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04/09/2020 | BéNIN | N°2018-25/CA2

Bénin | Bénin, Cour suprême, 04 septembre 2020, 2018-25/CA2


Texte (pseudonymisé)
N°199/CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN
N° 2018-25/CA2 du Greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
Arrêt du 04 septembre 2020 COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE
AFFAIRE :
ALANDA Soumaïla
- Ministre du Travail et de la Fonction
Publique et des Affaires Sociales
- Etat béninois
La Cour,
Vu la requête introductive d'instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 22 août 2018, enregistrée au greffe le 31 août 2018 sous le n°1042/GCS, par laquelle Aa A assisté de maître Timothée A. YA

BIT, Avocat au barreau du Bénin, a saisi la Cour suprême d'un recours en annulation de la dél...

N°199/CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN
N° 2018-25/CA2 du Greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
Arrêt du 04 septembre 2020 COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE
AFFAIRE :
ALANDA Soumaïla
- Ministre du Travail et de la Fonction
Publique et des Affaires Sociales
- Etat béninois
La Cour,
Vu la requête introductive d'instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 22 août 2018, enregistrée au greffe le 31 août 2018 sous le n°1042/GCS, par laquelle Aa A assisté de maître Timothée A. YABIT, Avocat au barreau du Bénin, a saisi la Cour suprême d'un recours en annulation de la délibération du conseil des ministres en date du 28 février 2018 relative à la vérification de l'authenticité de ses diplômes ;
Vu la loi N° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi N° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi N° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes en République du Bénin modifiée par la loi n°2016-16 du 28 juillet
Vu les pièces du dossier ;
Le conseiller Césaire KPENONHOUN entendu en son rapport et l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
En la forme
Sur la recevabilité du recours
Considérant qu’au soutien de son recours, Aa A expose qu'il a intégré le corps des préposés de la douane en 2005 sur la base du Brevet d’Etude du Premier Cycle (B.E.P.C) et qu’il occupait jusqu’à la date de l’introduction de sa requête, le
poste d’agent de constatation ; ik Qu’il était en poste à Agouna lorsqu’en octobre 2017, la commission nationale de vérification de l’authenticité des diplômes (CNVAD) l’a auditionné au sujet de l’authenticité de son diplôme de baccalauréat de l'enseignement du second cycle obtenu au Niger en 2011 ;
Que le rapport produit par ladite commission sur sa situation et celle d’autres agents permanents de l'Etat, fait état de ce que trente-quatre (34) agents de l’Etat dont lui ont été convaincus de détenir de faux diplômes et seraient passés aux aveux ;
Que le conseil des ministres, en sa séance du 28 février 2018, a approuvé ce rapport et a demandé instamment aux ministres compétents de mettre fin au paiement des traitements des agents concernés ;
Qu’en ce qui le concerne, il a été mis, après la décision du conseil des ministres, à la disposition de l’Inspection générale des services par note de service n°644/DGDDI/DGR/SGRH du 02 mars 2018 du directeur général des douanes et droits indirects, et que depuis lors, ses soldes ont été suspendues ;
Que la décision du conseil des ministres est entachée d’illégalité interne et externe ;
Qu’il a adressé, par lettre en date du 24 avril 2018, un recours gracieux au président de la République aux fins de retrait de la décision visée ;
Que le président de la République n’ayant pas réagi à son recours gracieux, il en réfère à la haute Juridiction aux fins d’annulation de cette décision implicite de rejet ;
Considérant que le ministre du Travail et de la Fonction Publique soulève l’irrecevabilité du recours tirée d’une part, du défaut de liaison du contentieux et d’autre part, du non-respect du délai du recours contentieux ;
Sur l’irrecevabilité du recours tirée de la non liaison du contentieux
Considérant que le ministre du Travail et de la Fonction Publique fait observer que dans son recours gracieux en date du 24 avril 2018, le requérant n’a pas fait mention « d’une demande de retrait de la décision du conseil des ministres du 28 février 2018 en ce qu’elle instruit les ministres compétents de mettre fin au paiement de son traitement » ;
