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10/07/2020 | BéNIN | N°40

Bénin | Bénin, Cour suprême, 10 juillet 2020, 40


Texte (pseudonymisé)
N° 40/CJ-DF du Répertoire ; N° 2012-09/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 10 juillet 2020 ; Av AL représentant la collectivité ABALOULO SINHOUN AWINNIN (Me Agathe AFFOUGNON AGO) C/ -Raymond AJ -Pascal HOUNMENOU

Droit foncier – mentions relatives à la profession et au domicile – Formalités substantielles – Prétentions contradictoirement exprimées – Rejet (Oui).



Droit de propriété – Enonciations et constatations – Première occupation – Preuve – Rejet

(Oui).



Défaut de base légale – Recevabilité de l’appel – Cassation (Oui).



Superficie du dom...

N° 40/CJ-DF du Répertoire ; N° 2012-09/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 10 juillet 2020 ; Av AL représentant la collectivité ABALOULO SINHOUN AWINNIN (Me Agathe AFFOUGNON AGO) C/ -Raymond AJ -Pascal HOUNMENOU

Droit foncier – mentions relatives à la profession et au domicile – Formalités substantielles – Prétentions contradictoirement exprimées – Rejet (Oui).

Droit de propriété – Enonciations et constatations – Première occupation – Preuve – Rejet (Oui).

Défaut de base légale – Recevabilité de l’appel – Cassation (Oui).

Superficie du domaine – Droit de propriété – Levé topographique – Rejet (Oui).

Les mentions relatives à la profession et au domicile des parties ne sont pas considérées comme des formalités substantielles, les parties ayant pu se présenter à la barre et exprimer contradictoirement leurs prétentions.

A suffisamment caractérisé le droit de propriété, une cour d’appel qui fait des énonciations et constatations relatives à la preuve de la propriété et à la première occupation.

Encourt cassation pour défaut de base légale l’arrêt qui déclare recevable l’appel d’une partie qui ne l’a pas interjeté.

Justifient légalement leur décision les juges d’appel qui déterminent, sur le fondement d’un levé topographique figurant au dossier, la superficie du domaine sur lequel le droit de propriété a été confirmé.

La Cour,

Vu l’acte n°003/11 du 17 février 2011 du greffe de la cour d’appel d’Am par lequel Av AL représentant la collectivité ABALOULO Sinhoun Awinnin a élevé pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°014/CTB/11 rendu le 16 février 2011 par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi dix juillet deux mil vingt, le président Michèle CARRENA ADOSSOU en son rapport ;

Ouï le procureur général Ae Aq AK en ses conclusions ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°003/11 du 17 février 2011 du greffe de la cour d’appel d’Am, Av AL représentant la collectivité ABALOULO Sinhoun Awinnin a élevé pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°014/CTB/11 rendu le 16 février 2011 par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;

Que par lettre n°0976/GCS du 23 avril 2012 du greffe de la Cour suprême, maître Agathe AFFOUGNON AGO conseil de AL A Z, a été mise en demeure de consigner dans le délai de quinze (15) jours et de produire son mémoire ampliatif dans le délai d’un (01) mois, le tout conformément aux dispositions des articles 3, 6 et 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Que la consignation a été payée et le mémoire ampliatif produit ;

Qu’en revanche, les défendeurs n’ont pas produit leur mémoire en défense malgré la communication du mémoire ampliatif à eu assurée par correspondances n°1183/GCS et n°1185/GCS du 12 avril 2013 transmises à fin de notification au commandant de la brigade territoriale de gendarmerie de Djidja ;

Que le Procureur général a pris ses conclusions ;

En la forme

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;

Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;

Au fond

Faits et procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date du 21 juin 1996, AL A Z a saisi le procureur de la République près le tribunal de première instance d’Am en revendication de droit de propriété d’un terrain sis à Dridji, commune de Ap contre As AJ et Ag B ;

Que par une autre requête en date du 05 juillet 1996, AL A Z a rappelé au procureur de la République près le tribunal de première instance sa précédente requête ;

Que transmises au président du tribunal, lesdites requêtes ont fait l’objet des procédures n°89/RG-96 et 108/RG-86 qui, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, ont été jointes par jugement avant dire droit du 14 novembre 1996 ;

Que le tribunal saisi a, par jugement n°071/05-1èreCH/B du 20 octobre 2015, ordonné la disjonction des procédures 89/RG-96 et 62/RG-98, et statuant sur la procédure 62/RG-98, confirmé le droit de propriété de AL A Z sur le domaine litigieux acquis auprès de Ar AH et, concernant la procédure 89/RG-96 confirmé le droit de propriété de AL A Z sur le domaine litigieux acquis depuis près de trente (30) ans par héritage ;

