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07/06/1991 | CJUE | N°T-19/91

CJUE | CJUE, Ordonnance du Président du Tribunal de première instance du 7 juin 1991., Société d'hygiène dermatologique de Vichy contre Commission des Communautés européennes., 07/06/1991, T-19/91


Avis juridique important

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61991B0019

Ordonnance du Président du Tribunal de première instance du 7 juin 1991. - Société d'hygiène dermatologique de Vichy contre Commission des Communautés européennes. - Référé. - Affaire T-19/91 R.
Recueil de jurisprudence 1991 page II-00265

Sommaire
Parti

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Motifs de l'arrêt
Dispositif

Mots clés

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Référé - Sursis à exécuti...

Avis juridique important

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61991B0019

Ordonnance du Président du Tribunal de première instance du 7 juin 1991. - Société d'hygiène dermatologique de Vichy contre Commission des Communautés européennes. - Référé. - Affaire T-19/91 R.
Recueil de jurisprudence 1991 page II-00265

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif

Mots clés

++++

Référé - Sursis à exécution - Décision de retrait du bénéfice de l' immunité d' amende adressée à une entreprise ayant notifié un accord - Décision non susceptible de faire l' objet d' un sursis à exécution - Absence de préjudice grave et irréparable

( Traité CEE, art . 85 et 185; règlement du Conseil n 17, art . 15, § 6 )

Sommaire

Une décision adoptée par la Commission au titre de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 se limite à faire connaître à l' entreprise à laquelle elle est adressée l' opinion provisoire de la Commission sur la compatibilité d' un accord notifié avec l' article 85 du traité et à mettre fin à la situation d' immunité dont cette entreprise pouvait se prévaloir du fait de la notification de l' accord . Par sa nature même, elle ne comporte en soi aucune injonction ni n' appelle aucune exécution et
n' est donc pas de nature à faire l' objet d' une mesure de sursis à exécution . Elle n' est, par ailleurs, pas susceptible d' entraîner, dans le chef de son destinataire, un préjudice grave et irréparable, dans la mesure où de la perte de l' immunité qui en découle ne peut, en tout état de cause, résulter qu' un préjudice futur, incertain et aléatoire, que l' entreprise concernée est à même d' apprécier et auquel, si elle l' estime approprié, elle peut mettre fin à tout moment .

Parties

Dans l' affaire T-19/91 R,

Société d' hygiène dermatologique de Vichy, société de droit français, établie à Vichy ( France ), représentée par Mes Robert Collin, Marie-Laure Coignard et Jeanne-Marie Henriot-Bellargent, avocats au barreau de Paris, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Decker, 16, avenue Marie-Thérèse,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M . Bernhard Jansen, membre du service juridique, en qualité d' agent, assisté par Me Hervé Lehman, avocat au barreau de Paris, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M . G . Berardis, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l' exécution de la décision 91/153/CEE de la Commission, du 11 janvier 1991, relative à une procédure au titre de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 du Conseil ( IV/31.624-Vichy ),

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

Motifs de l'arrêt

En fait

1 Par requête déposée au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes le 21 mars 1991, enregistrée le 25 mars 1991, la Société d' hygiène dermatologique de Vichy ( ci-après "Vichy ") a introduit, en vertu de l' article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, un recours visant à l' annulation de la décision de la Commission, du 11 janvier 1991, relative à une procédure au titre de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 du Conseil ( IV/31.624-Vichy ).

2 Par acte séparé enregistré au greffe du Tribunal le 24 avril 1991, la requérante a également introduit, en vertu de l' article 83, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, une demande en référé visant à obtenir le sursis à l' exécution de la décision litigieuse .

3 La Commission a présenté ses observations sur la demande en référé le 13 mai 1991 . Les parties ont été entendues en leurs explications orales le 30 mai 1991 .

4 Avant d' examiner le bien-fondé de la présente demande en référé, il convient de rappeler le contexte de la présente affaire et, en particulier, les faits qui ont amené la Commission à adopter la décision du 11 janvier 1991 à l' exécution de laquelle la requérante demande qu' il soit sursis .

5 Les Laboratoires d' application dermatologique de Vichy et Cie, filiale de Vichy, avaient notifié à la Commission, le 26 juin 1985, un système de distribution exclusive en pharmacie d' officine des produits cosmétiques Vichy pour le seul territoire français .

6 Par décision du 9 juin 1987 du conseil de la concurrence français, confirmée par arrêts de la cour d' appel de Paris du 28 janvier 1988 et de la Cour de cassation française du 25 avril 1989, Vichy a été obligée à modifier son système de distribution en France, la distribution exclusive en pharmacie d' officine ayant été considérée comme contraire au droit national et à l' article 85, paragraphe 1, du traité CEE .

