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29/11/2019 | BéNIN | N°50

Bénin | Bénin, Cour suprême, 29 novembre 2019, 50


Texte (pseudonymisé)
N° 50/CJ-CM du Répertoire ; N° 2015-08/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 29 novembre 2019 ; Succession de feu A X (Me Magloire YANSUNNU) C/ Ae X (Me Prosper AHOUNOU-Me Af Y)

Procédure civile –Donation entre vifs – Violation de la loi par fausse application des règles de la preuve – valeur probante ou attaché à un acte notarial (Non).

Dénaturation des faits – Défaut de base légale – Contrôle de la quotité – Moyen comportant deux cas d’ouverture à cassation – Irrecevabilité.

L’exercice du pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et de la por

tée des éléments de preuve incombe au juge de fond. Il échappe au contrôle de la juridiction de cassa...

N° 50/CJ-CM du Répertoire ; N° 2015-08/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 29 novembre 2019 ; Succession de feu A X (Me Magloire YANSUNNU) C/ Ae X (Me Prosper AHOUNOU-Me Af Y)

Procédure civile –Donation entre vifs – Violation de la loi par fausse application des règles de la preuve – valeur probante ou attaché à un acte notarial (Non).

Dénaturation des faits – Défaut de base légale – Contrôle de la quotité – Moyen comportant deux cas d’ouverture à cassation – Irrecevabilité.

L’exercice du pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve incombe au juge de fond. Il échappe au contrôle de la juridiction de cassation.

Le moyen qui met en œuvre deux cas d’ouverture à cassation est irrecevable.

Une loi n’est violée par une décision que lorsqu’elle est applicable en la cause.

La Cour,

Vu l’acte n°011/13 du 24 avril 2013 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Magloire YANSUNNU, conseil de la succession de feu Ah A X, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°28/13 rendu le 28 mars 2013 par la chambre civile moderne de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ; Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 29 novembre 2019 le conseiller Antoine GOUHOUEDE en son rapport ;

Ouï le procureur général Ac Aa C en ses conclusions ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°011/13 du 24 avril 2013 du greffe de la Cour d’appel de Cotonou, maître Magloire YANSUNNU, conseil de la succession de feu Ah A X, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°28/13 rendu le 28 mars 2013 par la chambre civile moderne de cette cour ;

Que par lettres n°s4227/GCS et 4228/GCS du 08 octobre 2015 du greffe de la Cour suprême, maître Magloire YANSUNNU a été mis en demeure de consigner dans le délai de quinze (15) jours et de produire son mémoire ampliatif dans un délai de deux (02) mois, le tout conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1 et 933 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense produits ;

Que le parquet général a produit ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;

Que maîtres Prosper AHOUNOU et Magloire YANSUNNU, conseils des parties ont produit leurs observations ;

EN LA FORME

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ; Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;

AU FOND

A- Faits et procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par acte en date du 29 août 2000, les héritiers A X ont attrait leur cohéritier Ae Ag X devant le tribunal de première instance de Cotonou pour obtenir l’annulation de l’acte de donation du 24 janvier 1997 pour vice d’exhérédation, dépassement de quotité disponible et pour irrégularités contenues dans l’acte de donation ;

Que vidant son délibéré, le tribunal saisi s’est déclaré compétent et a prononcé l’annulation de ladite donation avec toutes les conséquences de droit ;

Que sur appel de Ae A X, la cour d’appel a, par arrêt n°28/13 du 28 mars 2013, confirmé le jugement entrepris relativement à la compétence du tribunal et l’a infirmé en toutes ses autres dispositions et, évoquant et statuant à nouveau, a déclaré valable la donation faite le 24 janvier 1997 par Ah A X à son fils Ae A X et portant sur l’immeuble sis à la parcelle D du lot 793 Bar Ad Ab, objet du permis d’habiter n°06 du 12 janvier 1966 ;

Que c’est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;

B- DISCUSSION

- Sur le premier moyen tiré de la violation des articles 1315 et 931 du code civil (fausse application des règles de preuve)

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation des articles 1315 et 931 du code civil notamment par fausse application de la règle de preuve en ce que les juges d’appel, pour asseoir leur décision, ont retenu ’’qu’il ressort des écritures de maître COVI, conseil de l’appelant que chacun des enfants de feu Ah A X s’est vu attribuer par lui de son vivant, une parcelle’’, alors que, selon le moyen, si « les juges du fond apprécient souverainement la force probante des éléments de preuve qui leur sont soumis, leur pouvoir d’appréciation est toujours subordonné à la condition qu’ils ne soient appuyés, pour former leur conviction, que sur des preuves légalement autorisées et qu’ils n’aient pas méconnu la force probante que la loi attache à certains actes et à certains faits » ;

Qu’en l’espèce, en l’absence au dossier de la preuve de l’acte de donation faite en faveur de Ae X et des demandeurs, la cour d’appel a pris parti contre ces derniers et n’indique pas les documents qui matérialisent lesdites donations ;

Qu’elle a méconnu les dispositions des articles 1315 et 931 du code civil selon lesquelles les actes portant donation entre vifs seront passés devant notaire dans les formes ordinaires des contrats, il en restera minute, sous peine de nullité et la charge de la preuve incombe à celui qui s’en prévaut ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation tant de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que des faits par elle retenus, que la cour d’appel a estimé entre autres, « …. qu’il s’agit en l’espèce d’une donation entre vifs dont déclaration a été faite et reçue par officier ministériel dont les déclarations font foi jusqu’à inscription de faux … ; que les intimés ont initié au départ une procédure pénale en faux contre leur frère Césaire …. que le dossier révèle que cette procédure de faux a été sanctionnée par un non lieu en première instance et confirmé en appel… que l’acte de donation reçu par maître Jean Jacques GBEDO fait donc foi

