Oil Company/Conseil (T‑578/12, non publié, EU:T:2014:678, point 108 et jurisprudence citée). Cet arrêt a été confirmé sur pourvoi par l’arrêt du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C‑440/14 P, EU:C:2016:128).

( 35 ) Voir point 63 de l’arrêt attaqué.

( 36 ) Arrêt du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C‑440/14 P, EU:C:2016:128, point 53), mise en italique par nos soins.

( 37 ) Conformément à l’article 3, paragraphe 5, TUE, dans ces relations, l’Union contribue à la paix, à la sécurité et au strict respect et au développement du droit international, notamment au respect des principes de la charte des Nations unies. La PESC inclut le soutien aux principes du droit international [article 21, paragraphe 2, sous b), TUE] la préservation de la paix, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité internationale, conformément aux buts et aux principes de la
charte des Nations unies [article 21, paragraphe 2, sous c), TUE].

( 38 ) Voir points 4 et suivants.

( 39 ) À cet égard, voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 75), et ordonnance du 1er décembre 2015, Georgias e.a./Conseil et Commission (C‑545/14 P, non publiée, EU:C:2015:791, point 33).

( 40 ) À l’origine, le critère était que ces personnes et entités devaient avoir participé ou avoir été directement associées aux activités nucléaires de l’Iran [article 7, paragraphe 2, du règlement (CE) no 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2007, L 103, p. 1]. Ce critère a été étendu pour la première fois en 2010 [article 16, paragraphe 2, du règlement (UE) no 961/2010 du Conseil, du 25 octobre 2010, concernant l’adoption
de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement (CE) no 423/2007 (JO 2010, L 281, p. 1)]. De nombreuses autres extensions ont eu lieu depuis lors.

( 41 ) Considérant 2 de la décision du Conseil 2013/497 et considérant 2 du règlement du Conseil no 971/2013.

( 42 ) Voir, par analogie, arrêt du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C‑440/14 P, EU:C:2016:128, point 80).

( 43 ) Arrêts du 13 mars 2012, Tay Za/Conseil (C‑376/10 P, EU:C:2012:138, point 55) (dirigeants de certaines entreprises associés aux dirigeants des pays tiers concernés), du 22 septembre 2016, NIOC e.a./Conseil (C‑595/15 P, non publié, EU:C:2016:721, points 89 et 90) (« appartenir ou être contrôlé par » une personne soumise aux mesures restrictives), et du 28 mars 2017, Rosneft (C‑72/15, EU:C:2017:236, points 82 et suivants) (entités exerçant une activité économique dans un secteur spécifique).

( 44 ) Arrêt du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil (C‑380/09 P, EU:C:2012:137, points 40 et 41).

( 45 ) Point 67 de l’arrêt attaqué.

( 46 ) Arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a. (C‑72/11, EU:C:2011:874, point 44).

( 47 ) Arrêts du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 83), et du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C‑440/14 P, EU:C:2016:128, point 80).

( 48 ) Arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a. (C‑72/11, EU:C:2011:874, point 47).

( 49 ) Voir, par analogie, arrêt du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil (C‑380/09 P, EU:C:2012:137, point 57).

( 50 ) Voir, par analogie, arrêt du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C‑440/14 P, EU:C:2016:128, point 86). Voir également ordonnances du 1er décembre 2015, Georgias e.a./Conseil et Commission (C‑545/14 P, non publiée, EU:C:2015:791, point 34), et du 4 avril 2017, Sharif University of Technology/Conseil (C‑385/16 P, non publiée, EU:C:2017:258, points 59 à 61).

( 51 ) Voir points 20 et 27 des présentes conclusions. Je relève que, si le libellé du critère pertinent contenu dans le règlement no 9712013 est clair et sans équivoque, le libellé de la décision 2013497 (que la première mesure est censée mettre à exécution) ne l’est pas. Cette décision utilise de manière répétée le pronom « leur », dont le point de référence est ouvert à l’interprétation, tout comme, par conséquent, le champ d’application du critère. Je ne développerai pas cet argument plus avant
dès lors qu’aucun moyen ne soulève cette question.