Que sur appel de As AJ, la cour d’appel d’Am a, infirmé en toutes ses dispositions le jugement n°071/05 1erCH/B du 20 octobre 2005 rendu par le tribunal de première instance d’Am ; puis évoquant et statuant à nouveau, a confirmé le droit de propriété de AJ As et de B Ag sur un domaine d’une superficie de sept hectares soixante-quatre ares seize centiares (7ha 64a 16ca) sis à Ap ANAjAO, arrondissement de Dan, commune de Djidja ;

Que c’est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;

DISCUSSION

Premier moyen tiré de la violation de la loi

Première branche prise de la violation de l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 réorganisant la justice locale en AOF

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 réorganisant la justice locale en AOF en ce que l’arrêt de la cour d’appel ne contient ni la profession, ni le domicile des parties alors que, selon le moyen, lesdites mentions sont prescrites par l’article 85 dudit décret ;

Mais attendu qu’aux termes de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931 : « Les jugements ou arrêts des juridictions de droit local doivent mentionner les noms des membres du tribunal et la coutume de ceux qui sont citoyens de statut personnel particulier ; le nom et la qualité de l’interprète ou des interprètes ; le nom, le sexe, l’âge, la profession, le domicile et la coutume des parties avec leurs déclarations ou conclusions … » ;

Que les mentions relatives à la profession et au domicile des parties ne sont pas considérées comme des formalités substantielles, les parties ayant pu exprimer contradictoirement leurs prétentions devant les juridictions sans aucune entrave ;

Que cette branche du premier moyen n’est pas fondée ;

Deuxième branche prise de la violation de la loi dans la confirmation du droit de propriété

Attendu qu’il est, par ailleurs, fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi en ce que, pour confirmer le droit de propriété des défendeurs au pourvoi, la cour d’appel a soutenu que « la terre appartient aux premiers occupants » alors que même si la terre appartient aux premiers occupants, il faut que cette occupation soit publique, paisible et non équivoque pendant plus de trente (30) ans ;

Que la cour d’appel n’a pas caractérisé l’occupation des défendeurs au pourvoi pour établir le droit de propriété, que d’ailleurs c’est la collectivité AWINNIN qui occupait une bonne partie du domaine jusqu’à l’intervention de l’arrêt de la cour d’appel ;

Mais attendu que les juges d’appel ont motivé leur arrêt en se fondant sur les pièces versées au dossier et des témoignages, que dans leurs motifs, les juges d’appel ont énoncé notamment : « que le témoin des appelants, le nommé Ad Ao At, âgé de 120 ans, a déclaré le 13 janvier 2012 […] que AJ est le premier à s’installer sur les lieux ; […] que AJ s’est installé sur les lieux avant HOUNMENOU ; que AWINNIN est venu comme ouvrier ; que c’était l’ouvrier de AJ, que AJ n’a jamais donné de domaine à AWINNIN ; que le nommé X Aa, témoin de AJ … a précisé que AJ est le premier occupant des lieux ; … qu’à la question posée à l’intimé AL A Z de savoir pendant combien de temps ses aïeux ont complanté le domaine de tecks et de palmiers, il a répondu «  je ne sais rien » ; qu’il ressort du procès verbal de transport judiciaire que les nommés AJ Ac, Daniel, AI Ak, AKANZOUNON Vissin ont unanimement reconnu que le domaine querellé est la propriété de la collectivité AJ, premier occupant des lieux installée par le roi Glelè ; Que dame Ab Ah, âgée de 95 ans a reconnu que la collectivité AJ était le premier occupant des lieux querellés ; que Z AL A, Gabriel, AG Al sont venus à Dridji (Asségon) comme ouvriers agricoles, et que ASSE était ouvrier agricole de AJ ; qu’elle ne connaît pas le père de l’intimé AL A car ce dernier n’a jamais vécu à Ap ; que C Au, âgé de 73 ans a, pour sa part précisé qu’on ne peut parler de Ap sans voir la collectivité AJ ; que ASSE a été métayer pour AJ qui était le premier occupant des lieux ; que c’est AL A qui s’est installé auprès de AJ ; … que AM Af An né en 1925 ; âgé de 85 ans, retraçant l’histoire des terres querellées a souligné que c’est dada (RoiAO Ai, propriétaire des terres du Danxomè qui a installé AJ à l’entrée de la ville pour que ce dernier l’avertisse de l’arrivée des envahisseurs ;… que la collectivité AJ est la première à être installée par AGBOHOUNTO ;… qu’il ressort de tous les documents versés au dossier par les appelants à titre de preuve de leur droit de propriété que la collectivité AJ est le premier occupant de Ap ;… que l’intimé durant tout le cours de la procédure s’est contenté de dire que le domaine litigieux est la propriété de ses aïeux sans en rapporter la preuve, ni donner des détails sur les cultures qui s’y pratiquent ; que face à toutes ces circonstances du dossier, le premier juge, en confirmant le droit de propriété de l’intimé AL A Z a mal apprécié les faits et a violé le principe… selon lequel « La terre appartient au premier occupant » ;

