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13/08/2020 | BéNIN | N°2018-57/CA1

Bénin | Bénin, Cour suprême, 13 août 2020, 2018-57/CA1


Texte (pseudonymisé)
AAG
N°183/CA du Répertoire
N°2018-57/CA1 du Greffe
Arrêt du 13 août 2020
AFFAIRE : Conseil National du
Patronat du Bénin (CNP)
Etat Béninois
Ministre de la Justice et de la Législation (MJL) REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE La Cour,
Vu la requête introductive d’instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 29 octobre 2018, enregistrée au greffe de la Cour le 13 novembre 2018 sous le numéro 1327/GCS, par laquelle le Conseil national du patronat (CNP) du Bénin, pris en la personne de s

on président en exercice, Ae Ac A, assisté de maître Issiaka MOUSTAFA, avocat au barreau du Béni...

AAG
N°183/CA du Répertoire
N°2018-57/CA1 du Greffe
Arrêt du 13 août 2020
AFFAIRE : Conseil National du
Patronat du Bénin (CNP)
Etat Béninois
Ministre de la Justice et de la Législation (MJL) REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE La Cour,
Vu la requête introductive d’instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 29 octobre 2018, enregistrée au greffe de la Cour le 13 novembre 2018 sous le numéro 1327/GCS, par laquelle le Conseil national du patronat (CNP) du Bénin, pris en la personne de son président en exercice, Ae Ac A, assisté de maître Issiaka MOUSTAFA, avocat au barreau du Bénin, carré n°1375 Aa Ab Ad, 02 BP 340 Gbégamey, au cabinet duquel domicile est élu en tant que de besoin, a saisi la Cour suprême d’un recours tendant à l’annulation du décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 portant nomination à l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et des cours d’appel de commerce ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, modifiée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Le conseiller Césaire KPENONHOUN entendu en son rapport et l’avocat général Nicolas Pierre BIAO en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré f conformément à la loi R ; $ En la forme
Sur la recevabilité
Considérant que le requérant expose :
Qu’aux termes de la loi n°2016-15 du 28 juillet 2016 modifiant la loi n°2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin, des tribunaux et cours d’appel de commerce ont été créés ;
Que l’article 58.2 de ladite loi dispose : « Il est institué une Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et des cours d'appel de commerce auprès du ministre en charge de la justice.
Elle suit et évalue en permanence l’organisation, le fonctionnement et l’activité des tribunaux et cours d’appel de commerce, la formation et la déontologie des juges consulaires des tribunaux de commerce et des conseillers consulaires des cours d'appel de commerce ;
Elle formule au besoin des propositions dans les mêmes domaines.
À la demande des présidents de cours d’appel de commerce ou sur son initiative, elle procède à des visites d’information dans les tribunaux et les cours d’appel de commerce ;
Elle rend compte de son activité dans un rapport annuel remis au ministre en charge de la justice. » ;
Qu’il en résulte que le contrôle des tribunaux et cours d’appel de commerce est effectué par un organe spécial chargé d’assurer le suivi et l’évaluation de ces juridictions ;
Que cette Autorité est également l’organe de discipline des juges et conseillers consulaires qui, en cas de faute disciplinaire, peuvent encourir des sanctions ;
Que dans ce cadre, l’article 58.3 de la même loi dispose que : « L'Autorité nationale assure la discipline des juges et conseillers consulaires dans les conditions fixées par le décret portant statut des juges et conseillers consulaires ;
L’Autorité nationale saisit le ministre en charge de la justice ou l'inspection des services judiciaires en cas de manquement des juges professionnels et des greffiers aux devoirs de leur charge » ;
Que pour mieux remplir la mission qui lui est dévolue, le législateur a prévu dans la composition de l’Autorité, les opérateurs économiques provenant des chambres consulaires et du patronat ;
Qu’en … conséquence, conformément à l’article 58.4 de la loi supra citée : « L'Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d'appel de commerce comprend :
-un président de chambre à la Cour suprême désigné par le premier président de la Cour, président de l'Autorité nationale ;
-l’inspecteur général des services judiciaires ;
-un avocat désigné par le Barreau du Bénin ;
-un représentant des chambres consulaires ;
-un représentant de l'organisme représentant le patronat ;
Les membres sont nommés pour un mandat de quatre ans renouvelable une seule fois.
Un membre suppléant est désigné dans les mêmes conditions pour chaque membre titulaire (….) » ;
Qu’au regard de cet article, les membres de l’Autorité doivent provenir aussi bien des chambres consulaires que du patronat à raison d’un titulaire et d’un suppléant par structure ;
