Ohadata J-12-198
SAISIE ATTRIBUTION – PLURALITE DE SAISIES – SAISIES A DES DATES DIFFERENTES – RANG DE PAIEMENT SELON LA DATE DES SAISIES PREFERENCE POUR LES CREANCIERS PRIVILEGIES -
Aux termes de l’article 154 de l’Acte uniforme sur le recouvrement simplifié des créances et des voies d’exécution, «l’acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée ainsi que tous ses accessoires, mais pour ce montant seulement, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers. Les sommes sont rendues indisponibles par l’acte de saisie. Cet acte rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation ».
Il résulte de l’interprétation dudit article, que l’acte de saisie, dès l’instant où il est signifié au tiers saisi, emporte cantonnement automatique du montant de la saisie.
L’article 155 du même Acte uniforme précise clairement que «les actes de saisie signifiés au cours de la même journée entre les mains du même tiers sont réputés faits simultanément. Si les sommes disponibles ne permettent pas de désintéresser la totalité des créanciers ainsi saisissants, ceux-ci viennent en concours. La signification ultérieure d’autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement, même émanant de créanciers privilégiés, ne remettent pas en cause cette attribution, sans préjudice des dispositions organisant les procédures collectives... ».
Cette disposition fait clairement une distinction entre deux situations : celle des saisies signifiées au cours de la même journée dont les créanciers viennent en concours lorsque la somme n’est pas suffisante pour les désintéresser tous, car elles sont réputées faites simultanément ; celle où elle donne la priorité au premier créancier saisissant, lorsque la deuxième signification intervient à une date ultérieure, même si ce créancier est privilégié, comme en l’espèce la Direction Générale des Impôts, cette dernière ne devant se contenter que du reliquat disponible.
De toutes les dispositions qui précèdent, il résulte clairement que la société ORANGE Centrafrique devrait payer immédiatement le créancier saisissant puisqu’il y avait un cantonnement automatique et reverser le reliquat, quel que soit le montant, au second créancier même privilégié.
C’est donc à bon droit que le premier juge a ordonné le paiement de ladite somme sur minute dont il convient de confirmer la décision sur ce point.
ARTICLE 154 AUPSRVE ARTICLE 155 AUPSRVE
COUR D’APPEL DE BANGUI, CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE, ARRET CIVIL N° 295 DU 15 DECEMBRE 2010, AFFAIRE Société ORANGE Centrafrique (Me OUADDA DJALE) CONTRE C Ab Ac et B Aa A Ad International -Direction Générale des Impôts
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Appel d’une ordonnance de référé rendue en date du 18 Octobre 2010, par le Tribunal de Grande Instance de Bangui, signifiée le 26 Octobre dont le dispositif suit : «Statuant contradictoirement en matière de référé et en premier ressort ; Au principal : Renvoyons les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ; Mais d’ores et déjà : Vu l’urgence : ordonnons à la société ORANGE Centrafrique de payer à Ae C Ab Ac et B Aa la somme de 19.277.060 F, objet de la saisie attribution du 23 Juin 2010, sous astreinte journalière de 200.000 F à compter de la signification de la présente ordonnance ; ordonnons l’exécution provisoire sur minute ; condamnons la société ORANGE Centrafrique aux dépens».
La Cour d’Appel de Bangui, siégeant en chambre des appels civils et commerciaux en son audience de référé tenue au Palais de Justice de ladite ville le 15 Décembre 2010 à 11 heures du matin et à laquelle siégeaient, Messieurs :
Arsène SENDE, Président de la Chambre Civile et Commerciale ; PRESIDENT Alexis Georges PIALO, Premier Conseiller à la Chambre Civile et Commerciale ; Maurille Fulbert NGHALY, Conseiller à la Chambre Civile et Commerciale ;
MEMBRES Assistés de Maître Magloire Dieudonné MALIKI, Greffier en Chef à la Cour d’Appel de Bangui ; A été rendu l’Arrêt Civil suivant :
ENTRE : Sté ORANGE Centrafrique SA, ayant pour Conseil Me OUADDA DJALE, Avocat à la Cour ; APPELANTE D’UNE PART
ET : C Ab Ac et B Aa, tous de nationalité centrafricaine, ayant pour conseil, Me BOTALO et Me GOLLONDO ;
MEDIA INTERNATIONAL, ayant pour conseil Me MAITOVO, Avocat à la cour ;
Direction Générale des Impôts et des domaines, ayant pour conseil Me BIZON, Avocat à la cour ; INTIMES D’AUTRE PART
Sur requête reçue au Greffe de la Cour d’Appel de Bangui, le 27 Octobre 2010, enregistrée sous le numéro 438/10, La société ORANGE Centrafrique a déclaré formellement relever appel de l’ordonnance de référé rendue le 18 Octobre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de BANGUI, dont le dispositif est rappelé ci–haut et qui fait l’objet du présent appel ;
A l’audience du 7 Décembre 2010, l’affaire a été appelée, retenue et débattue ; Me GBOBOUKO pour le compte de Me OUADDA DJALE a plaidé pour l’appelante ; Me BOTALO et Me GOLLONDO ont plaidé pour C et SOUMBALA ; Me GUERNAS pour le compte de Me MAITOVO a plaidé pour MEDIA International ; Nul pour la Direction Générale des impôts; les débats clos la Cour a mis l’affaire en délibéré pour arrêt être rendu le 14 Décembre 2010, puis prorogé au 15 Décembre 2010, date à laquelle la Cour a rendu l’arrêt contradictoire dont la teneur suit :