Que ne l’ayant pas fait, le recours contentieux dans lequel cette demande a été formulée doit être déclaré irrecevable pour défaut de liaison du contentieux ;
Mais considérant qu’il existe au dossier copie du recours gracieux en date du 24 avril 2018 ;
Que la conclusion du requérant dans ce recours gracieux est formulée comme suit: «C’est pourquoi, je sollicite en toute confiance qu’il vous plaise, Monsieur le Président de la République,
retirer â la décision 2 du Conseil des Ministres du 28 février 2018 en ce LS qu'elle instruit les Ministres compétents de mettre fin au paiement de mon traitement » ;
Considérant qu’il ressort des termes du recours gracieux qu’ils sont identiques à ceux du recours contentieux en ce qu’ils tendent au retrait la décision du conseil des ministres du 28 février 2018 demandant aux ministres compétents de mettre fin au paiement du traitement du requérant ;
Qu'il suit de là que le moyen est inopérant et mérite rejet ;
Sur l’irrecevabilité du recours tirée du non-respect du délai du recours contentieux
Considérant que l’administration soutient que le recours contentieux de Aa A est tardif ;
Que le requérant disposait d’un délai qui expirait le 22 août 2018 pour se pourvoir contre la décision implicite de rejet par le Président de la République de son recours gracieux enregistré le 26 avril 2018 ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 827 de la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes en République du Bénin, « Le délai du recours pour excès de pouvoir est de deux (02) mois. Ce délai court de la publication ou de la notification de la décision attaquée.
Avant de se pouvoir contre une décision individuelle, le demandeur doit présenter un recours hiérarchique ou gracieux tendant à faire rapporter ladite décision.
Le silence gardé plus de deux (02) mois par l'autorité compétente pour le recours hiérarchique ou gracieux vaut décision
Le demandeur dispose pour se pouvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux (02) mois à compter du jour de l'expiration de la période de deux (02) mois sus- mentionnée.
Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux (02) mois, elle fait à nouveau courir le délai de recours.
Les délais prévus pour introduire le recours ne commencent que du jour de la notification de la décision de rejet du recours gracieux ou à l'expiration du délai de deux (02) mois prévu à l'alinéa précédent... ».
Considérant que le requérant a saisi le président de la
République de son recours gracieux le 26 avril 2018 ; Jin Que l’intéressé pouvait jusqu’au 27 août 2018 saisir le juge administratif, le 26 août 2018 étant un dimanche ;
Considérant que le recours de Aa A a été enregistré à la Chambre administrative de la Cour suprême le 29 août 2018 ;
Que sous ce rapport, le requérant est forclos ;
Mais considérant que le recours présente à juger de faits constitutifs prima facie d’illégalité manifeste ;
Qu'’il y a lieu de relever le requérant de l’irrecevabilité de son recours et de déclarer ledit recours recevable ;
Au fond
Considérant requérant demande l’annulation de la délibération du conseil des ministres datée du 28 février 2018 en ce qui le concerne pour illégalité externe tirée du vice de forme d’une part et pour absence de base légale d’autre part ;
Sur l’illégalité externe de la décision querellée tirée du vice de forme
Considérant que le requérant fait valoir qu’en ordonnant aux ministres compétents d’interrompre le paiement de ses salaires et accessoires en dehors de toute procédure disciplinaire, le conseil des ministres a commis un vice de procédure qui justifie l’annulation de sa décision ;
Que cette décision viole les dispositions des articles 65 et suivants de la loi n°2015-20 du 02 avril 2015 portant statut spécial des personnels des Forces de Sécurité Publique et assimilées qui instaurent un ensemble de garanties disciplinaires au profit des fonctionnaires des douanes ;
Considérant que l’administration soutient que le requérant est un fonctionnaire de l’Etat régi par la loi n°2015-18 du 1” septembre 2015 portant statut général de la Fonction Publique ;
Que l’article 80 de ladite loi dispose « …La sanction de révocation avec perte des droits à pension est prononcée à l’encontre du fonctionnaire dans les cas ci-après : -détention et usage de faux diplôme… » ;
Que la seule détention de diplôme non authentique, notamment son diplôme de baccalauréat de l’enseignement du second cycle qu’il aurait obtenu au Niger en 2011, est une faute grave punie par la loi ;
