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13/12/2019 | BéNIN | N°051

Bénin | Bénin, Cour suprême, 13 décembre 2019, 051


Texte (pseudonymisé)
N° 051/CJ-CM du répertoire ; N° 1999-041/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 13 Décembre 2019 ; COMPAGNIE BENINOISE DE NAVIGATION MARITIME (COBENAM) (Me Hélène KEKE-AHOLOU) Contre COMPAGNIE

D’ASSURANCE X B (Me Cabinet de feu Me Florentin FELIHO représenté par le bâtonnier de l’ordre des avocats)

Procédure civile – Violation de la loi – Interprétation de l’arrêt – Ouverture à cassation (Non).

Contradiction entre les motifs et le dispositif (Non).

L’interprétation d’une décision n’est possible que si l’exécution se heurte véritablement à

une difficulté tenant à l’obscurité de la décision.

Le pourvoi en cassation contre l’arrêt interprétatif ne p...

N° 051/CJ-CM du répertoire ; N° 1999-041/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 13 Décembre 2019 ; COMPAGNIE BENINOISE DE NAVIGATION MARITIME (COBENAM) (Me Hélène KEKE-AHOLOU) Contre COMPAGNIE

D’ASSURANCE X B (Me Cabinet de feu Me Florentin FELIHO représenté par le bâtonnier de l’ordre des avocats)

Procédure civile – Violation de la loi – Interprétation de l’arrêt – Ouverture à cassation (Non).

Contradiction entre les motifs et le dispositif (Non).

L’interprétation d’une décision n’est possible que si l’exécution se heurte véritablement à une difficulté tenant à l’obscurité de la décision.

Le pourvoi en cassation contre l’arrêt interprétatif ne peut formuler de critiques contre le jugement interprété.

L’interprétation ne saurait constituer un moyen détourné de faire modifier une décision.

La Cour,

Vu l’acte n°09/99 enregistré le 08 mars 1999 au greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Hélène KEKE-AHOLOU, conseil de la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM) a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°19/99 du 11 février 1999 rendu par la chambre commerciale de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ; Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 90-012 du 1er juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°s 21/PR du 26 avril 1966 et 70-16 du 14 mars 1970 définissant la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 13 décembre 2019 le président,

Innocent Sourou AVOGNON en son rapport ;

Ouï le procureur général, Ad Aa A en ses conclusions ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°09/99 enregistré le 08 mars 1999 au greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Hélène KEKE-AHOLOU, conseil de la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM) a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°19/99 du 11 février 1999 rendu par la première chambre civile moderne de cette cour ;

Que par lettre n°1109/GCS du 24 juin 1999 du greffe de la Cour suprême, maître Hélène KEKE-AHOLOU a été mise en demeure de consigner au greffe de la Cour suprême dans un délai de quinze (15) jours et de produire son mémoire ampliatif dans le délai d’un (01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême;

Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense produits ;

En la forme

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ; Qu’il convient de le déclarer recevable ;

Au fond

Faits et procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par exploit introductif d’instance en date du

24 juin 1981, la Compagnie d’Assurance X B, a assigné le capitaine de Navire M/S CYCLADES, la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM) et la Société Béninoise de Manutentions Portuaires (SOBEMAP), devant le tribunal de première instance de Cotonou aux fins de les voir condamner à lui rembourser la somme de cinq millions trois cent-dix- huit mille six cent cinquante-six (5 318 656) F CFA représentant l’indemnité qu’elle aurait payée à la société EL NASR pour le préjudice résultant des manquants et avaries occasionnés à sa cargaison de sel transportée à bord du navire M/S CYCLADES arrivé à Cotonou le 02 juillet 1980 ;

Que par jugement n°93 du 22 avril 1987, le tribunal saisi a déclaré le capitaine du navire CYCLADES, la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM), son consignataire et la Société Béninoise de Manutentions Portuaires (SOBEMAP) conjointement et solidairement responsables des avaries et manquants subis par les sacs de sel et les a condamnés conjointement et solidairement à payer à la compagnie d’Assurance X B la somme de 19 674, 12 dollars USA outre les intérêts de droit à compter du 24 juin 1980 ;