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LA COUR :
Ouï, le Conseiller en son rapport; Ouï, Me GBOBOUKO en sa plaidoirie pour l’appelante ; Ouï, Me BOTALO et Me GOLLONDO en les siennes pour C et SOUMBALA ; Ouï, Me GUERNAS pour MEDIA International ; Nul pour la Direction Générale des Impôts ; Vu les pièces du dossier ;
APRES EN AVOIR DELIBERE CONFORMEMENT A LA LOI
Attendu qu’il résulte de la procédure que par exploit d’Agent d’Exécution en date du 24 Septembre 2010, les sieurs C X et B Aa ont saisi le juge des référés aux fins de s’entendre ordonner le paiement de leur créance d’un montant de 19.277.060 F sous astreinte journalière de 3 millions de francs objet d’une saisie attribution pratiquée sur leur débitrice la société MEDIA International entre les mains de la société ORANGE Centrafrique depuis le 23 Juin 2010 et qui s’abstient de payer ladite créance ;
Que le juge des référés du tribunal de grande instance de Bangui a ordonné en date du 18 Octobre 2010 à la société Orange Centrafrique de payer ladite somme sous astreinte journalière de 200.000 F ;
Que cette ordonnance ayant été signifiée le 26 Octobre 2010, le 27 Octobre 2010, la société ORANGE Centrafrique a déclaré relever appel de cette décision ;
Que cet appel est en la forme recevable ;
Attendu que la société ORANGE Centrafrique soutient à l’appui de son appel, qu’elle est débitrice de la somme de 42.288.028 F au profit de la société MEDIA International ;
Qu’en exécution d’un arrêt rendu au profit des anciens salariés de la société MEDIA International, ceux-ci ont pratiqué une saisie attribution entre ses mains le 23 Juin 2010 ;
Qu’une autre créancière de la société MEDIA International, en l’occurrence, la Direction Générale de la Fiscalité des Grandes Entreprises a émis à son encontre un avis à tiers détenteur portant sur une somme de 163.831.196 F à titre d’impôt que la société MEDIA International lui reste devoir ;
Qu’en exécution de cet avis à tiers détenteur, une saisie attribution de créance fut pratiquée le 14 Septembre 2010 entre ses mains au profit de la Direction Générale des Impôts ;
Qu’un certificat de non contestation délivré par le Greffier en Chef en date du 22 Octobre 2010, lui fut signifié le même jour ;
Que se trouvant en présence de deux créanciers privilégiés munis de deux titres exécutoires, elle est en difficulté dans l’exécution des deux titres ;
Qu’elle sollicite de la cour une décision qui lui soit exécutoire afin de départager les deux créanciers ;
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Que c’est à tort que le juge des référés l’a condamné sous astreinte journalière de 200.000 F à compter de la signification de l’ordonnance querellée alors qu’elle n’a opposé aucune résistance et n’a manifesté aucune mauvaise foi face aux deux titres ;
Qu’elle conclut à l’infirmation de l’ordonnance querellée sur ce point et sollicite de la cour de la recevoir en son appel en déclaration d’arrêt commun et de lui donner acte de sa volonté d’exécuter l’arrêt à intervenir dans toutes ses dispositions ;
Attendu que les sieurs C Ab Ac et B Aa rétorquent que la demande de la société ORANGE mérite d’être purement et simplement rejetée ;
Qu’ils soutiennent qu’en exécution d’un arrêt social du 22 Avril 2010, ils ont pratiqué une saisie attribution sur les créances de la société MEDIA International entre les mains de la société ORANGE Centrafrique ;
Que le 23 Septembre 2010, face à la résistance du tiers-saisi, ils ont saisi le juge de l’exécution aux fins de condamnation de l’appelante au paiement de la créance saisie sous astreinte journalière de 3.000.000 F ;
Que se fondant sur les dispositions des articles 34, 164 et 168 de l’Acte uniforme portant recouvrement simplifié des créances et des voies d’exécution, le juge de l’exécution a fait droit à leur demande ;
Qu’ils ont sollicité en première instance une astreinte journalière de 3.000.000 F et que le premier juge ne leur a accordé que 200.000 F ;
Que malgré cela, la société ORANGE Centrafrique s’obstine à ne pas se plier à son obligation légale de payer ;
Qu’afin de vaincre la résistance illicite de la société ORANGE Centrafrique, ils interjettent appel incident et sollicitent de la cour l’infirmation partielle de l’ordonnance querellée sur le montant et de prononcer une astreinte journalière de 3 millions de francs à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
Attendu que le conseil de MEDIA International qui a comparu a déclaré ne pas contester les créances mais que son souci est l’insuffisance des ressources saisies ;
Attendu que le Conseil de la Direction Générale des Impôts qui a pourtant obtenu un renvoi ferme à sa demande n’a pas comparu mais a néanmoins fait parvenir par la suite ses conclusions à la cour ; que la décision à intervenir sera contradictoire à l’encontre de toutes les parties ;
SUR L’ANTERIORITE DE LA SAISIE
