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02/02/1989 | CJUE | N°128/88

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 2 février 1989., Di Felice contre Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants., 02/02/1989, 128/88


Avis juridique important

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61988C0128

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 2 février 1989. - Di Felice contre Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants. - Demande de décision préjudicielle: Tribunal du travail de Bruxelles - Belgique. - Sécurité sociale - Travailleur

indépendant - Prestations de même nature. - Affaire 128/88.
Recueil de j...

Avis juridique important

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61988C0128

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 2 février 1989. - Di Felice contre Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants. - Demande de décision préjudicielle: Tribunal du travail de Bruxelles - Belgique. - Sécurité sociale - Travailleur indépendant - Prestations de même nature. - Affaire 128/88.
Recueil de jurisprudence 1989 page 00923

Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Nous pouvons, en l' espèce, présenter nos conclusions brièvement, dans la mesure où, malgré certaines difficultés qui ont conduit la juridiction nationale à introduire cette demande de décision préjudicielle, il nous semble possible de répondre aux questions posées en nous fondant sur la jurisprudence antérieure de la Cour, et où il n' y a pas de raison de s' écarter dans cette affaire des principes établis par cette jurisprudence .

Les faits ne sont exposés que de manière sommaire dans l' ordonnance de renvoi, mais il en ressort que M . Olandino Di Felice est né le 28 avril 1924 et a été occupé en Belgique comme travailleur non salarié du 18 novembre 1950 au milieu de l' année 1964 . Il réside actuellement à Pescara, en Italie, et bénéficie d' une pension d' invalidité servie par les autorités italiennes depuis le mois d' avril 1969 . Il a introduit le 24 novembre 1983 une demande en vue de l' octroi au titre de la législation
belge d' une pension de retraite anticipée à partir de l' âge de 60 ans, qu' il a atteint le 28 avril 1984 . L' Institut national belge d' assurances sociales pour travailleurs indépendants (" Institut ") a rejeté sa demande le 24 septembre 1986 . M . Di Felice a introduit le 23 octobre 1986 un recours contre cette décision devant le tribunal du travail de Bruxelles . Cette juridiction a rendu un jugement le 3 septembre 1987, ordonnant de procéder à une nouvelle audience sur la question de savoir si
la personne prétendument désignée par M . Di Felice pour le représenter était compétente pour ce faire, et sur le problème de la nature exacte de la pension d' invalidité italienne dont il bénéficiait . A la suite de la nouvelle audience, cette juridiction a fixé, par jugement du 21 avril 1988, le montant de la pension de retraite due à M . Di Felice au titre de la législation belge à 39 007 BFR par an à compter du 1er mai 1984 . Le calcul de ce montant a été effectué sur la base d' une fraction
portée à 16/45 de carrière complète, compte tenu d' une réduction de 5 % par année d' anticipation avant son 65e anniversaire . Le tribunal a toutefois sursis à statuer sur la question de savoir si cette pension devait réellement être payée, jusqu' à ce qu' il ait levé ses doutes relatifs à l' effet, au regard du droit communautaire de la sécurité sociale, de la législation belge interdisant le cumul des prestations .

L' article 30 bis de l' arrêté royal belge n° 72, du 10 novembre 1967, relatif à la pension de retraite et de survie des travailleurs indépendants, tel que modifié par l' article 9 de l' arrêté royal n° 1, du 26 mars 1981, et l' article 10 de l' arrêté royal n° 34, du 30 mars 1982, dispose :

"Les prestations visées par le présent chapitre ... ne sont payables que si le bénéficiaire n' exerce pas d' activité professionnelle et s' il ne jouit pas d' une indemnité pour cause de maladie, d' invalidité ou de chômage involontaire par application d' une législation de sécurité sociale belge ou étrangère ou d' un statut applicable au personnel d' une institution de droit public international ."

L' article 31 de l' arrêté, tel qu' amendé par l' article 147, paragraphe 2, de la loi du 15 mai 1984, habilite le pouvoir exécutif belge à déterminer, par voie de dérogation à cette disposition, dans quelle mesure les prestations peuvent être cumulées; mais, à la date de l' ordonnance de renvoi dans la présente espèce, aucune détermination de ce type n' avait été effectuée . L' Institut refuse de verser la pension de retraite belge, au motif que l' article 30 bis fait clairement obstacle à l'
admission simultanée au bénéfice de la pension de retraite belge et à celui de la pension d' invalidité italienne .

