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13/07/2018 | BéNIN | N°050

Bénin | Bénin, Cour suprême, 13 juillet 2018, 050


Texte (pseudonymisé)
N° 050/CJ-CM du répertoire ;N° 2001-37/CJ-CM du greffe ;Arrêt du 13 Juillet 2018 ; Aa A(Me Hélène KEKE-AHOLOU) C/ ETAT BENINOIS REPRESENTE PAR L’AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR



Propriété foncière – Expropriation pour cause d’utilité publique – Titre foncier – Domaine non encore loti – Autorisation de construire – Violation de la loi par fausse application

Encourt cassation pour violation de la loi par fausse application, la décision des juges du fond qui rejette une demande d’indemnisation consécutive à une expropriation d’un immeuble immatr

iculé pour cause d’utilité publique, au motif que le titre foncier porte sur un terrain relevant d’...

N° 050/CJ-CM du répertoire ;N° 2001-37/CJ-CM du greffe ;Arrêt du 13 Juillet 2018 ; Aa A(Me Hélène KEKE-AHOLOU) C/ ETAT BENINOIS REPRESENTE PAR L’AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR

Propriété foncière – Expropriation pour cause d’utilité publique – Titre foncier – Domaine non encore loti – Autorisation de construire – Violation de la loi par fausse application

Encourt cassation pour violation de la loi par fausse application, la décision des juges du fond qui rejette une demande d’indemnisation consécutive à une expropriation d’un immeuble immatriculé pour cause d’utilité publique, au motif que le titre foncier porte sur un terrain relevant d’un domaine non encore loti et que ledit titre foncier ne peut tenir lieu d’autorisation de construire. 

La Cour,

Vu l’acte n°23/2001 du 10 avril 2001 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Hélène KEKE-AHOLOU a, au nom et pour le compte de Aa A, élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n° 71/2001 rendu le 15 mars 2001 par la première chambre civile de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 90-012 du 1er juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°s 21/PR du 26 avril 1966 et 70-16 du 14 mars 1970 définissant la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 13 juillet 2018 le président Innocent Sourou AVOGNON en son rapport ;

Ouï le procureur général, Ac Ab B en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°23/2001 du 10 avril 2001 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Hélène KEKE-AHOLOU a, au nom et pour le compte de Aa A, élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n° 71/2001 rendu le 15 mars 2001 par la première chambre civile de cette cour ;

Que par lettre n° 1544/GCS en date du 20 juin 2001 maître Hélène KEKE-AHOLOU a été mise en demeure de consigner dans un délai de quinze (15) jours et de produire son mémoire ampliatif dans un délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions des articles 42, 45 et 51 de l’ordonnance 21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême ;

Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;

Que le parquet général a produit ses conclusions ;

En la forme

Attendu que le présent pourvoi ayant été élevé dans les forme et délai de la loi ;

Qu’il convient de le déclarer recevable ;

Au fond

Faits et procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Aa A est propriétaire d’un immeuble en matériaux définitifs sis au quartier Ad et immatriculé sous le n° 3386 du livre foncier de Cotonou ;

Qu’à l’occasion des travaux de lotissement et d’urbanisation de la zone, sa propriété a été partiellement démolie pour favoriser le tracé des voies publiques d’accès ;

Qu’estimant avoir été victime d’une expropriation pour cause d’utilité publique, Aa A a, par exploit des 29 et 30 avril 1998, assigné, d’une part, l’Etat béninois représenté par l’Agent Judiciaire du Trésor (AJT), d’autre part, la préfecture de l’Atlantique pour les voir condamner à lui payer la somme de soixante-quinze millions (75.000.000) de francs à titre d’indemnisation, en principal et dommages et intérêts ;

Que par jugement réputé contradictoire n° 003/3ème CCIV du 11 janvier 1999, le tribunal de première instance de Cotonou a condamné l’Etat béninois et la préfecture de l’Atlantique à lui payer la somme de quarante cinq millions (45.000.000) de francs au titre d’indemnisation ;