7 A la suite des décisions des autorités françaises, Vichy a notifié à la Commission, en date du 29 août 1989, le système de distribution modifié pour la France, ainsi que le système de distribution pour les autres États membres, à l' exception du Danemark, où les produits Vichy ne sont pas distribués . Seul ce dernier système, applicable aux États membres autres que la France, et qui est fondé sur une distribution exclusive en pharmacie d' officine, fait l' objet de la décision de la Commission
déférée au Tribunal .

8 Dans sa décision du 11 janvier 1991, la Commission déclare, après examen provisoire au titre de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d' application des articles 85 et 86 du traité ( JO 13, p . 204, ci-après "règlement n 17 "), qu' en ce qui concerne les dispositions des accords conclus entre Vichy et les grossistes répartiteurs ainsi que les pharmaciens détaillants, dans la mesure où ces accords prévoient la distribution exclusive des
produits cosmétiques Vichy en pharmacie d' officine, les conditions d' application de l' article 85, paragraphe 1, du traité CEE sont remplies et qu' une appplication de l' article 85, paragraphe 3, n' est pas justifiée .

En droit

9 En vertu des dispositions combinées de l' article 185 du traité CEE et de l' article 4 de la décision du Conseil du 24 octobre 1988 instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes, le Tribunal peut, s' il estime que les circonstances l' exigent, ordonner le sursis à l' exécution de l' acte attaqué .

10 L' article 83, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour - applicable mutatis mutandis à la procédure devant le Tribunal jusqu' à l' entrée en vigueur de son propre règlement de procédure, en vertu de l' article 11, troisième alinéa, de la décision du Conseil précitée - prévoit que les demandes relatives à une mesure provisoire visée à l' article 185 du traité CEE doivent spécifier les circonstances établissant l' urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première
vue l' octroi de la mesure à laquelle elles concluent . Les mesures demandées doivent présenter un caractère provisoire en ce sens qu' elles ne doivent pas préjuger de la décision sur le fond .

11 En l' espèce, la requérante fait, en substance, valoir à l' appui de sa demande que la décision de la Commission du 11 janvier 1991, en ce qu' elle lui retire le bénéfice de l' immunité d' amende qui s' attache à la notification de ses accords, constitue une véritable injonction de fait comportant des conséquences extrêmement préoccupantes et entraînant un préjudice grave et irréparable . En effet, ou bien elle poursuit la distribution de ses produits selon les modalités actuelles et elle
risquerait, alors, une amende majorée, prenant en compte, au titre de la durée de l' infraction, celle de la procédure devant le juge communautaire, qu' elle ne maîtrise pas; ou bien elle renoncerait à l' exclusivité de vente de ses produits en pharmacie d' officine et elle serait, alors, contrainte de réorganiser l' ensemble de la politique de distribution de ses produits, ce qui impliquerait un travail et un coût considérables, avec la perspective d' une annulation de la décision de la Commission
et de l' impossibilité de revenir au statu quo ante qui assure une parfaite distribution de ses produits .

12 La requérante soutient, en effet, qu' il existe une forte présomption en faveur du bien-fondé de sa demande principale . A cet égard, Vichy articule plusieurs moyens tenant à la violation des formes substantielles ainsi qu' à la violation du traité, notamment de l' article 85, paragraphes 1 et 3, et des actes pris pour son application .

13 La requérante fait, notamment, valoir, à l' encontre de la décision litigieuse, l' absence de consultation du Comité consultatif prévue par l' article 10, paragraphe 3, du règlement n 17, ainsi que le caractère injustifié de la mesure provisoire adoptée au titre de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 . Elle reproche, en outre, à la Commission de ne pas avoir justifié, dans sa décision, l' existence d' une atteinte sensible à la concurrence et d' une affectation du commerce entre les
États membres . Enfin, la requérante soutient que la décision de la Commission méconnaît le principe d' égalité entre les opérateurs économiques, en ce sens que, du fait de la notification qu' elle a effectuée spontanément et de la décision de la Commission qui a été provoquée par cette notification, elle se trouve placée dans une position moins favorable que celle de ses concurrentes qui n' ont procédé à aucune notification .

14 La Commission, pour sa part, estime, en premier lieu, que la décision attaquée qui n' adresse aucune injonction n' est pas susceptible, en raison de sa nature même, de faire l' objet d' un sursis à exécution et que, par conséquent, la demande introduite par la requérante n' est pas recevable . En second lieu et à titre subsidiaire, la Commission fait également valoir que les conditions définies par la jurisprudence pour qu' une demande de sursis à exécution soit acueillie ne sont pas réunies, la
requérante n' ayant ni établi une présomption du bien-fondé de sa demande principale ni démontré que la décision contestée serait susceptible de lui occasionner un préjudice grave et irréparable . Enfin, la Commission ajoute qu' une décision accordant le sursis sollicité préjudicierait nécessairement au principal et signifierait que toute décision prise en application de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 devrait bénéficier, ipso facto, d' un sursis à exécution . Cela réduirait à néant
les compétences qu' elle tient de cette disposition .

