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23/07/2021 | BéNIN | N°49/CJ-P

Bénin | Bénin, Cour suprême, 23 juillet 2021, 49/CJ-P


Texte (pseudonymisé)
[N°49/CJ-P du répertoire ; N°2019-102/CJ-P du greffe ; Arrêt du 23 juillet 2021 ; Affaire : X Af M. X C/ - MINISTERE PUBLIC - MUTUELLE AFRICA FINANCES Rep/DESIRE H. KUESSI ET HUGUETTE VALENTINE A
Procédure pénale — Arrêt confirmatif — Motivation du premier juge.
- Non-respect du contradictoire — Violation des droits de la défense — Faits souverainement appréciés par juridiction du fond.
- Mesures d’instruction — Défaut d’éléments suffisants.
- Poursuite supposée entre président d’une formation collégiale de jugement et adversaire contradicteur — Vi

olation du principe d’impartialité — Cas d’ouverture.
Est suffisamment motivé l’arrêt confirm...

[N°49/CJ-P du répertoire ; N°2019-102/CJ-P du greffe ; Arrêt du 23 juillet 2021 ; Affaire : X Af M. X C/ - MINISTERE PUBLIC - MUTUELLE AFRICA FINANCES Rep/DESIRE H. KUESSI ET HUGUETTE VALENTINE A
Procédure pénale — Arrêt confirmatif — Motivation du premier juge.
- Non-respect du contradictoire — Violation des droits de la défense — Faits souverainement appréciés par juridiction du fond.
- Mesures d’instruction — Défaut d’éléments suffisants.
- Poursuite supposée entre président d’une formation collégiale de jugement et adversaire contradicteur — Violation du principe d’impartialité — Cas d’ouverture.
Est suffisamment motivé l’arrêt confirmatif qui adopte la motivation du premier juge ;
Est irrecevable, la branche du moyen qui, sous le grief non fondé du non-respect du contradictoire et de la violation des droits de la défense, tend à remettre en discussion devant la Haute juridiction, les faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Les juges ne peuvent ordonner des mesures d’instruction que si les éléments du dossier ne suffisent pas pour éclairer leur opinion ;
La seule proximité supposée entre le président d’une formation collégiale de jugement et d’adversaire contradicteur ne suffit pas à induire l’impartialité de toute la formation, impartialité dont la violation du principe, du reste, n’est pas un cas d’ouverture à cassation.
La Cour,
greffe de la cour d’appel de Cotonou par lesquels maîtres Igor Cécil SACRAMENTO et Gervais C. HOUEDETE, conseils de X Af Ab X ont déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l'arrêt n°33/19, rendu le 26 avril 2019 par la chambre correctionnelle de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu les pièces du dossier ;
Oui à l’audience publique du vendredi 23 juillet 2021 le conseiller Michèle O. A. CARRENA ADOSSOU en son rapport ;
Ouï l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant les actes n°09/19, n°10/19 et n°11/19 du 29 avril 2019 du greffe de la Cour d’appel de Cotonou, maîtres Igor Cécil SACRAMENTO et Gervais C. HOUEDETE, conseils de X Af Ab X ont déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°33/19, rendu le 26 avril 2019 par la chambre correctionnelle de cette Cour ;
Que par lettres numéros 0260 et 0261/GCS du 14 janvier 2020 du greffe de la Cour suprême, maîtres Igor Cécil SACRAMENTO et Gervais C. HOUEDETE ont été mis en demeure de produire leur mémoire ampliatif dans le délai d’un (01) mois conformément aux dispositions de l’article 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que les mémoires ampliatifs et en défense ont été produits ;
EN
LA FORME
Attendu que les présents pourvois ont été élevés dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il convient de les déclarer recevables ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon Jl’arrêt attaqué, que par jugement n°221/1FD/2015 rendu le 27 mai 2015, la chambre correctionnelle des flagrants délits du tribunal de première instance de deuxième classe d'Abomey-Calavi a déclaré X Af Ab X coupable d'abus de confiance et l’a condamné à dix- huit (18) mois d’emprisonnement assorti de sursis, à cinq cent mille (500 000) francs d’amende ferme et au paiement de la somme d’un million cinq cent mille (1 500 000) F à la Mutuelle Africa Finances ;
Que sur appels principaux de maître Gervais C. HOUEDETE et de X Af Ab X et sur appel incident du ministère public, la cour d’appel de Cotonou a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi en cinq (05) branches
Première branche : Violation de la loi par absence ou insuffisance de motivation soulevée par maître Igor Cécil SACRAMENTO
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, l’absence ou l'insuffisance de motivation en ce qu’en droit pénal, il est de principe que l'infraction n’est constituée à l’égard du prévenu que lorsque les éléments légal, matériel et intentionnel sont réunis, et que le juge correctionnel avant d’entrer en condamnation, se doit de caractériser chacun des éléments constitutifs de l’infraction ; que toutes les fois qu’il ne le fait pas, il y a absence de motivation en droit et sa décision encourt annulation, alors que, selon le moyen, la cour d’appel, dans son arrêt n’a pu caractériser aucun des éléments constitutifs de l'infraction, quand bien même le demandeur au pourvoi, dans ses observations devant la cour a démontré la non constitution de l'infraction d’abus de confiance à son égard ;
