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12/03/2021 | BéNIN | N°177CJ-DF

Bénin | Bénin, Cour suprême, 12 mars 2021, 177CJ-DF


Texte (pseudonymisé)
[N° 177CJ-DF du Répertoire ; N° 2019-40/CJ-DF du greffe ; Arrêt du 12 mars 2021 ; Affaire : Ab Aa AH et autres (Me Cyrille DJIKUI) CI Ab Af Z (M°° AG AI& Ak B).
Pourvoi en cassation — Juridiction de cassation — Violation de la loi — Fausse application du principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil — Cassation (Oui).
Est irrecevable le moyen tiré de la violation de la loi mais tendant en réalité à remettre en discussion devant la juridiction de cassation les éléments de fait souverainement appréciés par les juges du fond.
Encourt cas

sation, la décision qui fait une mauvaise ou fausse application du principe de l’a...

[N° 177CJ-DF du Répertoire ; N° 2019-40/CJ-DF du greffe ; Arrêt du 12 mars 2021 ; Affaire : Ab Aa AH et autres (Me Cyrille DJIKUI) CI Ab Af Z (M°° AG AI& Ak B).
Pourvoi en cassation — Juridiction de cassation — Violation de la loi — Fausse application du principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil — Cassation (Oui).
Est irrecevable le moyen tiré de la violation de la loi mais tendant en réalité à remettre en discussion devant la juridiction de cassation les éléments de fait souverainement appréciés par les juges du fond.
Encourt cassation, la décision qui fait une mauvaise ou fausse application du principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil.
La Cour,
Vu les actes n°21, 23, 24, 25, 26, 27 et 28 des 28 février et 08 mars 2019 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lesquels Ad A, Ac X, Ah C et Ab Aa AH ont élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°026/19 rendu le 26 février 2019 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu là ToI N7 ZU13-U1 du 14 aout 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi douze mars deux mil vingt et un, le conseiller Michèle CARRENA ADOSSOU en son rapport ;
Ouï l’avocat général Pierre Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant les actes n°21, 23, 24, 25, 26, 27 et 28 des 28 février et 08 mars 2019 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, Ad A, Ac X, Ah C et Ab Aa AH ont élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°026/19 rendu le 26 février 2019 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Que par lettre n°4632/GCS du 02 juillet 2019 du greffe de la Cour suprême, maître Cyrille DJIKUI, conseil de Ab Aa AH a été invité à consigner dans le délai de quinze (15) jours et à produire son mémoire ampliatif dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1° et 933 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
Que par correspondance en date à Cotonou du 28 octobre 2020, maîtres Ak Aj B et Jean-Claude M. AI, conseils des défendeurs au pourvoi ont versé leurs observations au dossier ;
EXAMEN DU POURVOI
En la forme Attendu que Tes présents pourvois ont été Introduits dans les forme et délai légaux ;
Qu'il y a lieu de les déclarer recevables ;
Au fond
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date à Cotonou du 23 avril 2010, Ab Af Z a saisi le tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey-Calavi statuant en matière civile de droit traditionnel des biens, d’une action en confirmation de droit de propriété sur un domaine d’une superficie de O3ha 58a 97ca sis à Agonkessa-Adjagbo Commune d’Abomey-Calavi contre Ag Ai Y, Aa Ab
Que vidant son délibéré, le tribunal saisi a, par jugement n°002/5CB/12 du 22 février 2012, entre autres dit qu’il n’y a pas
AH et Ah C, homologué le procès-verbal de règlement amiable intervenu entre Ab Af Z et Ag Ai Y, déclaré nulles toutes les ventes opérées par les défendeurs à l’exception de Ag Ai Y et ordonné l’expulsion de tous occupants de leur chef du domaine litigieux ;
Que sur appel de Ah C, la cour d'appel de Cotonou a, par l’arrêt n°026/19 du 26 février 2019 confirmé en toutes ses dispositions le jugement n°002/5CB/12 du 22 février 2012 après avoir rejeté la demande de production de l’original de la convention de vente de Af Ab Z et l'expertise graphologique ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le moyen tiré de la violation de la loi en ses deux
branches Première branche du moyen : violation de l’article 222 du
code de procédure civile, commerciale, sociale,
administrative et des comptes
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 222 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, en ce que, les juges de la cour d'appel ont rejeté la demande de production par l'intimé de l’original de sa convention de vente en date du 24 mars 1984 et son expertise graphologique aux motifs que, « la demande de production de l’original de la convention de vente du 24 mars 1984 de Z Ab Af et celle de son expertise graphologique visent le même objectif, à savoir établir le caractère authentique ou non de cette convention de vente ; …. que Z Ab Af a été poursuivi devant le juge pénal pour faux certificats et fausse attestation s'agissant de cette même convention ; … que le juge pénal l’a relaxé purement et simplement par une décision devenue définitive ; … que l'autorité de la chose jugée au criminel sur le civil fait obstacle à cette recherche sur le caractère authentique ou non de cette convention par le juge civil ; qu’il y a lieu de rejeter ces demandes », alors que, selon le moyen, l’autorité de la chose jugée au pénal n’empêche pas le juge de la propriété foncière d’ordonner des mesures d’instruction légalement imposées par la loi, aux fins de la manifestation de la vérité ;
Que l’article 222 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes dispose : « Les pièces que les parties déposent au dossier doivent l'être en original ou en copies certifiées conformes à l'original ;
Le juge saisi de l'affaire peut, à tout moment, se faire représenter l'original de la pièce déposée » ;
Qu'il appartient à la juridiction saisie d’assurer le respect de cette obligation par les parties ;
Que nulle part, il n’est prescrit que l’autorité de la chose jugée relativement à une pièce dispense de l’obligation de la produire « en original ou en copies certifiées conformes à l'original » à l’occasion des instances postérieures à la décision ayant acquis autorité de la chose jugée ;
de