Que sur appel de l’Agent Judiciaire du Trésor (AJT), la cour d’appel a, par l’arrêt n° 71/2001 du 15 mars 2001, annulé le jugement attaqué pour violation de la loi, puis évoquant et statuant à nouveau, rejeté les dommages et intérêts sollicités par Aa A ;

Que c’est contre cet arrêt que le pourvoi a été élevé ;

Discussion

SUR LE PREMIER MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE LA LOI

 

Attendu qu’il est reproché aux juges d’appel d’avoir violé la loi en énonçant que : «  le propriétaire d’un terrain muni d’un titre foncier relevant d’un domaine non encore loti et qui aurait pris le risque de sa mise en valeur, aura agi à ses dépens », alors que, selon le moyen :

-d’une part, la démolition partielle de sa propriété immobilière objet du titre foncier n° 3386 en vue du tracé de voies publiques d’accès est une expropriation pour cause d’utilité publique pour laquelle il n’a cependant pas perçu une juste et préalable indemnisation, comme l’exige l’article 545 du code civil ;

-d’autre part, les articles 6 et 121 de la loi n° 65-25 du 14 août 1965 portant régime de la propriété foncière au Bénin qui consacrent le caractère intangible, définitif et inattaquable du titre foncier n’ont pas distingué, selon que l’immeuble qui en est l’objet, est situé dans une zone lotie ou dans une zone non lotie ;

Attendu en effet, que selon les dispositions de l’article 545 du code civil : « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnisation » ;

Qu’il ressort de ces dispositions :

-que l’occupation par l’administration publique d’une propriété immobilière privée quelle que soit sa nature contre la volonté de son propriétaire est une expropriation pour cause d’utilité publique qui donne droit à une juste et préalable indemnisation ;

-qu’à défaut de cette indemnisation préalable, la victime est admise à agir en réparation de l’ensemble des préjudices découlant de l’atteinte à son droit de propriété immobilière ;

Que s’agissant des immeubles nantis de titre foncier auxquels les articles 6 et 121 de la n°65-25 du 14 août 1965 portant organisation de la propriété au Bénin confèrent un caractère définitif et inattaquable, leur occupation par l’administration publique obéit aux mêmes règles dès lors que ledit titre a été obtenu, conformément aux dispositions de l’article 86 de la même loi, c'est-à-dire sur les fonds de terre bâtis ou non bâtis ;

Qu’en rejetant en l’espèce l’indemnisation sollicitée par Aa A au titre de la démolition partielle de son immeuble objet du titre foncier n°3386 de Zogbo-Cotonou, par la préfecture de Cotonou pour le tracé de voies publiques d’accès, aux motifs que le titre foncier portait sur un terrain relevant d’un domaine non encore loti et que ledit titre foncier ne saurait tenir lieu d’autorisation de construire, les juges d’appel ont ajouté à la loi des conditions qu’elle ne comporte pas et, partant, ont violé les textes sus énoncés par fausse application de la loi ;

PAR CES MOTIFS :

En la forme :

Reçoit le présent pourvoi ;

Au fond :

Casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt n° 71/2001 rendu le 15 mars 2001 par la première chambre civile de la cour d’appel de Cotonou ;

Renvoie la cause devant ladite cour autrement composée ;

Met les frais à la charge du Trésor public ;

Ordonne la notification du présent arrêt aux parties  ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :

Innocent Sourou AVOGNON, président de la chambre judiciaire,

PRESIDENT ;

Michèle CARRENA-ADOSSOU

Et CONSEILLERS ;

Antoine GOUHOUEDE

Et prononcé à l’audience publique du vendredi treize juillet deux mille dix-huit, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ac Ab B, PROCUREUR GENERAL;

Hélène NAHUM-GANSARE, GREFFIER

 

Et ont signé,

Le président- rapporteur, Le greffier.

Innocent Sourou AVOGNON Hélène NAHUM-GANSARE


Synthèse
Numéro d'arrêt : 050
Date de la décision : 13/07/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2018-07-13;050 ?
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