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30/03/2018 | BéNIN | N°60

Bénin | Bénin, Cour suprême, 30 mars 2018, 60


Texte (pseudonymisé)
Fonction publique – Régime disciplinaire – Dysfonctionnement de l’administration – Non respect des délais de procédure – Actes de régularisation – Annulation.

Encourent annulation, nonobstant les actes pris à titre de régularisation, les sanctions infligées à l’agent permanent de l’Etat en violation des règles liées aux délais de procédure (disciplinaire).

N° 60/CA 30 mars 2018

C Ab

C/

MFPTRA

La Cour,

Vu la requête en date à Cotonou du 18 septembre 2003, enregistrée au greffe de la Cour suprême le 26 sept

embre 2003, précédée d’un recours gracieux en date à Cotonou le 22 mai 2003, par laquelle monsieur Ab C sollicite de la Co...

Fonction publique – Régime disciplinaire – Dysfonctionnement de l’administration – Non respect des délais de procédure – Actes de régularisation – Annulation.

Encourent annulation, nonobstant les actes pris à titre de régularisation, les sanctions infligées à l’agent permanent de l’Etat en violation des règles liées aux délais de procédure (disciplinaire).

N° 60/CA 30 mars 2018

C Ab

C/

MFPTRA

La Cour,

Vu la requête en date à Cotonou du 18 septembre 2003, enregistrée au greffe de la Cour suprême le 26 septembre 2003, précédée d’un recours gracieux en date à Cotonou le 22 mai 2003, par laquelle monsieur Ab C sollicite de la Cour l’annulation de la décision de suspension du 14 septembre 2001 et des décisions contenues dans la lettre n°0552/MFPTRA/ DC/SGM/DGFP/DACAD/SAD du 07 avril 2003 pour violation des articles 138 et 140 de la loi 86-013 du 26 février 1986 portant statut général des agents permanents de l’Etat ;

Vu la Loi n°90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin ;

Vu la Loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la Loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la Loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï le conseiller Rémy Yawo KODO en son rapport ;

Ouï l’avocat général Pierre Nicolas BIAO en ses conclusions ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME

Sur la recevabilité du recours

Considérant que le requérant expose au soutien de son recours qu’il a été recruté dans la fonction publique le 20 novembre 1973 en qualité d’agent technique du développement rural ;

Qu’il a servi à divers postes au ministère en charge de l’agriculture notamment à la direction de la promotion et de la législation rurale à Cotonou où il a été irrégulièrement suspendu de ses fonctions le 14 septembre 2001 et traduit devant le conseil de discipline ;

Que par suite, le ministre en charge de la fonction publique lui a infligé la sanction de rétrogradation ;

Qu’en raison des irrégularités de la procédure ayant conduit à cette sanction, il a saisi l’auteur de la sanction, c’est-à-dire le ministre de la fonction publique d’un recours gracieux le 22 mai 2003 ;

Qu’en réponse, le ministre lui a adressé le courrier n°1742/MFPTRA/ DC/SGM/DGFP/DACAD/SAD daté du 29 août 2003 dont les termes lui paraissent insatisfaisants ;

Considérant que le recours a été introduit dans les forme et délai prescrits par la loi ;

Qu’il échet de le déclarer recevable ;

AU FOND

Considérant que le requérant soulève au premier chef la violation des dispositions de l’article 140 alinéa 1er de la loi n°86-013 du 26 février 1986 portant statut général des agents permanents de l’Etat, en ce que la procédure disciplinaire pour abandon de poste a été engagée à son encontre le 21 mai 2001 sans aucune demande d’explication ;

Qu’il relève également que suspendu de ses fonctions le 14 septembre 2001, le conseil de discipline n’a été saisi du dossier au moyen d’un arrêté que le 18 septembre 2002, soit seize (16) mois après la mesure de suspension ;

Que ce faisant, l’article 138 alinéa 3 de la loi n°86-013 du 26 février 1986 qui prescrit que : « Le conseil de discipline est saisi de l’affaire sans délai… » a été méconnu ;

