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27/11/2020 | BéNIN | N°67

Bénin | Bénin, Cour suprême, 27 novembre 2020, 67


Texte (pseudonymisé)
N°67/CJ-DF du REPERTOIRE ; N°2004-20/CJ-DF du Greffe ; Arrêt du 27 Novembre 2020 ; Ag B Ai B et autres C/ Collectivité Y REP/ Ae Y Ab.



Procédure civile – Droit foncier – Interprétation d’un arrêt – Qualité à agir – Interdiction de modifier ou de contredire l’arrêt interprété – Cassation.



En matière de recours en interprétation, seules les parties concernées par la décision en cause ont qualité à agir.



Le juge d’appel qui interprète sa décision n’est pas admis à la modifier ou la contredire.



La

Cour,

Vu l’acte 37/2003 du 16 septembre 2003 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Brice TOHOUNGBA, du cabinet Wenc...

N°67/CJ-DF du REPERTOIRE ; N°2004-20/CJ-DF du Greffe ; Arrêt du 27 Novembre 2020 ; Ag B Ai B et autres C/ Collectivité Y REP/ Ae Y Ab.

Procédure civile – Droit foncier – Interprétation d’un arrêt – Qualité à agir – Interdiction de modifier ou de contredire l’arrêt interprété – Cassation.

En matière de recours en interprétation, seules les parties concernées par la décision en cause ont qualité à agir.

Le juge d’appel qui interprète sa décision n’est pas admis à la modifier ou la contredire.

La Cour,

Vu l’acte 37/2003 du 16 septembre 2003 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Brice TOHOUNGBA, du cabinet Wenceslas de SOUZA et Brice TOHOUNGBA, au nom et pour le compte de ALLADE Vincent, ALLADE Robert et autres, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°41/2003 rendu le 25 juillet 2003 par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes ; modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;

Vu la loi n°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi vingt-sept novembre deux mille vingt, le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;

Ouï le Procureur Général Ad C en ses conclusions ;

Attendu que suivant l’acte 37/2003 du 16 septembre 2003 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Brice TOHOUNGBA, du cabinet Wenceslas de SOUZA et Brice TOHOUNGBA, au nom et pour le compte de ALLADE Vincent, ALLADE Robert et autres, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°41/2003 rendu le 25 juillet 2003 par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;

Que par lettre n°0967/GCS du 11 mars 2005 et n°2735/GCS du 19 juillet 2005 du greffe de la Cour suprême, maîtres de SOUZA Wenceslas et Brice TOHOUNGBA ont été mis en demeure d’avoir à consigner dans le délai de quinze (15) jours et à produire leur mémoire ampliatif dans le délai d’un (01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 42, 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême ;

Que la consignation a été payée ;

Que le mémoire ampliatif a été produit ;

Que par lettre n°1230/GCS du 31 mars 2006, le mémoire ampliatif a été communiqué à maître Alphonse ADANDEDJAN, conseil constitué pour la défense des intérêts de la collectivité Y par lettre n°044/02/06/CAA/SK du 10 février 2006 ;

Que le mémoire en défense n’a pas été produit ;

Que le procureur général a pris ses conclusions ;

Le dossier est en état d’être examiné ;

EN LA FORME

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;

Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;

AU FOND

Faits et procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date du 12 décembre 2001, la collectivité Y représentée par Dah Ab Y, a saisi la cour d’appel de Cotonou aux fins de l’interprétation de l’arrêt n°54/2000 rendu le 11 juillet 2000 dans l’affaire Al Ag B et autres contre la collectivité familiale Y représentée par Dah Ab Y ;

Que par arrêt n°41/2003 rendu le 25 juillet 2003, la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou «a dit que selon l’arrêt, seule la collectivité TCHBOZO prise en tant qu’entité différente de la collectivité A est déboutée de toutes ses prétentions » et a, par ailleurs « dit que le droit de propriété de la descendance A est reconnu, sur les immeubles litigieux, par l’arrêt, descendance dont fait partie tant les ALLADE pris en tant que descendants de DJISSI ou KOKOUNON, tout comme les ATANHOUETO, que les descendants directs de Af Z Y dit Dah A en ce que ce dernier est le fils de Af dite HONVEHOUN » ;

Que c’est contre cet arrêt que le présent pourvoi a été élevé ;

DISCUSSION

Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi par dénaturation de la requête en interprétation en date du 12décembre 2001 de la collectivité familiale Y

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de la loi par dénaturation de la requête en interprétation en ce que, le dispositif dudit arrêt laisse croire que la requête a été introduite par le nommé Ab Y, seul représentant légal de la famille Y, alors que, selon le moyen, la demande en interprétation a été en vérité formulée par Ah Y et Aj A qui y ont apposé leurs signatures ; que la méconnaissance, par la cour d’appel de la personne qui a introduit la requête en interprétation, constitue une dénaturation de ladite requête ; que de ce fait, l’arrêt attaqué encourt cassation ;

