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09/07/2021 | BéNIN | N°2005-144bis/CA3

Bénin | Bénin, Cour suprême, 09 juillet 2021, 2005-144bis/CA3


Texte (pseudonymisé)
N°150/CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN
N° 2005-144bis/CA3 du greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
Arrêt du 09 juillet 2021 COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE
AFFAIRE :
KITI Monique
Préfet de l’Atlantique et du Littoral
La Cour,
Vu la requête introductive d’instance en date à Cotonou du 11 octobre 2005, enregistrée au greffe le 21 octobre 2005 sous le n°1224/GCS, par laquelle Ab C, assistée de maître Montand AÏKPON, avocat au barreau du Bénin, a saisi la C

our suprême d’un recours en annulation du permis d’habiter n°2/1272 du 16 décembre 2002 ...

N°150/CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN
N° 2005-144bis/CA3 du greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
Arrêt du 09 juillet 2021 COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE
AFFAIRE :
KITI Monique
Préfet de l’Atlantique et du Littoral
La Cour,
Vu la requête introductive d’instance en date à Cotonou du 11 octobre 2005, enregistrée au greffe le 21 octobre 2005 sous le n°1224/GCS, par laquelle Ab C, assistée de maître Montand AÏKPON, avocat au barreau du Bénin, a saisi la Cour suprême d’un recours en annulation du permis d’habiter n°2/1272 du 16 décembre 2002 délivré à A Af Ad par le préfet de l’Atlantique ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes modifiée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Le conseiller Rémy Yawo KODO entendu en son rapport
et l’avocat général Mardochée KILANYOSSI en ses conclusions }K Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
Sur la recevabilité du recours
Considérant qu’au soutien de son recours, la requérante expose :
Qu’elle a acquis auprès de X Ac, suivant convention de vente en date du 21 avril 1990, une parcelle de terrain d’une dimension de 20m sur 25m, située à Ahogbohouè, moyennant la somme de trois cent mille (300 000) francs ;
Que, prétextant de ce que l'immeuble est la propriété d’un ensemble de collectivités à savoir la collectivité X de Zogbo, la collectivité DOSSA de Zogbo et la collectivité B de Zogbo, une autre convention de vente a été établie et signée le 21 avril 1990, en confirmation de son droit de propriété ;
Qu'un certificat de non litige lui a été délivré le 17 janvier 1991 par le chef du quartier de situation de l'immeuble et qu’elle y habite depuis lors avec sa famille ;
Que curieusement et contre toute attente, A Af Ad lui a fait signifier par voie d’huissier un procès-verbal de constat avec sommation interpellative et de déguerpir, le 13 janvier 2003 ;
Qu'elle a formé opposition contre cet exploit d’huissier avec assignation de A Af Ad en défense et de Ac X et Ae B en intervention forcée ;
Que suivant lettre n°BCA/AA/1573/05 du 21 juin 2005, A Af Ad, par l’organe de son conseil, lui a communiqué ses pièces au nombre desquelles le permis d’habiter n°/1272 à lui délivré le 16 décembre 2002 par le préfet de l'Atlantique alors que depuis l’avènement de la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin, seules les communes délivrent désormais les permis d’habiter et autres actes administratifs ;
Que suite à cette communication de pièces, elle a, par lettre n°0402/05/MA/SA en date du 28 juin 2005, saisi le préfet de l’Atlantique d’un recours gracieux aux fins de
ASSANI rapporter Mohamed l’acte établissant Ad ; le permis d’habiter délivré y Considérant que l’administration soulève l’irrecevabilité du recours au motif qu’il a été introduit après l’expiration des délais légaux ;
Qu'elle soutient que le recours gracieux étant daté du 28 juillet 2005, le recours contentieux devant la Cour suprême, devrait intervenir avant le 29 novembre 2005 ;
Que le cachet de la Cour ne figure pas sur le recours introductif d’instance et que l’absence de date de réception dudit recours est imputable à la requérante ;
Mais considérant qu’à l’examen des pièces du dossier, il apparaît que la requête introductive d’instance timbrée, porte aussi bien le cachet de réception au greffe de la Cour que celui de la Chambre administrative ;
Que le cachet du greffe établit que le recours a été reçu le 21 octobre 2005 sous le n°1224/GCS tandis que le cachet de la Chambre administrative, atteste de ce que le recours a été réceptionné le 27 octobre 2005 sous le n°1059/CS/CA ;