( 52 ) Arrêt du 20 février 2013, Melli Bank/Conseil (T‑492/10, EU:T:2013:80, point 55). Cet arrêt a été confirmé sur pourvoi par l’arrêt du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil (C‑380/09 P, EU:C:2012:137).

( 53 ) Arrêt du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil (C‑380/09 P, EU:C:2012:137, points 39 et 75 à 79), et du 20 février 2013, Melli Bank/Conseil (T‑492/10, EU:T:2013:80, points 55 et 56).

( 54 ) Voir points 14 à 19 des présentes conclusions. Bien que le Tribunal ait considéré que l’inscription d’IRISL en 2010 était illégale, il a maintenu cette inscription en vigueur jusqu’au 26 novembre 2013 (voir arrêt du Tribunal de 2013, point 82). Il s’ensuit que, à la date de l’adoption des critères de 2013, le gel des avoirs appartenant à IRISL était en place et le Conseil pouvait par conséquent justifier le critère visant à contrer son contournement, même si ce n’était que pour un peu plus
d’un mois.

( 55 ) Certes, le considérant 7 de cette décision offre des bases aux critères d’inscription établis à l’article 20, paragraphe 1, sous a), du même texte, en permettant au Conseil de geler les avoirs des entités de l’IRISL désignées par le Conseil de sécurité dans l’annexe III de sa résolution 1929 (2010). Cependant, cette annexe ne désigne aucune des requérantes (voir points 9 et 10 des présentes conclusions). Ce considérant ne pourrait manifestement pas constituer le fondement de l’article 20,
paragraphe 1, sous b), de cette décision, qui instaure un régime de sanctions restrictives distinct et complémentaire, propre à l’Union européenne, pour d’autres entités (en ce compris les requérantes).

( 56 ) Arrêts du 18 juin 2015, Estonie/Parlement et Conseil (C‑508/13, EU:C:2015:403, point 60), et du 3 mars 2016, Espagne/Commission (C‑26/15 P, non publié, EU:C:2016:132, points 30 et 31), entre autres.

( 57 ) Arrêts du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission (C‑350/88, EU:C:1990:71, point 16 et jurisprudence citée), et du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba (C‑417/11 P, EU:C:2012:718, point 53 et jurisprudence citée).

( 58 ) Voir points 4 à 19 des présentes conclusions.

( 59 ) Arrêt du Tribunal de 2013, point 67.

( 60 ) Arrêt du 29 janvier 2013, Bank Mellat/Conseil (T‑496/10, EU:T:2013:39, point 42). Dans son analyse, le Tribunal a tenu compte de l’arrêt de la Cour EDH du 13 décembre 2007, Compagnie de navigation de la République islamique d’Iran c. Turquie (ECLI:CE:ECHR:2007:1213JUD004099898, § 79 et 80).

( 61 ) Arrêt du 4 juin 2014, Sedghi et Azizi/Conseil (T‑66/12, non publié, EU:T:2014:347, point 69).

( 62 ) Arrêt du Tribunal de 2013, point 21.

( 63 ) Voir point 13 des présentes conclusions.

( 64 ) Arrêt du 25 juin 2010, Imperial Chemical Industries/Commission (T‑66/01, EU:T:2010:255, points 196 à 198).

( 65 ) Ordonnance du 28 novembre 1996, Lenz/Commission (C‑277/95 P, EU:C:1996:456, point 50).

( 66 ) Arrêt du 15 mars 2018, Deichmann (C‑256/16, EU:C:2018:187, point 87) (mise en italique par nos soins).

( 67 ) Conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Commission/McBride e.a. (C‑361/14 P, EU:C:2016:25, point 70).

( 68 ) En ce qui concerne le second grief, j’examinerai cet argument plus en détail aux points 117 à 128.

( 69 ) Arrêt du 6 juin 2013, Ayadi/Commission (C‑183/12 P, non publié, EU:C:2013:369, point 18).

( 70 ) Arrêt du 14 septembre 1999, Commission/AssiDomän Kraft Products e.a. (C‑310/97 P, EU:C:1999:407, points 50 et 56).

