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27/12/2019 | BéNIN | N°58

Bénin | Bénin, Cour suprême, 27 décembre 2019, 58


Texte (pseudonymisé)
N° 58/CJ-S du Répertoire ; N° 2009-04/CJ-S du greffe ; Arrêt du 27 décembre 2019 ; Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) (Me Victoire AGBANRIN ELISHA) C/ C Ab B (Me Mohamed TOKO)

Procédure sociale – Rupture du contrat de travail – Appréciation de la durée déterminée ou indéterminée du contrat de travail – Allocation de dommages-intérêts – Défaut de base légale – Violation de la loi (Rejet).

La rupture unilatérale d’un contrat de travail à durée déterminée avant l’échéance fixée de commun accord et en l’absence de toute faute favorable ouv

re droit à des dommages-intérêts.

Le licenciement d’un délégué du personnel est soumis à l’autorisati...

N° 58/CJ-S du Répertoire ; N° 2009-04/CJ-S du greffe ; Arrêt du 27 décembre 2019 ; Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) (Me Victoire AGBANRIN ELISHA) C/ C Ab B (Me Mohamed TOKO)

Procédure sociale – Rupture du contrat de travail – Appréciation de la durée déterminée ou indéterminée du contrat de travail – Allocation de dommages-intérêts – Défaut de base légale – Violation de la loi (Rejet).

La rupture unilatérale d’un contrat de travail à durée déterminée avant l’échéance fixée de commun accord et en l’absence de toute faute favorable ouvre droit à des dommages-intérêts.

Le licenciement d’un délégué du personnel est soumis à l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail sous peine de paiement d’une indemnité forfaitaire égale à douze (12) mois de son salaire.

La Cour,

Vu l’acte n°02/2009 du 10 février 2009 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Victoire AGBANRIN ELISHA, conseil de la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR), a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°006/CS/08 rendu le 12 novembre 2008 par la chambre sociale de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ; Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 27 décembre 2019 le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;

Ouï le procureur général Ad Aa A en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°02/2009 du 10 février 2009 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Victoire AGBANRIN ELISHA, conseil de la Société

Béninoise Maritime (SOBEMAR), a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°006/CS/08 rendu le 12 novembre 2008 par la chambre sociale de cette cour ;

Que par lettre n°0057/GCS du 26 janvier 2010 du greffe de la Cour suprême, maître Victoire AGBANRIN a été mise en demeure de produire ses moyens de cassation dans le délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions des articles 12 et 13 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ; Que le procureur général a produit ses conclusions ;

EN LA FORME

Attendu que le pourvoi a été élevé dans les forme et délai prescrits par la loi ; Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;

AU FOND

FAITS ET PROCEDURE

Attendu que par jugement n°11/06 du 16 janvier 2006, le tribunal de première instance de Cotonou a jugé que le contrat de B C Ab est un contrat à durée déterminée, que par conséquent, son licenciement n’est pas abusif et a condamné la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) à payer à B C Ab la somme de francs CFA cinq cent mille (500 000) au titre des frais de voyage et de transport de bagages ;

Que sur appel de B C Ab, la cour d’appel de Cotonou, par arrêt n°006/08 rendu le 12 novembre 2008, a confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société SOBEMAR à payer à B C Ab la somme de francs CFA cinq cent mille (500 000) au titre des frais de voyage et de transport, l’a infirmé sur tous les autres points, puis évoquant et statuant à nouveau, a dit que B C Ab est lié à la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) par un contrat à durée indéterminée, a déclaré abusif son licenciement et a condamné la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) à lui payer des dommages intérêts et divers droits ;

Que c’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;

DISCUSSION

Sur les moyens de cassation de maître Léopold OLORY TOGBE

Premier moyen : contradiction de motifs

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir usé de motifs contradictoires en ce que les juges d’appel ont affirmé, s’agissant des indemnités d’heures supplémentaires, "qu’il convient de faire droit à cette demande" alors que curieusement, dans son dispositif, il n’existe aucune condamnation relative aux heures supplémentaires et d’avoir par ailleurs, relativement au même point, affirmé que Ab B C « … a seulement produit au dossier la preuve des heures supplémentaires effectuées au mois d’avril 2000 sans préciser le montant correspondant à chaque heure… » sans en tirer la conséquence en rejetant la demande de paiement des heures supplémentaires ;

Mais attendu que la cour d’appel, en affirmant d’une part, qu’il « convient de faire droit à sa demande » statuait sur l’indemnité forfaitaire de délégué du personnel et non sur les heures supplémentaires et d’autre part, a rejeté en la page 4 de sa décision la demande de condamnation à des indemnités d’heures supplémentaires ;

Que le moyen manque en fait ;

Deuxième moyen : absence de motifs

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de l’absence de motifs en ce que la cour d’appel a condamné la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) à verser une indemnité forfaitaire de licenciement au délégué du personnel sans qu’une telle condamnation soit sous tendue par une quelconque motivation, qu’elle s’est contentée de reprendre uniquement les prétentions du défendeur au pourvoi alors que, selon le moyen, une décision ne peut se contenter du seul exposé de la prétention de l’une des parties, que la motivation de pure forme équivaut à une absence de motivation ; qu’il en est de même d’une motivation d’ordre général impropre à justifier légalement la décision ;