Considérant l’article 235 de la loi n°2015-18 du 1” septembre 2015 portant que statut général de la Fonction Publique ÿ dispose : « En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu’il s’agisse d’un manquement à ses obligations professionnelles ou d’une infraction de droit commun, l’auteur de cette faute peut être immédiatement suspendu par le ministre utilisateur.
La décision prononçant la suspension d'un fonctionnaire doit préciser si l'intéressé conserve pendant le temps où il est suspendu le bénéfice de son traitement ou déterminer la quotité de la retenue qu'il subit et qui ne peut être supérieure à la moitié. En tout état de cause, il continue à percevoir la totalité des prestations familiales.
Le Conseil national de discipline est saisi de l'affaire sans délai et, sous peine de dessaisissement, doit se prononcer dans un délai d’un (01) mois. Ce délai est porté à trois (03) mois en cas
La situation du fonctionnaire suspendu doit être définitivement réglée dans un délai de trois (03) mois, à compter du jour où la décision de suspension a pris effet.
Lorsqu’aucune décision n’est intervenue au bout de trois (03) mois, l’intéressé reprend service ipso facto et perçoit à nouveau l’intégralité de son traitement……
Considérant que la suspension de fonction est une mesure conservatoire prise par l’administration qui décide d’écarter momentanément un agent du service ;
Que cette mesure d’éloignement, prise dans l’intérêt du service public et/ou dans celui de l’agent lui-même dans l’attente du règlement de sa situation, n’est pas une sanction disciplinaire ;
Que conformément aux dispositions de l’article 235 de la loi n°2015-18 du 1” septembre 2015 portant statut général de la Fonction Publique, la durée d’une suspension de fonction est limitée à trois (03) mois ;
Que lorsqu’aucune décision n’intervient au bout de trois (03) mois, l’intéressé reprend service et perçoit à nouveau l’intégralité de son traitement ;
Considérant que pour une décision de suspension intervenue en mars 2018, l’agent devra être réintégré au plus tard en juin 2018 en l’absence de sanction disciplinaire ;
Mais considérant qu’il ressort des débats à l’audience et des pièces du dossier, notamment du bulletin de solde du requérant que la mesure de suspension ordonnée par la décision du conseil des ministres en sa séance du 28 février 2018 a duré jusqu’en décembre 2018, soit au total neuf (09) mois ;
Que l’acte créateur de la suspension prolongée du paiement des soldes du requérant est sans conteste la décision du conseil des
ministres ; KI Qu’une telle décision du conseil des ministres qui maintient l’agent de l’Etat en suspension pendant plus de trois (03) mois en dehors de toute sanction disciplinaire viole les dispositions de l’article 235 de la loi n°2015-18 du 1°” septembre 2015 portant statut général de la Fonction Publique ;
Qu’il y a lieu de l’annuler sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
Par ces motifs,
Décide :
Article 1°" : Le recours en date à Cotonou du 22 août 2018, de Aa A tendant à l’annulation de la décision du conseil des ministres en date du 28 février 2018 mettant fin au paiement de ses traitements à la suite des travaux de la Commission Nationale de vérification de l'authenticité de diplôme, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ;
RArticle 3 : Est annulée, la décision du Conseil des ministres en date du 28 février 2018 mettant fin au paiement des traitements de l’intéressé ;
Article 4 : Les frais sont à la charge du Trésor public ;
Article 5: Le présent arrêt sera notifié aux parties et au procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre administrative) composée de :
Rémy Yawo KODO, Conseiller à la chambre administrative ;
PRESIDENT ;
Dandi GNAMOU
et CONSEILLERS ;
Césaire KPENONHOUN
Et prononcé à l’audience publique du vendredi quatre septembre deux mille vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Saturnin AFATON, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC ;
Bienvenu CODJO, GREFFIER ; }k ÿ .
Et ont signé,
Le Président, Césaire Le fonb Rapporteur, a KPENONHOUN 7°


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2018-25/CA2
Date de la décision : 04/09/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2020-09-04;2018.25.ca2 ?
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