La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/12/2019 | BéNIN | N°052

Bénin | Bénin, Cour suprême, 13 décembre 2019, 052


Texte (pseudonymisé)
N° 052/CJ-CM du répertoire ; N° 2003-30/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 13 Décembre 2019 ; -SOCIETE NATIONALE DE COMMERCIALISATION DES PRODUITS PETROLIERS (SONACOP) (Me Alfred POGNON) -PAUL OKOUMASSOU (Me Mohamed TOKO) Contre –PAUL OKOUMASSOU (Me Mohamed TOKO) -SOCIETE NATIONALE DE COMMERCIALISATION DES PRODUITS PETROLIERS (SONACOP) (Me Alfred POGNON)

Droit des obligations – Non-respect des obligations contractuelles par les parties – violation de l’article 1134 (non)

Pourvoi en cassation – cas d’ouverture – Dénaturation des faits (non)

Réparation de préju

dice – Insuffisance d’éléments d’appréciation – Appréciation souveraine du juge.

N’est...

N° 052/CJ-CM du répertoire ; N° 2003-30/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 13 Décembre 2019 ; -SOCIETE NATIONALE DE COMMERCIALISATION DES PRODUITS PETROLIERS (SONACOP) (Me Alfred POGNON) -PAUL OKOUMASSOU (Me Mohamed TOKO) Contre –PAUL OKOUMASSOU (Me Mohamed TOKO) -SOCIETE NATIONALE DE COMMERCIALISATION DES PRODUITS PETROLIERS (SONACOP) (Me Alfred POGNON)

Droit des obligations – Non-respect des obligations contractuelles par les parties – violation de l’article 1134 (non)

Pourvoi en cassation – cas d’ouverture – Dénaturation des faits (non)

Réparation de préjudice – Insuffisance d’éléments d’appréciation – Appréciation souveraine du juge.

N’est pas fondé, le moyen tiré de la violation de l’article 1134 du code civil, lorsque le demandeur, co-contractant, est défaillant lui-même dans l’exécution de ses propres obligations.

N’est pas fondé, le moyen tiré de la violation de l’article 1134 du code civil, lorsque le non-respect des obligations contractuelles par l’une des parties est occasionné par l’autre partie.

La dénaturation des faits n’est pas un cas d’ouverture à cassation.

Le juge du fond peut souverainement fixer le quantum des dommages- intérêts lorsque la partie lésée ne produit pas d’éléments suffisants d’appréciation du préjudice subi.

La Cour,

Vu les actes n°24/02 et 25/02 du 18 mars 2002 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lesquels Aa C et maître Yvon DETCHENOU substituant maître Alfred POGNON, conseil de la Société Nationale de Commercialisation des produits Pétroliers (SONACOP), ont élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°22/2002 rendu le 14 mars 2002 par la chambre commerciale de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ; Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 90-012 du 1er juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°s 21/PR du 26 avril 1966 et 70-16 du 14 mars 1970 définissant la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 13 décembre 2019 le conseiller,

Michèle CARRENA-ADOSSOU en son rapport ;

Ouï le procureur général, Ad Ab A en ses conclusions ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant les actes n°24/02 et 25/02 du 18 mars 2002 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, Aa C et maître Yvon DETCHENOU substituant maître Alfred POGNON, conseil de la Société Nationale de Commercialisation des produits Pétroliers (SONACOP), ont élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°22/2002 rendu le 14 mars 2002 par la chambre commerciale de cette cour ;

Que par lettres n°s 300 et 301/GCS du 12 juin 2003, maîtres Mohamed TOKO et Alfred POGNON ont été mis en demeure d’avoir à consigner dans un délai de quinze (15) jours et à produire leurs moyens de cassation dans un délai d’un

(01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Que les consignations ont été payées et les mémoires ampliatifs et en défense produits ;

Que le procureur général a produit ses conclusions;

En la forme

Attendu que les présents pourvois ont été élevés dans les forme et délai de la loi ;

Qu’il y a lieu de les déclarer recevables ;

Au fond

Faits et procédure

Attendu selon l’arrêt attaqué, que Aa C et la SONACOP ont passé en 1975 un contrat de gérance libre sur la station-service « Rond-Point de Cadjèhoun » pour une durée indéterminée;

