Arrêt n°12/2021 du 11/03/2021 Société SYSAID Faso SA
C/
RESTRA –B SARL
POURVOI EN CASSATION-REQUALIFICATION DE LA DEMANDE D’UNE PARTIE-DECISION ULTRA PETITA (NON)-MOYEN DE PUR DROIT (NON)-REJET.
Ne constitue ni une violation des dispositions de l’article 21 du CPC ni un moyen de pur droit qui requiert les observations préalables des parties conformément à l’article 7 du même code, la requalification d’une demande de dommages et intérêts en reliquat de créances. TEXTES APPLIQUES : articles 7 et 21 du Code de procédure civile
B A Unité – Progrès – Justice ~~~~~~~~~ COUR DE CASSATION CHAMBRE COMMERCIALE ~~~~~~~~~ Arrêt n°12/2021 du 11 mars 2021 Dossier n°961 /2018 ~~~~~~~~~
La Société SYSAID Faso SA C/ RESTRA-B SARL
Décision attaquée : arrêt n°034 du 02 mars 2018 de la Cour d’Appel de Aa;
La Cour de cassation, Chambre commerciale, siégeant en audience publique et ordinaire, tenue le onze mars deux mil vingt et un dans la salle d’audience de ladite Cour à Aa composée de :
Madame HIEN Eudoxie, Présidente PRESIDENT Monsieur BAMOUNI Pascal et Madame KYDICKO Diéinaba tous Conseillers ;
MEMBRES En présence de Monsieur ILBOUDO Wenceslas, Avocat général ;
Assistés de Monsieur SINARE Iliassa, Greffier ;
A rendu l’arrêt après dans la cause ci-après. ENTRE:
La Société SYSAID FASO SA, assistée de Maître Vincent KABORE, Avocat à la Cour Aa Demanderesse d’une part, ET Le Réseau des Travaux du Burkina (RESTRA-B), assisté de Maître Moumouni KOPIHO, et la SCPA THEMIS B Avocats à la cour Aa Défendeur d’autre part,
LA COUR,
Statuant sur le pourvoi en cassation formé le 27 avril 2018 par maître Vincent KABORE au nom et pour le compte de la société SYSAID FASO, contre l’arrêt n° 034 du 02 mars 2018 rendu par la Chambre commerciale de la cour d’appel de Aa, dans l’instance l’opposant à la société RESTRA-B, ayant pour conseil, la SCPA YANOGO et Bobson ;
Vu la loi organique n°018-2016/AN du 26 mai 2016 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement de la Cour de cassation et procédure applicable devant elle ;
Vu la loi 22/99/AN du 18 mai 1999 portant Code de procédure civile ;
Vu le rapport du Conseiller ; Vu les conclusions du Ministère Public ;
Ouï le Conseiller en son rapport ;
Ouï les parties en leurs observations ; Ouï l’Avocat général en ses conclusions et observations ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI Attendu que le pourvoi a été élevé dans les forme et délai requis par les articles 602, 603, 604 et 605 du CPC ; qu’il est donc recevable ;
AU FOND Faits et procédure Attendu qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que dans le cadre de l’exécution du marché public n°31-2013/FDE/GD/PRM, sur appel d’offre restreint du Fond de Développement de l’Electrification (FDE), un contrat de sous-traitance portant électrification de certaines localités du B A a été conclu le 7 novembre 2013 entre la SYSAID FASO et la société RES.TRA.B dont le coût global du marché était de cent soixante-quatre millions six cent cinq quatre cent (164.605.400) francs CFA ; que le délai d’exécution était de quatre mois à compter de la date fixée par l’ordre de service notifié à l’attributaire la RES.TRA.B ; que le contrat a connu un taux d’exécution de 83% équivalent au montant de cent trente-six millions six cent vingt-deux mille quatre-cent quatre-vingt-deux (136.622.482) francs CFA mais l’attributaire n’a reçu qu’un paiement partiel de cent deux millions quatre cent mille (102.400.000) francs CFA ; que les multiples relances en vue de rentrer en possession de la somme restante de trente-quatre millions deux cents vingt-deux mille quatre-vingt-deux (34.222.422) francs CFA ont été vaines ;
Attendu que par acte d’huissier en date du 27 septembre 2016, la société RES.TRA.B a assigné la SYSAID FASO par devant le Tribunal de commerce de Aa à l’effet de voir prononcer la résolution du contrat n°002/AAJ/DC/DE conclu le 7 novembre 2013 entre elle et la société SYSAID FASO, condamner celle-ci à lui payer la somme de soixante-deux millions deux cent cinq mille quatre cent vingt et deux (62.205.422) francs CFA à titre de dommages et intérêts décomposée comme suit :
34.222.422 F CFA au titre de la perte éprouvée ;
27.982.978 F CFA au titre du gain manqué ;
Dire que ladite somme sera productive d’intérêts de droit pour compter de la présente assignation ; condamner la SYSAID FASO à lui payer les frais exposés et non compris dans les dépens d’un montant d’un million de francs CFA outre les dépens ;
Que par jugement n°216 du 06 juillet 2017, le Tribunal a statué en ces termes :
 « - se déclare compétent ;
dit l’action introduite par la société RES.TRA.B recevable et partiellement fondée ;
constate la résolution unilatérale du contrat par la SYSAID, la condamne à lui payer la somme de 39.819.018 F CFA à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal à compter de l’assignation ;
Condamne C à lui payer la somme de 500.000 FCFA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
déboute la société RES.TRA.B du surplus de sa demande ;