Qu’il s’attendait à la désignation de son représentant devant siéger quand il a appris que seul le représentant des chambres consulaires a été nommé par décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 alors qu’il a régulièrement envoyé le nom de ses membres titulaire et suppléant devant être également nommés ;
Que le texte réglementaire ci-dessus évoqué ne mentionne nulle part, le nom du représentant titulaire du patronat et de son suppléant à l’Autorité, alors que la loi précise bien que le patronat y soit représenté ;
Que le CNP est la seule organisation nationale représentative du patronat au Bénin, et qu’à ce titre, il siège en qualité de membre employeur suppléant au conseil d’administration du Bureau International du Travail (BIT) à Genève ;
Qu’il résulte de ce qui précède que le décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 discrimine le CNP et viole de ce fait la loi ;
Que cette illégalité manifeste dont est entachée le décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 préjudicie à ses intérêts de sorte qu’il faille l’annuler avec toutes les conséquences de droit ;
Que préalablement à la saisine de la Cour suprême, il adressé un recours gracieux en date du 25 juin 2018 reçu à la présidence de la
République publiq le 20 J juillet f 2018 ; @& Ÿ Sur l’irrecevabilité du recours tirée de la tardivité du recours gracieux
Considérant que maître Charles BADOU, conseil de l’administration soulève l’irrecevabilité du recours au motif que le recours gracieux en date du 25 juin 2018, reçu par le Président de la République le 20 juillet 2018, est tardif en ce qu’il devrait être exercé avant l’expiration du délai de deux (02) mois à compter de la publication de l’acte attaqué, soit à compter du 13 décembre 2017 et ce, conformément à l’article 827 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, modifiée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Considérant que l’article 827 supra cité dispose : « Le délai du recours pour excès de pouvoir est de deux (02) mois. Ce délai court de la date de publication ou de notification de la décision attaquée.
Avant de se pourvoir contre une décision individuelle, le demandeur doit présenter un recours hiérarchique ou gracieux tendant à faire rapporter ladite décision.
Le silence gardé plus de deux (02) mois par l'autorité compétente pour le recours hiérarchique ou gracieux vaut décision de rejet.
Le demandeur dispose pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux (02) mois à compter du jour de l'expiration de la période de deux (02) mois sus-mentionnée. Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux (02) mois, elle fait à nouveau courir le délai de recours. Les délais prévus pour introduire le recours ne commencent à courir que du jour de la notification de la décision de rejet du recours gracieux ou à l'expiration du délai de deux (02) mois prévu à l'alinéa précédent… » ;
Qu’il en résulte que le recours contentieux n’est recevable contre un acte administratif individuel qu’à la condition d’être exercé dans le délai de deux (02) mois à l’expiration d’un délai équivalent imparti à l’administration pour prendre position sur le recours gracieux ou hiérarchique, lequel court à partir de la saisine de cette dernière par le demandeur ;
Considérant qu’en l’espèce, l’acte attaqué est individuel ;
Que le délai pour former le recours précontentieux devant l’administration court à partir de la date de la connaissance acquise ou de sa notification aux intéressés ;
Qu’en l’absence de preuve par l’administration que le requérant a reçu notification ou a connaissance acquise du décret attaqué le 13 décembre 2017, date de sa signature, il est réputé en avoir connaissance acquise au plus tard à la date de son recours gracieux, soit le 25 juin 2018 ;
Qu’en computant les délais à partir de cette date, il devra adresser à l’administration son recours gracieux dans le délai légal de deux (02) mois qui expire le 25 août 2018 ;
Considérant que le requérant a adressé son recours gracieux à l’administration le 20 juillet 2018, soit avant le 25 août 2018, comme en témoigne la décharge du secrétariat particulier du Président de la République ;
Que son recours gracieux est intervenu dans le délai légal ;
Que par conséquent, l’irrecevabilité soutenue en la présente cause par le conseil de l’administration ne saurait prospérer ;
Qu’il y a lieu de déclarer le recours recevable pour avoir été exercé dans les forme et de la loi ;
Au fond
Considérant qu’au soutien de son recours en annulation de la décision implicite de rejet de la demande en rétractation du décret n°2017-576 du 13 décembre 2017, le requérant invoque d’une part, le moyen tiré de la violation de la loi, d’autre part, la violation du principe de l’égalité de tous devant la loi ;
Sur la violation de la loi et sans qu’il soit nécessaire
d’examiner le second moyen
Considérant que le requérant soutient que les dispositions de l’article 58,4 de la loi n°2016-15 du 28 juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin prévoient que : «l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce comprend :