Attendu qu’il résulte des débats et des pièces versées au dossier que les sieurs C Ab Ac et B Aa ont pratiqué leur saisie attribution depuis le 23 Juin 2010 ; que c’est le 14 Septembre 2010 que la Direction Générale des Impôts a pratiqué sa saisie ;
Attendu qu’aux termes de l’article 154 de l’Acte uniforme sur le recouvrement simplifié des créances et des voies d’exécution, «l’acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour
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lesquelles elle est pratiquée ainsi que tous ses accessoires, mais pour ce montant seulement, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers. Les sommes sont rendues indisponibles par l’acte de saisie. Cet acte rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation » ;
Qu’il résulte de l’interprétation dudit article, que l’acte de saisie, dès l’instant où il est signifié au tiers saisi, emporte cantonnement automatique du montant de la saisie ;
Que l’article 155 du même acte précise clairement que «les actes de saisie signifiés au cours de la même journée entre les mains du même tiers sont réputés faits simultanément. Si les sommes disponibles ne permettent pas de désintéresser la totalité des créanciers ainsi saisissants, ceux-ci viennent en concours. La signification ultérieure d’autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement, même émanant de créanciers privilégiés, ne remettent pas en cause cette attribution, sans préjudice des dispositions organisant les procédures collectives... » ;
Que cette disposition a clairement fait une distinction entre des saisies signifiées au cours de la même journée dont les créanciers viennent en concours lorsque la somme n’est pas suffisante pour les désintéresser tous, car elles sont réputées faites simultanément. Par contre, cette même disposition donne la priorité au premier créancier saisissant, lorsque la signification intervient à une autre date ultérieure, même si ce créancier est privilégié comme en l’espèce la Direction Générale des Impôts. Cette dernière ne devant se contenter que du reliquat disponible ;
Que de toutes les dispositions qui précèdent, il résulte clairement que la société ORANGE Centrafrique devrait payer immédiatement le créancier saisissant puisqu’il y avait un cantonnement automatique et reverser le reliquat, quel que soit le montant, au second créancier même privilégié ;
Que c’est donc à bon droit que le premier juge a ordonné le paiement de ladite somme sur minute dont il convient de confirmer la décision sur ce point ;
SUR L’APPEL INCIDENT
Attendu que devant la résistance de la société ORANGE Centrafrique, les sieurs C Ab Ac et B Aa ont introduit un appel incident sollicitant le paiement d’une astreinte journalière de 3.000.000 F par jour de retard à compter du prononcé de la décision au lieu de 200.000 F à eux accordés par le premier juge ;
Attendu qu’aux termes de l’article 164 alinéa 1 de l’Acte uniforme portant recouvrement simplifié des créances et des voies d’exécution, «le tiers saisi procède au paiement sur présentation d’un certificat du greffe attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le mois suivant la dénonciation de la saisie (au débiteur saisi) ou sur présentation de la décision exécutoire de la juridiction rejetant la contestant » ;
Que la société MEDIA International n’a élevé aucune contestation ;
Que malgré la décision exécutoire par provision du premier juge lui ordonnant le paiement sous astreinte journalière de 200.000 F aux créanciers saisissants, la société ORANGE
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Centrafrique n’a pas cru devoir se libérer d’une somme dont elle n’est que détentrice précaire, somme placée désormais sous main de justice ;
Attendu qu’en s’obstinant de le faire, elle a manqué à une obligation légale qui fonde l’appel incident des intimés ; qu’il échet d’infirmer partiellement l’ordonnance querellée en ce qui concerne le montant de l’astreinte et son point de départ ;
Attendu que l’article 154 alinéa 3 précité rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie en ce que l’acte de saisie emporte attribution immédiate au profit du créancier ;
Attendu que la demande d’augmentation de l’astreinte bien que justifiée paraît exagérée ; que sur la base des articles 472 et suivants du code de procédure civile, la cour dispose d’éléments d’appréciation suffisants pour fixer à 1.000.000 F le montant de l’astreinte journalière à compter du prononcé de ladite décision par jour de retard.
PAR CES MOTIFS Statuant contradictoirement en matière de référé et en dernier ressort ; En la forme : Déclare l’appel principal et l’appel incident recevables ; Au fond : infirme partiellement l’ordonnance querellé en ce qui concerne le montant de l’astreinte ; Statuant à nouveau : fixe à 1.000.000 F à compter du prononcé de la présente décision le montant de l’astreinte par jour de retard ; Met les dépens à la charge de l’appelante ; Ainsi jugé et prononcé en audience de chambre, les jour, mois et an que dessus ; En foi de quoi, le présent arrêt a été signé après lecture faite par Monsieur le Président et le Greffier.
Le Président Le Greffier