et condamne SYSAID aux dépens » ;
Attendu que sur appel interjeté le 4 septembre 2017 par la RES.TRA.B du jugement, la Chambre commerciale de la Cour d’appel de Aa, en son arrêt n°034 du 02 mars 2018, a infirmé partiellement le jugement attaqué en ce qu’il a condamné la société SYSAID à payer à la société RESTRAB la somme de trente-quatre millions deux cent vingt-deux mille quatre cent vingt-deux (34.222.422) francs CFA à titre de perte éprouvée et statuant à nouveau a :
condamné C A à payer à la RESTRAB la somme de trente-quatre millions deux cent vingt-deux mille quatre cent vingt-deux (34.222.422) FCFA comme un élément de dommages et intérêts au titre du reliquat de sa créance sur les travaux exécutés ;
confirmé les autres dispositions du jugement ;
condamné SYSAID FASO aux dépens et à payer à la RESTRAB la somme de cinq cent mille (500.000) F CFA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Que c’est cet arrêt qui a fait l’objet de pourvoi, le 27 avril 2018 par la SYSAID FASO à l’appui des moyens tirés de la violation des articles 21 et 7 du Code de procédure civile ; Discussion des moyens Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 21 du Code de procédure civile (CPC) Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt déféré d’avoir violé l’article 21 du CPC en ce qu’il a requalifié la demande de dommages et intérêts formulée par la RESTRAB au titre de perte éprouvée, en une demande de paiement de reliquat de créance, au motif qu’il est constant que la somme réclamée par RESTRAB au titre de la perte éprouvée correspond en réalité à 21% des travaux par elle réalisés mais non encore payés, alors selon le moyen que le pouvoir que détient le juge de requalifier les faits ne lui permet pas de statuer sur ce qui n’est pas demandé ; Mais attendu que la Cour d’appel en soutenant que la somme de trente-quatre millions deux cent vingt-deux mille quatre cent vingt-deux (34.222.422) F CFA ne peut constituer un élément de dommages et intérêts mais un reliquat de créance résultant des travaux réalisés n’a pas statué en deçà ou au-delà de la demande ; que la Cour n’a procédé qu’à une requalification de la demande qui ne saurait s’analyser en une violation de l’article 21 du CPC ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen tiré de la violation de l’article 7 du CPC Attendu qu’il est reproché à la décision attaquée d’avoir relevé d’office son pouvoir de requalification tel que prévu à l’article 29 du CPC sans soumettre ce moyen à la discussion des parties, motif pris de ce que le fait qu’elle ait réclamé la somme de 34.222.422 F CFA comme un élément de dommages et intérêts à titre de perte éprouvée ne lie pas le juge ;
Attendu qu’il ressort de l’article 7 du CPC que « en toutes circonstances, le juge doit faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office ou sur les explications complémentaires qu’il a demandées, sans avoir au préalable inviter les parties à présenter leurs observations », et que l’article 29 du même Code dispose que « le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.
Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux, nonobstant la dénomination que les parties en auraient proposée. Il ne peut d’office relever les moyens de pur droit, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations ». Qu’alors selon le moyen, les parties doivent présenter leurs observations sur les moyens de droit relevés d’office par le juge en respectant le principe du contradictoire ;
Mais attendu qu’en l’espèce, il ne s’agit pas de moyens de pur droit soulevé par le juge, la juridiction de fond ayant procédé simplement à une requalification des faits sans changer l’objet ; Que la Cour d’appel a donc fait une bonne appréciation de la loi et il convient de rejeter le moyen comme étant mal fondé. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens Attendu que la SYSAID FASO sollicite de la Cour qu’elle condamne la RESTRA-B à lui payer la somme d’un million de francs CFA à ce titre et la RESTRA-B réclame aussi la condamnation de la demanderesse à lui payer la somme de un million cinq cent mille (1.500.000) francs CFA à ce titre en ce qu’elle a été contrainte de faire recours aux services d’un conseil ;
Attendu qu’au sens de l’art 7 de la loi 15-2019 du 2 mai 2019 portant organisation judicaire au B A, le juge, dans toutes les instances, sur demande expresse et motivée condamne la partie perdante à payer à l’autre, une somme qu’il détermine à cet effet ;
Qu’en l’espèce, la demanderesse a succombé au procès et la RESTRA-B ne justifie pas sa demande ; qu’il convient de les en débouter ; PAR CES MOTIFS En la forme Déclare le pourvoi recevable Au fond Le rejette ;
Condamne la société SYSAID FASO SA aux dépens ;
Déboute chacune des parties de sa demande en paiement de frais exposés et non compris dans les dépens ; Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Chambre commerciale de la Cour de cassation du B A les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.