-un président de chambre à la Cour suprême désigné par le premier président de la Cour, président de l’Autorité nationale ;
-un avocat désigné par le Barreau du Bénin ;
-un représentant des chambres consulaires ; LP -un représentant de l’organisme représentant le patronat ;
Les membres sont nommés pour un mandat de quatre (04) ans renouvelable une seule fois.
Un membre suppléant est désigné dans les mêmes conditions pour chaque membre titulaire (…) » :
Qu’au regard de cet article, le décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 portant nomination à l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce viole la loiet mérite annulation pour n’avoir pas pris en considération le membre désigné de l’organisme représentant le patronat et dont le nom a été pourtant communiqué au ministre en charge de la justice avant la prise du décret querellé ;
Considérant que l’administration fait valoir que c’est face à l’incapacité du patronat à désigner un représentant consensuel accepté des deux organisations qui le compose, à savoir la confédération nationale des employeurs du Bénin (CONEB) et le conseil national du patronat (CNP), qu’elle a procédé, en l’absence de leur représentant, à la nomination des membres de l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce ;
Considérant que l’administration admet qu’effectivement, l’article 58-4 de la loi n°2016-15 du 28 juillet 2016 modifiant la loi n°2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin prévoit qu’un membre de l’organisme représentant le patronat siège au sein de l’autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce ;
Que de ce fait, le décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 ne viole pas la loi n°2016-15 du 28 juillet 2016 ci-dessus citée ;
Mais considérant que selon l’article 58.4 de la loi n°2016-15 du 28 juillet 2016 supra cité, l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce comprend, entre autres, un représentant de l’organisme représentant le patronat ;
Que l’administration a pourtant pris le décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 pour nommer les membres de l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce sans la présence en son sein du représentant de l’organisme représentant le patronat alors que le législateur a expressément prévu que celui-ci siège au sein de cette Autorité :
Que l’examen du dossier ne révèle aucune difficulté où négligence du patronat à désigner son représentant pour siéger au sein de l’Autorité comme en fait foi l’absence de mise en demeure adressée au patronat par l’administration et qui serait restée sans suite ;
Qu’ainsi, il y a lieu de dire que le moyen tiré de l’illégalité du
décret querellé est fondé ; & > Ÿ €
Mais considérant qu’à l’analyse, le but visé en réalité par le recours est de rétablir le requérant dans ses droits, à savoir la nomination du représentant du patronat et son suppléant pour siéger au sein de l’autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce ;
Qu’au regard de ce qui précède et de la nécessité de concilier les intérêts en présence, l’annulation du décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 ne présente pas d’intérêt pratique, les autres membres de l’Autorité ayant été nommés conformément à la loi et sans aucune contestation ;
Qu’en conséquence, il y a lieu d’ordonner qu’il soit procédé à la nomination du cinquième membre représentant le patronat du Bénin ainsi que son suppléant, pour siéger au sein de l’ Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce ;
Par ces motifs :
Décide :
Article 1 : Le recours en date à Cotonou du 29 octobre 2018 du Conseil National du Patronat du Bénin tendant à l’annulation du décret n°2017-576 du 13 décembre 2017 portant nomination des membres de l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est partiellement fondé ;
Article 3: Il est ordonné au Président de la République de procéder à la nomination du cinquième membre représentant de l’Autorité nationale de suivi et d’évaluation des tribunaux et cours d’appel de commerce, représentant le patronat du Bénin ainsi que son suppléant ;
Article 4 : Les frais sont mis à la charge du trésor public ;
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre administrative) composée de :
Victor Dassi ADOSSOU, président de la chambre administrative ;
Rémy Yawo KODO
et
Césaire KPENONHOUN CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du jeudi treize août deux mille vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Nicolas Pierre BIAO, avocat général,
MINISTERE PUBLIC ;
Gédéon Affouda AKPONE,
GREFFIER ;
Et ont signé :
Le président r: = Le rapporteur, f >
Césaire KPENONHOUN
Le greffier,
Gédéon Affouda AKPONE


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2018-57/CA1
Date de la décision : 13/08/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2020-08-13;2018.57.ca1 ?
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