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22/06/2018 | BéNIN | N°43

Bénin | Bénin, Cour suprême, 22 juin 2018, 43


Texte (pseudonymisé)
N° 43/CJ-CM du Répertoire ;N° 2003-44/CJ-CM du greffe ;Arrêt du 22 juin 2018 ;Centrale de Sécurisation des Paiements Et de Recouvrement (CSPR-GIE) C/ Ac’s Cotton Industries (MCI)- Financial Bank-Bénin- Bank Of Africa (BOA) Bénin- Eco-Bank Bénin- Continental Bank Bénin- Société Béninoise de Manutentions Portuaires (SOBEMAP)- Société Béninoise d’Entreprises Ag (C)- Société de Négoce et de Distribution- Ab B





Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) - Modalité d’examen d’un recours en cassation - Erreur matérielle énoncée par la

cour d’appel (comme juridiction de renvoi) sur sa saisine - Impact sur la régularité de la décision ...

N° 43/CJ-CM du Répertoire ;N° 2003-44/CJ-CM du greffe ;Arrêt du 22 juin 2018 ;Centrale de Sécurisation des Paiements Et de Recouvrement (CSPR-GIE) C/ Ac’s Cotton Industries (MCI)- Financial Bank-Bénin- Bank Of Africa (BOA) Bénin- Eco-Bank Bénin- Continental Bank Bénin- Société Béninoise de Manutentions Portuaires (SOBEMAP)- Société Béninoise d’Entreprises Ag (C)- Société de Négoce et de Distribution- Ab B

Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) - Modalité d’examen d’un recours en cassation - Erreur matérielle énoncée par la cour d’appel (comme juridiction de renvoi) sur sa saisine - Impact sur la régularité de la décision (Non) - Voie d’exécution - Juge des référés -Compétence -Faculté pour une juridiction de renvoi d’examiner à nouveau une demande de mainlevée alors qu’une décision a pourtant été rendue par le juge des référés (Oui) - Pouvoir souverain d’appréciation des éléments de preuve soumis à l’appréciation des juges du fond (oui).

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) n’est compétente pour examiner le recours en cassation dont elle est saisie que si, des moyens tirés de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l’interprétation d’un acte uniforme ou d’un règlement prévu au Traité de l’OHADA ont été invoqués soit devant le premier juge, soit devant la cour d’appel , par l’une ou l’autre des parties ou ont servi de base à la décision attaquée.

Une erreur matérielle énoncée par la cour d’appel comme juridiction de renvoi sur sa saisine n’affecte par la régularité de la décision qu’elle a rendue.

Le juge des référés, compétent en raison de l’urgence ou des difficultés d’exécution d’un titre exécutoire ou d’un jugement, peut au regard des éléments du dossier au jour où il rend sa décision, ordonner la poursuite ou la mainlevée de mesures conservatoires.

Une juridiction de renvoi peut examiner à nouveau une mainlevée dont pourtant la décision a été rendue par le juge des référés parce que les ordonnances du juge des référés ne lient en aucune façon le juge du fond.

Les juges ont un pouvoir d’appréciation souverain des pièces faisant office de preuves qui leur sont soumises.

La Cour,

Vu l’acte n°55/2002 du 13 novembre 2002 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Simon TOLI, conseil de la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°111/02 rendu le 07 novembre 2002 par la chambre civile de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n°90-012 du 1er juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°S 21/PR du 26 avril 1966 et 70-16 du 14 mars 1970 organisant la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 22 juin 2018 le président Innocent Sourou AVOGNON en son rapport ;

Ouï l’avocat général Saturnin D. AFATON en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°55/2002 du 13 novembre 2002 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Simon TOLI, conseil de la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°111/02 rendu le 07 novembre 2002 par la chambre civile de cette cour ;

Que par lettre n°881/GCS du 12 août 2003 du greffe de la Cour suprême, maître Simon TOLI, a été mis en demeure d’avoir à consigner dans un délai de quinze (15) jours et à produire ses moyens de cassation dans un délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions des articles 42, 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême ;

Que la consignation a été payée et le mémoire ampliatif produit ;

Que maîtres Angelo HOUNKPATIN et Agnès CAMPBELL ont produit leur mémoire en défense respectivement pour le compte de Marlan’s Cotton Industries (MCI) et la Bank Of Africa (BOA) Bénin ;

Que maître Hélène KEKE-AHOLOU, conseil de la Société Béninoise d’Entreprises Ag XC) a déclaré ne pas vouloir répliquer au mémoire ampliatif ;