Que pour contraindre la SONACOP à respecter ses obligations contractuelles, Aa C l’a assignée en justice en 1983 ;

Qu’avant l’aboutissement de cette procédure et plus précisément le 24 avril 1991, la SONACOP a rompu unilatéralement et abusivement le contrat de gérance libre la liant à Aa C ;

Que Aa C a alors assigné en justice la SONACOP le 10 juillet 1998 pour rupture abusive du contrat de location gérance et sollicité sa condamnation à lui payer les sommes de deux cent millions (200 000 000) F CFA au titre de dommages-intérêts et de cent trente-quatre mille (134 000) F CFA au titre de reliquat des frais de consignation des bouteilles de gaz butane ; Que par jugement contradictoire n°19/2èmeC.Com en date du 11 novembre 1989, la 2ème chambre commerciale du tribunal de première instance de Cotonou a condamné la SONACOP à payer à Aa C la somme de dix millions (10 000 000) F CFA à titre de dommages-intérêts et déclaré compensée la créance de cent quatre-vingt-quatre mille (134 000) F CFA par la SONACOP ;

Que sur appels de Aa C et de la SONACOP la chambre commerciale de la cour d’appel de Cotonou a rendu l’arrêt confirmatif n°22/2002 du 14 mars 2002 ;

Que c’est cet arrêt qui est l’objet des présents pourvois ;

Discussion

SUR LE MOYEN UNIQUE DE LA SONACOP TIRE DE LA VIOLATION DE LA LOI

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de la loi en ce que la cour d’appel a condamné la SONACOP pour une prétendue rupture abusive du contrat de location gérance qui la lie à Aa C, alors que, selon

le moyen, aux termes des dispositions de l’article 1134 du code civil, toute convention légalement formée tient lieu de loi à ceux qui l’ont faite ;

Qu’il est dit à l’article 11 point (b) du contrat de location gérance qui lie les parties que : le gérant maintiendra à tout moment les stocks suffisants de produits pétroliers ou autres en vue de satisfaire sa clientèle sauf dans le cas où la société ne pouvait pour une raison quelconque en assurer les livraisons ; Qu’il est stipulé à l’alinéa (a) de l’article 17 du même contrat que si l’une des clauses du présent contrat n’est pas respectée, la société aura le droit de mettre fin immédiatement au présent contrat, de reprendre la station sans préavis ou versement d’une quelconque compensation et aura au contraire le droit de réclamer au gérant toute indemnité pour dommages et intérêts le cas échéant;

Qu’en ne retenant pas le non-respect de ses obligations contractuelles par Aa C pour condamner la SONACOP, les juges du fond ont violé les dispositions de l’article 1134 du code civil ;

Mais attendu que l’arrêt attaqué a relevé que « pour approvisionner une station, il faut des moyens financiers ; qu’il est constant au dossier que la SONACOP s’est refusé à payer à Aa C la somme de trente-trois millions huit cent vingt-six mille (33 826 000) F CFA qu’il lui réclame » ;

Qu’elle lui a même refusé le remboursement d’avoirs par livraison de produits B ;

Qu’il convient de juger que la SONACOP a mis Aa C dans une situation de nature à l’empêcher d’approvisionner la station ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel de Cotonou n’a point violé l’article 1134 du code civil ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

SUR LES PREMIER, DEUXIEME ET TROISIEME MOYENS DE Aa C TIRES RESPECTIVEMENT DU DEFAUT DE BASE LEGALE ET VIOLATION DE LA LOI, DENATURATION DES FAITS DE LA CAUSE, DES DOCUMENTS PRODUITS ET DEFAUT DE REPONSE AUX MOYENS ; VIOLATION DES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 1149 DU CODE CIVIL, MOYENS REUNIS

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué le défaut de base légale, la violation de la loi, la dénaturation des faits, le défaut de réponse aux moyens, en ce que

les juges du fond ont refusé d’accorder au demandeur le montant sollicité au titre des dommages-intérêts, décidé que la preuve n’est pas faite que les avantages tirés du chiffre d’affaires équivalent à 10 % de celui-ci et fixé le montant des dommages-intérêts à la somme de dix millions (10 000 000) F CFA en réparation du préjudice subi par le demandeur, alors que, selon les moyens, d’une part, Aa C était gérant de l’une des plus grandes stations de vente d’essence et de produits dérivés de la ville de Cotonou qui réalise chaque année le plus grand chiffre d’affaires du pays ; Qu’en application des dispositions des articles 1330 du code civil et 109 du code de commerce, les livres des marchands font preuve contre eux ;