…. » ;

D’où, il suit que le moyen n’est pas fondé ;

- Sur le deuxième moyen tiré de la dénaturation des faits et du défaut de base légale

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la dénaturation des faits et le défaut de base légale en ce que la cour d’appel s’est déterminée en estimant, d’une part, qu’au contraire d’un acte régulièrement passé devant notaire (dans les formes ordinaires du contrat) les écritures du conseil de l’appelant peuvent remplacer les règles de preuve propres à justifier la donation entre vifs, d’autre part, le fait qu’une procédure en faux et usage de faux initiée contre Césaire et d’autres se soit soldée par une ordonnance de non lieu confirmée par l’arrêt n°077/06 du 07 août 2006, alors que, selon le moyen, les juges du fond n’ont

pas été saisis de la fausseté ou la régularité de l’acte de donation mais plutôt de la validité de l’objet de l’acte qui doit s’apprécier à l’aune des dispositions de l’article 931 du code civil relatives au contrôle de la quotité disponible ;

Que pour répondre à cette question, les juges d’appel ont estimé qu’ « aucune pièce du dossier ne permet de taxer de faux l’acte de donation en faveur de Calixte » ; qu’ « il est interdit aux juges du fond de former leur conviction d’après les connaissances personnelles qu’ils auraient acquises des faits du litige, en dehors des moyens de preuve admis par la loi et administrés suivant les règles qu’elle prescrit » ;

Qu’il est constant que les juges du fond ont fait une appréciation personnelle et non légale des faits de la cause en privilégiant une attestation de donation entre vifs, à un acte de donation entre vifs ; qu’ayant ainsi décidé, les juges du fond ont substitué aux formalités impératives prévues par l’article 931 du code civil, une formalité personnelle érigée au rang de preuve matérielle ; que l’arrêt attaqué mérite cassation pour défaut de base légale en ce qu’il se fonde sur des motifs de droit erronés mais aussi pour dénaturation des faits en ce qu’il se limite aux conclusions du conseil du défendeur pour conclure qu’une procédure de faux initiée contre le défendeur s’est soldée par une ordonnance de non lieu ;

Mais attendu que selon l’article 52 alinéa 2 de la loi n°2004-20 du 17 août 2017 portant règles de procédure applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême, « A peine d’être déclaré d’office irrecevable, un moyen ou un élément de moyen ne doit mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture à cassation » ;

Que le présent moyen qui met en œuvre deux cas d’ouverture à cassation est irrecevable ;

- Sur le troisième moyen tiré de la violation des articles 12 et 13 de la loi n°71-523 du 03 juillet 1971 et des articles 893 et 913 du code civil, défaut de base légale

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation des articles 12 et 13 de la loi n°71-523 du 03 juillet 1971, 893 et 913 du code civil ainsi que le défaut de base légale en ce que les juges d’appel ont rejeté la demande de rapport des héritiers de feu Ah A X au motif que cette demande est nouvelle et que rien au dossier ne permet d’y faire droit alors que, selon le moyen, cette demande a été abondamment exprimée en termes univoques dans le dispositif de l’acte introductif d’instance en date du 29 août 2000 et les conclusions d’instance du 05 novembre 2001 ;

Que les affirmations de la cour d’appel n’ont pas de raison d’être ; que l’arrêt dont pourvoi a fait litière des moyens sous-jacents offerts par les parties lors de leurs échanges d’écriture ;

Que par ailleurs, la cour d’appel n’a pas réclamé la production de l’acte de donation notarié en cause et s’est bornée à admettre une attestation dudit acte ;

Qu’en procédant comme ils l’ont fait et en faisant fi de leur devoir d’investigation ou d’instruction avant tout jugement, les juges d’appel ont méconnu les dispositions légales susvisées et leur décision encourt cassation ;

Mais attendu qu’une loi n’est violée par une décision que lorsqu’elle est

« applicable en la cause » ;

Qu’en l’espèce, la loi (française) n°71-523 du 03 juillet 1971 modifiant certaines dispositions du code civil relatives aux rapports à succession, à la réduction des libéralités excédant la quotité disponible et à la réduction dans les partages d’ascendants, dont la violation est invoquée n’est pas applicable en République du Bénin ;

Attendu par ailleurs que la preuve de la donation est une question de fait souverainement appréciée par les juges du fond qui échappe donc au contrôle de la juridiction de cassation ;

Qu’en outre l’énoncé du présent moyen ne laisse apparaître aucun grief tenant au défaut de base légale, à défaut de conclure que le moyen tel que formulé est complexe et donc irrecevable, il y a lieu de dire qu’il est mal fondé ;

PAR CES MOTIFS

Reçoit en la forme le présent pourvoi ; Le rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge de la succession de feu Ah A X ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de : Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambrejudiciaire ; PRESIDENT;

Antoine GOUHOUEDE

etCONSEILLERS ;

Ae B

Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-neuf novembre deux mille dix-neuf, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de : Ac Aa C, PROCUREUR GENERAL ;

Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;

Et ont signé :

Le Président,Le Rapporteur,

Sourou Innocent AVOGNONAntoine GOUHOUEDE

Le Greffier.

Djèwekpégo Paul ASSOGBA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 50
Date de la décision : 29/11/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2019-11-29;50 ?
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