15 L' article 15, paragraphe 5, du règlement n 17 dispose que les amendes prévues au paragraphe 2 de ce même article ne peuvent pas être infligées pour des agissements postérieurs à la notification à la Commission et antérieurs à la décision par laquelle elle accorde ou refuse l' application de l' article 85, paragraphe 3, du traité, pour autant qu' ils restent dans les limites de l' activité décrite dans la notification .

16 En vertu du paragraphe 6 de l' article 15, les dispositions précitées ne sont pas applicables, dès lors que la Commission a fait savoir aux entreprises intéressées que, après examen provisoire, elle estime que les conditions d' application de l' article 85, paragraphe 1, du traité, sont remplies et qu' une application de l' article 85, paragraphe 3, n' est pas justifiée .

17 Il convient de constater que la décision de retrait du bénéfice de l' immunité d' amende se limite à mettre fin à une situation d' immunité dont l' entreprise pouvait se prévaloir, du fait de la notification de l' accord, et à rétablir son destinataire dans la situation juridique qui était la sienne avant qu' il ait notifié l' accord à la Commission . Elle n' implique aucune sanction et n' adresse aucune injonction, en droit ou en fait, à Vichy . De ce fait, l' égalité entre opérateurs
économiques, dont se prévaut Vichy, n' est nullement rompue par la décision en cause .

18 En effet, ainsi que le Tribunal ( première chambre ) l' a jugé dans son ordonnance du 23 janvier 1991, Vereniging Prodifarma/Commission, points 41 et 42 ( T-3/90, Rec . p . II-1 ), bien que, pour les parties à une entente, une telle décision produise des effets juridiques, elle n' a pas pour effet d' empêcher les parties de mettre en oeuvre leur entente . S' il est vrai que le risque de se voir infliger une amende peut les en dissuader, toujours est-il qu' un tel risque est exactement le même que
celui auquel s' expose toute entreprise qui n' aurait pas notifié à la Commission un accord susceptible d' entrer dans le champ d' application de l' interdiction édictée par l' article 85, paragraphe 1, du traité .

19 Ce n' est que si la Commission adoptait, le cas échéant, une décision, en vertu de l' article 3 du règlement n 17, constatant une infraction, par Vichy, aux dispositions de l' article 85, paragraphe 1, que le retrait de l' immunité pourrait être pris en considération pour la détermination de la durée de l' infraction et, partant, pour le calcul du montant de l' amende à infliger . L' entreprise destinataire disposerait, alors, des voies de droit lui permettant de faire encore valoir ses droits
utilement devant le juge communautaire . En tout état de cause, il s' agit d' un préjudice futur, incertain et aléatoire, que l' entreprise destinataire est à même d' apprécier et auquel, si elle l' estime approprié, elle peut mettre fin à tout moment .

20 Il résulte de ce qui précède que, par sa nature même, une décision adoptée par la Commission au titre de l' article 15, paragraphe 6, du règlement n 17 ne comporte en soi aucune injonction et n' appelle aucune exécution . Elle se limite à faire connaître à l' entreprise destinataire de la décision l' opinion provisoire de la Commission sur, en l' occurrence, la compatibilité d' un système de distribution exclusive avec l' article 85 du traité . Par conséquent, une telle décision non seulement n'
est pas susceptible d' entraîner, dans le chef de son destinataire, un préjudice grave et irréparable, mais encore n' est pas de nature à faire l' objet d' une mesure de sursis à exécution .

21 Dès lors, et sans qu' il soit nécessaire d' analyser les moyens invoqués par la requérante à l' appui d' une présomption en faveur du bien-fondé de la demande principale, il y a lieu de constater que les conditions permettant, en droit, l' octroi de la mesure provisoire sollicitée ne sont pas satisfaites et que la demande doit être rejetée .

Dispositif

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

statuant à titre provisoire,

ordonne :

1 ) La demande de mesures provisoires est rejetée .

2 ) Les dépens sont réservés .

Fait à Luxembourg, le 7 juin 1991 .


Synthèse
Numéro d'arrêt : T-19/91
Date de la décision : 07/06/1991
Type d'affaire : Demande en référé - non fondé
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Référé.

Pratiques concertées

Ententes

Concurrence


Parties
Demandeurs : Société d'hygiène dermatologique de Vichy
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:1991:29

Source

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