( 71 ) Arrêt du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission (97/86, 99/86, 193/86 et 215/86, EU:C:1988:199, point 29). Les conséquences d’une décision judiciaire précédente identifiées dans ce passage semblent constituer des expressions spécifiques du principe plus général de l’état de droit, plutôt que des effets du principe d’autorité de la chose jugée en tant que tel.

( 72 ) Voir point 18 des présentes conclusions.

( 73 ) Voir point 80 de l’arrêt attaqué. Si le Tribunal avait annulé les critères, il aurait naturellement été illégal que le Conseil les maintienne et, a fortiori, qu’il réinscrive certaines entités sur les listes en se basant sur eux.

( 74 ) Voir point 77 de l’arrêt du Tribunal de 2013.

( 75 ) Voir point 82 de l’arrêt attaqué. J’examine la question de savoir si ces principes ont empêché le Conseil de réinscrire certaines des requérantes sur la base des mêmes critères et des mêmes faits que ceux à la base de l’inscription de 2010 dans le cadre du troisième moyen du second grief (voir points 195 et suivants des présentes conclusions).

( 76 ) Voir à cet égard arrêt du 26 février 2013, Åkerberg Fransson (C‑617/10, EU:C:2013:105, point 34).

( 77 ) Arrêt du 5 juin 2012, Bonda (C‑489/10, EU:C:2012:319, point 37).

( 78 ) En 2013, IRISL a été inscrite sur la base du nouveau critère relatif à la violation des résolutions du Conseil de sécurité. Irano Misr Shipping Co. et Rahbaran Omid Darya Ship Management Co. ont été inscrites sur la base du nouveau critère relatif à la fourniture de services essentiels à IRISL. Dans le cas de cette dernière société, ce nouveau critère était lié en parallèle à l’« ancien » critère d’action pour le compte de IRISL. Les autres requérantes ont été inscrites en 2010 et en 2013 sur
la base de critères essentiellement identiques.

( 79 ) Arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a. (C‑72/11, EU:C:2011:874, point 44).

( 80 ) La Cour a notamment fait observer que les différentes dispositions des actes instaurant des mesures de gel des avoirs dans le contexte du programme de prolifération nucléaire de l’Iran sont rédigées de manière générale, sans référence à des comportements préalables à une décision de gel des fonds (en ce sens, voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 85).

( 81 ) Arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil (T‑390/08, EU:T:2009:401, point 111).

( 82 ) Arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil (T‑390/08, EU:T:2009:401, point 68), cité par l’avocat général Bot dans ses conclusions dans l’affaire Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:470, point 106).

( 83 ) Arrêt attaqué, point 192, dans lequel le Tribunal renvoie à l’arrêt du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission (C‑67/09 P, EU:C:2010:607, point 77).

( 84 ) Ces mesures sont imposées au titre de la position commune du Conseil du 27 décembre 2001 relative à l’application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme (2001/931/PESC) (JO 2001, L 344, p. 93), telle que modifiée.

( 85 ) En ce sens, voir conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Conseil/LTTE (C‑599/14 P, EU:C:2016:723, points 77 et suivants et en particulier le point 79).

( 86 ) Voir points 110 à 112 des présentes conclusions.

( 87 ) Ce principe, consacré par l’article 49, paragraphe 1, de la Charte, est l’expression spécifique du principe de sécurité juridique dans le contexte de l’imposition de sanctions pénales.

( 88 ) Ce principe est le corollaire du principe consacré par l’article 49 de la Charte, selon lequel les délits et les peines doivent être établies par la loi.

( 89 ) Point 191 de l’arrêt attaqué, citant l’arrêt du 16 décembre 2010, Kahla Thüringen Porzellan/Commission (C‑537/08 P, EU:C:2010:769, point 63).

( 90 ) Voir, par exemple, arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission (C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, points 125 et 126).

( 91 ) En ce sens, arrêt du 30 mai 2017, Safa Nicu Sepahan/Conseil (C‑45/15 P, EU:C:2017:402, point 49).

( 92 ) Voir, par exemple, arrêt du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e.a./Commission (C‑131/03 P, EU:C:2006:541, points 82 à 84).

( 93 ) Arrêt du Tribunal de 2013, points 80 à 83.