Le tribunal du travail nourrit cependant une incertitude quant à la conformité d' une telle législation et du refus fondé sur celle-ci avec les règles communautaires en matière de sécurité sociale . Pour dissiper le doute, le tribunal a saisi la Cour de justice des questions préjudicielles suivantes, formulées dans l' ordonnance de renvoi en une question unique divisée en trois parties, mais que nous présenterons pour les besoins de la cause sous forme de trois questions, qui visent à savoir :

"1 ) si le silence encore actuel de la réglementation nationale belge en matière de cumul de pension ( en l' espèce, de retraite personnelle ) de travailleur indépendant avec d' autres prestations de retraite ou avantage qui en tient lieu ( en l' espèce, une indemnité d' invalidité ) accordées en vertu d' un régime de retraite étranger et la pratique que l' organisme attributeur national compétent entend en tirer constituent ou pourraient constituer, ou non, une discrimination exercée en raison de
la nationalité visée par l' article 7, alinéa 1, du traité, qu' elle soit directe ou indirecte ou encore fondée sur la nationalité, par application de critères formellement neutres, mais aboutissant, en fait, au même résultat, à savoir, désavantager les non-ressortissants par l' existence d' un obstacle disproportionné;

2 ) si ce silence de la réglementation nationale et la pratique de l' Institut tombent ou pourraient tomber, ou non, sous le coup des articles 52, alinéa 2, et 53 du traité, et des articles 12, paragraphes 1 et 2, et 43, ainsi que du chapitre 3, et notamment des articles 44, paragraphes 1 et 2, et 46 du règlement ( CEE ) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l' application de la sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui
se déplacent à l' intérieur de la Communauté;

3 ) si, en définitive, la pension d' invalidité italienne ( en l' espèce, 'ab initio' non encore transformée en pension de vieillesse ) et la pension de retraite anticipée belge de travailleur indépendant sont, ou non, à considérer comme des 'prestations de même nature' ."

Seuls la Commission et l' Institut défendeur ont présenté des observations devant la Cour . La partie demanderesse, qui n' a pas non plus comparu devant la juridiction belge, n' a pas présenté d' observations .

L' Institut ne prend position qu' en ce qui concerne la troisième des questions déférées à la Cour . Il affirme que la pension de retraite anticipée belge et la pension d' invalidité italienne non encore transformée en pension de vieillesse ne peuvent pas être considérées comme des prestations de même nature pour l' application de l' article 12, paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 1408/71 ( JO 1971, L 149, p . 2; version mise à jour, JO 1983, L 230, p . 6 ). En conséquence, les clauses de
réduction, de suspension ou de suppression prévues par la législation belge en cas de cumul d' une pension de retraite avec d' autres prestations trouvent à s' appliquer même s' il s' agit de prestations acquises au titre de la législation d' un autre État membre . En outre, il n' a pas été établi avec certitude que la pension d' invalidité italienne sera transformée en pension de vieillesse lorsque M . Di Felice aura atteint l' âge de 65 ans, de sorte que, même à ce moment, l' Institut ne
considérerait pas que la pension d' invalidité présente la même nature que la pension de retraite . L' Institut estime que le règlement ( CEE ) n° 1408/71 ne fait pas obstacle à l' application de l' article 30 bis de l' arrêté royal belge, qui a pour effet d' empêcher le paiement d' une pension de retraite anticipée belge à M . Di Felice .

La Commission fait valoir, en substance, que la matière est régie par les articles 12, paragraphe 2, et 46 du règlement ( CEE ) n° 1408/71 . Les deux prestations en cause sont des "prestations de même nature", au sens de l' article 12, paragraphe 2, qui, par conséquent, exclut l' application de l' article 30 bis de l' arrêté royal belge . Le demandeur a droit à la pension de retraite anticipée belge, dont le montant est à calculer soit en vertu de la loi belge en faisant abstraction de l' article 30
bis de l' arrêté royal, soit conformément à l' article 46, paragraphe 2, du règlement, suivant le plus élevé des deux montants .

