N°80/CJ-DF DU REPERTOIRE ; N°2020-123/CJ-DF DU GREFFE ; ARRET DU 26 AOUÛT 2022 ; AFFAIRE : COLLECTIVITE AH A REPRESENTEE PAR Y Af A CONTRE B X REPRESENTEE PAR Ab X.
Droit foncier — Simple mention que la parole a été donnée à l’intimé — Défaut de mentions des observations faites par l’intimé — Violation du principe du contradictoire — Cassation (Oui).
Exposent leur décision à cassation, les juges d’appel qui n’observent pas ou ne font pas observer le principe du contradictoire et qui se bornent à mentionner que la parole a été donnée à l’intimé sans aucune mention des observations faites par ceux-ci.
La Cour,
Vu l’acte n°122/2020 du 06 novembre 2020 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel la collectivité AH A représentée par Y Af A a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°126/20 rendu le 03 novembre 2020 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;
Vu la loi n° 2020-08 du 23 avril 2020 portant modernisation de la justice ;
Vu la loi n°2022-10 du 27 juin 2022 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2022-12 du O5 juillet 2022 portant règles particulières de procédure applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l'audience publique du vendredi vingt-six août deux mil vingt-deux, le conseiller Vignon André SAGBO en son rapport ;
Ouï le premier avocat général Pierre Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°122/2020 du 06 novembre 2020 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, la collectivité AH A représentée par Y Af A a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°126/20 rendu le 03 novembre 2020 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Que par lettres numéros 0578 et 0584/GCS du 22 janvier 2021 du greffe de la Cour suprême, la demanderesse au pourvoi et son conseil, maître Paul KATO ATITA, ont été invités à consigner dans le délai de quinze (15) jours, sous peine de déchéance et à produire leur mémoire ampliatif dans le délai de deux (02) mois, le tout,
conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1 et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que la consignation a été faite et les mémoires ampliatif et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
Que maître Sakariyaou NOUROU-GUIWA a produit ses observations par lettre en date du 04 février 2022 ;
Que maître Paul KATO ATITA a également produit ses observations suivant ses correspondances des 20 janvier et 07 août
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
Au fond
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date à Agblangandan, commune de Sèmè-Podji du 08 avril 1999, la collectivité AH A représentée par Y Af A a attrait la hoirie Aj Ah X représentée par Ab X par devant le tribunal de première instance de première classe de Porto-Novo en confirmation de son droit de propriété sur les parcelles relevées à l’état des lieux sous les numéros 5802, 5803, 5813, 5814 et 5815 du lotissement d’Agblangandan ;
Que la juridiction saisie, après avoir constaté entre autres « que la famille X, par cette tentative de règlement à l’amiable, reconnaît implicitement le droit de propriété de la collectivité AH A sur le domaine litigieux »,
a confirmé par jugement n°11/2C/14 rendu le 21 mars 2014 « le droit de propriété de la collectivité AH A sur les parcelles relevées à l’état des lieux du lotissement d’Agblangandan sous les numéros 5802, 5803, 5813, 5814 et 5815, lesquelles parcelles sont issues du domaine litigieux » ;
Que sur appel de la B X, la cour d'appel de Cotonou a, par arrêt n°126/20 du 03 novembre 2020, annulé la décision querellée puis, évoquant et statuant à nouveau, a confirmé «le droit de propriété de AG X, Ag X, veuve Aa X, Ae Ac X et Ai C née Z Ad respectivement sur les parcelles en cause » ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le moyen unique tiré de la violation du principe du contradictoire
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué d’avoir violé le principe du contradictoire en ce que ledit arrêt a été rendu sans que le demandeur au pourvoi n’ait été avisé ; et que le 03 novembre 2020, date à laquelle ledit arrêt a été rendu n’est pas celle du 08 décembre 2020 communiquée préalablement au demandeur au pourvoi comme date du délibéré, alors que, selon le moyen, le vice tiré du défaut du contradictoire est un motif sérieux de cassation ;
Qu'en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges de la cour d’appel ont violé le principe du contradictoire exposant de ce fait leur décision à cassation ;
Attendu en effet que le principe du contradictoire est un principe fondamental du procès équitable ;
Que l'examen de la carte judiciaire du dossier de la procédure révèle qu’à l'audience du 04 août 2020, le dossier a été évoqué pour être plaidé, à défaut pour être mis en délibéré ;
Qu’advenue la date du 04 août 2020, le dossier a été mis en délibéré pour être vidé le 03 novembre 2020 ;
Que les feuilles de notes d’audience qui devraient normalement porter les mêmes mentions et renseignements que ceux figurant sur la carte du dossier, notamment celles de l’audience du 04 août 2020, ne figurent nulle part au dossier de la procédure ;
Que la parole a été donnée au demandeur au pourvoi, intimé en cause d'appel, pour savoir si elle entendait répliquer aux écritures de l’appelant ou non sur la feuille de notes d'audience de cette date ;
Qu’aucune mention n’indique aussi que le demandeur au pourvoi a fait quelque observation ;
Que curieusement, la feuille de notes de l'audience censée être celle sur laquelle il est mentionné « Del 03/11/20 » n’est pas datée et ne renseigne non plus sur la composition de la cour qui a siégé à cette audience et qui a mis le dossier en délibéré ;
Que la seule mention qui figure sur cette feuille de notes d'audience se résume à : « Acte à Me Nourou GUIWA du dépôt de ses écritures communiquées, maître Nourou GUIWA, substitué par maître Guy DOSSOU sollicite la mise en délibéré du dossier » ;
Qu'il y a donc lieu de conclure que les juges de la cour d'appel n’ont pas respecté le principe du contradictoire ;
Que le moyen est fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Au fond, casse et annule en toutes ses dispositions l'arrêt n°126/20 rendu le 03 novembre 2020 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de la cour d’appel de Cotonou ;
Renvoie la cause et les parties devant la même cour d'appel autrement composée ;
Ordonne la restitution de la consignation faite à la collectivité AH A représentée par Y Af A ;
Met les frais à la charge du trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu'aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d'appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
Vignon André SAGBO, conseiller à la chambre judiciaire, PRESIDENT ;
Nougbognon PATHINVOH, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-six août deux mil vingt-deux, la Cour étant composée comme il est dit ci- dessus en présence de :
Pierre Nicolas BIAO, premier avocat général, MINISTERE PUBLIC ;
Mongadji Henri YAÏ, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président-rapporteur Le greffier,
Vignon André SAGBO Mongadji Henri YAÏ