Qu’en produisant les bilans année par année de sa gestion avant l’ouverture du conflit avec la SONACOP, Aa C visait à soutenir le bien-fondé de sa demande de dommages-intérêts fixés à deux cent millions (200 000 000) F CFA ;

Que d’autre part, il a été soutenu devant les juges de la cour d’appel de Cotonou que de janvier 1976 à avril 1991, Aa C a réalisé un chiffre d’affaires global de deux milliards cent soixante-treize millions sept cent quatre-vingt-seize mille cent soixante-dix-sept (2 173 796 177) F CFA, représentant un chiffre d’affaire annuel de cent cinquante millions (150 000 000) F CFA ;

Que le montant des dommages-intérêts sollicité par Aa C constitue une contrepartie de la richesse qu’il a procurée à la SONACOP à l’image de la pratique des intérêts qui constituent une somme d’argent représentant le prix de l’usage du capital ;

Qu’en matière d’intérêts de droit, les taux encore en vigueur au Bénin sont de 11 % pour les créances civiles et 13 % en matière commerciale ;

Qu’en décidant de n’accorder que dix millions (10 000 000) F CFA à titre de dommages-intérêts qui ne représente que 0,4% du chiffre d’affaires réalisé sur la période concernée, les juges d’appel ont dénaturé les faits et n’ont pas répondu aux moyens du demandeur ;

Qu’enfin, la cour d’appel de Cotonou a violé les dispositions de l’article 1149 du code civil selon lesquelles les dommages-intérêts dus au créancier sont, en

général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications prévues ;

Que tout le préjudice subi par la victime doit être réparé par l’auteur de la faute, y compris le gain manqué ou la perte subie ;

Que dans le cas d’espèce, les juges du fond n’ont nullement tenu compte de la perte subie et du gain manqué par Aa C pour lui allouer la modeste somme de dix millions (10 000 000) F CFA et leur arrêt encourt cassation ;

Mais attendu d’une part, que la dénaturation des faits n’est pas un cas d’ouverture à cassation, que seule l’interprétation d’un écrit peut faire l’objet d’un grief de dénaturation ;

Que d’autre part, pour fixer à dix millions (10 000 000) F CFA les dommages- intérêts alloués à Aa C, les juges du fond ont relevé que « Aa C a sollicité deux cent millions (200 000 000) F CFA de dommages-intérêts qui représenteraient 10 % de son chiffre d’affaires global réalisé de 1976 à 1991 ; qu’il est incontestable que la résiliation abusive du contrat de location gérance a causé à Aa C des préjudices ; Qu’il n’a pas produit d’éléments suffisants d’appréciation pour les fixer à deux cent millions (200 000 000) F CFA ; que la preuve n’est pas non plus rapportée que les avantages tirés du chiffre d’affaires équivalent à 10 % de celui-ci ; Qu’en ramenant à dix millions (10 000 000) F CFA le montant des dommages- intérêts, le juge d’instance a fait une bonne appréciation des faits » ;

Qu’en l’état de ces énonciations les juges du fond ont légalement justifié leur décision ;

PAR CES MOTIFS :

Reçoit en la forme les présents pourvois ; Les rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge de la Société Nationale de Commercialisation des produits Pétroliers (SONACOP) et de Aa C ;

Ordonne la notification du présent arrêt aux parties ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :

Innocent Sourou AVOGNON, président de la chambre judiciaire,

PRESIDENT ;

Michèle CARRENA-ADOSSOU

EtCONSEILLERS ;

Ac X

Et prononcé à l’audience publique du vendredi treize décembre deux mille dix- neuf, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ad Ab A, PROCUREUR GENERAL; Hélène NAHUM-GANSARE, GREFFIER ;

Et ont signé,

Le président,Le rapporteur,

Innocent Sourou AVOGNONMichèle CARRENA-ADOSSOU

Le greffier.

Hélène NAHUM-GANSARE


Synthèse
Numéro d'arrêt : 052
Date de la décision : 13/12/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2019-12-13;052 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award