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23/04/2021 | BéNIN | N°23/CJ-P

Bénin | Bénin, Cour suprême, 23 avril 2021, 23/CJ-P


Texte (pseudonymisé)
[N°23/CJ-P du répertoire ; N° 2021-11/CJ-P du greffe ; Arrêt du 23 avril 2021 ; Affaire : PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR SUPREME C/ - HUI LONG - Z B - MAHMOUD EL HADJI WABI ABDUL - SOCIETE SINOHYDRO CORPORATION LIMITED
Procédure pénale — Pourvoi en cassation — Pourvoi formé par le procureur général près la Cour suprême — Sur saisine du ministre de la Justice —-Recevabilité (oui).
Violation de l’article 416 du code des douanes par les juges de la cour d’appel — Amande du code pénal — Cassation.
Est recevable le pourvoi formé par le procureur général prè

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[N°23/CJ-P du répertoire ; N° 2021-11/CJ-P du greffe ; Arrêt du 23 avril 2021 ; Affaire : PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR SUPREME C/ - HUI LONG - Z B - MAHMOUD EL HADJI WABI ABDUL - SOCIETE SINOHYDRO CORPORATION LIMITED
Procédure pénale — Pourvoi en cassation — Pourvoi formé par le procureur général près la Cour suprême — Sur saisine du ministre de la Justice —-Recevabilité (oui).
Violation de l’article 416 du code des douanes par les juges de la cour d’appel — Amande du code pénal — Cassation.
Est recevable le pourvoi formé par le procureur général près la Cour suprême sur saisine du ministre de la Justice dans les forme et délai prévus par la loi.
Encourt cassation l’arrêt d’une Cour d’appel qui modère l’amende de manière en la confondant à l’amende pénale au sens large.
La Cour,
Vu l’acte n°03 du 04 février 2021 du greffe de la Cour d'appel de Cotonou par lequel le procureur général près la Cour suprême, sur saisine du Ministre de la Justice et conformément aux dispositions des articles 45 alinéa 1, 46, 47 et 48 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême, a formé pourvoi dans l’intérêt de la loi contre les dispositions de l’arrêt n°157/2 CC- 2020, rendu le 04 décembre 2020 par la deuxième chambre correctionnelle de cette cour
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu Tes pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 23 avril 2021 le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°03 du 04 février 2021 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, le procureur général près la Cour suprême, sur saisine du ministre de la justice et conformément aux dispositions des articles 45 alinéa 1, 46, 47 et 48 de la loi n°2004- 20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême, a formé pourvoi dans l'intérêt de la loi contre les dispositions de l’arrêt n°157/2 CC-2020 rendu le 04 décembre 2020 par la deuxième chambre correctionnelle de cette cour
Que par lettre n°094/PG-CS du 16 février 2021, le procureur général près la Cour suprême a produit son mémoire ampliatif ;
Que par lettres numéros 1342, 1343 et 1344/GCS du 19 février 2021, le mémoire ampliatif du procureur général a été communiqué à maîtres Nadine DOSSOU SAKPONOU, Fidel ABOUTA et Raymond GBESSEMEHLAN, conseils des défendeurs au pourvoi, qui ont été invités à produire leurs mémoires en défense dans le délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions de l’article 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême;
Que par correspondance n°01.23.03.2021/RMD/NDS/AP du 23 mars 2021, la SCPA Robert M. AG représentée par maîtres Robert M. AG et Ab AG C ainsi que maître Fidel ABOUTA, conseils des défendeurs au pourvoi, ont transmis à la haute Juridiction leur mémoire en réplique
EXAMEN DU POURVOI
Attendu que l’article 45 alinéa 1 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations Juridictonnelnres de là Cour suprême dispose : « lorsque des décisions de justice contraires à la loi sont rendues, elles peuvent être annulées sur le pourvoi que le procureur général près la Cour suprême forme, dans un délai de deux (02) mois sur saisine du ministre chargé de la justice » ;
Attendu qu’il résulte de ces dispositions que pour être recevable, le pourvoi sur saisine du Ministre de la Justice doit procéder de la seule demande formelle de celui-ci au procureur général près la Cour suprême qui dispose d’un délai de deux (02) mois pour introduire cette action ;