Que sur appels des parties, la cour d’appel de Cotonou, a, par arrêt n°61/98 en date du 26 mars 1998 déclaré la Société Béninoise de Manutentions Portuaires (SOBEMAP) mal fondée en son appel et a confirmé le jugement n°93 du 22 avril 1987 en disant que la somme à rembourser sera égale au cours légal actuel soit 19 674, 12 USA outre les intérêts de droit ;

Que la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM), par l’organe de son conseil maître Hélène KEKE-AHOLOU a sollicité l’interprétation de l’arrêt pré-cité ;

Que par arrêt n°19/99 du 11 février 1999, la cour d’appel de Cotonou, tout en déclarant régulière la requête, l’a jugée mal fondée en sa demande d’interprétation de l’arrêt n°61/98 du 26 mars 1998 au motif que son exécution ne se heurte à aucune difficulté tenant à l’obscurité de la décision ;

Que c’est contre cet arrêt interprétatif que maître Hélène KEKE-AHOLOU a élevé pourvoi ;

Discussion

Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi pris en ses deux branches

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt interprétatif attaqué la violation :

- D’une part, de l’article 244 du code de commerce maritime, en ce que la cour d’appel a estimé « qu’il est de principe que l’interprétation n’est possible que si l’exécution se heurte véritablement à une difficulté tenant à l’obscurité de la décision », alors que, selon la première branche du moyen, l’obscurité de l’arrêt n°61/98 du 26 mars 1998 rendu par la cour d’appel de Cotonou se situe au niveau de la confirmation de la décision n°93 du 22 avril 1987 rendue par le tribunal de première instance de Ac qui a condamné le capitaine du

navire M/S CYCLADES, la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM) prise en sa qualité de consignataire et la SOBEMAP ;

Que l’exécution de cette décision manifestement obscure a été faite sur les comptes personnels de la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM) consignataire ; que cette exécution se heurte véritablement à une difficulté tenant à cette obscurité de l’arrêt n°61/98 ;

Que la cour d’appel de Cotonou devrait tout simplement dire dans son arrêt interprétatif que la condamnation de la COBENAM ès qualité de consignataire du navire M/S CYCLADES ne peut emporter exécution de cette condamnation sur les biens propres de la COBENAM, mais plutôt sur ceux du capitaine du navire et de l’armateur ;

- D’autre part, de l’article 245 du code de commerce maritime, en ce que les juges de la cour d’appel de Cotonou ont soutenu que « l’établissement des états met en évidence que l’obligation de livraison des marchandises conformes au connaissement émis sans réserve qui pèse sur le bord n’a pas été remplie » et que « l’on ne peut dès lors que le déclarer responsable ainsi que la COBENAM, son représentant légal », alors que, selon cette branche du moyen, l’article 245 sus-visé a clairement indiqué que le consignataire du navire « n’est pas responsable personnellement de la bonne exécution du contrat de transport maritime même s’il est chargé du recouvrement du fret » et qu’il n’est responsable envers les destinataires des marchandises que de ses fautes personnelles ;

Qu’en rejetant la demande d’interprétation de la COBENAM au motif que le consignataire a réclamé le fret et que ses comptes personnels peuvent faire l’objet d’une exécution de décision de justice, alors même, qu’elle a bien soutenu dans l’arrêt interprétatif que la COBENAM est mandataire de l’armateur du navire M/S CYCLADES, la cour d’appel a violé les dispositions des articles 244 et 245 du code de commerce maritime ;

Mais attendu que, d’une part, le pourvoi contre l’arrêt interprétatif ne peut formuler de critiques contre le jugement interprété ;

Que précisément, les critiques du moyen sont exclusivement dirigées contre les dispositions du jugement interprété, tel que celui-ci a été éclairé par l’arrêt interprétatif qui est seul attaqué par le pourvoi ;

Que d’autre part, avant de rejeter la demande d’interprétation de l’arrêt n°61/98 du 26 avril 1998, comme mal fondée, les juges de la cour d’appel, dans l’arrêt interprétatif attaqué ont motivé que « l’interprétation ne saurait constituer un moyen détourné de faire modifier ladite décision » ;