Qu’en ne motivant pas en droit leur décision avant de retenir le prévenu dans les liens de la prévention, les juges d’appel l’exposent à cassation ;
Mais attendu que l'arrêt entrepris est un arrêt confirmatif qui a adopté la motivation du premier juge ;
Qu’en énonçant dans leur arrêt que : « … en le retenant dans les liens de la prévention d’abus de confiance et en le condamnant à une peine d’emprisonnement, le premier juge a fait une bonne appréciation des faits et une bonne application de la loi », les juges d'appel ont suffisamment motivé leur décision ;
Que cette branche du moyen n’est pas fondée ;
Deuxième branche : Violation de la loi par mauvaise application de l’article 408 de l’ancien code pénal soulevée par maîtres Igor Cécil SACRAMENTO et Gervais C. HOUEDETE
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation de la loi par mauvaise application de l’article 408 du code pénal en ce que, les juges d’appel ont confirmé en toutes ses dispositions le jugement rendu sans chercher à démontrer que la somme compromise a été remise à X Af Ab X à charge pour lui de la représenter, ni à caractériser le détournement de la chose préalablement remise alors que, selon le moyen, l’article 408 du code pénal définit l’abus de confiance comme le détournement de la chose remise à titre précaire à charge de la représenter ;
Qu’en droit, le détournement caractéristique de l’abus de confiance suppose une demande de restitution infructueuse, une incapacité de l’agent pénal à représenter la chose préalablement remise en vertu du contrat ;
Que si là directrice de la Mutuelle Africa Finances soutient n’avoir jamais signé le chèque, qui en l’espèce, est le corps du délit, elle n’a donc jamais pu le remettre au demandeur au pourvoi pour en demander la restitution ;
Qu’en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges de la chambre correctionnelle de la cour d’appel ont fait une mauvaise application de l’article 408 de l’ancien code pénal et que l'arrêt encourt cassation ;
Mais attendu que, dans son développement, cette branche du moyen tend à soumettre à la haute Juridiction des faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Que le moyen en cette branche est irrecevable ;
Troisième branche : Violation des droits de la défense soulevée par maître Gervais C. HOUEDETE
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué, la violation des droits de la défense en ce que, légalement, pour retenir l'infraction d’abus de confiance contre la personne poursuivie, il faut, entre autres, que le prévenu ait posé un acte matériel de détournement ou de dissipation, alors que, selon la branche du moyen, du fait que le prévenu ne nie pas avoir retiré pour le compte de la directrice générale, la somme de quatre millions (4 000 000) F, le 30 mars 2011, il est indispensable de rechercher si, revenu de la banque, il la lui a remise ou l’a utilisée à d’autres fins ;
Qu'il est constant eu égard aux circonstances des faits que seule une expertise peut départager les protagonistes ;
Que dans ce cadre, Ac Ad C, consultant indépendant en finances et contrôle de gestion, commis par Africa Finances a conclu dans son rapport en date du 08 octobre 2012 que «les constats ci-dessus nous amènent à conclure que le chèque n°8718577 du 30 mars 2011 a été bel et bien mis dans le coffre-fort car, sans cela, même si en cas de rupture de stock, les transferts de sortie d’argent sont possibles, l’argent ne serait pas disponible physiquement » ;
Que cette conclusion Insatistaisante à l'attente de la directrice générale, Huguette V. A provoqua unilatéralement l’expertise d’un deuxième cabinet en l’occurrence celui de Ae B, fait en février 2014 ;
Que ce deuxième expert a déposé son rapport à la directrice générale sans que le prévenu ait été appelé pour être entendu ou produise ses pièces justificatives ;
Que le prévenu et ses conseils ayant soulevé aussi bien devant le premier juge qu’en appel cette violation flagrante des droits de la défense, liée aux circonstances du déroulement de la deuxième expertise, ces derniers se devaient de rétablir l’équilibre en invitant les deux experts à l’audience pour leur éclairage, le premier juge ayant écarté le rapport du premier expert sollicité, estimant son dépôt tardif ;
Que ledit rapport, produit à nouveau devant la cour d’appel ne constituait pas une demande nouvelle mais plutôt une pièce à la décharge du prévenu ;
Que le fait pour la cour de n’avoir pas invité le deuxième expert serait un prolongement de la violation des droits de la défense ;
Mais attendu qu'il résulte des pièces de la procédure trois (03) rapports dont deux (02) de l’expert Ac Ad C, qui sont contradictoires dans leur contenu et ont donc été écartés des débats par les juges ;
Que dans le troisième rapport, celui de l’expert Ae Ag B, contrairement aux allégations du demandeur, il est consigné qu’il a été entendu et a produit des observations ;
Que ce rapport est donc contradictoire et ne devrait pas être écarté des débats ;
