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13/04/2018 | BéNIN | N°2005-023

Bénin | Bénin, Cour suprême, 13 avril 2018, 2005-023


Texte (pseudonymisé)
N° 014/CJ-CM du répertoire REPUBLIQUE DU BENIN



N° 2005-023/CJ-CM du greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS



Arrêt du 13 Avril 2018 COUR SUPREME



AFFAIRE :

CHAMBRE JUDICIAIRE

...

N° 014/CJ-CM du répertoire REPUBLIQUE DU BENIN

N° 2005-023/CJ-CM du greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

Arrêt du 13 Avril 2018 COUR SUPREME

AFFAIRE : CHAMBRE JUDICIAIRE

(Civile Moderne)

A B ET COMPAGNIE

(Me Robert DOSSOU)

Contre

-SOCIETE NEGOCE ET DISTRIBUTION

( Me Cyrille DJIKUI)

-CREDIT Z Aa REPRESENTE PAR CONTINENTAL C Aa

(Me Maximin CAKPO-ASSOGBA)

La Cour,

Vu l’acte n°51/001 du 29 juin 2001 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Robert DOSSOU, conseil des A B et Compagnie, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°174/2001 rendu le 28 juin 2001 par la première chambre civile et commerciale de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 90-012 du 1er juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°s 21/PR du 26 avril 1966 et 70-16 du 14 mars 1970 définissant la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 13 avril 2018 le président, Innocent Sourou AVOGNON en son rapport ;

Ouï le procureur général Ab Ac X en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°51/001 du 29 juin 2001 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Robert DOSSOU, conseil des A B et Compagnie, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°174/2001 rendu le 28 juin 2001 par la première chambre civile et commerciale de cette cour ;

Que par lettre n°0706/GCS du 26 mars 2002 du greffe de la Cour suprême, maître Robert DOSSOU a été mis en demeure d’avoir à consigner dans un délai de quinze (15) jours et à produire ses moyens de cassation dans un délai d’un (01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 42, 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême ;

Que maître Robert DOSSOU a payé la consignation et a produit son mémoire ampliatif ;

Qu’en revanche, les défendeurs au pourvoi n’ont pas produit leurs mémoires en défense ;

Attendu que sur ce, la Haute juridiction a rendu l’arrêt n°29/CJ-CM du 18 avril 2003 par lequel elle s’est déclarée incompétente à examiner le pourvoi des A B et Compagnie au motif que le litige porte sur l’application des articles 36 et 154 de l’acte uniforme de l’OHADA sur les voies d’exécution et s’est dessaisie du dossier au profit de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) ;

Que par lettre n°943/GCS du 11 mars 2004 du greffe de la Cour suprême, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) a été saisie ;

Qu’après la production des écritures par les parties, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) a rendu l’arrêt n°46/2005 du 07 juillet 2005 par lequel elle s’est déclarée incompétente et a renvoyé l’affaire devant la Cour suprême du Bénin pour qu’il y soit statué aux motifs que les conditions de sa compétence telles que précisées par l’article 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ne sont pas réunies en l’espèce ;

Que par lettre n°438/2005/G5 du 15 juillet 2005, le greffier en chef de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) a renvoyé le dossier à la Cour suprême du Bénin ;

Que par lettres n°4003/GCS du 09 décembre 2005 et n°253/GCS du 26 janvier 2006 du greffe de la Cour suprême, maître Robert DOSSOU et le directeur général des A B et Compagnie ont été mis en demeure d’avoir à consigner dans un délai de quinze (15) jours et à produire leurs moyens en cassation dans un délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions des articles 42, 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 ;

Que la consignation a été payée ;

Que par correspondance du 23 janvier 2006, maître Robert DOSSOU a indiqué qu’il maintient au dossier ses précédentes écritures ainsi que celles déposées à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) notamment : son mémoire ampliatif du 07 août 2002 à l’exception des développements sur l’incompétence désormais sans objet, et son mémoire en réplique et additionnel du 04 novembre 2004 déposé à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) à l’exception des développements et demandes relatifs à l’évocation, non pertinents devant la Cour suprême ;

Que maître Maximin E. CAKPO-ASSOGBA, conseil de la Continental C Aa (Ex Crédit Z AaAG a produit son mémoire en défense ;

