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17/07/2020 | BéNIN | N°2015-71/CA2

Bénin | Bénin, Cour suprême, 17 juillet 2020, 2015-71/CA2


Texte (pseudonymisé)
N°150/CA du Répertoire
N° 2015-71/CA2 du Greffe
Arrêt du 17 juillet 2020
AFFAIRE : B X Aa
MINISTRE DE LA DEFENSE
NATIONALE REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE La Cour,
Vu la requête introductive d’instance en date à Porto- Novo du 23 mars 2015, enregistrée au greffe de la Cour suprême le 10 avril 2015 sous le numéro 0319/GCS, par laquelle B X Aa, lieutenant-colonel de la gendarmerie nationale, directeur de la communication et des relations publiques de l’Etat-major des Ag Ad Ae, assisté de maître Paul AVL

ESSI, avocat au barreau du Bénin, en l’étude de laquelle domicile est élu au 2ème étage d...

N°150/CA du Répertoire
N° 2015-71/CA2 du Greffe
Arrêt du 17 juillet 2020
AFFAIRE : B X Aa
MINISTRE DE LA DEFENSE
NATIONALE REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE La Cour,
Vu la requête introductive d’instance en date à Porto- Novo du 23 mars 2015, enregistrée au greffe de la Cour suprême le 10 avril 2015 sous le numéro 0319/GCS, par laquelle B X Aa, lieutenant-colonel de la gendarmerie nationale, directeur de la communication et des relations publiques de l’Etat-major des Ag Ad Ae, assisté de maître Paul AVLESSI, avocat au barreau du Bénin, en l’étude de laquelle domicile est élu au 2ème étage de l’immeuble Ab à Sikècodji, 03 BP 3398, téléphone : 97 21 18 21/21 02 86 32/95 86 11 25, a saisi la Haute Juridiction d’un recours en annulation de la décision n°0711/MDN/DC/DRH/SADC/SP-C du 25 juin 2014 portant punition d’un officier supérieur, prise par le ministre de la Défense Nationale ;
Vu la loi n°90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin telle que révisée par la loi n°2019-40 du 07 novembre 2019 ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations
juridictionnelles de la Cour suprême ; y /k Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Le conseiller Rémy Yawo KODO entendu en son rapport et l’avocat général Saturnin D. AFATON en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
Sur la recevabilité du recours
Considérant qu’au soutien de son recours, le requérant expose que suivant arrêté n°5842/MDN/DC/DRH/SG- SC/SA du 26 décembre 2013 portant inscription au tableau d’avancement au grade supérieur de certains officiers des Ag Ad Ae au titre de l’année 2014, le ministre de la Défense Nationale a nommément désigné les officiers supérieurs éligibles au tableau d’avancement au grade supérieur ;
Qu’apte à un avancement au grade de colonel, il a été écarté par ledit arrêté qui l’a omis au profit d’autres candidats moins méritants ;
Que l’arrêté lui ayant porté préjudice, il a adressé le 14 février 2014 un recours gracieux au ministre de la Défense Nationale pour en demander l’annulation ;
Que contre toute attente, le chef d’Etat-major général lui a adressé le 13 mars 2014 une demande d’explication dans laquelle il lui était reproché d’avoir adressé directement une réclamation au ministre de la Défense Nationale, toute chose qui serait constitutive d’une violation de l’article 13 du décret n°2008-493 du 29 août 2008 portant règlement de discipline générale dans les Ag Ad Ae qui dispose : « Tout militaire qui estime avoir à se plaindre d’un acte administratif pris à son encontre, peut par recours,
gracieux, adresser une réclamation écrite à l’autorité qui a pris la décision dans un délai de deux (02) mois pour compter du jour de la notification de l’acte. En cas de fin de non-recevoir ou de non valoir, le militaire dispose de nouveau d’un nouveau délai de deux (02) mois pour compter de la date de notification du rejet pour engager le recours hiérarchique adressé à l’autorité immédiatement supérieure. » ;
Qu’après sa réponse en date du 14 mars 2014 à la demande d’explication, il lui a été notifié le 11 juillet 2014, la décision n°0711/MDN/DC/SG/DRH/SADC/ SP-C du 25 juin 2014 portant sanction d’un officier supérieur ;
Que la punition de quarante-cinq (45) jours d’arrêt de rigueur qui lui a été infligée l’a été pour deux (02) motifs à savoir :
- réclamation fondée sur des allégations sciemment fausses ;
- écrire ou s’adresser à l’autorité supérieure sans passer par la voie hiérarchique ;
Considérant que le requérant soulève la violation de l’article 13 du décret n°2008-493 du 29 août 2008 portant règlement de discipline générale dans les Ag Ad Ae en ce que non seulement il a adressé un recours gracieux à l’auteur de l’arrêté querellé, mais encore qu’il n’a été entendu avant la punition ni par le ministre, ni par une autorité par lui déléguée à cette fin ;
Que le défaut de son audition avant la prise de la sanction est constitutif de vice de procédure contraire à l’article 13 alinéa 1” du décret n°2008-493 du 29 août 2008 qui dispose : « L'autorité saisie entend l’intéressé, examine sa réclamation et lui fait connaître sa réponse dans un délai de deux (02) mois à partir de l’enregistrement et de l’arrivée de