Que sous le grief non fondé de non-respect du contradictoire et de la violation des droits de la défense, la branche du moyen tend à remettre en discussion devant la Haute Juridiction, des faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Que le moyen est irrecevable en cette branche ;
Quatrième branche : Violation des mesures d'instruction soulevée par maître Gervais C. HOUEDETE
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué, la violation des mesures d'instruction nécessaires en ce que, la directrice générale d’Africa Finances qui est censée avoir cosigné le chèque querellé soutient qu’elle n’en a pas été signataire, alors que, selon le moyen, si l’infraction pour laquelle la poursuite est engagée est l’abus de confiance, et non le faux en écriture privée ou la fausse attestation, il va sans dire que seul le remettant du chèque agissant ès qualités peut poursuivre ;
Qu’ayant reçu à la barre, la déclaration consistant à nier avoir signé ledit chèque, la cour d’appel se devait de prescrire les mesures d’instruction tendant à la vérification des signatures apposées sur le chèque par les autorités compétentes en la matière ;
Que le défaut de mesure d’instruction ne peut que laisser un doute dont le seul bénéficiaire serait le prévenu ;
Que de même, cette mesure d'instruction est nécessaire en raison de ce que la directrice générale, a soutenu n’avoir pas été signataire en ce qui concerne l’opération en cause dans le cahier de décharge ;
Que devant ces velléités de la directrice générale, la cour d'appel, à l'examen de la pièce produite par le prévenu et faisant état de la suppression en historique des données comptables de Africa Finances avant le dépôt de la plainte, se devait de s'interroger sur les tenants et aboutissants d’une telle manœuvre ;
Que mieux, le prévenu avait déjà sollicité une expertise judiciaire dont la juridiction saisie avait trouvé le bien fondé ;
Qu’en confirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions, la cour d’appel a manifestement violé l’une des mesures nécessaires à prescrire, celle d’une expertise graphologique ;
Mais attendu qu’il convient de relever que lors des débats en cause d'appel, le demandeur au pourvoi n’a jamais sollicité une quelconque mesure d'instruction à laquelle les juges d'appel ont manqué de donner suite ;
Que les juges d'appel l’auraient ordonnée d'office si les éléments du dossier n’étaient pas suffisants pour éclairer leur opinion ;
Que procédant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges d'appel ne sont pas reprochables de violation des mesures d'instruction ;
Que la branche du moyen n’est pas fondée ;
Cinquième branche : Violation du principe d’impartialité du juge soulevée par maître Gervais C. HOUEDETE
Attendu qu'il est également reproché aux juges, la violation du principe d’impartialité en ce que devant la cour d'appel, les griefs articulés contre l’arrêt ont été tous développés en vain, alors que, selon le moyen, la non prise en compte de tous ces moyens inquiétait sérieusement le prévenu sur son sort ;
Que ne disposant d’aucun indice de proximité du président de la chambre avec la directrice générale de Africa Finances, le prévenu a simplement choisi de compter sur tous les juges composant ladite chambre ;
Qu’alors que le dossier a été vidé par un arrêt confirmatif du jugement en toutes ses dispositions, le 03 mai 2019, le prévenu a surpris le président de la chambre qui a connu du dossier à table, avec son adversaire, à Aa lors de la réception organisée par maître Alfred BOCOVO le jour de l’innumation de son père ;
Qu’à juste regarder leur position dans l’une des photos prises par les photographes à cette occasion, leur proximité n’est plus à démontrer ;
Qu'il s’induit que le demandeur au pourvoi a été certainement victime de la violation de la règle d’impartialité imposée au magistrat ;
Qu'il sollicite de la Cour de casser l'arrêt querellé et de renvoyer la cause devant la cour d’appel de Cotonou autrement composée ;
Mais attendu que l'arrêt dont pourvoi est un arrèt contirmaur émanant d’une chambre collégiale composée de trois (03) juges ;
Que la seule proximité supposée entre le président de la formation et l’adversaire contradicteur ne suffit pas à induire une impartialité de toute la formation de jugement ;
Qu’au surplus, la violation du principe d’impartialité n’est pas un cas d'ouverture à cassation ;
Que la branche du moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême, au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de : Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT; Michèle O. A. CARRENA ADOSSOU et Georges TOUMATOU, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-trois juillet deux mille vingt-et-un, la Cour étant composée comme il est dit ci- dessus en présence de : Saturnin AFATON, AVOCAT GENERAL; Osséni SEIDOU BAGUIRI, GREFFIER;
Et ont signé
Le président, Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Michèle O. A. CARRENA ADOSSOU
Le greffier
Osséni SEIDOU BAGUIRI


Synthèse
Numéro d'arrêt : 49/CJ-P
Date de la décision : 23/07/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2021-07-23;49.cj.p ?
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