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12/06/2020 | BéNIN | N°15

Bénin | Bénin, Cour suprême, 12 juin 2020, 15


Texte (pseudonymisé)
N° 15/CJ-CM du Répertoire ; N° 2014-013/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 12 juin 2020 ; Ag Ah Y (Me Roland ADJAKOU) C/ Héritiers de feue Ad A Z représentés par Z Ac Af (Me Alfred BOCOVO)

Procédure civile – Compétence matérielle – Droit de propriété – Permis d’habiter – Juge civil moderne - Violation de la loi (Non) – Rejet (Oui).

Procèdent d’une bonne application de la loi les juges d’appel qui décident que relève de la compétence du juge civil moderne, tout différend ayant trait au droit de propriété et portant sur une parcelle de terrain munie dâ

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La Cour,

Vu l’acte n°004/2013 du 28 mai 2013 du greffe de la cour d’appel ...

N° 15/CJ-CM du Répertoire ; N° 2014-013/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 12 juin 2020 ; Ag Ah Y (Me Roland ADJAKOU) C/ Héritiers de feue Ad A Z représentés par Z Ac Af (Me Alfred BOCOVO)

Procédure civile – Compétence matérielle – Droit de propriété – Permis d’habiter – Juge civil moderne - Violation de la loi (Non) – Rejet (Oui).

Procèdent d’une bonne application de la loi les juges d’appel qui décident que relève de la compétence du juge civil moderne, tout différend ayant trait au droit de propriété et portant sur une parcelle de terrain munie d’un permis d’habiter.

La Cour,

Vu l’acte n°004/2013 du 28 mai 2013 du greffe de la cour d’appel d’Aa par lequel maître Roland K. ADJAKOU, conseil de Ag Ah Y, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°07/CM/13 rendu le 23 mai 2013 par la chambre civile moderne de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes telle que modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 12 juin 2020 le conseiller Antoine GOUHOUEDE en son rapport ;

Ouï l’avocat général Saturnin D. AFATON en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°004/2013 du 28 mai 2013 du greffe de la cour d’appel d’Aa, maître Roland K. ADJAKOU, conseil de Ag Ah Y, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°07/CM/13 rendu le 23 mai 2013 par la chambre civile moderne de cette cour ;

Que par lettres n°s 1235/GCS et 1236/GCS du 08 mai 2014 du greffe de la Cour suprême, maître Roland K. ADJAKOU a été mis en demeure, sous peine de déchéance, de consigner dans le délai de quinze (15) jours et de produire son mémoire ampliatif dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1er et 933 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;

Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense produits ;

Que le parquet général a pris ses conclusions lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations sans aucune réaction de leur part ;

EN LA FORME

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;

Qu’il convient de le déclarer recevable ;

AU FOND

Faits et Procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par exploit du 23 novembre 2010, les héritiers de feue Ad A Z représentés par Af Ac Z, ont attrait Ag Y devant le tribunal de première instance d’Aa statuant en matière civile moderne pour voir confirmer leur droit de propriété sur les parcelles E et F du lot n°64 tranche D du lotissement de Goho à Aa et obtenir le déguerpissement de Ag Y desdites parcelles tant de sa personne, de ses biens que tous occupants de son chef ;

Que par jugement n°004/11-CM du 08 février 2011, le tribunal a constaté que les parcelles en cause sont dépourvues de titres fonciers puis s’est déclaré incompétent ;

Que sur appel des héritiers de feue Ad A Z, la cour d’appel d’Aa a, par arrêt n°07-CM/13 du 23 mai 2013, annulé le jugement querellé, puis évoquant et statuant à nouveau, s’est déclaré compétente et a confirmé leur droit de propriété sur les parcelles en cause ;

Que c’est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;

DISCUSSION

Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi en trois (03) branches

Première branche prise de la violation des articles 1er et 11 de la loi n°60-20 du 13 juillet 1960 fixant le régime des permis d’habiter, 5, 19, 121, 122 de la loi n°65-25 du 14 août 1965 portant régime de la propriété foncière, 544, 1599 du code civil

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation de la loi en ce que, les juges de la cour d’appel, statuant en matière civile moderne se sont déclarés compétents à connaître du litige, sur la base de la convention de vente, de l’attestation de recasement et des permis d’habiter qui ne constituent pas des titres de droit de propriété inattaquables, alors que, selon cette première branche du moyen, il résulte d’une part, de l’article 11 de la loi n°60-20 du 13 juillet 1960 portant régime des permis d’habiter que « le permis d’habiter ne confère en principe … qu’un droit d’habitation essentiellement personnel, précaire et révocable », d’autre part, de l’article 19 de la loi n°65-25 du 14 août 1965 portant régime de la propriété foncière que « sont applicables sur immeubles immatriculés et aux droits réels qui s’y rapportent, d’une façon générale, les dispositions du code civil et des lois … » ; qu’en l’espèce, la demande de confirmation de droit de propriété sur les parcelles « E » et « F » non munies de titre foncier, introduite principalement par les héritiers de feu Ad A Z, ne relève pas de la compétence du juge civil moderne ; que le droit de propriété mis en cause devrait être porté devant le juge civil de droit traditionnel (Biens) conformément aux dispositions de l’article 6 du décret du 03 décembre 1931 réorganisant la justice locale en Afrique Occidentale Française (AOF) selon lesquelles « en matière civile, commerciale, les juridictions de droit local appliquent exclusivement la coutume des parties » ;