Considérant que le requérant soutient en outre que la décision de sanction prise à son encontre est intervenue le 07 avril 2003 ;

Que le délai de règlement de son dossier n’est pas respectueux des prescriptions de l’article 138 alinéa 4 qui prévoit trois mois à compter de la mesure de suspension ;

Considérant qu’il est établi voire reconnu par l’administration que la procédure disciplinaire engagée contre le requérant, l’a été sans une demande d’explication, mais que cette formalité a fait l’objet de "régularisation" le 24 avril 2002 avant l’institution d’un conseil de discipline le 18 septembre 2002 ;

Considérant que les exigences procédurales en matière disciplinaire sont substantielles ;

Considérant qu’aux termes de l’article 140 alinéa 1er de la loi n°86-013 du 26 février 1986 : « La procédure disciplinaire est engagée par une demande d’explication écrite adressée à l’agent permanent de l’Etat par l’autorité hiérarchique dont il dépend » ;

Considérant qu’il ressort du dossier que l’administration ne s’est pas conformée à la disposition précitée ;

Qu’elle n’a pas non plus été respectueuse des dispositions prévues à l’article 138 alinéas 3 et 4 de la loi susvisée en ce que le conseil de discipline a été saisi dans un délai anormalement long, soit douze (12) mois après la mesure de suspension du requérant ;

Qu’au surplus, mis à part sa saisine tardive, la situation de l’agent n’a été réglée qu’après plus de dix-huit (18) mois après sa suspension contrairement au délai impératif de trois (03) mois fixé par l’article 138 alinéa 4 de la loi 86-013 qui dispose que : « La situation de l’agent permanent de l’Etat suspendu doit être définitivement réglée dans un délai de trois (03) mois à compter du jour où la décision de suspension a pris effet. Lorsqu’aucune décision n’est intervenue au bout de trois(03) mois, l’intéressé perçoit à nouveau l’intégralité de son traitement. » ;

Considérant que par lettre n°0552/MFPTRA/DC/SGM/DGFP/DACAD/SAD du 07 avril 2003, le ministre de la fonction publique, du travail et de la réforme administrative, a porté à la connaissance de son homologue de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, diverses sanctions infligées à C Ab, notamment la rétrogradation ou abaissement d’échelon de l’intéressé ;

Considérant que la procédure disciplinaire initiée contre le requérant a été entachée par les irrégularités et violations précédemment établies ;

Qu’il échet d’annuler les décisions contenues dans la lettre n°0552/MFPTRA/DC/SGM/DGFP/DACAD/SAD du 07 avril 2003 et de rétablir l’intégralité du traitement du requérant pour compter du 14 décembre 2001, soit trois (03) mois après la mesure de suspension de l’intéressé ;

PAR CES MOTIFS,

Décide :

Article 1er : Le recours en date à Cotonou du 18 septembre 2003 de Ab C tendant à l’annulation des décisions contenues dans la lettre n°0552/MFPTRA/DC/SGM/DGFP/DACAD/SAD du 07 avril 2003 est recevable.

Article 2 : Ledit recours est fondé.

Article 3 : Les décisions contenues dans la lettre n°0552/MFPTRA/ DC/SGM/DGFP/DACAD/SAD du 07 avril 2003 sont annulées.

Article 4 : Il est ordonné le rétablissement de l’intégralité du traitement de C Ab pour compter du 14 décembre 2001.

Article 5 : Les frais sont mis à la charge du Trésor public.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre administrative) composée de :

Rémy Yawo KODO, Conseiller à la chambre administrative ;

PRESIDENT ;

Honoré KOUKOUI et Dandi GNAMOU,

CONSEILLERS ;

Et prononcé à l’audience publique du vendredi trente mars deux mille dix-huit, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :

Pierre Nicolas BIAO, MINISTERE PUBLIC ;

AKPONE Affouda Gédéon, GREFFIER ;

Et ont signé :

Le Président-rapporteur, Le Greffier.

Rémy Aa B Ad Ac A


Synthèse
Numéro d'arrêt : 60
Date de la décision : 30/03/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2018-03-30;60 ?
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