Que la Tattude contérée au juge « de se faire représenter l'original de la pièce déposée » ne vaut que lorsque les pièces sont déposées « en copiés certifiées conformes à l'original » ;
Que lorsqu'elles sont déposées en simple copie et que la partie adverse réclame la production en original en vertu des dispositions de l’article 222 précité, le juge est tenu de faire droit à la demande ;
Qu’en l'espèce, devant la cour d’appel, la pièce dont la production de l’original a été sollicitée a été produite en simple copie ;
Qu’en jugeant comme ils l’ont fait, les juges de la cour d’appel n’ont pas assuré le respect de la loi ;
Mais attendu que sous le grief de violation de l’article 222 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, cette branche du moyen tend en réalité à remettre en débat devant la haute Juridiction, les éléments de fait souverainement appréciés par les juges du fond ;
Que le moyen, en cette branche est irrecevable ;
Deuxième branche du moyen : violation de l’article 5 alinéa 2 la loi n°2012-15 du 12 décembre 2012 portant code de
procédure République pénale en du Bénin
Attendu qu'il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 5 alinéa 2 de la loi n°2012-15 du 12 décembre 2012 portant code de procédure pénale en République du Bénin, en ce qu'il a confirmé le jugement querellé en toutes ses dispositions, aux motifs d’une part « qu’il ressort des pièces du dossier que le juge pénal a relaxé purement et simplement Z Ab Af entre autres pour abattage d'arbres appartenant à autrui sur le domaine litigieux .… que cette décision s'impose au juge civil » et d’autre part « qu’en raison du principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil, le juge civil ne peut connaître à nouveau d’une question définitivement tranchée par le juge pénal. que le caractère authentique de la convention de la vente du 24 mars 1984 a été définitivement tranché par le juge pénal…. que c’est à tort que les appelants évoquent l’infirmation du jugement de ce fait... qu’il y a lieu de rejeter ce moyen et de confirmer le jugement entrepris sur ce point », alors que, selon la branche du moyen, l’article 5 alinéa 2 de la loi n°2012-15 du 12 décembre 2017 portant code de procédure pénale en République du Bénin dispose : « il est suris au jugement de cette action exercée devant la juridiction civile tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement » ;
Que ces dispositions imposent au juge civil, lorsque l’action publique est enclenchée, de surseoir à statuer jusqu’à décision définitive du juge répressif et en cas de décision définitive, de se conformer à celle-ci ;
Que le principe de l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil interdit au juge civil de remettre en cause ce qui a été jugé au pénal quant à l'existence d’un fait formant la base commune de l’action publique et de l’action civile quant à sa qualification et à la culpabilité de celui à qui ce fait a été imputé ;
Que selon la jurisprudence, l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil ne peut être valablement invoquée que lorsqu’I existe une identité de cause, d’objet et de parties entre les deux poursuites ;
Qu’en l'espèce, les parties au procès pénal ne sont pas les mêmes que celles qui ont comparu devant le juge civil ;
Que l’action portée devant le juge civil est une action en revendication de droit de propriété qui ne vise donc pas la réparation d’un quelconque préjudice causé par les infractions de faux et d’abattage d’arbres appartenant à autrui pour lesquelles Ab Af Z a été poursuivi puis relaxé par le juge pénal ;
Que cet arrêt pénal ne pouvait et n’a nulle part confirmé le droit de propriété de Ab Af Z, pas plus qu’il n’a déclaré authentique la convention de vente du 24 mars 1984 exhibée par lui ;
Qu'’en évoquant l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil pour rejeter les moyens des concluants et confirmer ainsi le jugement rendu, les juges de la cour d’appel ont violé la loi par fausse application du principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil et exposent ainsi leur décision à cassation ;
Attendu en effet que les décisions pénales n’ont, au civil autorité de la chose jugée que relativement à l’existence du fait constituant la base commune des actions civile et pénale et la culpabilité de celui à qui ce fait est imputé ;
Que l’autorité s'attache essentiellement aux éléments tranchés par la décision pénale que le juge civil doit tenir pour acquis ;
Que par sa décision de relaxe, la juridiction répressive n’a pas authentifié la convention de vente sous seing privé en date du 24 mars 1984 relative à un terrain de contenance trois (03) hectares cinq huit (58) ares quatre-vingt-dix-sept (97) centiares sis à Ae ;
Qu’en énonçant que « l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil fait obstacle à toute autre recherche sur le caractère authentique ou non de cette convention de vente par le juge civil » pour rejeter la demande de production par Ab Af Z de l’original de sa convention de vente, la cour d'appel a méconnu les dispositions de la loi et l’arrêt encourt cassation sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme les présents pourvois ;
Au fond et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres
moyens, casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt
n°026/19 rendu le 26 février 2019 par la chambre civile de droit de propriété foncière de la cour d'appel de Cotonou ;
Renvoie la cause et les parties devant la même cour d'appel autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu'aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d'appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire)
composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire,
PRESIDENT ;
Michèle CARRENA ADOSSOU
Et
André SAGBO CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi douze mars deux mil vingt et un, la Cour étant composée comme il est dit ci- dessus en présence de :
Pierre Nicolas BIAO, avocat général, MINISTERE PUBLIC ;
Mongadji Henri YAÏ, GREFFIER ;
Et ont signé,
Le président, Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Michèle CARRENA ADOSSOU
Le greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 177CJ-DF
Date de la décision : 12/03/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2021-03-12;177cj.df ?
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