Attendu que dans le cas d’espèce, par lettre n°065/MJL/SP-C du 1°" février 2021, enregistrée au parquet général près la Cour suprême le 02 février 2021 sous le n°102, le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et de la législation a saisi le procureur général près la Cour suprême afin qu’il se pourvoie en annulation « dans l'intérêt de la loi » contre l’arrêt n°157/2 CC-2020 du 04 décembre 2020 rendu par la deuxième chambre correctionnelle de la Cour d'appel de Cotonou ;
Que suite à cette saisine, le procureur général près la Cour suprême, par lettre n°084/PG-CS du 04 février 2021 adressée au greffier en chef de la Cour d’appel de Cotonou s’est pourvu en annulation contre ledit arrêt ;
Que ce pourvoi donc a été élevé dans les forme et délai prévus par les dispositions de l’article 45 alinéa 1 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 ci-dessus citée ;
Qu'il convient de le déclarer recevable ;
Au fond
Faits et Procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’en vue de l’exécution du marché de construction de plusieurs routes dont elle est adjudicataire, la société SINOHYDRO CORPORATION LIMITED a bénéficié d’une franchise des droits de douane sur le carburant, précisément le gaz oil qu’elle utilise pour la réalisation des travaux qui lui sont confiés ;
Que le 11 août 2020, alors que des agents de ladite société siphonnaient le gaz oil contenu dans les camions de leur propre société, ils ont été surpris à Agbotagon, dans la commune de Toffo par des agents du service d'intervention rapide de la direction départementale des douanes de l’Atlantique et du Littoral ;
Qu’interpellés, ils ont pris la fuite et les camions ont été arraisonnés ;
Que pour obtenir la restitution desdits camions, Z B, le conducteur des travaux de ladite société a pris contact avec Hui LONG qui, à son tour, a sollicité EL HADJI WABI Mahamoud. Ce dernier les a aidés à rencontrer l’adjoint au chef du service des douanes à qui ils ont voulu remettre une enveloppe contenant de l’argent afin d'obtenir la restitution desdits camions. Mais celui-ci a décliné l’offre. Ils ont ensuite rencontré le chef service à qui ils ont également offert une somme d'argent ; mais ce dernier a refusé leur don ;
Que suite à leur poursuite en justice pour importation sans déclaration et tentative de corruption, la première chambre des flagrants délits du Tribunal de Première Instance de Première Classe de Cotonou, par jugement n°367/1FD/CI-20 du 24 août 2020, a entre autres condamné Hui LONG, Z B et Aa Y X A à cinq (05) ans d'emprisonnement ferme chacun, puis solidairement avec la société SINOHYDRO COPORATION LIMITED à un milliard quatre cent soixante-dix millions trois cent dix mille sept cent soixante-treize (1 470 310 773) francs CFA d’amende ferme, et a ordonné la confiscation de leurs camions au profit de l’administration douanière ;
Que sur appel des prévenus, la Cour d'appel de Cotonou a, entre autres, infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, puis, évoquant et statuant à nouveau, a requalifié les faits d'importation sans déclaration en détournement de marchandises de leur destination privilégiée, relaxé purement et simplement Hui LONG et Aa Y X A des fins de la poursuite du chef de cette infraction, retenu par contre la société SINOHYDRO CORPORATION LIMITED et Z B dans les liens de ladite prévention, retenu par ailleurs Z B, Hui LONG tentative de corruption en les condamnant à douze (12) mois d'emprisonnement ferme et enfin condamné solidairement la société SINOHYDRO COPORATION LIMITED et Z B à cinq cent millions (500 000 000) francs CFA d’amende ferme ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le moyen unique tiré de la violation de la loi
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de la loi en ce que les juges de la Cour d’appel de Cotonou ont réduit à cinq cent millions (500 000 000) francs CFA le montant des amendes douanières réclamé par l’administration douanière alors que, selon le moyen, la direction générale des douanes et droits indirects a demandé la condamnation des prévenus au titre desdites amendes à la somme de un milliard (1 000 000 000) francs CFA ;
Qu’en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges de la cour d’appel ont violé l’article 416 du code des douanes institué par la loi n°2014- 20 du 12 septembre 2014 qui interdit aux juges de modérer les droits, confiscations et amendes au préjudice de l’administration des douanes, et leur arrêt encourt cassation de ce chef ;