Qu'il apparaît ainsi évident que le recours contentieux a été introduit avant le 29 novembre 2005et par conséquent, dans les délais légaux ;
Qu'il y a lieu de rejeter le moyen d'’irrecevabilité tiré de la forclusion et de déclarer le recours recevable ;
AU FOND
Considérant que la requérante soulève deux moyens tirés le premier de l’incompétence de l’auteur de l’acte et le
second d’un vice de procédure ;
Qu'il y a lieu de les examiner séparément ;
Sur le premier moyen tiré de l’incompétence du préfet à délivrer le permis d’habiter
Considérant que la requérante soulève l’incompétence du préfet tant au regard de la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin que de la lettre n°1639/MISAT/DC/SG/CNAD du 07 août 2000 du ministre de l'Intérieur, adressée au préfet de l’Atlantique et du Littoral ;
- Sur la première branche du premier moyen tirée de la
violation de l’article 84 de la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin
Considérant que la requérante invoque l’incompétence du préfet à délivrer le permis d’habiter depuis l’avènement de la
loi $&-— n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des I communes en République du Bénin qui donne désormais aux communes compétence pour la délivrance des actes administratifs en matière domaniale ;
Que l’article 84 de ladite loi dispose : « La commune élabore et adopte son plan de développement. Elle veille à son exécution en harmonie avec les orientations nationales en vue d'assurer les meilleures conditions de vie à l’ensemble de la population. Dans ce cadre [...] délivre les permis d’habiter et les permis de construire » ;
Que c'est en toute illégalité que le 16 décembre 2002, le préfet a délivré le permis d’habiter n°2/1272 à A Af Ad ;
Considérant que le conseil de la préfecture relève que la loi n°97- 029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin n’était pas applicable en 2002, les conditions de son applicabilité n'étant pas réunies ;
Considérant que les élections communales et municipales ont été organisées courant décembre 2002 suivies de l’élection du maire de la municipalité de Cotonou le 18 février 2003 ;
Que le 17 novembre 2003, le préfet a assuré le transfert des documents domaniaux au maire élu de Cotonou ;
Qu'’avant l’élection du maire, le préfet était toujours compétent pour prendre des actes administratifs en matière domaniale, notamment le permis d’habiter ;
Qu’entre la mise en vigueur de la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin et l’installation du conseil communal de Cotonou, les départements sont restés compétents en matière domaniale, au nom du principe de continuité du service public ;
Qu'il s'ensuit qu’en prenant le permis d’habiter querellé, délivré le 16 décembre 2002, le préfet de l’Atlantique et du Littoral n’a pas agi en dehors de son champ de compétence ;
Qu’en conséquence, le moyen tiré de son incompétence est inopérant et doit être rejeté ;
- Sur la deuxième branche du moyen tirée du contenu de la
lettre n°1639/MISAT/DC/SG/CNAD du 07 août 2000 du ministre de l’Intérieur adressée au préfet de l’Atlantique et du Littoral
Considérant que la requérante indique que par lettre n°1639/MISAT/DC/SG/ CNAD du 07 août 2000, le ministre de
l'Intérieur préfet de l’Atlantique a suspendu ; toute délivrance d’acte administratif par le ir Que ladite correspondance dont les termes sont rapportés dans le mémoire ampliatif, enjoint le préfet de l’Atlantique et du Littoral aux fins de :
2°- surseoir à la délivrance de tels actes administratifs dans les zones en cour de lotissement à Aa ;
3°- me faire le point des lotissements [...] (parce qu’) il ressort de l’analyse des plaintes que les arrêtés et permis ainsi délivrés à des tiers sont en général des sources de graves tensions et conflits domaniaux très préjudiciables à la cohésion sociale au niveau des quartiers de la ville de Cotonou » ;
Que le préfet de l’Atlantique et du Littoral n’était donc plus compétent pour délivrer le 16 décembre 2002 à A Af Ad, le permis d’habiter n°2/1272 ;
Que de ce point de vue, ledit permis d’habiter encourt annulation ;
Considérant que la requérante ne produit pas au dossier la lettre du ministre de l’Intérieur dont elle se prévaut ;
