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18/11/1987 | CJUE | N°199/86

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 18 novembre 1987., Raiffeisen Hauptgenossenschaft eG contre Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung (BALM)., 18/11/1987, 199/86


Avis juridique important

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61986C0199

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 18 novembre 1987. - Raiffeisen Hauptgenossenschaft eG contre Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung (BALM). - Demande de décision préjudicielle: Bundesverwaltungsgericht - Allemagne. - Arrêt de déclaration de no

n-validité d'un règlement - Effets - Répétition de l'indu. - Affaire 199/8...

Avis juridique important

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61986C0199

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 18 novembre 1987. - Raiffeisen Hauptgenossenschaft eG contre Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung (BALM). - Demande de décision préjudicielle: Bundesverwaltungsgericht - Allemagne. - Arrêt de déclaration de non-validité d'un règlement - Effets - Répétition de l'indu. - Affaire 199/86.
Recueil de jurisprudence 1988 page 01169

Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . Le Bundesverwaltungsgericht vous pose une série de six questions relatives aux conséquences résultant de la déclaration par la Cour de l' invalidité du règlement n° 563/76 du Conseil, du 15 mars 1976, relatif à l' achat obligatoire de lait écrémé en poudre détenu par les organismes d' intervention et destiné à être utilisé dans les aliments pour animaux ( JO L 67, p . 18 ), notamment en ce qui concerne l' annulation d' une décision fixant une caution ainsi que la libération de cette caution,
prise sur la base du règlement déclaré invalide .

2 . Dans son ordonnance de renvoi, la juridiction nationale se réfère à plusieurs reprises à l' arrêt de la Cour du 13 mai 1981 ( International Chemical Corporation, aff . 66/80, Rec . p . 1191 ).

3 . En ce qui concerne la réponse à donner à ces questions, mon opinion coïncide dans une très large mesure avec celle de la Commission . Aussi voudrais-je me limiter à de brèves observations, en me référant pour le reste à l' argumentation développée par cette institution .

4 . A - La première question porte sur le point de savoir si le droit communautaire comporte une règle selon laquelle une décision fixant une caution

- prise sur la base d' un règlement invalide, le règlement ( CEE ) n° 563/76 du Conseil, du 15 mars 1976, et

- attaquée suivant les voies de recours du droit national, et, partant, qui n' est pas encore devenue définitive,

ne peut pas être annulée alors que, en vertu des règles du droit national, elle devrait l' être en raison de l' invalidité du règlement ( CEE ) n° 563/76 .

5 . Je partage le point de vue de la requérante au principal ainsi que de la Commission qui proposent de donner une réponse négative à cette question .

6 . En effet, ni les principes généraux du droit communautaire ni le règlement n° 563/76 ne comportent une telle règle . Par ailleurs, l' arrêt ICC, précité, de la Cour est muet sur le point de savoir si les actes portant fixation d' une caution, pris sur le fondement du règlement n° 563/76, déclaré non valide, peuvent être annulés .

7 . B - Par sa deuxième question le Bundesverwaltungsgericht demande si le droit communautaire comporte une règle selon laquelle une caution constituée sur la base d' une décision de fixation

- prise sur le fondement d' un règlement invalide, le règlement ( CEE ) n° 563/76, et

- attaquée suivant les voies de recours du droit national, puis annulée en raison de l' invalidité du règlement ( CEE ) n° 563/76,

ne peut pas, néanmoins, être libérée .

8 . Or, il résulte de la jurisprudence de la Cour ( voir arrêt du 12 juin 1980, aff . 130/79, Express Dairy Foods Limited/Intervention Board for Agricultural Produce, Rec . p . 1887 ) que les litiges relatifs à la restitution de montants perçus pour le compte de la Communauté sur la base de règlements communautaires invalides

"relèvent de la compétence des juridictions internes et doivent être tranchés par celles-ci en application de leur droit national, en la forme et au fond, dans la mesure où le droit communautaire n' a pas autrement disposé en la matière" ( point 11 ).

Cela doit valoir logiquement également en ce qui concerne la libération d' une caution dont la fixation n' est pas devenue définitive .

9 . En l' occurrence, le droit communautaire, à savoir l' article 5 du règlement n° 563/76, avait prévu expressément que "pour les contrats conclus avant le jour de l' entrée en vigueur du présent règlement, les acheteurs successifs des produits visés aux articles 2 et 3 ou des produits protéiques issus de leur transformation supportent l' incidence de la charge résultant du régime défini au présent règlement ".