( 94 ) Arrêt du 15 mai 2008, Espagne/Conseil (C‑442/04, EU:C:2008:276, point 49 et jurisprudence citée).

( 95 ) Voir points 67 et 68 des présentes conclusions.

( 96 ) J’ai examiné ces questions dans le cadre du premier moyen (points 72 et suivants des présentes conclusions).

( 97 ) Arrêt du 14 octobre 1999, Atlanta/Communauté européenne (C‑104/97 P, EU:C:1999:498, points 34 à 38).

( 98 ) Arrêt du 23 avril 2013, Gbagbo e.a./Conseil (C‑478/11 P à C‑482/11 P, EU:C:2013:258, point 56).

( 99 ) Arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 336).

( 100 ) À cet égard, voir arrêt du 16 avril 2015, TMK Europe (C‑143/14, EU:C:2015:236, point 18). Il est de jurisprudence constante que l’article 277 TFUE est l’expression d’un principe général assurant à toute partie le droit de contester par voie incidente, en vue d’obtenir l’annulation d’une décision qui lui est adressée, la validité des actes réglementaires qui forment la base juridique de celle-ci, si cette partie ne disposait pas du droit d’introduire, en vertu de l’article 263, quatrième
alinéa, TFUE, un recours direct contre ces actes (arrêt du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission, 92/78, EU:C:1979:53, point 39). Dès lors qu’IRISL a introduit son recours en annulation devant le Tribunal le 7 février 2014, c’est‑à‑dire trois mois et vingt‑six jours après la publication des critères de 2013 au Journal officiel, la contestation de ces critères dans ce recours aurait été hors délais.

( 101 ) Voir à cet égard arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 69).

( 102 ) Voir points 101 et 102 de l’arrêt attaqué.

( 103 ) Pour les considérations générales à cet égard, voir points 71 et suivants. Le point 78 aborde plus spécifiquement la question pour le premier critère, alors que les points 82 et 83 font de même pour le dernier critère.

( 104 ) En ce qui concerne la réputation, voir arrêt du 7 avril 2016, Central Bank of Iran/Conseil (C‑266/15 P, EU:C:2016:208, points 53 et 54). En ce qui concerne les activités commerciales, voir arrêt du 12 mai 2016, Bank of Industry and Mine/Conseil (C‑358/15 P, non publié, EU:C:2016:338, points 55 à 57).

( 105 ) Voir point 50 des présentes conclusions.

( 106 ) Arrêt du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil (C‑380/09 P, EU:C:2012:137, points 40 et 41) (mise en italique par nos soins).

( 107 ) Arrêt du 5 mars 2015, Ezz e.a./Conseil (C‑220/14 P, EU:C:2015:147, point 77).

( 108 ) Arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 44 et jurisprudence citée).

( 109 ) Arrêt du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/OHMI et centrotherm Clean Solutions (C‑610/11 P, EU:C:2013:593, point 39).

( 110 ) En fonction des circonstances concrètes de l’affaire, le Conseil peut parfois, mais pas toujours, être tenu d’invoquer de nouvelles preuves. À cet égard, voir arrêt du 26 juillet 2017, Conseil/LTTE (C‑599/14 P, EU:C:2017:583, points 52 à 54).

( 111 ) Arrêt attaqué, point 117.

( 112 ) Arrêt attaqué, points 116 à 132.

( 113 ) Arrêt attaqué, points 135 à 164.

( 114 ) Arrêt attaqué, point 117. À cet égard, voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi (C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 156).

( 115 ) Arrêt du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil (C‑548/09 P, EU:C:2011:735, point 47 et jurisprudence citée).

( 116 ) Arrêt du 18 juin 2015, Ipatau/Conseil (C‑535/14 P, EU:C:2015:407, point 26). Bien que cette jurisprudence porte sur le maintien de mesures restrictives plutôt que sur une inscription initiale, elle est pertinente en l’espèce : par la décision de réinscription de 2013, le Conseil a maintenu les mesures restrictives préexistantes, même si, en ce qui concerne trois requérantes (IRISL, Irano Misr Shipping Co. et Rahbaran Omid Darya Ship Management Co.), il l’a fait sur la base d’un nouveau
critère.

( 117 ) Arrêt attaqué, points 170 à 180.