Qu’à supposer même que cette lettre existe, elle ne peut valoir une interdiction générale et illimitée faite au préfet de l'Atlantique et du Littoral, d'exercer les compétences que la loi n°60-20 du 13 juillet 1960 fixant le régime des permis d’habiter au Dahomey lui a conférées ;
Qu'il suit de là que le moyen de l’incompétence est mal fondée et qu'il y a lieu de l’écarter ;
Sur le second moyen tiré du vice de procédure ayant entaché la prise du permis d’habiter attaqué
Considérant que la requérante soulève le vice de procédure dans le processus ayant conduit à la prise par le préfet l’Atlantique et du Littoral, du permis d’habiter querellé ;
Qu'elle soutient n'avoir pas été mise en mesure de présenter ses observations aux autorités administratives, en l’occurrence le préfet de l’Atlantique et du Littoral avant la délivrance du permis d’habiter à A Af Ad ;
Que par ailleurs, aucune enquête préalable n’a été diligentée par le préfet avant la délivrance à un tiers d’un permis d’habiter sur la parcelle qu’elle occupe depuis des années avec sa famille ;
Considérant que les textes en vigueur notamment l’article 4 du décret n°64-276/PC/MFAEP/EDT du 02 décembre 1964 fixant le régime des permis d’habiter en son alinéa 2 dispose : « Dans la où il possible de satisfaire à de telles demandes et mesure après consultation sera de la commission prévue à l’article précédent, in, :
et du maire dans les communes, le chef de circonscription désignera au demandeur la parcelle libre de toute occupation et préalablement bornée ou pour le moins piquetée, qu’il pourra occuper, et lui délivrera un permis d’habiter détaché d’un registre à souches portant un numéro d’une série d'enregistrement » ;
Qu'il ressort de cette disposition réglementaire que la désignation au demandeur de la parcelle libre de toute occupation suppose une enquête préalable, aux fins de s'assurer de la disponibilité et de l’inoccupation de la parcelle de terrain pour laquelle un permis d’habiter est sollicité ;
Considérant que les services de la préfecture de l'Atlantique et du Littoral n’ont pas, avant la délivrance du permis d’habiter attaqué, recueilli les observations de la requérante, qui occupait déjà la parcelle de terrain ;
Que l’enquête des services compétents de la préfecture aurait pu révéler :
- qu’un certificat de non litige (versé au dossier) a été établi le 17 janvier 1991 par le chef du quartier et maire de la commune urbaine de Houénoussou (Cotonou) et atteste que ladite parcelle de terrain vendue par X Ac à la requérante lui appartient effectivement, n’est grevée d'aucune charge et ne fait l’objet d’aucun litige ;
- que depuis cette date, la parcelle était indisponible car occupée par la requérante qui y vit avec sa famille ;
Qu’en délivrant le permis d’habiter contesté sur la parcelle de terrain occupée par la requérante sans avoir au préalable, respecté la procédure prescrite par le décret n°64-276/PC/MFAEP/EDT du 02 décembre 1964 fixant le régime des permis d’habiter, le préfet de l'Atlantique et du Littoral a outrepassé ses pouvoirs ;
Qu’au regard de tout ce qui précède, il y a lieu de dire que la délivrance par le préfet du permis d’habiter querellé a été entachée d’un vice de procédure et de l’annuler ;
PAR CES MOTIFS,
DECIDE :
Article 1°: Le recours en date à Cotonou du 11 octobre 2005 de Ab C, tendant à l’annulation du permis d’habiter n°2/1272 du 16 décembre 2002 délivré par le préfet de l’Atlantique à A Af Ad, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ; gl .
Article 3 : Le permis d’habiter n°2/1272 du 16 décembre 2002 délivré par le préfet de l’Atlantique à A Af Ad, est annulé avec toutes les conséquences de droit ;
Article 4 : Les frais sont mis à la charge du Trésor public ;
Article 5: Le présent arrêt sera notifié aux parties et au procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre administrative) composée de :
Rémy Yawo KODO, conseiller à la Chambre administrative ;
PRESIDENT;
Et CONSEILLERS ;
Edouard Ignace GANGNY
Et prononcé à l’audience publique du vendredi neuf juillet deux mille vingt et un, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Mardochée KILANYOSSI, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC ;
GREFFIER ; Et ont signé :
Rémy Yawo KODO Bienvenu COBTD


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2005-144bis/CA3
Date de la décision : 09/07/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2021-07-09;2005.144bis.ca3 ?
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