Mais attendu qu’il est de jurisprudence consacrée par la Haute Juridiction, que le différend ayant trait au droit de propriété et portant sur une parcelle de terrain muni d’un permis d’habiter relève de la compétence du juge civil moderne ;

Que l’arrêt attaqué, en rejetant le moyen d’incompétence tiré de la tenure coutumière des parcelles en cause, ne peut être reprochable du grief articulé ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

Deuxième branche prise de la violation des dispositions des articles 6-7-8-9-11-12-13-14-16-17-224-226 et 227 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation de la loi en ce que, les juges de la cour d’appel, d’une part, n’ont pas exposé tous les moyens de fait et de droit relatifs au droit de propriété de la collectivité X sur les parcelles « E » et « F » en cause, d’autre part, n’ont pas mis en demeure les héritiers Ad A Z de rapporter les preuves du droit de propriété de Ae X B, vendeur desdites parcelles en cause à feue Ad A Z, avant de confirmer le droit de propriété de cette dernière sur lesdites parcelles, alors que, selon cette deuxième branche du moyen, il résulte notamment des articles 08-12 et 14 du code de procédure civile que :

- le juge peut inviter les parties à fournir les explications de fait qu’il estime nécessaires à la solution du litige ;

- le juge peut enjoindre à l’une des parties de produire, à peine d’astreinte, un élément de preuve ;

- le juge peut inviter les parties à fournir les explications qu’il estime nécessaires à la solution du juge ;

Qu’en s’abstenant de respecter les prescriptions des articles sus-cités et d’exposer ainsi tous les moyens de fait et de droit relatifs au droit de propriété sur les parcelles en cause, les juges de la cour d’appel ont violé la loi et leur arrêt encourt cassation ;

Mais attendu que sous le couvert du grief non fondé de la violation de la loi, le moyen en sa deuxième branche présente à juger des faits souverainement appréciés par les juges du fond ;

Que le moyen en cette branche est irrecevable ;

Troisième branche prise du défaut de réponse à conclusions

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, le défaut de réponse à conclusions, en ce que, les juges de la cour d’appel se sont abstenus de répondre aux demandes relatives au droit de propriété initial concernant la collectivité X et Ae X B, l’immatriculation au livre foncier d’Aa ou non, des parcelles « E » et « F » en cause, la recherche des parcelles pour lesquelles Ae X B avait été condamné sur plainte de Ad A Z et Ab X, alors que, selon le moyen, le défaut de réponse à conclusions expose l’arrêt rendu à la cassation ;

Mais attendu que les juges du fond ne doivent répondre qu’aux conclusions qui invoquent un véritable moyen, précisément aux moyens « explicités » ;

Qu’ils ne sont pas tenus de suivre les parties dans le détail de leurs argumentations ;

Qu’en l’espèce, il ne résulte pas des conclusions d’appel visées, que le demandeur au pourvoi ait, en cause d’appel, explicitement invoqué quelque moyen relatif aux demandes sus-visées, qui n’aurait pas reçu de réponse ;

Que cette troisième branche du moyen manque en fait ;

Sur le second moyen tiré de la violation des articles 374-378-379-380-381-394-399 et 402 de la loi n°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation de la loi n°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial, en ses articles 374-378-379-380-381-394-399 et 402 en ce que, la chambre civile moderne de la cour d’appel s’est déclarée compétente pour connaître du présent litige relatif au droit de propriété, en ignorant les preuves fournies par le demandeur au pourvoi, en confirmant le droit de propriété des héritiers de feue Ad A Z, sur la base des permis d’habiter n°4/79 et 87/SAGD des 11 et 30 juillet 1980 et en faisant litière de ce que les parcelles en cause, relevées sous le couvert de la collectivité familiale X à l’état des lieux n°459 de la tranche D du lot 64 du lotissement de Ai Aa, ont été occupées initialement par les héritiers Ab X, alors que, selon le moyen, il résulte des dispositions sus-visées du code foncier et domanial que : « sans qu’il soit tenu compte de la nature de l’immeuble objet du litige, le président du tribunal saisi de la demande l’affecte … à la chambre civile statuant en matière de droit de propriété foncière », que le permis d’habiter ne peut être utilisé que pour administrer la preuve du droit d’usage ou d’usufruit et le juge ne peut y fonder une décision confirmative de droit de propriété ; que le juge peut établir le droit de propriété à partir de présomption et de témoignage dont il apprécie la force probante ; que la charge de la preuve incombe à celui qui a pris l’initiative du procès ;

Mais attendu qu’une loi n’est violée par un jugement que lorsqu’elle est applicable en la cause ;

Qu’en l’espèce, l’arrêt attaqué, rendu le 23 mai 2013 ne peut être reprochable de la violation des dispositions de la loi n°2013-01 portant code foncier et domanial en République du Bénin, promulguée le 14 août 2013, soit postérieurement à sa reddition ;

Que le moyen est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS

Reçoit en la forme  le présent pourvoi;

Le rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge de Ag Y ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel d’Aa ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :

Michèle CARRENA ADOSSOU, conseiller à la chambre judiciaire ; PRESIDENT;

Isabelle SAGBOHAN et Antoine GOUHOUEDE, CONSEILLERS ;

Et prononcé à l’audience publique du vendredi douze juin deux mille vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Saturnin D. AFATON, AVOCAT GENERAL ;

Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;

Et ont signé :

Le président Le rapporteur

Michèle CARRENA ADOSSOU Antoine GOUHOUEDE

Le greffier.

Djèwekpégo Paul ASSOGBA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 15
Date de la décision : 12/06/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2020-06-12;15 ?
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