Que « la COBENAM, sous prétexte d’obscurité dudit arrêt, se contente d’affirmer que la saisie a été pratiquée sur ses comptes tout en se gardant de préciser la nature et l’intitulé des comptes ayant fait l’objet de saisie » ;

Qu’en sa qualité de consignataire du navire M/S CYCLADES et de mandataire de l’armateur dudit navire, la COBENAM « ne peut contester de détenir en ses livres comptables, le compte où est logé le fret pour l’armateur dont elle a consigné le navire… », « que dans ces conditions, c’est à bon droit que la saisie a été pratiquée en ses mains » ;

Que l’arrêt interprétatif attaqué n’est pas reprochable du grief articulé de violation des articles 244 et 245 du code de commerce maritime ;

Que le moyen en ses deux (02) branches réunies n’est pas fondé ;

Sur le second moyen tiré du défaut de motifs

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt interprétatif attaqué, la contradiction entre les motifs et le dispositif, en ce que la cour d’appel après avoir motivé : « qu’au lieu de faire face à l’exécution de l’arrêt dont il s’agit, la COBENAM sous prétexte d’obscurité de l’arrêt, se contente d’affirmer que la saisie a été pratiquée sur ses comptes tout en se gardant de préciser la nature et l’intitulé des comptes ayant fait l’objet de la saisie » ;

« …. Que la COBENAM ne conteste pas sa qualité de consignataire du navire M/S CYCLADES » ; « qu’en cette qualité, elle est mandataire de l’armateur du navire » ; « qu’à ce titre elle a réclamé le fret au nom de ce mandant et elle ne peut être tenue que parce qu’elle a le fret en main » ; « qu’elle ne peut donc contester, détenir en ses livres comptables, le compte où est logé le fret pour l’armateur dont elle a consigné le navire » ; « … que c’est à bon droit que la saisie a été pratiquée en ses mains » ; « qu’il lui revient donc d’exécuter la décision en sa qualité de mandataire de l’armateur jusqu’à concurrence des valeurs qu’elle détient pour le compte de l’armateur du navire CYCLADES », a encore déclaré la COBENAM mal fondée en sa demande d’interprétation de l’arrêt n°61/98 du 26 mars 1998 et l’a rejetée, alors que, selon le moyen, la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ;

Mais attendu que c’est sans se contredire, que la cour d’appel, après avoir rappelé l’objet de la demande de la COBENAM qui est de voir dire dans l’arrêt interprétatif, que la condamnation de celle-ci ne veut nullement signifier sa condamnation personnelle susceptible d’être poursuivie sur ses biens propres, mais celle de l’armateur et de son capitaine et qu’il est de principe que l’interprétation n’est possible que si l’exécution se heurte véritablement à une difficulté tenant à l’obscurité de la décision et qu’elle ne saurait constituer un moyen détourné de faire modifier ladite décision, a dit que la COBENAM, consignataire du navire et mandataire de l’armateur et qui détient en ses livres comptables le compte où est logé le fret pour l’armateur devait exécuter la décision à concurrence des valeurs qu’elle détient, sans devoir recourir à l’interprétation demandée qui n’est qu’un moyen détourné de faire modifier la décision dont il s’agit, et a rejeté ladite demande ;

Qu’en conséquence, le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

Reçoit en la forme le présent pourvoi ; Le rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge de la Compagnie Béninoise de Navigation Maritime (COBENAM);

Ordonne la notification du présent arrêt aux parties ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de : InnocentSourouAVOGNON,présidentdelachambrejudiciaire, PRESIDENT ;

Michèle CARRENA-ADOSSOU

EtCONSEILLERS ;

Ab C

Et prononcé à l’audience publique du vendredi treize décembre deux mille dix- neuf, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ad Aa A, PROCUREUR GENERAL;

Hélène NAHUM-GANSARE, GREFFIER ;

Et ont signé,

Le président- rapporteur,Le greffier

Sourou Innocent AVOGNONHélène NAHUM-GANSARE


Synthèse
Numéro d'arrêt : 051
Date de la décision : 13/12/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2019-12-13;051 ?
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