10 . La Cour pouvait donc légitimement partir de l' idée, dans son arrêt ICC, qu' en ce qui concerne ces contrats anciens la répercussion de la charge avait eu lieu, et qu' une restitution de la caution aurait dès lors conduit à un enrichissement sans cause dans le chef des importateurs .

11 . En ce qui concerne les contrats postérieurs au 19 mars 1976, pour lesquels n' existait pas une obligation juridique de répercuter la charge de la caution, on pouvait néanmoins supposer que le système mis en place par le règlement n° 563/76 avait conduit à l' étalement des effets économiques de ces cautions pour autant que la fixation de celles-ci, comme dans l' affaire ICC, n' avait pas été attaquée devant les juridictions internes compétentes avant les arrêts de la Cour constatant la nullité
du règlement .

12 . Une telle présomption de répercussion de la charge ne saurait cependant être établie en ce qui concerne des contrats conclus postérieurement au 19 mars 1976, à propos desquels la décision fixant la caution a été attaquée dans un bref délai suivant les voies de recours du droit national .

13 . Je vous propose dès lors de reprendre la distinction fondée sur la date de conclusion des contrats, proposée par la Commission, mais de modifier un peu la deuxième partie de la réponse en disant pour droit, à propos des contrats "nouveaux", que, si la fixation de la caution a été attaquée suivant les voies de recours du droit national avant les arrêts de la Cour constatant l' invalidité du règlement n° 563/76, puis annulée en raison de l' invalidité de celui-ci, aucun principe de droit
communautaire ne fait obstacle à une libération de la caution .

14 . C - En ce qui concerne la troisième question, je partage également l' opinion de la Commission suivant laquelle, du point de vue du droit communautaire, il est sans importance, aux fins de la libération d' une caution, que celle-ci soit devenue acquise avant ou après le prononcé des arrêts de la Cour du 5 juillet 1977 constatant la non-validité du règlement n° 563/76 . Ce qui compte, c' est la date de conclusion du contrat .

15 . Il me semble d' ailleurs que, dans un cas comme celui en instance devant le Bundesverwaltungsgericht, le problème qui fait l' objet de la troisième question ne saurait guère se poser .

16 . Il résulte de l' article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 677/76 de la Commission, du 26 mars 1976, portant modalités d' application du régime d' achat obligatoire de lait écrémé en poudre prévu par le règlement ( CEE ) n° 563/76 ( JO L 81, p . 23 ) que le "certificat protéine" est valable trois mois à partir de la date de sa délivrance . Par ailleurs, d' après l' article 10, paragraphe 4, sous b ), du même règlement, "la caution reste acquise lorsque l' intéressé ... n' a pas apporté l' une
des preuves visées au paragraphe 1 sous b ), c ), d ), e ) et f ), dans les six mois suivant le dernier jour de validité du certificat protéine ".

17 . Dans ces conditions, une caution déposée le 24 mars 1976 aurait dû être considérée comme "restée acquise" à partir du 24 décembre 1976, c' est-à-dire à une date antérieure aux arrêts de la Cour du 5 juillet 1977 .

18 . Je suis en effet d' avis qu' on pouvait déduire de l' article 10 précité que la caution restait acquise automatiquement lorsque le délai de neuf mois était écoulé et que les conditions pour la libération de la caution n' avaient pas été remplies .

19 . Cette conclusion me semble s' imposer aussi en raison du principe suivant lequel le droit communautaire doit être appliqué uniformément dans toute la Communauté . Il ne saurait dès lors être admis que l' autorité compétente d' un État membre prolonge les délais résultant d' un règlement de la Commission en faisant une "déclaration d' acquisition de la caution" sortant ses effets à une date postérieure à la date limite découlant de ce règlement . Une éventuelle "déclaration d' acquisition" ne
saurait donc être faite qu' à titre d' information, pour constater et non pas pour déclarer la déchéance d' une caution .