Il nous paraît clair que, par les deux premières questions, la juridiction nationale demande en substance si les dispositions belges sont contraires à des dispositions de droit communautaire . La réponse ne peut pas être apportée en ces termes, dans la mesure où cela conduirait la Cour à statuer directement sur le droit national . La réponse doit se limiter à l' interprétation des dispositions pertinentes du droit communautaire . Comme la Cour l' a établi au point 8 des motifs de l' arrêt rendu le
24 septembre 1987 dans l' affaire 37/86, Van Gastel, née Coenen ( Rec . 1987, p . 3589 ), "dans le cadre d' une procédure introduite en vertu de l' article 177 du traité CEE, la Cour n' a pas compétence pour appliquer les règles du droit communautaire à une espèce déterminée et, partant, pour qualifier des dispositions de droit national au regard d' une telle règle . Elle peut toutefois fournir à la juridiction nationale tous éléments d' interprétation relevant du droit communautaire qui pourraient
lui être utiles dans l' appréciation des effets de ces dispositions ".

En ce qui concerne la première question, l' article 30 bis de l' arrêté royal n° 72, tel que modifié, contient une disposition particulièrement extensive, qui non seulement réduit, mais - en l' absence de dérogations - exclut complètement le paiement de prestations en application du droit belge, lorsque des prestations sont servies au titre d' une législation d' un autre État membre . Une telle disposition restreindrait gravement les droits en matière de sécurité sociale des travailleurs migrants à
l' intérieur de la Communauté, si ses effets n' étaient pas circonscrits par des dispositions communautaires, en particulier par les articles 12 et 46 du règlement ( CEE ) n° 1408/71 . Ce règlement est notamment fondé sur l' article 7 du traité CEE, et, à notre avis, tout effet discriminatoire d' une règle nationale contre le cumul est appréhendé par le règlement, et non pas directement par l' article 7 du traité . Il suffit de se référer à la jurisprudence de la Cour selon laquelle, tant qu' une
personne reçoit une pension en vertu de la seule législation nationale, les dispositions du règlement ( CEE ) n° 1408/71 ne font pas obstacle à ce que la législation nationale lui soit appliquée, étant entendu que si l' application de cette législation se révèle moins favorable au travailleur que celle du régime de l' article 46 du règlement, les dispositions de cet article doivent être appliquées : voir, à titre d' exemple, les affaires jointes 116, 117, 119, 120 et 121/80, RWP/Celestre (( Rec .
1981, p . 1737, 1756, lettre a ) du dispositif )). Cette solution, transposée de manière appropriée, peut être retenue en réponse à la première question posée .

En ce qui concerne la deuxième question, nous estimons que les articles 52 et 53 du traité ne sont pas pertinents, dans la mesure où ils se rapportent au droit d' établissement plutôt qu' à la libre circulation des travailleurs, et ne font pas partie de la base juridique du règlement ( CEE ) n° 1408/71 . Les dispositions de ce règlement ont été étendues aux travailleurs non salariés et à leurs familles non pas en application du chapitre du traité relatif au droit d' établissement, mais en vertu du
règlement ( CEE ) n° 1390/81 ( JO 1981, L 143, p . 1 ), fondé sur les articles 2, 7, 51 et 235 du traité . Ce règlement est entré en vigueur le 2 juillet 1982, de sorte que l' ensemble des dispositions du règlement ( CEE ) n° 1408/71 en cause en l' espèce se sont appliquées aux personnes non salariées depuis cette date et étaient, par conséquent, applicables à l' époque considérée dans la présente espèce .

Au regard de ces dispositions, la première démarche consiste à établir le montant de la pension due en application de la législation belge ( y compris des règles contre le cumul ), puis à déterminer le montant de la pension en vertu du droit communautaire (( c' est-à-dire de l' article 46 du règlement ( CEE ) n° 1408/71 )). La disposition de l' article 12, paragraphe 2 - écartant l' application des règles nationales contre le cumul lorsque l' intéressé bénéficie de "prestations de même nature",
conformément aux dispositions de l' article 46 -, intervient au moment de l' application de l' article 46, paragraphe 1, et il faut à ce stade déterminer si la pension de retraite anticipée et la prestation d' invalidité constituent des prestations de même nature . C' est l' objet de la troisième question, qui vise à savoir si la pension d' invalidité italienne et la pension de retraite anticipée belge sont à considérer comme des "prestations de même nature", implicitement au sens de l' article 12,
paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 1408/71, aux termes duquel :

"Les clauses de réduction, de suspension ou de suppression prévues par la législation d' un État membre en cas de cumul d' une prestation avec d' autres prestations de sécurité sociale ou avec d' autres revenus sont opposables au bénéficiaire, même s' il s' agit de prestations acquises au titre de la législation d' un autre État membre ou de revenus obtenus sur le territoire d' un autre État membre . Toutefois, il n' est pas fait application de cette règle lorsque l' intéressé bénéficie de
prestations de même nature d' invalidité, de vieillesse, de décès ( pensions ) ou de maladie professionnelle, qui sont liquidées par les institutions de deux ou plusieurs États membres, conformément aux dispositions des articles 46, 50 et 51, ou de l' article 60, paragraphe 1, sous b )."

