N°50/CJ-DF DU REPERTOIRE ; N° 2020-99/CJ-DF DU GREFFE ; ARRET DU 10 JUIN 2022 ; AFFAIRE : X Y AH CONTRE A AJ REPRESENTANT L’ASSOCIATION POUR LE DEVELOPPEMENT D’AI AGB).
Droit foncier — Défaut de base légale — Accord sur l’immeuble et le prix — Vente parfaite — Rejet.
Justifient légalement leur décision, les juges du fond qui ont constaté que les vendeurs ont cédé à l’acheteur le domaine spécifié au prix convenu et retenu que la vente intervenue entre ceux-ci est, dès lors parfaite.
La Cour,
Vu l’acte n°74/20 du 1“ juillet 2020 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Sadikou Ayo ALAO, conseil de X Y AH, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°082/20 rendu le 09 juin 2020 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;
Vu la loi n° 2020-08 du 23 avril 2020 portant modernisation de la justice ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi dix juin deux mil vingt- deux, le conseiller Vignon André SAGBO en son rapport ;
Ouï l’avocat général Pierre Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°74/20 du 1“ juillet 2020 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Sadikou Ayo ALAO, conseil de X Y AH, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°082/20 rendu le 09 juin 2020 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Que par lettre n°0136/GCS du 07 janvier 2021 du greffe de la Cour suprême, le conseil du demandeur au pourvoi a été invité à consigner dans le délai de quinze (15) jours, sous peine de déchéance et à produire ses moyens de cassation dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1 et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que la consignation a été faite et les mémoires ampliatif et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
Que seule la société civile professionnelle d’avocats AHOUNOU et CHADARE, conseil du défendeur a, par correspondance en date à Cotonou du 04 avril 2022, versé ses observations au dossier ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été introduit dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il convient de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date du 14 mars 2010, X Y AH a saisi le tribunal de première instance de première classe de Porto-Novo d’une action en revendication de son droit de propriété sur un domaine de terrain de contenance de 05 ha 32 a 86 ca sis au quartier Gbèdji, arrondissement d’Ac, commune d’Ifangni, contre l’Association de Développement local d’AI AGB) représentée par A AJ ;
Que par jugement n°21/1C/11 rendu le 21 juillet 2011, la juridiction saisie, après avoir constaté, entre autres, « que monsieur X Y AH est propriétaire du domaine de terrain de contenance superficielle de 05 ha 32 a 86 ca sis au quartier Gbèdji à Ac pour l’avoir acquis auprès des héritiers de feu C Z ; que ces derniers ont vendu la même parcelle de terrain à l'Association de Développement Local d’AI AGB)» et « dit que la seconde vente au profit de ADELI est nulle et de nul effet car portant sur un bien d'autrui» a confirmé le droit de propriété de X Y AH sur ledit domaine et ordonné l’exécution provisoire de la présente décision nonobstant toutes voies de recours ;
Que A AJ a interjeté appel de la décision rendue et obtenu, par ordonnance du 03 novembre 2011 du premier président de la cour d’appel de Cotonou, l’autorisation d’assigner en défense à exécution provisoire ; que par arrêt n°032/2012 du 26 juillet 2012, la chambre civile moderne de la cour d’appel saisie, a rejeté la demande de défense à exécution provisoire ;
Que statuant sur le mérite de l’appel interjeté par A AJ, la cour d'appel de Cotonou a, par arrêt n°20/13 du 27 août 2013, infirmé le jugement querellé, puis évoquant et statuant à nouveau, a annulé la convention de vente du 16 janvier 2005 délivrée à X Y AH par les héritiers de feu Z C, confirmé le droit de propriété de l'association pour le développement local d’AI AGB!) représentée par A AJ ;
Que maître Sadikou Ayo ALAO, conseil de X Y AH, a élevé pourvoi en cassation contre l’arrêt entrepris ;
Que la haute Juridiction saisie a rendu le 11 mai 2018 l’arrêt n°2014-11/CJ-CT par lequel elle a cassé et annulé en toutes ses dispositions, l’arrêt n°20/13 rendu le 27 août 2013 par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou puis renvoyé les parties devant la même cour autrement composée ;