la requête. » ; M X Qu’en outre, l’arrêté querellé a été pris au mépris des dispositions de l’article 14 de la loi n°2005-43 du 26 juin 2006 portant statut général des personnels militaires des Ag Ad Ae aux termes duquel : « Les militaires sont soumis aux règles de droit définies par la loi ; qu’il s’agisse de la constatation de divers actes de la vie civile ou de jouissance et de l’exercice de droits privés. Ils peuvent également utiliser, sans qu’une autorisation quelconque soit nécessaire, les voies de droit que la loi met à la disposition de tous pour la défense des intérêts individuels ;
Comme tout citoyen, un militaire peut aussi intenter, toutes actions en justice, qu’elles soient civiles, pénales ou administratives pour défendre en quelque domaine que ce soit, tous droits et intérêts qui lui sont propres.
Les décisions administratives de nature à porter préjudice aux intérêts de carrière des personnels militaires peuvent faire l’objet de recours contentieux devant les juridictions administratives compétentes. » ;
Considérant que dans son mémoire en défense, le ministre de la défense nationale développe qu’après son omission sur le tableau d’avancement, le —lieutenant-colonel B X Aa a introduit auprès de cette autorité, un recours gracieux avec ampliation à deux autres autorités hors du cadre hiérarchique direct et régulier, notamment à monsieur le président de la République, chef de l’Etat, chef du gouvernement, chef suprême des armées et à monsieur le ministre d’Etat chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique ;
Qu’il fait valoir qu’une sanction de quarante-cinq (45) jours d’arrêt de rigueur a été infligée au requérant d’abord pour réclamation fondée sur des allégations sciemment fausses et ensuite pour « Ecrire ou s’adresser à l’autorité
supérieure sans passer par la voie hiérarchique Le » ; ji Qu'il soutient que tel que formalisé, le recours gracieux du requérant a violé l’article 13 du décret n° 2008-493 du 29 août 2008 lequel dispose que : « Tout militaire qui estime avoir à se plaindre d’un acte administratif pris à son encontre, peut, par recours gracieux, adresser une réclamation écrite à l’autorité qui a pris la décision, dans un délai de deux (02) mois pour compter du jour de la notification de l’acte… » ;
Considérant que la décision n°0711/MDN/DC/SG/DRH/ SADC/SP-C du 25 juin 2014 portant punition d’un officier supérieur a été notifiée au requérant le 11 juillet 2014 ;
Que contre cette décision, l’intéressé a introduit un recours gracieux le 10 septembre 2014 ;
Qu’après réponse confirmative de la sanction par lettre du ministre de la Défense Nationale notifiée le 22 octobre 2014 au requérant, celui-ci a adressé au Chef de l’Etat un recours hiérarchique en date du 22 décembre 2014 ;
Que suite au rejet dudit recours suivant lettre en date du 22 janvier 2015 du directeur du cabinet militaire du président de la République, il a saisi la Cour suprême de la présente requête ;
Considérant que le requérant a exercé le recours gracieux puis le recours hiérarchique conformément aux dispositions de l’article 13 alinéa 1” du décret n°2008-493 du 29 août 2008 aux termes desquelles : « Tout militaire qui estime avoir à se plaindre …… notification de l’acte.
En cas de fin de non-recevoir ou de non valoir, le militaire dispose de nouveau d’un délai de deux (02) mois pour compter de la date de notification du rejet pour engager le recours hiérarchique adressé à l’autorité immédiatement Le recours gracieux et le recours hiérarchique préalable sont obligatoires avant toute saisine de la Cour suprême (Chambre administrative) … » ;
administratifs tels qu’ils sont organisés dans le cadre militaire, le requérant a saisi la Cour suprême dans les forme et délai prévus par la loi ;
Qu’il y a lieu de déclarer le recours recevable ;
AU FOND
Considérant que la décision querellée entre dans la catégorie des décisions administratives de nature à porter atteinte aux intérêts de carrière des personnels militaires ;
Considérant qu’au soutien de la sanction infligée au requérant, le ministre de la Défense Nationale invoque deux motifs, savoir :
- «réclamation fondée sur des allégations sciemment fausses ;
- écrire ou s’adresser à l’autorité supérieure sans passer par la voie hiérarchique » ;
Qu’il cite des extraits du recours gracieux selon lesquels : « N’étant affilié, comme certains, à aucun groupe d’aire ethnique, ethnocentrique ou géographique ( pourtant natif fon du plateau d’AfA, à aucun groupe de pression ou lobby, à aucun ordre ou cercle religieux, mystique ou secte, à aucune association ou club, à aucune autorité politique, civile et militaire pouvant me coopter, me parrainer et/ ou permettre d’influer rapidement pour résoudre la situation que je querelle, je me suis donc résolu à entreprendre cette démarche… » ;
Considérant que par rapport à ces allégations, la Cour ne dispose d’aucun élément pour conclure à leur caractère