20 . Si l' on accepte la thèse du caractère automatique du délai de neuf mois, on est d' ailleurs aussi amené à conclure qu' aucune caution constituée en vertu du règlement n° 563/76 n' a pu être acquise à une date postérieure au 31 juillet 1977, car d' après son article 11 ce règlement n' était applicable qu' aux produits importés avant le 31 octobre 1976 . La durée de validité normale du règlement n° 563/76 était ainsi venue à expiration bien avant les arrêts de la Cour du 5 juillet 1977 qui en
ont constaté la nullité .

21 . Pour les raisons exposées ci-dessus je préfère modifier légèrement la réponse à la troisième question suggérée par la Commission en remplaçant l' expression "caution déclarée acquise" par celle de "caution restée acquise ". La formule proposée est dès lors la suivante :

"Du point de vue du droit communautaire, il est sans importance aux fins de la libération d' une caution que celle-ci soit restée acquise avant ou après le prononcé des arrêts de la Cour de justice du 5 juillet 1977 constatant la non-validité du règlement ( CEE ) n° 563/77 ."

22 . D - Les questions 4 et 5 n' ont été posées que pour le cas où la question 3, sous a ), recevrait une réponse positive . Comme tel n' est pas le cas, une réponse aux questions subséquentes, y compris la question 6, ne s' impose pas .

23 . A titre subsidiaire et à toutes fins utiles, je voudrais cependant signaler qu' il découle des observations faites sous B que les questions 4, sous b ), et 5, sous b ), doivent à mon avis recevoir une réponse positive . En d' autres termes :

- la caution peut devenir acquise alors même qu' un litige est encore pendant quant à la légalité de la décision qui lui sert de base;

- dès que les conditions prévues par les dispositions applicables pour qu' une caution soit acquise sont remplies, les effets juridiques qui en découlent s' exercent automatiquement sans qu' une décision administrative formelle, déclarant la caution acquise, ne soit nécessaire .

24 . Enfin, en ce qui concerne la question 6, qui tend à demander si le droit communautaire comporte une règle établissant les effets juridiques d' une situation dans laquelle la décision ayant servi de base à une caution constituée et déjà acquise est ensuite annulée pour cause d' illégalité, il y a lieu de rappeler encore une fois l' arrêt précité de la Cour du 12 juin 1980 dans l' affaire 130/79, Express Dairy Foods Limited .

Conclusions

25 . En résumé, je propose à la Cour de répondre aux questions posées par le Bundesverwaltungsgericht de la manière suivante :

"1 ) Il n' existe aucune disposition du droit communautaire qui exclurait d' annuler, en conformité avec les règles du droit national, la fixation d' une caution qui a été décidée sur le fondement du règlement ( CEE ) n° 563/76, déclaré non valide par la Cour, et attaquée en temps utile par un recours formé conformément aux règles de procédure du droit national .

2 ) Dans la mesure où les produits protéiques acquis aux conditions du règlement ( CEE ) n° 563/76 ont été revendus sur le fondement de contrats conclus avant l' entrée en vigueur de ce règlement, tout droit à libération des cautions constituées sur la base dudit règlement est privé de fondement pour les motifs énoncés dans l' arrêt rendu le 13 mai 1981 dans l' affaire 66/80 .

Si, en revanche, les produits protéiques achetés moyennant constitution d' une caution ont été revendus sur la base de contrats conclus après l' entrée en vigueur du règlement ( CEE ) n° 563/76, et si la fixation de la caution a été attaquée suivant les voies de recours du droit national avant les arrêts de la Cour constatant l' invalidité dudit règlement, puis annulée en raison de l' invalidité de cet acte, aucun principe de droit communautaire ne fait obstacle à une libération des cautions .

3 ) Du point de vue du droit communautaire, il est sans importance aux fins de la libération d' une caution que celle-ci soit restée acquise avant ou après le prononcé des arrêts de la Cour de justice du 5 juillet 1977 constatant la non-validité du règlement ( CEE ) n° 563/77 ."


Synthèse
Numéro d'arrêt : 199/86
Date de la décision : 18/11/1987
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Bundesverwaltungsgericht - Allemagne.

Arrêt de déclaration de non-validité d'un règlement - Effets - Répétition de l'indu.

Ressources propres

Dispositions financières

Agriculture et Pêche

Produits laitiers


Parties
Demandeurs : Raiffeisen Hauptgenossenschaft eG
Défendeurs : Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung (BALM).

Composition du Tribunal
Avocat général : Mischo
Rapporteur ?: Kakouris

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1987:496

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