Mais attendu que la cour d’appel, sur ce point, a motivé sa décision ainsi qu’il suit : « Attendu qu’il est constant que l’arrêt dont interprétation est demandée oppose B Al Ag, Ak Ab d’une part, à la collectivité familiale Y représentée par Ae Y Ab ;

Attendu qu’en matière d’interprétation, seules les parties concernées par la décision en cause sont habilitées à demander son interprétation ;

Qu’en l’espèce, s’il est vrai que la demande en interprétation a été signée par Ah Y et Aj A, il n’en demeure pas moins vrai que l’expéditeur de la requête donc l’auteur de ladite requête est la collectivité familiale Y ; que, par ailleurs, en droit local, caractérisé par sa nature essentiellement orale, c’est à l’audience que les parties précisent leurs demandes et prétentions ;

Que cette particularité procédurale lie davantage le juge que n’importe quelle demande écrite ;

Qu’à l’audience, il est apparu clairement dès l’entame des débats que c’est la collectivité familiale Y qui a demandé l’interprétation de l’arrêt entrepris ;

Qu’il échet dès lors, de rejeter le moyen des défendeurs en interprétation, fondée sur la qualité des demandeurs » ;

Attendu que les signataires de la requête, Ah Y et Aj A, ne contestent pas avoir agi au nom de la collectivité familiale Y ; que non plus Dah Ab Y représentant légal de ladite collectivité ne conteste à Ah Y et Aj Ac A avoir signé la requête de ladite collectivité ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen tiré du défaut de réponse à conclusion

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué le défaut de réponse à conclusion en ce que, l’arrêt attaqué n’a pas cru devoir répondre à la fin de non-recevoir invoquée par les demandeurs au pourvoi et tirée du défaut de qualité des sieurs Ah Y et Aj Ac A à agir en interprétation au nom de la famille Y ;

Mais attendu que ce moyen trouve sa réponse dans le développement fait par rapport au premier moyen ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le troisième moyen tiré de la violation par les juges du second degré des principes du dessaisissement du juge et de l’autorité de la chose jugée

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation des principes de dessaisissement du juge et de l’autorité de la chose jugée en ce que, lorsqu’un jugement à caractère juridictionnel est rendu, le juge est dessaisi ; il ne peut y retrancher un mot, ni y ajouter un mot ;

Que la demande en interprétation ne doit pas être un moyen détourné de faire modifier le jugement ;

Qu’en l’espèce la demande en interprétation de la collectivité Y a justement été un moyen pour les juges du second degré de modifier l’arrêt n°54/2000 du 11 juillet 2000 de la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;

Qu’en effet, pour avoir reconnu entre autres le droit de propriété des descendants directs de Af Z Y sur le domaine litigieux, l’arrêt d’interprétation n°41 du 25 juillet 2003 dont pourvoi a modifié substantiellement et même contredit l’arrêt n°54/2000 du 11 juillet 2000 qui a débouté la collectivité Y (dont fait partie Af Z Y) de toutes ses demandes et qui lui a fait défense de perturber la descendance de A dans la jouissance paisible de leur bien ;

Attendu en effet que l’arrêt n°54/2000 du 11 juillet 2000 interprété, a reconnu le droit de propriété de la descendance de A sur la maison A dite Aa et débouté la collectivité Y de toutes ses prétentions et lui a fait défense de les perturber dans la jouissance paisible de leur bien ;

Que l’arrêt interprétatif n°41/2003 du 25 juillet 2003 dont pourvoi, en disant « que seule la collectivité Y prise en tant qu’entité différente de la collectivité A est déboutée de toutes ses prétentions » par l’arrêt n°54/2000 du 11 juillet 2000 et « que le droit de propriété de la descendance A est reconnu sur les immeubles litigieux par l’arrêt, descendance dont font partie, tant les ALLADE que les descendants directs de Af Z Y dit Dah ASSOGBAGUE… », introduit une certaine contradiction dans l’arrêt n°54/2000 du 11 juillet 2000 qu’il interprète ;

Que le moyen est fondé ;

PAR CES MOTIFS

- Reçoit en la forme le présent pourvoi ;

- Casse et annule l’arrêt n°41/2003 du 25 juillet 2003 rendu par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou en toutes ses dispositions ;

- Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Cotonou autrement composée ;

- Met les frais à la charge du Trésor public.

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :

Sourou Innocent AVOGNON Président de la Chambre Judiciaire, PRESIDENT ;

Michèle CARRENA ADOSSOU Et Isabelle SAGBOHAN, CONSEILLERS ;

Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-sept novembre deux mille vingt, la cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ad C, Procureur Général, MINISTERE PUBLIC ;

Et de Maître Hortense LOGOSSOU-MAHMA, GREFFIER

Et ont signé,

Le Président - Rapporteur Le Greffier

Sourou Innocent AVOGNON Hortense LOGOSSOU-MAHMA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 67
Date de la décision : 27/11/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2020-11-27;67 ?
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