Que par ces énonciations et constatations, la cour d’appel a suffisamment caractérisé le droit de propriété de AJ ;

Que le moyen en cette branche n’est pas fondé ;

Deuxième moyen tiré du défaut de base légale

Première branche prise du défaut de base légale sur la recevabilité de l’appel de B Ag

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué le défaut de base légale sur la recevabilité de l’appel de B Ag en ce que, celui-ci n’a pas a relevé appel, que AJ As seul a relevé appel, alors que, selon cette branche du moyen, l’arrêt attaqué a énoncé que AJ As et B Ag ont tous relevé appel ;

Que AJ As a seul relevé appel du jugement n°71/05-1èreCH-B rendu le 20 octobre 2005 par le tribunal de première instance d’Am, que maître Emile Dossou TANON n’a pas relevé appel de la décision concernée pour le compte de B Ag, que l’arrêt manque de base légale pour cette mauvaise appréciation de la recevabilité de l’appel de celui-ci ;

Attendu en effet, que l’arrêt de la cour d’appel a énoncé dans son dispositif, quant à la recevabilité des appels : « Reçoit AJ As et B Ag assisté de maître DOSSOU TANON, Avocat à la cour en leur appel », qu’aucun procès-verbal d’appel n’a été établi relativement à l’appel interjeté par B Ag, que les motifs de l’arrêt de la cour d’appel ont énoncé que « le 24 octobre 2005, AJ As s’est présenté au greffe du tribunal de première instance de 2ème classe d’Am pour interjeter appel contre le jugement n°071/05-1èreCH du 20 octobre 2005 rendu par ledit tribunal statuant en matière civile traditionnelle sur une revendication de droit de propriété foncière, ledit appel a été constaté sur procès-verbal n°047/GTA-OJ du 24 octobre 2005 du greffe du tribunal » ;

Que l’arrêt, à l’exclusion du dispositif, n’a énoncé aucun motif concernant l’appel de B Ag, qu’ainsi la cour d’appel n’a pas motivé la recevabilité de l’appel de B Ag ;

Que l’arrêt encourt cassation de ce chef ;

Deuxième branche prise du défaut de base légale relativement à la superficie du domaine accordé aux défendeurs au pourvoi

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir manqué de base légale en ce qu’il a confirmé le droit de propriété de AJ As et de B Ag sur un domaine d’une superficie de 7 hectares, 64 ares, 16 centiares, alors que, selon cette branche du moyen, ni les faits, ni les débats, ni aucune pièce produite au dossier ne précise cette superficie, que l’arrêt encourt cassation pour défaut de base légale ;

Mais attendu qu’il figure au dossier judiciaire un levé topographique établi le 10 juillet 2000 par le cabinet de topographie et de travaux connexes établissant que le domaine litigieux est d’une contenance de 07ha 64a 16ca et est situé à Asségon dans la commune de Dan, sous-préfecture de Djidja ;

Que ce n’est donc pas ex-nihilo que les juges d’appel ont déterminé la superficie du domaine sur lequel le droit de propriété de As AJ et Ag B a été confirmé ;

Que le moyen en cette branche n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS 

Reçoit en la forme le présent pourvoi ;

Au fond, casse et annule l’arrêt n°014/CTB/11 rendu le 16 février 2011 par la chambre civile de droit traditionnel de la cour d’appel d’Am seulement en ce qu’il a statué ultra petita en octroyant la qualité d’appelant à Ag B ;

Renvoie la cause et les parties devant la même cour d’appel autrement composée ;

Met les frais à la charge du Trésor public ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel d’Am ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :

Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT ;

Michèle CARRENA ADOSSOU Et Césaire KPENONHOUN, CONSEILLERS ;

Et prononcé à l’audience publique du vendredi dix juillet deux mil vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de : 

Ae Aq AK, procureur général, MINISTERE PUBLIC ;

Mongadji Henri YAÏ, GREFFIER ;

Et ont signé

Le président, Le rapporteur,

Sourou Innocent AVOGNON Michèle CARRENA ADOSSOU

Le greffier.

Mongadji Henri YAÏ


Synthèse
Numéro d'arrêt : 40
Date de la décision : 10/07/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2020-07-10;40 ?
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