Que la Ae Ad Aa, l’A Aa, la Continental Bank Bénin, la Société Béninoise de Manutentions Portuaires (SOBEMAP), la société Négoce et Distribution (N et D) et Ab B n’ont pas produit leur mémoire en défense malgré les deux (02) mises en demeure qui leur ont été adressées ;

Que le dossier est en état d’être examiné ;

EN LA FORME

Sur le moyen d’incompétence soulevé par maître Angelo HOUNKPATIN, conseil de Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA)

Attendu que la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) Bénin soulève l’incompétence de la haute Juridiction au motif que le contentieux porte sur la contestation et la mainlevée des saisies pratiquées par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) ;

Que cette procédure est désormais réglée par l’Acte Uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;

Que tous recours en cassation contre les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats membres de l’OHADA dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes Uniformes sont examinés par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), seule habilitée à statuer sur les mesures d’exécution forcée ;

Mais attendu que selon les dispositions de l’article 14 alinéas 3 et 4 du Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique « … saisie par voie du recours en cassation, la cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes Uniformes et des règlements prévus au présent Traité, à l’exception des décisions appliquant des actions pénales.

Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux » ;

Qu’au sens de ces dispositions, la Cour Commune de Justice d’Arbitrage (CCJA) n’est compétente pour examiner le recours en cassation dont elle est saisie que si des moyens tirés de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l’interprétation d’un Acte Uniforme ou d’un règlement prévu au Traité de l’OHADA ont été à bon droit invoqués soit devant le premier juge, soit devant la cour d’appel par l’une ou l’autre des parties ou ont servi de base à la décision attaquée ;

Qu’en l’espèce les dispositions de l’arrêt n°074/2ème CCMS du 08 août 2001 tout comme celles de l’arrêt n°111/2002 du 07 novembre 2002, objet du présent pourvoi, sont fondées sur les articles 806 et 809 du code de procédure civile qui traitent des attributions du juge des référés et sur l’article 109 du code de commerce pour établir la preuve de l’existence ou non de la créance de la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) sur la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) ;

Que la décision attaquée n’a donc statué sur aucun grief tiré de la violation dans l’application des dispositions des Actes Uniformes ou du Traité de l’OHADA ;

Qu’il s’ensuit que les conditions de compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) telles que prévues par l’article 14 du Traité de l’OHADA ne sont pas réunies ;

Qu’il y a lieu de se déclarer compétente ;

Sur la recevabilité du pourvoi

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;

Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;

AU FOND

Faits et procédure

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que se prévalant d’une créance de quatre milliards quatre cent cinquante et un millions trois cent quatre vingt dix-sept mille sept cent vingt (4 451 397 720) francs sur la Marlan’s Cotton Industries (MCI), la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) a obtenu l’autorisation de saisir les biens de sa débitrice, par ordonnance n°40/2001 du 11 mai 2001 de la cour d’appel de Cotonou ;

Que sur opposition de la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA), le juge des référés du tribunal de première instance de Cotonou, par ordonnance n°085/3ème CC du 22 juin 2001, s’est déclaré incompétent pour ordonner mainlevée des saisies opérées par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) ;

Que sur appel de la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA), la cour d’appel a rendu l’arrêt n°074/2ème CCMS du 08 août 2001 ordonnant les saisies ;

Que sur le pourvoi en cassation de la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA), la chambre judiciaire de la Cour suprême a, par arrêt n°058/CJ-CM du 03 mai 2002, cassé l’arrêt entrepris en toutes ses dispositions ;

Que sur renvoi, la cour d’appel de Cotonou autrement composée a rendu l’arrêt n°111/2002 du 07 novembre 2002 ordonnant mainlevée de toutes les saisies pratiquées par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) sur la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) ;

Que c’est contre cet arrêt le présent pourvoi a été élevé ;

DISCUSSION DES MOYENS

Premier moyen : Violation des articles 83 alinéa 1er et 84 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême

Attendu qu’il est fait grief à la cour d’appel d’avoir énoncé que sa saisine découle d’un acte d’appel du 25 juin 2001 de maître Yvonne DOSSOU-DAGBENONBAKIN, huissier de justice à Af et que la décision attaquée devant elle est l’ordonnance de référé n°085/3ème CC rendue le 22 juin 2001 par le tribunal de première instance de Cotonou, alors que, selon le moyen, elle est appelée à statuer sur renvoi après cassation de l’arrêt n°074/2ème CCMS/2001 du 08 août 2001 rendu sur appel de l’ordonnance de référé n°085/3ème CC du 22 juin 2001 ;