sciemment faux ; Ne ÿ Considérant en outre que le ministre de la Défense fait grief au requérant d’avoir outrepassé les règles du recours gracieux en faisant ampliation de ce recours au président de la République, chef de l’Etat, chef du gouvernement, chef suprême des armées puis au ministre d’Etat, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique ;
Considérant qu’en faisant tenir au président de la République et au ministre de l’Enseignement Supérieur, copie authentique ayant valeur d’original de son recours gracieux, le requérant en a saisi prématurément le président de la République, supérieur hiérarchique du ministre de la défense ;
Qu’il a adressé le même recours à un ministre hors du champ militaire ;
Considérant qu’en agissant comme il l’a fait, B X Aa ne s’est pas conformé aux dispositions de l’article 13 alinéa 1” du décret n°2008-493 du 29 août 2008 visé ci-dessus ;
Que sous ce rapport, sa réclamation a été transmise en violation des règles de procédure définies audit article, l’exposant à une sanction au sens de l’avant-dernier paragraphe de l’article 13 qui dispose que: «une réclamation ne peut être fondée sur de fausses allégations, ni être transmise en infraction aux règles définies ci-dessus ; faute de quoi, son auteur peut s’exposer à une sanction qui toutefois, n’arrête pas la procédure de réclamation. » :
Que la sanction de quarante-cinq (45) jours d’arrêt de rigueur infligée au requérant peut se justifier de ce point de vue ;
Mais considérant qu’aux termes de l’article 13 alinéa 4 du même décret : « Le droit à réclamation est exercé dans les 1- l’autorité saisie entend l’intéressé, examine sa réclamation et lui fait connaître sa réponse dans un délai de deux (02) mois à partir de la date d’enregistrement de l’arrivée de la requête. Si l’intéressé n’a pas obtenu satisfaction et maintient sa réclamation, il le fait savoir par écrit. Par transmissions successives dans les délais sus prescrits, accompagnées chaque fois d’un avis motivé, la réclamation peut être portée jusqu’au chef d’Etat-major de l’armée de terre, commandant forces aériennes, commandant forces navales ou Directeur général de la
4- si l’intéressé n’a pas obtenu satisfaction et maintient son recours, il adresse par voie hiérarchique la réclamation au président de la République, chef suprême des armées. Celui-ci décide de la suite à donner et répond à l’intéressé … » ;
Considérant que le droit de réclamation tel qu’il est organisé par l’article 13 du décret n°2008-493 du 29 août 2008, fait obligation à l’autorité saisie, quelle qu’elle soit dans la chaîne du commandement militaire, d’entendre le réclamant, d’examiner sa réclamation et de lui faire connaître sa réponse dans un délai de deux (02) mois à partir de la date d’enregistrement de l’arrivée de la requête… ;
Considérant qu’au sens de cet article, l’audition du militaire réclamant est le préalable nécessaire à l’examen de la réclamation ;
Considérant que dans le cas d’espèce, l’autorité saisie est le ministre de la Défense Nationale ;
Que la loi ne l’a pas dispensé de la formalité de l’audition du militaire réclamant avant l’examen de son
recours pour suite à lui donner ; M Considérant qu’après réception du recours gracieux en date du 10 septembre 2014 de B X Aa, le ministre ne l’a pas entendu avant de lui infliger la sanction de quarante-cinq (45) jours d’arrêt de rigueur notifiée à l’intéressé le 11 juillet 2014 ;
Qu'il suit de là que le ministre a violé les dispositions de l’article 13 du décret visé plus haut ;
Qu’en conséquence, il y a lieu d’annuler la décision n°0711/MDN/DC/SG/DRH/SADC/SP-C du 25 juin 2014 portant punition d’un officier supérieur ;
Par ces motifs,
Décide :
Article 1 : Le recours en date à Porto-Novo du 23
mars 2015 de B X Aa, tendant à
l’annulation de la décision n°0711/MDN/DC/SG/DRH/
SADC/SP-C du 25 juin 2014 portant sanction de l’intéressé,
est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ;
Article 3 : Est annulée, avec toutes les conséquences
de droit, la décision n°0711/MDN/DC/SG/DRH/SADC/SP-
C du 25 juin 2014 portant sanction de B X
Aa ;
Article 4 : Les frais sont mis à la charge du Trésor
public ;
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et
au procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre
administrative) composée de :
Rémy Yawo KODO, Conseiller à la Chambre PRESIDENT ;
Etienne FIFATIN
Et CONSEILLERS ; Césaire F. Ac C
Et prononcé à l’audience publique du vendredi dix- sept juillet deux mille vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Saturnin D. AFATON, Avocat général ;
MINISTERE PUBLIC ;
Calixte A. DOSSOU-KOKO,
GREFFIER ;
Et ont signé,
Le Président Rapporteur, Le Greffier,
Calixte A. DOSSOU-KOKO


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2015-71/CA2
Date de la décision : 17/07/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2020-07-17;2015.71.ca2 ?
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