Que la cour de renvoi a, par arrêt n°082/20 du 09 juin 2020, infirmé en toutes ses dispositions le jugement n°21/1C/11 du 21 juillet 2011 du tribunal de première instance de première classe de Porto-Novo, puis évoquant et statuant à nouveau, a annulé la convention de vente en date du 16 janvier 2005 établie au profit de X Y AH ; déclaré irrecevable la demande de X Y AH tendant à la condamnation de l’association pour le développement local d’AI AGB) au paiement de dommages- intérêts et confirmé le droit de propriété de celle-ci sur le domaine querellé ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi n°2013- 01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué la violation de la loi n°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin en ce que les juges d’appel ont à tort fondé leur argumentation sur la convention de vente en date du 16 janvier 2005 frauduleusement délivrée à ADELI et postérieurement à celle détenue par X Y AH et délivrée par les mêmes vendeurs, alors que, selon le moyen, en annulant dans le dispositif de l'arrêt entrepris la convention de vente délivrée à X Y AH pour faire droit à celle dont se prévaut l’association pour le développement local d’AI AGB) , laquelle est entachée de faux, les juges d'appel ont donné leur onction à la vente de la chose d’autrui ;
Qu’au demeurant, un tel dispositif viole l’article 493 de la loi précitée sanctionnant le stellionat ;
Qu'en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges d'appel exposent leur décision à cassation ;
Mais attendu que sous le grief de la violation de la loi, le moyen tend en réalité à faire réexaminer par la haute Juridiction, les faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Que le moyen est irrecevable ;
Sur le second moyen tiré du défaut de base légale
Attendu qu'il est fait grief à l’arrêt attaqué du défaut de base légale en ce que la cour d’appel de Cotonou a mentionné dans sa motivation « qu’en l’espèce, par décharge en date du 1°” décembre 2004, ADELI a acquis le domaine querellé, de contenance superficielle de 5ha 32 a 86 ca … qu’en outre, ADELI a versé au dossier judiciaire une convention de vente affirmée en date du 16 janvier 2005 ; qu’au regard de ces constances, il y a lieu de dire que c’est à tort que le premier juge a confirmé le droit de propriété de X Y AH et d'’infirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions », alors que, selon le moyen, après le paiement du premier versement de vingt millions (20 000 000) F CFA par chèque en date du 29 novembre 2004, c’est à X Y AH que le vendeur C Z Ad Aa a délivré la décharge du ''" décembre 2004 antérieure à celle de la convention de vente en date du 16 janvier 2005 également établie en son nom ;
Que c'est après la révolte de l'association de développement, que les vendeurs C Z ont délivré une convention à l’association après en avoir délivré une première à X Y
Que cette convention de vente délivrée dans ces conditions est entachée de faux ;
Que l'acte de vente dont se prévaut l’ADELI est nul et ne peut produire aucun effet ;
Que l’arrêt attaqué trouve sa base juridique dans la validation erronée d’une convention de vente entachée de faux en date du 16 janvier 2005 dont se prévaut l’ADELI ;
Qu’en procédant comme ils l’ont fait, les juges d’appel n’ont pas donné une base légale à leur décision ;
Mais attendu que l’arrêt dont pourvoi énonce :
« Qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier notamment de la décharge en date du 1 décembre 2004 que les héritiers de feu Z C (...) reconnaissent avoir pris des mains de monsieur AH X Y, Directeur général du Parc Autos, une somme de vingt millions (20 000 000) francs pour un terrain sis au quartier Gbèdji (Ac) arrondissement d’Ifangni demandé par l’association de développement d’Ac (…) ;
Qu'il s’infère d’une part, que les héritiers Z C ont cédé à ADELI représentée par X Y AH, un domaine sis au quartier Ab dans l'arrondissement d’Ac, de contenance superficielle de 05 ha 32 a 86 ca au prix convenu de trente millions (30 000 000) F CFA ;
Que d'autre part, une avance de vingt millions (20 000 000) F CFA a été perçue par les héritiers de feu Z C ;
Que conformément aux dispositions des articles 1582 et 1583 du code civil, de manière définitive, les héritiers Z C ont cédé à l'association ADELI, le domaine ainsi spécifié et au prix convenu dans la décharge du 1° décembre 2004 ;
Que l'acte de vente formalisé plus tard ne vient que consolider l’accord antérieurement intervenu entre les parties contractantes ; Que dès lors, la vente intervenue entre les héritiers de feu Z C et l’'ADELI est parfaite et opère transfert de propriété au profit de cette dernière » ;
Qu'’à travers ces constatations de fait et énonciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge de X Y AH ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d'appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
Vignon André SAGBO, conseiller à la chambre judiciaire, PRESIDENT ;
Nougbognon PATHINVOH, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi dix juin deux mil vingt-deux, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Pierre Nicolas BIAO, premier avocat général, MINISTERE PUBLIC ;
Mongadji Henri YAÏ, greffier, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président-rapporteur, Le greffier,
Vignon André SAGBO Mongadiji Henri YAÏ