Mais attendu que les juges d’appel ont relevé que … tout licenciement d’un délégué du personnel non soumis à l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail oblige son employeur à payer à celui-ci une indemnité forfaitaire égale à 12 mois de son salaire ; … qu’en l’espèce, B C Ab est un délégué du personnel, qualité approuvée par la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR SA) sur procès-verbal de non conciliation et réaffirmée à l’audience du 22 juillet 2002 ; que son licenciement est intervenu sans que la

formalitéd’autorisationpréalabledel’inspecteur dutravailn’ait été accomplie… ;

Qu’ayant ainsi décidé, les juges d’appel ont satisfait à l’obligation de motivation ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

Sur les moyens de cassation de maître Victoire AGBANRIN ELISHA Premier moyen : mauvaise appréciation des faits

Attendu qu’il est également reproché à l’arrêt attaqué la mauvaise appréciation des faits en ce que les juges du fond, pour entrer en condamnation contre la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR), ont motivé leur décision comme suit :

« qu’en l’espèce, Ab B C était, du 21 juillet 1994 au 04 septembre 1997, soit 3 ans 2 mois 9 jours, au service de la demanderesse au pourvoi ; que le contrat de travail qu’il a conclu avec la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) le 21 juillet 1994 est verbal et sans indication de durée ;…il ne fait l’ombre d’aucun doute que du 02 avril 1997 au 04 septembre 1997 d’une part, et du 05 septembre 1999 au 24 juillet 2000… d’autre part, Ab B C a travaillé néanmoins exclusivement dans la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR SA) sans aucun contrat de travail écrit et a régulièrement été rémunéré durant tout le temps ; qu’il convient de conclure que Ab B C est bel et bien lié à la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR SA) par un contrat verbal à durée indéterminée depuis le 21 juillet 1994 pour y avoir travaillé de manière ininterrompue depuis cette date jusqu’à son licenciement intervenu le 19 septembre 2001 » alors que, selon le moyen, la demande d’emploi datée du 1er avril 1997 et versée au dossier judiciaire ensemble avec le certificat de travail en date du 1er avril 1997 démontrent à suffire que Ab B C n’avait aucun lien de travail avec la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR SA) avant la date du 04 septembre 1997 ; Mais attendu que la mauvaise appréciation des faits ne constitue pas un cas d’ouverture à cassation ;

Que le moyen est irrecevable ; Deuxième moyen : défaut de base légale

Attendu qu’il est en outre fait grief à l’arrêt attaqué, du défaut de base légale en ce que la cour d’appel a affirmé que Ab B C était lié à la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR SA) par un contrat à durée indéterminée et de

surcroît, depuis 1994 ; que ce faisant, elle a omis de donner une base légale à sa motivation car, aux termes de l’article 25 de la loi n°98-004 du 27 janvier 1998 portant code du travail en République du Bénin, un contrat de travail à durée indéterminée nécessitant l’installation du travailleur hors de sa résidence habituelle ne peut être verbal ; qu’ "il doit être constaté par écrit et enregistré" ; qu’en l’espèce, Ab B C est de nationalité togolaise, il a sa résidence habituelle à Lomé au TOGO, il a été embauché par la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR SA) en 1997 sur sa demande et les contrats de travail qu’il a signés successivement le 04 septembre 1997 et le 24 juillet 2000 sont à durée déterminée ;

Mais attendu que la cour d’appel ayant fixé au 21 juillet 1994 la date du contrat entre les parties, il en résulte que la loi n°98-004 du 27 janvier 1998 portant code du travail en République du Bénin est inapplicable ;

Qu’en statuant comme ils l’ont fait, les juges d’appel ont légalement justifié leur décision ;

Troisième moyen : violation de la loi

Attendu qu’il est reproché à la cour d’appel la violation de la loi en ce que l’arrêt attaqué a trahi les intentions réelles des cocontractants en affirmant que les contrats de travail à durée déterminée du 04 septembre 1997 et 24 juillet 2000 sont sans fondement juridique alors que, selon le moyen, aux termes des dispositions de l’article 1134 du code civil, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; qu’en l’espèce, les parties ont convenu librement non seulement de reconduire le contrat lorsque surviendraient les deux ans prévus pour sa durée, mais aussi de fixer le 1er octobre comme étant la date de départ et de prise d’effet du contrat ; que la cour, dans son arrêt, n’a aucunement tenu compte des intentions réelles des parties qui, par une commune volonté, ont indiqué les dates d’effet de leurs différents contrats ainsi que leur durée ; que la cour d’appel a fait une interprétation erronée des clauses des contrats à durée déterminée liant les parties, violant ainsi la loi ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour d’appel, par décision motivée, a décidé que Ab B C

est lié à la Société Béninoise Maritime (SOBEMAR) par un contrat verbal à durée indéterminée depuis le 21 juillet 1994 pour y avoir travaillé de manière ininterrompue depuis cette date jusqu’à son licenciement le 19 septembre 2001 ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

Reçoit en la forme le présent pourvoi ; Le rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge du Trésor public ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judicaire) composée de : SourouInnocentAVOGNON,présidentdelaChambrejudiciaire, PRESIDENT;

Michèle CARRENA ADOSSOU

EtCONSEILLERS ;

Ac X

Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-sept décembre deux mille dix-neuf, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ad Aa A,PROCUREUR GENERAL;

Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;

Et ont signé

Le président-rapporteur,Le greffier

Sourou Innocent AVOGNONDjèwekpégo Paul ASSOGBA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 58
Date de la décision : 27/12/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2019-12-27;58 ?
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