Mais attendu qu’il ressort des énonciations de la décision attaquée que la juridiction de renvoi a été saisie par l’arrêt de cassation n°058/CJ-CM du 03 mai 2002 de la chambre judiciaire de la Cour suprême ;

Que le vice allégué procède d’une erreur purement matérielle qui n’affecte pas la régularité de la décision attaquée ;

Qu’il s’ensuit que ce moyen n’est pas fondé ;

Deuxième moyen : Violation de la loi par mauvaise interprétation des articles 806 et 809 du code de procédure civile

Attendu qu’il est reproché aux juges d’appel d’avoir par un motif inexact, retenu leur compétence en énonçant que : « la saisine du juge des référés est antérieure à celle du juge du fond qui a rendu la décision du 19 décembre 2001 dont appel a été relevé », alors que, selon le moyen, le juge des référés doit apprécier sa compétence non au jour de sa saisine, mais au jour où il statue ;

Mais attendu qu’au sens des dispositions des articles 806 et 809 du code de procédure civile applicable, le juge des référés, compétent en raison de l’urgence ou des difficultés d’exécution d’un titre exécutoire ou d’un jugement, peut, au regard des éléments du dossier au jour où il rend sa décision, ordonner la poursuite ou la mainlevée de mesures conservatoires ;

Attendu en l’espèce que, pour se déclarer compétente à ordonner mainlevée des saisies pratiquées sur la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA), la cour d’appel a relevé que, de même que les ordonnances du juge des référés ne lient pas le tribunal pour l’appréciation du litige au fond, de même l’existence du jugement au fond du 19 décembre 2001 ayant converti les saisies pratiquées en saisies exécution et dont appel a été du reste relevé, ne pourrait l’empêcher, en sa qualité de juridiction d’appel des référés statuant sur renvoi de la Cour suprême après cassation, d’examiner à nouveau la demande de la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) ;

Qu’en statuant ainsi, les juges d’appel ont fait l’exacte application de la loi ;

Que le moyen n’est donc pas fondé ;

Troisième moyen : Manque de base légale par absence de motif et par dénaturation des faits et procédures

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir écarté, sans aucun fondement légal, l’incompétence soulevée par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) en énonçant que l’interdiction faite au juge des référés de préjudicier au fond ne fait pas obstacle au constat de l’erreur qu’a pu commettre le juge en concédant l’ordonnance en cause, de la retirer et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir, alors que, selon le moyen, l’ordonnance n°085/3ème CC du 22 juin 2001 en cause a définitivement réglé la question d’incompétence du juge des référés de céans conformément à l’article 63 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;

Mais attendu que, pour se déclarer compétente, la cour d’appel a également retenu que dans la mesure où les ordonnances de référés ne lient en aucune façon le juge du fond, le jugement de validation des saisies opérées par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) et dont appel a été relevé, ne pouvait l’empêcher, en sa qualité de juridiction de renvoi, d’examiner à nouveau la demande de mainlevée présentée par la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) ;

Qu’ainsi, l’arrêt se trouve également justifié, abstraction faite du motif dont fait état le moyen, mais qui est surabondant ;

Que ce moyen n’est donc pas fondé ;

Quatrième moyen : Violation de la loi par mauvaise interprétation de l’article 109 du code de commerce

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté les factures produites par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) à titre de preuve de l’existence de sa créance sur la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA), au motif que ces factures ne portent aucune signature de la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) ni aucune mention de son acceptation, alors que, selon le moyen, l’article 109 du code de commerce consacre la liberté de preuve en matière commerciale ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain que la cour d’appel, statuant sur renvoi après cassation, a constaté que les documents produits par la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) au pourvoi ne font pas la preuve de l’existence de sa créance sur la Marlan’s Cotton Industries (MCI-SA) ;

Qu’il s’ensuit que ce moyen n’est pas fondé ;

Par ces motifs

En la forme

Se déclare compétente ;

Reçoit le présent pourvoi ;

Au fond

Le rejette ;

Met les frais à la charge de la Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement (CSPR-GIE) ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :

Innocent Sourou AVOGNON, président de la chambre judiciaire ;

PRESIDENT;

Michèle CARRENA ADOSSOU

et CONSEILLERS ;

Antoine GOUHOUEDE

Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-deux juin deux mille dix-huit, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Saturnin D. AFATON, AVOCAT GENERAL;

Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;

Et ont signé :

Le Président-Rapporteur Le Greffier.

Innocent Sourou AVOGNON Djèwekpégo Paul ASSOGBA



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 22/06/2018
Date de l'import : 05/10/2020

Numérotation
Numéro d'arrêt : 43
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2018-06-22;43 ?
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