Le critère permettant de déterminer si les prestations sont de même nature se trouve dans la jurisprudence antérieure de la Cour . Au point 13 des motifs de l' arrêt Valentini rendu dans l' affaire 171/82 ( Rec . 1983, p . 2157, 2170 ), confirmé au paragraphe 10 de l' arrêt précité Van Gastel, née Coenen, la Cour a jugé que des prestations doivent être considérées comme étant de même nature lorsque leur objet et leur finalité ainsi que leur base de calcul et leurs conditions d' octroi sont
identiques, et que des caractéristiques seulement formelles ne doivent pas être considérées comme élément constitutif pour la classification des prestations . La véritable difficulté que semble avoir rencontrée la juridiction nationale dans la présente espèce consistait à établir la nature exacte de la prestation italienne en cause . La juridiction nationale n' était pas à même d' obtenir des informations supplémentaires sur la nature de la pension italienne auprès du demandeur, qui n' a pas comparu
et ne s' est pas fait représenter devant cette juridiction . Mais il ne faudrait pas perdre de vue que l' institution nationale de sécurité sociale est toujours en mesure d' obtenir des informations appropriées grâce au mécanisme de coopération entre les institutions de sécurité sociale des divers États membres : voir l' article 84 du règlement ( CEE ) n° 1408/71 et l' article 7, paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 574/72, tel que modifié ( JO 1983, L 230, p . 86 ).

Toutefois, la nature de la pension italienne dans la présente espèce ressort à suffisance de l' ordonnance de renvoi pour permettre l' application des critères développés dans la jurisprudence de la Cour, puisque la juridiction nationale affirme dans ses motifs que la prestation italienne était calculée sur la base d' une période d' assurance, à savoir une fraction portée à 8,69/45 de carrière complète, ce qui permet de déduire comment les dispositions du règlement doivent s' appliquer . L'
ordonnance de renvoi ne fournit en revanche aucune réponse quant à la question de savoir si la prestation italienne était calculée sur la base d' une période d' assurance accomplie uniquement en Italie ou sur la base d' une totalisation et d' une proratisation . Mais dans l' une et l' autre hypothèses, il nous paraît clair que les dispositions de l' article 46 doivent s' appliquer, et que les prestations sont des prestations de même nature . Dans la présente affaire, les deux prestations sont
destinées à assurer les moyens de subsistance d' une personne qui n' est plus capable ou n' est plus tout à fait capable de travailler, et le montant des deux prestations est établi, ainsi que nous l' avons exposé, en fonction des périodes d' assurance de la même personne, comme dans l' affaire Van Gastel, née Coenen, points 11 et 12 des motifs . La situation pourrait être différente si l' une des prestations était fondée sur les contributions d' une autre personne, à l' instar des faits dans l'
arrêt Stefanutti rendu le 6 octobre 1987 dans l' affaire 197/85 ( Rec . 1987, p . 3855 ). Dans l' affaire 4/80, D' Amico ( Rec.1980, p . 2951 ), la Cour a estimé que lorsqu' un travailleur bénéficie de prestations d' invalidité transformées en pension de vieillesse en vertu de la législation d' un État membre et de prestations d' invalidité non encore transformées en pension de vieillesse en vertu de la législation d' un autre État membre, la pension de vieillesse et les prestations d' invalidité
sont à considérer comme étant de même nature . A la lettre b ) du dispositif dans l' arrêt Celestre, la Cour a jugé de manière itérative que lorsqu' un travailleur bénéficie de prestations d' invalidité transformées en pension de vieillesse en application de la législation d' un État membre et de prestations d' invalidité non encore transformées en pension de vieillesse en application de la législation d' un autre État membre, la pension de vieillesse et les prestations d' invalidité doivent être
considérées comme présentant la même nature, aux fins de l' article 12, paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 1408/71 .