Que maître Cyrille Y. DJIKUI, conseil de la société Négoce et Distribution n’a pas produit de mémoire en défense malgré la mise en demeure qui lui a été faite par lettre n°4231/GCS du 03 novembre 2006 du greffe de la Cour suprême reçue à son cabinet le 08 novembre 2006 ;

Que le parquet général a produit ses conclusions ;

SUR L’EXCEPTION DE CHOSE JUGEE

Attendu que la Continental C Aa (Ex Crédit Z AaAG invoque la force de chose jugée de l’arrêt d’incompétence n°29/CJ-CM du 18 avril 2003 rendu par la Cour suprême, en se fondant sur l’article 2 alinéa 2 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 selon lequel les décisions de la Cour suprême ne sont susceptibles d’aucun recours ;

Que cette Haute juridiction se trouve dans une impossibilité légale de se prononcer à nouveau dans une même affaire et sur le même pourvoi ;

Mais attendu qu’aux termes de l’article 20 du Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, « Les arrêts de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) ont l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire. Ils reçoivent sur le territoire de chacun des Etats parties une exécution forcée dans les mêmes conditions que les décisions des juridictions nationales. Dans une même affaire, aucune décision contraire à un arrêt de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) ne peut faire l’objet d’une exécution forcée sur le territoire d’un Etat partie » ;

Qu’il se dégage de ces dispositions deux principes à savoir l’autorité de la chose jugée des arrêts de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) et leur force exécutoire dans les pays membres de l’OHADA ;

Qu’ainsi, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) exerce un imperium supranational sur les juridictions de cassation des Etats parties au Traité ;

Qu’en conséquence de ces dispositions ainsi que de celles de l’article 18 alinéa 3 du Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, l’arrêt d’incompétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), saisie sur renvoi d’une juridiction nationale de cassation, alors que le litige ne porte pas sur l’application des actes uniformes, s’impose à cette juridiction nationale de cassation dont la décision est dès lors réputée nulle et non avenue ;

Attendu en l’espèce que l’arrêt n°046/2005 du 07 juillet 2005 par lequel la Cour Commune de Justice d’Arbitrage (CCJA) s’est déclarée incompétente aux motifs « qu’aucun grief, ni moyen tiré de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l’interprétation d’un acte uniforme ou règlement prévu au Traité de l’OHADA n’a été invoqué ni devant le premier juge, ni devant le juge d’appel par l’une ou l’autre des parties », s’impose à la Cour suprême ;

Qu’ainsi, l’arrêt n°29/CJ-CM du 18 avril 2003 de la Cour suprême est réputé nul et non avenu et aucune force ou autorité de chose jugée ne pourrait dès lors lui être attachée ;

Que cette exception n’est pas fondée ;

En la forme

Attendu que le présent pourvoi a été introduit dans les forme et délai légaux ;

Qu’ il y a lieu de le déclarer recevable ;

Au fond

Faits et procédure

Attendu que le 28 décembre 1993, la société Négoce et Distribution a introduit auprès du Crédit Z Aa des demandes d’ouverture de trois (03) crédits documentaires au profit des A B et Compagnie en France ;

Qu’ayant constaté que ses demandes n’ont été exécutées et notifiées aux bénéficiaires, les A B et Compagnie, que les 12 et 13 janvier 1994, soit après la dévaluation du franc CFA intervenue le 11 janvier 1994, ce qui a eu pour conséquence le doublement de tous les paiements qui devaient être effectués en franc français, la société Négoce et Distribution a, par exploit du 26 juillet 1994, assigné le Crédit Z Aa devant le tribunal de première instance de Cotonou pour, entre autres, voir constater l’ouverture tardive des crédits et ordonner paiement de divers frais indûment perçus ;

Que par jugement n°532 du 20 novembre 1997, le tribunal a fait droit aux demandes de la société Négoce et Distribution ;

Que sur appel de la société Négoce et Distribution et de la Continental C Aa (Ex Crédit Z AaAG, la cour d’appel de Cotonou a rendu l’arrêt n°174/2001 du 28 juin 2001 par lequel elle a décidé que l’acte notarié du 14 avril 2002 portant remise de dettes de la société Négoce et Distribution au profit de la Continental C Aa constitue un désistement d’action qui rend sans objet la procédure en paiement de créance initiée par la société Négoce et Distribution contre le Crédit Z Aa ;