Attendu qu’en réplique les conseils des défendeurs au pourvoi sollicitent au principal le rejet du pourvoi au motif que l'interdiction faite au juge pénal dans le code douanier du 12 septembre 2014 de modérer les amendes, devient sans effet voire désuète dès l’entrée en vigueur du nouveau code pénal institué par la loi n°2018-16 du 28 décembre 2018 dont l’article 88, renforcé par l’article 1004 permet au juge, lorsqu’une infraction est punie d’une peine d'amende, de prononcer une amende d’un montant inférieur à celle qui est encourue ;
Qu’au subsidiaire, ils demandent la cassation sans renvoi en invitant la haute Juridiction, au cas où elle déclarerait recevable le pourvoi du procureur général, à fixer le montant de l'amende à laquelle devrait être condamnée la société SINOHYDRO CORPORATION LIMITED et Z B ;
Attendu que l’article 416 de la loi N°2014-20 du 12 septembre 2014 portant code des douanes en République du Bénin dispose : « les juges ne peuvent modérer ni les droits, ni les confiscations et amendes, non plus en ordonner l’emploi au préjudice de l'administration des douanes » ;
Attendu que les amendes indiquées dans cette disposition qui dans le code des douanes, figure dans la rubrique consacrée aux "défenses faites aux juges” ne sauraient être confondues avec les amendes pénales dont il est question dans l’article 88 de la loi n°2018-16 du 28 décembre 2018 portant code pénal qui énonce que : « lorsqu'une infraction est punie d'amende, la juridiction peut prononcer une amende d’un montant inférieur à celle qui est encourue » ;
Que si les amendes pénales au sens large sont une peine pécuniaire obligeant un condamné à verser une certaine somme d'argent au Trésor public, elles doivent être distinguées des amendes douanières qui sont à la fois une peine et une mesure de réparation destinées à récupérer les sommes dont l’administration des douanes a pu être privée ; que la limitation du pouvoir du juge de procéder à une réduction ou à un contrôle de proportionnalité sur le montant desdites amendes douanières telle que prévue par l’article 416 du code des douanes institué par une loi, du reste spéciale, est justifiée par des considérations tenant à la nécessité d'assurer la sécurité publique et fiscale en matière de fraude douanière ;
Attendu que dans le cas d’espèce, en condamnant la société SINOHYDRO COPORATION LIMITED et Z B à cinq cent millions (500 000 000) de francs CFA, contre la somme d’un milliard (1 000 000 000) francs CFA sollicitée par l’administration douanière, la cour d'appel a modéré l’amende, en violation des prescriptions d’ordre public de l’article 416 susvisé du code des douanes ;
Que dès lors, l'arrêt attaqué mérite cassation et annulation ;
PAR CES MOTIFS Declare recevable le pourvoi dans l'intérêt de là Tor du procureur général près la Cour suprême sur saisine du ministre chargé de la justice ;
Au fond
Casse et annule l’arrêt n°157/2CC-2020 rendu le 04 décembre 2020 par la cour d’appel de Ac uniquement en ce qui concerne la violation de l’article 416 de la loi n°2014-20 du 12 septembre 2014 portant code des douanes en République du Bénin ;
Renvoie la cause devant la cour d'appel de Cotonou autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public.
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême, au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne le retour de la procédure au procureur général près la cour d'appel de Cotoou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de : Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT; Michèle O. A. CARRENA ADOSSOU et Georges TOUMATOU, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l'audience publique du vendredi vingt-trois avril deux mille vingt-un, la Cour étant composée comme il est dit ci- dessus en présence de : Nicolas BIAO, AVOCAT GENERAL; Osséni SEIDOU BAGUIRI, GREFFIER;
Et ont signé
Le président rapporteur, Le greffier.
Sourou Innocent AVOGNON Osséni SEIDOU BAGUIRI


Synthèse
Numéro d'arrêt : 23/CJ-P
Date de la décision : 23/04/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2021-04-23;23.cj.p ?
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