DKK
N°364/CA DU REPERTOIRE
C A
Arrêt du 04 septembre 2019
AFFAIRE :
REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE AH AI
X B
MAIRE DE LA COMMUNE
D’ABOMEY-CALAVI ET
Ag Y
La Cour,
Vu la requête introductive d'instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 15 avril 2011 enregistrée au greffe de la Cour le 26 avril 2011 sous le n° 334/GCS, par laquelle AI AH née B a saisi la haute Juridiction d'un recours pour excès de pouvoir contre le permis d'habiter n° 21/489/0 délivré le 16 novembre 2009 par le maire de la Commune d'Abomey-Calavi au profit de Ag Y sur la parcelle "V" du lot 213 de la ZOPA ;
Vu la loi n°90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Le Conseiller Isabelle SAGBOHAN entendu en son rapport et l’Avocat général Saturnin D. AFATON en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
Considérant que la requérante expose qu'elle a acquis le 24 septembre 1997 auprès de Ab AG une portion de la palmeraie (ZOPA) à Ac Af Ae ;
Qu'à la liquidation de la zone, son vendeur a hérité le domaine de son feu père Aa AG ;
Que toutes les fiches attributaires des parcelles issues du morcellement de l'hectare de terre qu'elle a acquis, établies au nom du feu père de son vendeur Ab AG, lui ont été envoyées par ce dernier par le biais du démarcheur Z Ad, qui a profité pour revendre les parcelles à d'autres personnes dont le nommé Ag Y ;
Qu'elle a procédé à un compulsoire des registres et répertoires de la mairie et pratiqué par le même acte opposition à mutation et à délivrance de tout acte administratif sur les parcelles "T", "U" et "V" du lot 213 du lotissement de la ZOPA ;
Qu'elle a ensuite empêché les acquéreurs de ces parcelles de construire les obligeant à retrouver le démarcheur indélicat ;
Que cette procédure n'avait pas encore trouvé une issue judiciaire quand l'un des acquéreurs le nommé Ag Y l'a assigné en expulsion sur le fondement d'un permis d'habiter que le maire de la commune d'Abomey-Calavi lui a délivré au mépris de l'opposition faite et du contentieux existant déjà à propos des parcelles ;
Que c'est à l'occasion de cette instance qu'elle a eu connaissance du permis d'habiter délivré sur sa parcelle et a introduit le 24 décembre 2010, un recours gracieux à l'endroit du maire de la commune d'Abomey-Calavi, recours resté sans suite ;
Que le silence de l'administration devant être interprété comme un rejet, elle a saisi la haute Juridiction d'un recours pour voir annuler le permis d'habiter n° 21/489/0 du 16 novembre 2009 délivré à Ag Y par le maire de la commune d'Abomey-Calavi ;
Sur la recevabilité
Considérant que le recours est respectueux des forme et délai
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Sur l'excès de pouvoir
Considérant que la requérante soutient que le maire de la commune d'Abomey-Calavi a excédé ses pouvoirs en délivrant à Ag Y le permis d'habiter n° 21/489/0 du 16 novembre 2009 sans tenir compte de l'opposition faite entre ses mains à propos de la parcelle objet du permis d'habiter ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier et notamment du procès-verbal de compulsoire comportant opposition à mutation du 17 octobre 2005 que les parcelles T, U et V du lot 213 étaient toujours au nom de Aa AG, feu père du vendeur de AI AH née B, la requérante ;
Qu'elle s'oppose formellement dans le même acte à toutes opérations de délivrance du permis d'habiter, de mutation ou de cession de droits relatifs aux parcelles T, U et V du lot 213 du lotissement de la zone dite ZOPA à Abomey-Calavi ;
Considérant que le procès-verbal de compulsoire comportant opposition à mutation a été délaissé au secrétariat administratif de la mairie ;
Que l'autorité communale savait qu'un problème de droit de propriété se posait déjà sur ladite parcelle et ne pouvait pas affirmer une convention de vente par rapport à l'une de ces parcelles et délivrer non plus le permis d'habiter attaqué ;
Que l'autorité communale a excédé ses pouvoirs en délivrant le permis d'habiter en cause malgré l’opposition ;
Que de ce fait, la requérante est fondée en son moyen ;
Sur la violation de la loi
Considérant que la requérante soutient qu'il y a violation de l’article 1 de la loi n°60-20 du 13 juillet 1960 fixant le régime des permis d’habiter au Dahomey (Bénin) par l'autorité communale ;
Considérant que l’article 1 de la loi n°60-20 du 13 juillet 1960 dispose : « Dans tous les centres urbains du Dahomey dotés d’un plan de lotissement ou d’un plan d’aménagement régulièrement approuvé des commandants de cercle et chefs de subdivision (désignés ci-après sous le vocable: «chefs de circonscription »), peuvent délivrer sur les terrains immatriculés au nom de l’Etat ; des permis d’habiter dans les conditions édictées par la présente loi.
A Cotonou, les permis sont délivrés par le délégué du gouvernement en cette ville. » ;
Considérant que conformément à ces dispositions l'autorité communale ne peut délivrer des permis d'habiter que sur des parcelles immatriculées au nom de l'Etat ;
Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que cette parcelle ait été immatriculée au nom de l'Etat ;
Que le maire aurait pu s'en rendre compte s'il avait consulté la commission ainsi que le prévoit la loi ;
Qu'ayant délivré un permis d'habiter sur un domaine n'appartenant pas à l'Etat et en l'absence de ladite consultation, le maire a violé la loi ;
Que la requérante est fondée en son moyen ;
Considérant que sans qu'il soit nécessaire d’examiner le troisième moyen de la requérante tirée de l’erreur de fait, il y a lieu de conclure à l'annulation du permis d'habiter n°21/489/0 du 16 novembre 2009 délivré par le maire de la commune d'Abomey-Calavi au profit de Ag Y ;
Par ces motifs,
Décide :
Article 1°” : Le recours en date à Cotonou du 15 avril 2011 de AI AH tendant à l’annulation du permis d’habiter n°21/489/0 du 16 novembre 2009 délivré à Ag Y par le maire de la commune de Abomey-Calavi, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ;
Article 3 : Est annulé, le permis d’habiter n°21/489/0 du 16 novembre 2009 délivré par le maire de la commune de Abomey- Calavi à Ag Y sur la parcelle « V » du lot n° 213 du lotissement de Zopa ;
Article 4: Les frais sont mis à la charge du trésor public ;
Article S : Notification du présent arrêt sera faite aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre administrative) composée de :
Etienne FIFATIN, Conseiller à la Chambre administrative ;
PRESIDENT ;
Isabelle SAGBOHAN
et CONSEILLERS ;
Etienne S. AHOUANKA
Et prononcé à l’audience publique du mercredi quatre septembre deux mille dix-neuf, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Saturnin D. AFATON, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC;
Gédéon A. AKPONE,
GREFFIER;
Et ont signé :
Le Président, Le Rapporteur,
Isabelle SAGBOHAN
Le Greffier
Gédéon A. AKPONE