Discussion des moyens

SUR LE PREMIER MOYEN : VIOLATION DES ARTICLES 36 ET 154 DE L’ACTE UNIFORME DE L’OHADA PORTANT PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT ET VOIES D’EXECUTION

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les articles 36 et 154 de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution en ce que la saisie attribution qui a eu lieu le 13 janvier 2000, a été dénoncée le 14 janvier 2000, alors que, selon le moyen, la prétendue remise de dette à laquelle l’arrêt attaqué a, à tort, accordé effet, est intervenu le 24 avril 2000, soit trois (03) mois et douze (12) jours après ladite saisie ;

Mais attendu que l’arrêt objet du présent pourvoi n’est fondé sur aucun acte uniforme ou règlement prévu au Traité institutif de l’OHADA, aucun grief, ni moyen tiré de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l’interprétation d’un acte uniforme ou règlement prévu au Traité de l’OHADA n’ayant été invoqué ni devant le premier juge, ni devant les juges d’appel par l’une ou l’autre des parties ;

Que ce moyen n’est pas fondé ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DES REGLES GOUVERNANT LES JUGEMENTS

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation des règles gouvernant les jugements en ce que, le jugement n°531 du 20 novembre 1999, assorti de l’exécution provisoire et dont l’exécution était entreprise, avait condamné le Crédit Z Aa à effectuer le transfert en payant aux A B et Compagnie la somme de 225 000 000 FCFA et à débiter le compte de la société Négoce et Distribution de la somme de 127 500 000 FCFA selon l’ancienne parité, alors que, selon le moyen, d’une part la Continental C Aa prétend quatre (04) ans après ce jugement, bénéficier non pas de la part des A B et Compagnie mais de celle de la société Négoce et Distribution, d’une prétendue remise de dette, d’autre part dès le prononcé du jugement n°531 du 20 novembre 1999, la société Négoce et Distribution a perdu, ne serait-ce que provisoirement, tout droit sur cette somme dont il ne peut plus disposer ;

Mais attendu que l’arrêt n°174 du 28 juin 2001 objet du présent pourvoi a été rendu sur appel du jugement n°532 du 20 novembre 1997 du tribunal de première instance de Cotonou et non sur appel du jugement n°531 du 20 novembre 1997 ;

Que ce moyen qui critique les dispositions d’un jugement non confirmé par l’arrêt attaqué, est irrecevable ;

SUR LE TROISIEME MOYEN PRIS DE LA VIOLATION DU PRINCIPE D’INOPPOSABILITE DE L’ACTE FRAUDULEUX

Attendu qu’il est reproché aux juges d’appel d’avoir violé le principe d’inopposabilité de l’acte frauduleux en retenant que cet acte vient supplanter l’acte de cession de créance du 26 septembre 1995, alors que, selon le moyen, le prétendu acte notarié de cession revêt toutes les apparences d’un acte régulier mais constitue à l’évidence un acte délibérément passé en fraude des droits des A B et Compagnie et qu’une telle fraude vêtue est sanctionnée par son inopposabilité aux tiers, donc par son inefficacité ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain que la cour d’appel a déclaré valable l’acte notarié du 14 avril 2000 comme étant un acte authentique constituant un désistement d’action de la société Négoce et Distribution qui rend sans objet la procédure par laquelle la société Négoce et Distribution entendait se faire payer sa créance par la Continental C Aa ; 

Que ce moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette l’exception de chose jugée invoquée par la Continental C Aa représentant le Crédit Z Aa ;

Reçoit en la forme le pourvoi élevé par les A B et Compagnie ;

Le rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge des A B et Compagnie ;

Ordonne la notification du présent arrêt aux parties  ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :

Innocent Sourou AVOGNON, président de la chambre judiciaire,

PRESIDENT ;

Michèle CARRENA-ADOSSOU

Et CONSEILLERS ;

Honoré G. ALOAKINNOU

Et prononcé à l’audience publique du vendredi treize avril deux mille dix-huit, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ab Ac X,

PROCUREUR GENERAL ;

Hélène NAHUM-GANSARE,

GREFFIER ;

Et ont signé,

Le président-rapporteur, Le greffier.

Innocent Sourou AVOGNON Hélène NAHUM-GANSARE


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2005-023
Date de la décision : 13/04/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2018-04-13;2005.023 ?
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