( 118 ) Voir note 78.

( 119 ) Voir points 107 et suivants.

( 120 ) Voir points 93 et suivants.

( 121 ) Voir points 117 à 128.

( 122 ) S’agissant du critère de contrôle juridictionnel de la légalité interne à cet égard, voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi (C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119).

( 123 ) Arrêt du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa (C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 82).

( 124 ) Voir jurisprudence citée à la note 114.

( 125 ) Voir mon analyse des effets de l’arrêt du Tribunal de 2013 aux points 103 et 106. La situation est par conséquent fondamentalement différente de celle analysée par l’avocat général Tanchev dans ses conclusions dans l’affaire National Iranian Tanker Company/Conseil (C‑600/16 P, EU:C:2018:227, points 96 à 102).

( 126 ) Arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 374).

( 127 ) En ce sens, voir arrêt du 23 octobre 2008, People’s Mojahedin Organization of Iran/Conseil (T‑256/07, EU:T:2008:461, point 75), qui n’a pas fait l’objet d’un pourvoi, dans lequel le Tribunal s’est référé aux constatations figurant au point 65 de l’arrêt du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil (T‑228/02, EU:T:2006:384) par lequel le Tribunal a annulé une inscription antérieure de l’entité concernée.

( 128 ) Arrêts du 13 novembre 2014, Hamcho et Hamcho International/Conseil (T‑43/12, non publié, EU:T:2014:946, point 108), et du 26 octobre 2016, Hamcho et Hamcho International/Conseil (T‑153/15, EU:T:2016:630, point 66), qui n’ont pas fait l’objet d’un pourvoi.

( 129 ) Voir points 140 et 141.

( 130 ) Par analogie, arrêt du 6 mars 2003, Interporc/Commission (C‑41/00 P, EU:C:2003:125, point 31). Cela découle du fait que l’acte annulé est éliminé de l’ordre juridique et l’auteur de cet acte est placé dans la situation initiale en vue de l’adoption d’un acte de remplacement.

( 131 ) Arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi (C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119), et du 14 mars 2017, Bank Tejarat/Conseil (T‑346/15, non publié, EU:T:2017:164, point 38).

( 132 ) Voir point 50.

( 133 ) Arrêt du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa (C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 122).

( 134 ) Voir points 67 et 68.

( 135 ) Arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 126).

( 136 ) Voir points 159 et suivants.

( 137 ) En ce qui concerne le contexte de ces mesures, voir points 63, 66 et 67 de l’arrêt attaqué ; en ce qui concerne les objectifs poursuivis par les mesures en cause, voir points 68 à 71 et 74 à 76 ; en ce qui concerne le principe de proportionnalité, considéré de manière générale, voir points 72, 73 et 77 ; et enfin, en ce qui concerne les conséquences soi-disant disproportionnées des mesures en cause sur le droit de propriété et les affaires des requérantes, voir points 204 à 210 de l’arrêt
attaqué.

( 138 ) Voir points 174 et 175.

( 139 ) En ce sens, voir, par analogie, arrêt du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil (C‑380/09 P, EU:C:2012:137, points 77 à 80), dans lesquels la Cour a souligné qu’en procédant à un réexamen ultérieur du point consistant à savoir si « [l’entité répondant au critère de détention] pouvait être amenée, avec une probabilité non négligeable, à contourner l’effet des mesures adoptées à l’encontre de son entité mère », le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-225/17
Date de la décision : 13/09/2018
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la République islamique d’Iran – Gel de fonds et de ressources économiques – Annulation d’une inscription par le Tribunal de l’Union européenne – Modification des critères d’inscription sur une liste de personnes et d’entités dont les avoirs sont gelés – Réinscription – Éléments de preuve portant une date antérieure à la première inscription – Faits connus avant la première inscription – Autorité de la chose jugée – Portée – Sécurité juridique – Protection de la confiance légitime – Principe ne bis in idem – Protection juridictionnelle effective.

Politique étrangère et de sécurité commune

Relations extérieures


Parties
Demandeurs : Islamic Republic of Iran Shipping Lines e.a.
Défendeurs : Conseil de l'Union européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Sharpston

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2018:720

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