La présente affaire concerne une pension d' invalidité accordée en vertu de la législation d' un État membre et une pension de retraite anticipée accordée en vertu de la législation d' un autre État membre . Il n' a cependant été suggéré ni dans l' ordonnance de renvoi, ni dans les observations présentées devant la Cour, que le paiement anticipé de la pension de retraite a la moindre répercussion sur le droit applicable . Nous n' estimons pas non plus que tel soit le cas . Le paiement anticipé a
simplement pour effet de réduire le montant de la pension de 5 % par année d' anticipation avant l' âge normal de la retraite en Belgique . Cette absence de répercussion résulte également de manière indirecte de la démarche adoptée par la Cour en ce qui concerne une pension de retraite anticipée allemande dans l' affaire 180/78, Brouwer-Kaune ( Rec . 1979, p . 2111 ). Là encore, il pourrait en être autrement si le régime avait pour finalité de fournir un revenu garanti en cas de retraite anticipée,
régime du type de celui qui était en cause dans l' affaire Valentini, précitée . Mais dans la présente espèce, les prestations constituent une pension de retraite normale payée avec une réduction avant l' âge normal de la retraite .

Par conséquent, les arrêts D' Amico et Celestre suggèrent fortement que les deux types de prestations en cause dans la présente espèce sont "de même nature", au sens de l' article 12, paragraphe 2, et nous estimons, à la lumière de la jurisprudence antérieure, que deux prestations du type de celles qui nous intéressent en l' occurrence doivent être considérées comme des "prestations de même nature" aux fins de l' article 12, paragraphe 2, du règlement . En outre, il nous semble que toute autre
solution, qui autoriserait l' application des dispositions nationales contre le cumul dans une affaire telle que celle dont il s' agit ici, serait totalement incompatible avec les objectifs poursuivis par la réglementation communautaire et l' article 51 du traité .

Il peut alors se révéler nécessaire de procéder à la totalisation et à la proratisation du montant, conformément à l' article 46, paragraphe 2, du règlement, mais aucune question relative à l' interprétation de ces dispositions n' a été déférée à la Cour . Que ce calcul soit ou non nécessaire, le point essentiel réside en ce que les dispositions nationales écartant le cumul des prestations ne peuvent en aucun cas s' appliquer .

Il en résulte que les dispositions nationales contre le cumul ne sont pas applicables et que le montant visé à l' article 46, paragraphe 1, est le montant auquel le travailleur aurait droit au titre de la législation nationale, s' il ne bénéficiait pas d' une pension en vertu de la législation d' un autre État membre ( Celestre, point 12 des motifs de l' arrêt, Rec . p . 1754 ).

En conséquence, nous estimons que les questions qui vous ont été déférées à titre préjudiciel appellent les réponses suivantes :

"1 ) Lorsqu' un travailleur salarié ou non salarié reçoit une pension en vertu de la seule législation nationale, les dispositions du règlement n° 1408/71 ne font pas obstacle à ce que la législation nationale lui soit appliquée intégralement, y compris les règles anticumul nationales, étant entendu que si l' application de cette législation se révèle moins favorable pour le demandeur que celle du régime de l' article 46 du règlement n° 1408/71, les dispositions de cet article doivent être
appliquées .

2 ) Lorsqu' un travailleur salarié ou non salarié bénéficie de prestations de même nature au sens de l' article 12, paragraphe 2, du règlement n° 1408/71, accordées par les institutions d' au moins deux États membres, conformément aux dispositions de l' article 46 du règlement n° 1408/71, les clauses de réduction, de suspension ou de suppression des prestations prévues par la législation d' un État membre sont inapplicables, en vertu de la dernière phrase de l' article 12, paragraphe 2, de ce
règlement . Le montant mentionné à l' article 46, paragraphe 1, dudit règlement correspond alors au montant qui serait accordé à la personne en application de la législation nationale si elle ne bénéficiait pas d' une pension en vertu de la législation d' un autre État membre .

3 ) Lorsqu' un travailleur salarié ou non salarié bénéficie d' une pension de vieillesse en vertu de la législation d' un État membre et d' une pension d' invalidité en vertu de la législation d' un autre État membre, ces prestations doivent être considérées comme étant de même nature au sens de l' article 12, paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 1408/71 ".

(*) Langue originale : l' anglais .


Synthèse
Numéro d'arrêt : 128/88
Date de la décision : 02/02/1989
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Tribunal du travail de Bruxelles - Belgique.

Sécurité sociale - Travailleur indépendant - Prestations de même nature.

Sécurité sociale des travailleurs migrants


Parties
Demandeurs : Di Felice
Défendeurs : Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants.

Composition du Tribunal
Avocat général : Jacobs
Rapporteur ?: Moitinho de Almeida

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1989:54

Source

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